Dong Joo trouvait un peu chiant ces derniers temps que la ville soit en proie à des vents assez forts. Pas qu’elle ait vraiment pitié des petites vieilles qui perdaient leurs affaires en les voyant s’envoler, c'était simplement parce qu’elle en avait marre de se coiffer le matin pour qu’une bourrasque vienne emmêler ses cheveux une fois sortie. Elle avait vraiment une tête de folle après, c’était un peu un problème. En revanche, c’était le top du top quand elle sortait de la piscine, au moins ses cheveux séchaient vite, mais c’était le seul point positif qu’elle avait trouvé à cette météo digne de la Bretagne. Ah si, au moins il ne pleuvait pas, ça lui évitait donc de se faire arroser par les voitures sur le bas-côté. En attendant, c’était la tête sur la vitre de sa chambre au dortoir qu’elle regardait dehors comme un chaton curieux, sauf que là, elle s’ennuyait. Une ou deux fois elle se fit la réflexion qu’avec la chance qu’elle avait c’était le jour où elle avait décidé de s’ennuyer la tête collée contre la fenêtre que Se Jun déciderait de lui faire une visite surprise et qu’en voulant passer par la fenêtre comme à son habitude, elle allait faire une crise cardiaque. Mais elle s’ennuyait, et elle n’avait personne a ennuyé en retour. C’était peut-être même ça le pire, c’est qu’elle n’avait personne à embêter, de quoi faire de ce jour une mauvaise journée. Personne ne lui répondait, sûrement trop occupé ou l’ignorant juste, parce qu’ils pressentaient qu’elle avait envie d’être pénible. A travers sa fenêtre, elle vit un couple avec une poussette qui essayait de se débattre avec le vent, quand soudainement le père la lâcha, les jeunes parents courant après le landau. Ça la fit bien rire, cette situation, surtout voyant le charriot transporté par le vent. Et soudain, elle eut un éclair de génie. Est-ce que la petite tempête n’était pas super utile pour faire des bêtises ? Est-ce poser ses fesses sur une planche de skate et se laisser porter par la tempête ne serait pas un jeu super drôle ? Il n’y avait qu’une seule personne qu’elle réussirait à entraîner dans une idée si bête. Jung Su. Un message fut envoyé, l’idée exposée, et elle ignora ses grands discours moralisateurs de l’adulte qu’il était alors qu’elle n’avait jamais besoin d’insister quand il s’agissait de faire n’importe quoi. Ils avaient une heure et un endroit où se retrouver, une liste de choses à prendre, et c’était partie. Une heure après Dong Joo attendait l’étudiant aux alentours de la ville, assise sur sa planche qu’elle avait pris avec ou sans consentement, avec un sac rempli de choses pour faire des expériences débiles avec le vent, mais surtout ce sac qui allait leur permettre de faire concurrence aux voitures. Et mieux encore, elle avait choisi un lieu en pente.

C’était une journée plutôt calme comparé au temps qu’il faisait dehors. Contrairement aux immenses rafales de vents qui faisaient vibrer ses fenêtres toutes les cinq minutes, Jung Su était plutôt détendu. Il n’avait rien de spéciale à faire aujourd’hui, pour ne pas dire absolument rien. Alors il essayait de s’occuper comme il pouvait. Il avait rangé et fait le ménage dans sa chambre, révisé un petit peu avant de se perdre littéralement sur son téléphone. Il était d’ailleurs entrain de regarder une vidéo témoignage sur les chauves-souris lorsqu’il reçut un message de Dong Joo. Rien qu’en lisant ce prénom, Jung Su savait qu’il allait être entrainé dans de nouvelles péripéties. Parce que malgré tout il se connait. Peu importe combien il sait endosser le rôle de l’étudiant sérieux, celui de l’adulte posé, il avait malgré tout cette flamme de folie presque enfantine en lui. Dong Joo était extrêmement douée pour faire ressortir cette part de lui. Pourtant, il essayait de lutter. Alors face à sa proposition d’utiliser des sacs comme parachute, les fesses posés sur un skate pour se laisser tirer par le vent, il a essayé de l’en dissuader. « Tu sais que ça peut être dangereux ? » Bla, bla, bla … Mais au fur et à mesure qu’il essayait de l’en dissuader, il se laissait convaincre par son idée sans même qu’elle ne lui réponde … C’est vrai quoi, ça pourrait être super marrant. Et puis franchement, la vie est assez monotone comme ça : ils feraient de mal à qui en faisant du para voile terrestres de toute façon hein ? Il aurait l’air con devant tout le monde et alors ? Il ne les connait même pas et quand bien même, eh bien sachez qu’il aura bien rigolé et qu’il vous le conseille. Alors après son discours moralisateur écrit dans le vent, même pas capable de le convaincre lui-même de toute façon, il se prépara pour leurs rendez-vous. Heureusement que le jeune homme avait fait du skate durant son adolescence et que par miracle, il avait décidé de le prendre en quittant le domicile familial. Il souvient même s’être demandé pourquoi il l’avait pris, comme quoi …

