La chute avait été brutale, infernale, sans fin. Alice avait du avoir si peur, de tomber sans jamais connaître la fin, tout en sachant qu'elle arriverait. L'obscurité effrayante avait pris d'assaut une vie qui ne demandait qu'à briller. Il était parti, ce tout nouveau père. Quelques années qu'il avait partagé avec sa fille, à lui faire toucher des cordes de guitares abîmées par l'expérience, à rire avec elle en chantant à tue-tête. Et sa lumière n'éclairait plus la maison. Reposant alors sous cette terre qui l'avait accueilli ta mère pleurait  sa mort prématurée. Une vie simplement enlevée par un chauffard inconscient de ses actes, comme si tout était facile, comme si ça n'avait pas d'importance, il était parti. Sans le vouloir il t'avait laissé.

Mais qui voulais tu pleurer à cinq ans? Qui voulais attendre à cinq ans? C'est plus tard, que chaque mot retrouvait leur place. Les adultes étaient des êtres effrayants faisant passer  la pitié pour de la sympathie. Rappelant sans cesse un passé douloureux au point que tu compris tout. Ces pilules que ta mère prenait chaque soir avant de dormir, œil curieux qui observait dans l'entre d'une porte à peine ouverte. Sept ans, et tu comprenais que les adultes ne t'aideraient pas. Epaulant ta mère pour chaque nouvelle facture, la rassurant quant à votre vie future, tu endossais ce rôle pour elle, pour vous. Oubliant de penser à toi. Effaçant ta présence de fillette pour remplacer ces adultes absents.

Une main tendue dans l'incroyable chute. Il avait été celui qui vous avez sauvé, soufflant des douze bougies.  Votre maison se déplaçant alors à Séoul, fermant la porte du passé pour de bon. Peut être, que la détresse avait été trop grande et sa présence trop rassurante.

Une longue inspiration et tu te réveillais, la vision encore trouble. Chaque souvenir revenait. Chaque nuit, t'entraînant dans une chute plus profonde encore. Le lapin blanc avait il été aussi diabolique avec Alice? Ce gâteau là, te rendrait il si petite que tu disparaîtrais ? . Apparemment pas. Chaque jour il se répétait, martelant un esprit fragile. Vous lui apparteniez au même prix qu'un trophée de guerre. "N'oublie pas Eun Ji. Je vous ai aidé.. personne ne te croira.. " Un murmure à ton oreille, un cri pour ton coeur. Personne ne voudra t'aider. " Je pensais que j'avais été clair. Aucune permission pour découcher.. " Passer la nuit autre part ? Qui étais tu pour? Des accusations graves, une nausée qui te prenait. La violence lorsque sa main s'abattit sur la table. Qui te croira?  Tu arrivais à peine à respirer, comment pouvais tu vivre? Comment faisait elle? La seule qui pouvait te sortir de là. Celle qui ne cessait de sourire, heureuse de ce mensonge à peine déguisée.

" Tu me connais, j'ai essayé de l'aider, mais elle n'en fait qu'à sa tête. " Quand allait il s'arrêter? Quand allait elle ouvrir les yeux? Cette main frappant ta joue te donna la réponse: jamais. Pas même lorsque son regard changea. Pas quand il dénigrait ton nom sous couverture de ton comportement. Pas même quand il se rapprocha pour se faire pardonner. La chute était longue. Trop longue. Allait elle s'arrêter? Si tes yeux se fermaient, peut être cesserait il. Trop tard. Tu le croyais. Personne ne viendrait t'aider. Tu n'étais personne Eun Ji. Personne qu'un passe temps pour un homme ennuyé de sa vie. La peur fut fuir ta raison, elle même ayant congédié la confiance tu restais là. Croyant chaque parole. Craignant le moindre de ses gestes, la moindre parole. Frissonnant sous un regard.  Tu étais seule Eun Ji.