Du regard, j’observais le petit bureau autrefois laissé à l’abandon mais qui aujourd’hui se voyait acculé des montagnes de papiers. Des procédures, des textes de loi, des témoignages, et d’autres feuilles noircies qui pouvaient m’aider et me guider vers la sortie de ce tunnel qui me paraissait sans fin. Chaque permission se ressemblait, chaque répit n’en était désormais plus un puisque les journées censées être tournées vers le repos n’étaient plus désormais qu’une longue bataille juridique qui me donnait des migraines. Je ne comprenais pas la moitié du jargon qui était employé, bien plus accoutumé aux éternels codes et signaux militaires, et c’est avec le soulagement de pouvoir laisser le procès de côté, mais le cœur pincé de devoir m’éloigner de celle qui me soutenait envers et contre tout que j’enfilais de nouveau le treillis. En quelques gestes, j’achevais de fermer mon sac et me préparais à retrouver ma seconde maison.

17h30 ▬ Je poussais les portes de la caserne non sans saluer les quelques nouvelles recrues venues prendre leurs quartiers, et je m’enfonçais dans le labyrinthe de couloirs aux couleurs ternies par le temps. Je connaissais chaque recoins, chaque porte, chaque pièces qui composait l’édifice pour y avoir passé la moitié de ma vie. Sans surprise, je me rendais dans le bureau de mon supérieur, lui notifier ainsi ma présence et prendre les instructions avant de retrouver mon unité, mais je m’abstins de tout commentaire alors que mon vis-à-vis me toisait derrière ses lunettes rondes. « Kwon… » Je me mettais en position si tôt mon nom soufflé, prêt à recevoir le blâme de l’un de mes subordonnés qui auraient peut-être abusé de la patience du vétéran, mais c’est une autre raison qui le fit tousser. « Im ? » lâchait-il. Un nom… un simple nom et j’avais compris. « Pas avec moi chef. » Il n’eut pas besoin de rajouter quoi que ce soit, un regard et je confirmais d’un hochement de tête. « Je vais le chercher… »

Si la capitale pouvait se vanter d’étendre ses tentacules le plus loin possible, je pouvais y errer sans ne jamais me perdre. J’en connaissais parfaitement les artères et les ruelles, les coins les plus fréquentés ou non, et dans son cas, les établissements qu’il aimait fréquenter. Sans la moindre surprise, je poussais les battants d’un bar et l’y trouvais, accoudé au comptoir en bonne compagnie, et bien sûr, loin de l’apparat du soldat qu’il aurait dû revêtir quelques heures plus tôt. « Cas’… » J’abattais une main sur son épaule, la mine désabusée face à sa désinvolture, mais qu’y pouvais-je ? « Tu ne serais pas encore en retard ? » soufflais-je.

@Im Caspian

La permission du militaire avait commencé il y a quelques jours. Alors il profitait de cette dernière. Il était allé voir Queen et Sang Jun lors de son retour. Profitant de ce repos bien mérité vu qu’il n’était pas souvent chez lui. Caspian avait d’ailleurs profiter pour récupérer sa chienne, Lori, heureux de pouvoir avoir la compagnie de celle qu’il considérait comme sa fille. Une fois cela fait, il pouvait enfin se détendre en charmante compagnie. C’est dernier temps là compagnie féminine qu’il désirait été celle de Jin Ri. Lui donnant rendez-vous dans un bar près de chez elle. Laissant son téléphone dans sa poche sans se soucier de ce dernier plus longtemps. La femme devant lui occupé toutes ses pensées. C’était ainsi depuis un moment. Plus il était loin d’elle et plus il désirait la voir alors il profitait quand il pouvait le faire. C’était plaisant de passer de tels moments en sa compagnie. Caspian appréciait de plus en plus la jeune maman, bien plus qu’il ne voulait se l’avouer pour l’instant.

Le temps passait toujours plus vite quand Jin Ri était dans les environs. Ce qui plaisait et déplaisait au militaire en même temps. Mais surtout ce qui surprit Caspian fut la main sur son épaule alors qu’il parlait sereinement avec la jeune femme. Il ne s’était pas attendu à le voir là. “Eiji ?” Il observait le plus âgé avec un regard rempli de questions. Ne comprenant pas sa présence ici, surtout en uniforme. “C’est rare de te voir dans les bars. En retard ? Pourquoi ?” En général il entendait son téléphone sonner mais là il ne se souvenait pas l’avoir entendu. “Pitié dis moi qu’on doit pas partir en mission maintenant ?” Devoir quitter Jin Ri ainsi ne lui plaisait pas. Certes il avait déjà dû le faire mais ce n’était jamais bien vu. Surtout qu’il espérait grandement l’inviter à manger chez lui juste après. Mais il semblait que ses plans de soirées allaient devoir être revus. “On a besoin de quoi ? J’ai laissé mon uniforme à la caserne. Je n’ai que ma moto avec moi pour l’instant.” Au moins, il serait fixé si il devait directement rentrer ou si il avait au moins le temps de faire un détour jusque chez lui. Puis il fallait qu’il prévienne Queen pour qu’elle puisse passer chercher Lori dès que possible. Hors de question que sa fille reste seule chez lui trop longtemps.