Il n’y avait pas foule dehors, les gens préféraient certainement rester bien au chaud chez eux. Honnêtement, ils ne savaient pas ce qu’il ratait. Sur le chemin et malgré les gifles qu’il se prenait par le vent, il faisait l’inventaire de ce qu’il avait apporté histoire d’être sûr de ne rien avoir oublié. Skate ? Ok. Sacs poubelles ? Ok. Petite bouteille d’eau pour se désaltérer ? Ok. Boîte de premier soin en cas de pépin ? Ok. « DONG JOO ! » Hurla-t-il au loin lorsqu’il aperçu la jeune femme bien sagement entrain de l’attendre. Il accompagnait ses paroles par de grands gestes pour lui signifier sa présence puisque à tous les coups, elle n’allait pas l’entendre vu les grognements du vent. Il arriva finalement à sa hauteur, légèrement essoufflé par la pente qu’il venait de monter, à contresens du vent comme par hasard. « Alors je pense toujours que c’est une mauvaise idée mais je veux absolument voir la gueule des conducteurs quand on va les fumer avec ton idée de génie ! » Il s’abaissa pour poser son sac au sol et sortir ses sacs. « J’ai pris des sacs poubelles genre t’sais les grands, personne n’a de chance contre moi, ils peuvent bien aller se faire foutre avec leurs BMW double pots d’échappement, moi j’ai des sacs poubelles achetés en promo, ils vont être dégoûtés ces tocards. »  Ajouta-t-il en brandissant super fièrement ses sacs poubelles.
 

Le vent fouettait le visage de Dong Joo qui se demandait dans combien de temps le koryo allait finir par arriver. Finalement, elle avait vraiment une tête de folle comme elle le redoutait. Mais est-ce que ça changeait de d'habitude ? Pas vraiment. Elle avait fini par s'allonger sur la planche de skate, regardant le ciel nuageux, même si la moitié de son corps était dans le vide et que la position était plutôt inconfortable. L’idée qu'une tornade puisse faire son apparition lui traversa l’esprit, et imaginant des vaches s'envoler, un sourire traversa son visage faussement angélique. Jung Su mettait beaucoup trop de temps à son goût, et elle doutait qu’il soit assez léger pour avoir été emporté par le vent. Au bout d’un moment elle vit une personne bizarre, à l'envers (parce que forcément étant allongée elle voit à l’envers) faire de grands signes. Elle se redressa et regarda dans la direction vers laquelle cette personne se dirigeait pour se rendre compte qu’il n'y avait qu'elle et que forcément ces mouvements de bras lui étaient adressé. Après avoir plissé les yeux elle se rendit compte que cette personne bizarre était sa personne bizarre. “Faut travailler un peu plus ton cardio, papy.” le taquina-t-elle en le voyant essoufflé. Dong Joo passait littéralement ses journées à faire du sport et même avec des grosses cuites presque tous les soirs elle enchaînait avec des footings le lendemain avec à peine quatre heures de sommeil. Elle était un véritable mystère. “D'accord maître Yoda, épargnes-moi tes sermons et faisons des bêtises.” fit-elle en se relevant, curieuse de voir ce que Jung Su avait apporté. Dong Joo ne put s’empêcher de rire en écoutant son ami, avant de s’intéresser plus intensément aux sacs poubelles, prenant le rouleau qu’il brandissait. "Sérieux ? Tu les as trouvé où en promo ? Parce que ça coûte trop cher, c’est vraiment des voleurs." Elle porta les sacs jusqu’à son nez. "En plus ils sentent bon ceux-là ! Et des 50L, pas mal.” Son regard fut attiré par la bouteille d’eau dans son sac, qu'elle attrapa. "T’es sérieux ? Tu penses vraiment à tout à ton âge.” Il était vraiment consciencieux, et c’était peut-être pas plus mal que ça soit le cas d'un sur les deux. Elle déroula le rouleau, donnant un sac à Jung Su avant d’en prendre un et de le secouer pour l’ouvrir, après avoir posé tout ce qu'elle jugeait inutile. “Le vent a changé de sens, on l'aura dans le dos en descendant, on va aller encore plus vite !” Quand l’étudiant fut prêt aussi, elle s’assit sur la planche de skate et avança maladroitement jusqu’à l'endroit qui serait désigné comme top départ, le sommet de la pente mais aussi l’endroit où elle commençait à descendre. “Tu es prêt ? Le dernier arrivé doit payer à manger à l’autre !" fit Dong Joo, ne ratant pas une occasion de manger gratuitement.

Il n’y avait pas meilleur combo que Dong Joo et Jung Su pour faire ce genre de connerie. Honnêtement il semblerait parfois qu’il y ait eu un léger dérèglement de l’équilibre sur terre pour se dire que le destin les avait mis consciemment ensemble sur le même chemin. C’est vrai quoi, comment s’assurer que ces deux énergumènes n’allaient pas finir par faire exploser la planète avec leurs bêtises ? Non parce que là, le coup des sacs poubelles c’est encore gentil.  Attendez qu’ils soient bien à fond et se soient bien encouragés dans leurs absurdités pour constater que les choses escaladent rapidement. Une connerie en menant à une autre d’une qualité bien supérieure et ainsi de suite … Par chance, ils ne sont pas encore totalement débiles non plus. Par exemple, ils savent pertinemment que sauter d’un building avec un sac en guise de parachute est une très mauvaise idée mais se sont-ils déjà imaginés entrain de le faire ? Absolument, n’en doutez jamais …

Ayant finalement retrouvé son amie au sommet de la montée, Jung Su était quelque peu essoufflé. Dans un premier temps parce que honnêtement, il n’est pas dans le classement des étudiants les plus athlétiques du campus. Oulah, non, vous avez facilement le temps de voir plusieurs centaines de noms avant de trouver le sien. Le sport, courir, les courbatures et tout ce que cela implique ce n’est pas vraiment son truc. Il aimerait très sincèrement avoir le six pack supplément pectoraux qui bouge un à un mais cela lui demanderait trop d’effort et … bah non du coup. Pourtant, il mimait une mine décontenancée en entendant Dong Joo lui soumettre de faire davantage travailler son cardio supplément papy. « Alors déjà, sache que c’est carrément un choix délibéré. » Protesta-t-il. « T’imagine si en plus d’être beau, drôle et intelligent, comme je le suis déjà je sais pas si tu avais remarqué, j’étais monté comme Dwayne Johnson ? Je serai trop parfait ! Je peux pas assurer la survie de l’humanité à moi seul tu vois. » Il poussa un faux soupir rempli de désespoir avant de reprendre son sérieux.