Spoiler:

Je pus lire la surprise dans les yeux de mon vis-à-vis, une réaction à laquelle je ne m’attendais pas alors que je saluais d’un signe de tête la demoiselle qui l’accompagnait. Je ne pus m’empêcher de pouffer à sa réplique. « Pas en retard pour boire un verre visiblement. Où est ton téléphone ? » Mais plus que son incrédulité dans une situation qui ne laissait que peu de place au doute, ce fut davantage la gêne et l’affliction de devoir l’arracher à sa vie de citadin qui me submergeait. « Je… malheureusement si. On a encore un peu de temps cela dit, si tu veux dire au revoir, je t’attends dehors ? » Je ne savais que trop bien à quel point il était difficile de se construire une vie normale alors que l’uniforme nous appelait à n’importe quel moment. Comment accorder sa confiance à quelqu’un sans avoir pu échanger plus que quelques banalités ? Comment s’attacher à une personne alors que le devoir de son pays passe avant tout ? Comment parvenir à exister autrement que comme la chair à canon que nous avions fait le choix de devenir ? Certains en devenaient fous, d’autres désertaient ou démissionnaient quand le reste tenait debout, sans plier. « On peut passer par chez toi, on y déposera ta moto et on récupérera tes affaires au passage. »

Une tape amicale et bienveillante sur l’épaule, je lui laissais un semblant d’intimité en rejoignant la rue plongée dans l’obscurité. Un air saturé d’humidité que nous allions bientôt quitter pour un environnement plus sec… je n’en doutais pas. J’imaginais, sans ne pouvoir en prendre la mesure, ce à quoi pouvait ressembler tous nos allers et retours depuis l’extérieur… épuisant sûrement, frustrant sans aucun doute. N’y avait-il aucun moyen de trouver un équilibre entre ces deux vies si différentes ? Discrètement, je fis couler mon regard vers le bar, désolé de devoir le rappeler à l’ordre alors qu’il passait à son tour les portes. « Désolé, je ne voulais pas te déranger… » tentais-je.

Spoiler:

La remarque de son ami le fit sourire, il était vrai que Caspian n’était généralement pas le dernier pour boire. En tout cas, quand il était en civil. Lorsqu’il était en mission, c’était tolérance zéro là dessus, il devait toujours être à l'affût de ce qui se passait autour de lui. “Il est dans ma poche, je ne l’ai pas entendu sonné.” C’était rare qu’il ne l’entende pas sonner ou vibrer contre sa cuisse d’où la surprise qu’il avait exprimé en voyant Eiji. Mais sa simple présence était suffisante pour que Caspian comprenne qu’il était attendu autre part. “Je vois. Merci, je fais au plus vite.” Dit-il avec un regard désolé pour la jeune femme qui était à ses côtés. Ce n’était pas réellement la soirée qu’il lui avait promis et il s’en voulait un peu que cela se passe ainsi. Elle devait probablement avoir conscience que ce n’était n’y la première fois n’y la dernière fois qu’il devrait partir ainsi. Même si il espérait que ça n’arriverait pas trop souvent. Pour une fois qu’il était vraiment attaché à quelqu’un. Alors il ne voulait pas rendre Jin Ri malheureuse. “Ça m'arrangerait, j’ai des trucs à gérer chez moi aussi avant de partir.” Et principalement la petite princesse qui vivait avec lui. Il devait lui mettre un minimum à manger avant que Queen puisse avoir le temps de venir la chercher, il ne savait pas quand sa cadette pourrait passer la récupérer.

Adressant un sourire amical à son camarade, il avait reporté toute son attention sur sa petite amie. S’excusant de devoir partir de la sorte avant de proposer de la ramener si elle le désirait. Insistant sur le fait de vouloir un message quand elle sera rentrée suite à son refus. Le forçant ainsi à devoir quitter le bar pour rejoindre son homonyme capitaine. “Ne t’excuse pas, ce n’est pas ta faute. J’aurais dû faire plus attention à mon téléphone. Ca t’aurais éviter de devoir venir jusqu’ici.” C’était assez rare qu’il manque les appels de la caserne, Eiji n’avait juste pas eu de chance aujourd’hui. “Allons-y. Sinon je sens que je vais me faire tirer les oreilles pendant des heures.” Et dieu sait que le militaire n’avait pas envie de subir une leçon interminable maintenant. Même ce n’était clairement pas la première fois qu’il se ferait sermonner par leur supérieur. Rejoignant sa moto pour faire rapidement la route jusqu’à son appartement. Indiquant à Eiji de le suivre à l’intérieur le temps qu’il prépare ses affaires. “Tu sais où on va ?” Le militaire se demandait bien où ils allaient être envoyés pour qu’ils aient convoqué les deux capitaines des unités spéciales. Ce n’était pas la première mission qu’ils partageaient mais c’était assez rare qu’ils doivent travailler ensemble en mission.