Comme il l’avait justement imaginé, Dong Joo se moquait pas mal de son discours. Il la comprenait après tout, même lui n’écoutait pas le semblant de maturité qui l’habitait alors …
Il n’était pas peu fier de ses sacs poubelles. Déjà parce qu’ils étaient grands donc qui dit grand dit plus de vent et plus de vent, plus de rapidité ! Ensuite, parce qu’il les avait eus en promo. Non pas qu’il était radin, en l’occurrence l’expression Téma la taille du rat ne fonctionnait absolument pas sur lui mais écoutez, les petites économies font les grandes économies ! « Bon pour le coup, je les avais pas senti … Ca t’arrive souvent de sentir des sacs poubelles ? » Demanda-t-il en fronçant légèrement les sourcils après qu’elle ait complimenté les sacs poubelles sur leurs odeurs. C’était une réelle question. Peut-être avait-elle un fétiche de l’odeur dont il ignorait l’existence ? Existe-t-il des sacs poubelles qui puent de base alors qu’ils sont encore enroulés ? Il ne put partir plus loin dans sa réflexion, arrêté (et tant mieux) par la jeune femme qui pointait du doigt sa bouteille d’eau. « Ouais je me suis dit que avec un peu d’eau tu arriveras peut-être à mieux avaler ta défaite. » Il afficha un grand sourire en prononçant ces mots. Non en fait, il avait fait ça assez naturellement, sans même s’en rendre compte. Par contre, il comptait réellement gagner cette course. Il voulait voir la surprise sur le visage des conducteurs et les traits de la défaite sur le visage de Dong Joo.

Il referma son sac à dos pour le remettre sur ses épaules, récupéra le sac poubelle que lui tendait l’étudiant et l’agita à son tour pour l’ouvrir. Il se plaça soigneusement sur son skate, histoire d’être à l’aise et que AUCUN déséquilibre sur sa planche ne puisse lui coûter la victoire. « Je suis né prêt, prépare ton porte-monnaie looseuse. » Annonça-t-il fièrement. « Un ... Deux ... Trois !  »

A trois, il ouvrit en grand son sac poubelle. Signe des dieux ou simple coïncidence, pile au moment où le départ était lancé une immense bourrasque se mit à souffler. Il se sentit soudainement tiré en avant et se mit à dégringoler la descente à toute allure. Mais cela sera-t-il suffisant pour lui accorder la victoire ?

le destin des dés:

 

Dong Joo éclata de rire sans s’en cacher. Vous savez, ce rire à la fois sincère et ironique, comme si Jung Su venait de faire son one man show. La jeune fille avait le don pour se taper tout ce qui bougeait, mais étrangement les garçons dont elle était proche ne l’avaient jamais intéressé. Le président de sa fraternité qui avait pourtant tenté l’avait laissé de marbre en passant par son meilleur ami qu’elle ne voyait même pas comme un homme, Jung Su n’échappait pas à ce triste sort. Il ne l’avait jamais intéressé, et même au cours d’une soirée alcoolisée, il y avait peu de risques pour qu'elle tente sa chance. Alors là qu’il se décrive comme drôle, beau et intelligent, ça la faisait vraiment rire. Drôle peut-être, intelligent sûrement pas sinon il ne traînerait pas avec elle et beau ? Il n’était pas moche, mais ce n’était peut-être pas la première chose qu’on pensait en le voyant. “Ah bah cherches pas. Ce n’est pas tes grosses fesses qui t’empêchent de monter correctement la côte, c'est tes chevilles qui gonflent à cause de ta modestie. Encore heureux que tu ne puisses pas assurer l’avenir de l'humanité à toi tout seul, le monde serait peut-être plus drôle mais le niveau intellectuel ne volerait pas haut ! Et en plus faudrait des filles super belles pour rattraper le coup.” Dong Joo et sa faculté naturelle à être gentille et agréable. Elle secoua la tête, exaspérée avant de s’intéresser un peu plus à ce qu'il avait ramené. Les sacs poubelles étaient un must, surtout qu’ils comptent s'en servir pour se propulser plus vite. Aller jouer sur l’autoroute avec un ballon n’était pas vraiment la taquinerie qu’on pourrait leur faire car ils risqueraient de le prendre au sérieux. Descendre une pente sur un skateboard en pleine tempête pour aller plus vite que les voitures, et ils risquaient de se faire mal, mais est-ce que l’un des deux avait pensé aux pansements ? Non. En revanche, l’étudiante avait remarqué que les sacs sentaient bons. “Non. Tu n’as jamais remarqué que certains ne sentent rien et d'autres ont des odeurs ? Et ça se dit adulte...” fit-elle en faisant mine d’être exaspérée. A quoi bon être adulte si on ne faisait pas attention aux choses essentielles ? En fait si, Jung Su faisait attention aux choses essentielles, à savoir la compétition qui allait se dérouler entre eux. Dong Joo était très compétitrice, ce n’était pas un secret et c’était la raison pour laquelle elle s'était tournée vers les sports. Une chance que Jae Yoon ne nageait pas avec elle, sinon les deux meilleurs amis auraient dû s’affronter bien souvent et la natation aurait coûté leur amitié. En tout cas, elle ne comptait pas laisser Jung Su gagner. “C’est ça. Ce n’est peut-être pas plus mal que tu ne boives pas, papy, les fuites urinaires à ton âge sont fréquentes.” Elle le taquina, encore une fois. Elle avait fait l’erreur d’être trop sûre d’elle et le lancer un pari. Dong Joo prit un sac et tendit le rouleau à son ami, le laissant ranger ses affaires alors qu’elle s’installait sur sa planche, son sac prêt à être ouvert. “Fais attention au tour de rein.” Lui répondit-elle en retour, son sang bouillonnant d'excitation. Jung Su donna le top départ et les deux amis purent s’élancer dans la pente. Le vent souffla soudainement les aidant à s’élancer plus rapidement. Le seul problème, c’était que le trottoir ne leur appartenait pas, et une dame promenant son chien fit son apparition, forçant Dong Joo à dévier, se jetant sur le côté avec sa planche, et lâchant au passage son sac poubelle. Jung Su, lui, était déjà arrivé en bas. L’idée du siècle de la jeune fille fut donc de se mettre sur le ventre sur sa planche et dévala la pente à toute vitesse. C’est quand elle voulut s'arrêter qu'elle se rendit compte que ce n'était pas la meilleure de ses idées. "JUNG SUUUUUU.” s'écria-t-elle alors qu’elle lui fonçait dessus, le garçon ne s'étant pas relevé, et elle le percuta de plein fouet. Elle avait la tête dure, Dong Joo, mis un peu mal quand même.

Déjà que Jung Su était complètement abasourdi par le commentaire de Dong Joo au sujet de sa condition physique, commentaire auquel il avait trouvé une explication complètement crédible et construite, les choses n’allaient pas en s’arrangeant. Pire, voilà que maintenant il avait des grosses chevilles, qu’il n’était pas intelligent et qu’il n’était pas ouf à l’entendre physiquement. Attendez, comment ça ? Premièrement, à moins qu’il ne soit devenu complètement con pour ne pas avoir remarqué que celle-ci avait doublés de volume elles vont très bien merci. Deuxièmement, bon ok c’est vrai qu’il est super marrant mais cela ne veut pas dire qu’il n’est pas intelligent pour autant ! Vous pensez que l’Albert Einstein était constamment en mode sérieux ? Non. Et puis ça tombe la course de sac poubelle à skate, peut-être que c’est lui qui l’a inventé. Troisièmement, elle sous entendait qu’il est moche ?? Bon, à ça, Jung Su n’y avait jamais vraiment pensé. Il n’était pas dégueulasse non plus ça va … Non ??? « Tu ne sais même pas ce que tu dis. » Lança-t-il complètement décontenancé en plissant les yeux d’un air jugeur. « C’est la jalousie qui te fait parler. Mais c’est pas grave, je te pardonne, ça doit pas être évident de côtoyer une lumière divine aussi puissante que moi. » Exagérait-il ? Absolument, un peu. Il jetait un rapide coup d’œil à ses chevilles, juste histoire d’être sûr avant de reporter son attention sur l’objet phare de cette journée : Les sacs poubelles. Visiblement, la jeune femme avait une passion pour les sacs poubelles. Que dis-je, pour leur odeur, fait étrange mais réel visiblement qu’il n'avait pas hésité pas à souligner. « Non mais j’crois que t’es la seule à l’avoir remarqué. Ca a rien à voir avec le fait d’être adulte, c’est juste que t’es bizarre mais c’est pas grave t’inquiète, je sais quoi t’acheter pour ton anniversaire maintenant. » Un sourire moqueur s’affichait sur ses lèvres. Il fallait lui dire si c’était aussi facile : Il y a des filles qui veulent des sacs de luxe, Dong Joo elle, elle veut des sacs poubelles avec une odeur. Le bonheur ne se trouve-t-il pas dans les choses simples ? En tout cas, c’était noté.

Il la laissait le taquiner sur son âge sans trop répondre. Ah la folle jeunesse ! De toute façon, elle allait bien voir si il sera toujours aussi vieux une fois qu’il lui aura fait mordre la poussière. Préparé comme jamais, la détermination faisant pétiller ses yeux, Jung Su donnait le top départ. Aussitôt, il s’élançait. Le sac poubelle ouvert, la pente aidant, il défilait à toute allure : une voiture de rallye, que dis-je, une fusée. Au passage, il ne se gênait absolument pas pour faire un doigt d’honneur en riant comme une dinde à ce pauvre automobiliste qui constatait tristement qu’un type avec un sac poubelle et un skate le doublait sans la moindre pression.
Rapidement, le jeune homme franchissait la ligne d’arrivée. Le premier évidemment mais sommes-nous étonnés ? Tandis qu’il s’attendait à entendre une foule en délire hurler son nom, il n’entendit que la voix de Dong Joo. A peine eut-il le temps de tourner la tête qu’il la sentit le percuter de plein fouet. Excusez-moi, est-ce une jeune fille ou une Fiat 500 qu’il venait de se prendre dans la gueule ? Parce que autant elle n’est pas épaisse, autant avec la vitesse et l’élan, elle avait littéralement réussi à l’éjecter de son skate en plus de l’immense coup qu’il venait de se prendre. Pourtant, malgré le choc il ne lui fallut que quelques secondes pour se relever. « C’est qui le boss ??? C’est Jung Su ! C’est qui le boss ??? C’est Jung Su ! » Chantonna-t-il gaiement, accompagnant ses paroles à une petite danse. Tellement occupé à célébrer ce moment de victoire, il ne remarquait même pas sa lèvre légèrement ouverte et l’hématome qui posait ses valides sur sa côte. « Ca va ? » S’inquiétait-il finalement après son petit show, s’approchant d’elle et lui tendant la main. Non parce que autant il avait gagné et ça c’est cool mais autant si il fallait emmener son amie à l’hôpital, ça l’était beaucoup moins.

 

Dong Joo éclata de rire, ne validant pas du tout ses propos. Elle savait de quoi elle parlait, elle était entourée par des personnes très intelligente comme son frère ou son petit-ami. En y repensant, c’était des goguryeo alors qu’elle et Jung Su... Elle réfléchit un peu plus et se rappela de celui qui fut leur président. Décidément, les koryo étaient stupides. Mais si on devait décerner un trophée, elle le donnait volontiers à son ami. “C’est tellement puissant que ta bêtise t’as fait griller les deux-trois neurones qui se baladent dans ta petite tête.” Dong Joo avait toujours les mots pour faire plaisir aux autres, c’était indéniable. Mais ce n’était que de la taquinerie, elle savait démontrer son affection seulement de cette manière si particulière. “T’as pas intérêt à m’acheter ça pour mon anniversaire ! Les seuls sacs que je veux sont de luxe.” Elle avait peut-être l’air d’être un garçon manqué qui s’en fichait pas mal de son apparence et voulait seulement s’amuser, mais l’étudiante aimait les jolies choses, encore plus si ces dernières brillaient. Elle serait prête à faire la tête à Jung Su s’il se décidait à lui offrir un truc pourri. Mais il avait encore le temps d’économiser pour l’anniversaire de la jeune fille, elle n’était pas inquiète pour ça. En tout cas, s’il songeait un peu trop fort à lui offrir des sacs poubelle, il pouvait s’attendre à avoir des insectes pour le sien. En tout cas, elle se fit la réflexion qu’elle avait dû faire le ménage trop souvent chez ses parents pour avoir des références pareilles en matière de produits d’entretien. Mais ils avaient terminé de se chamailler à propos d’âge et de ménage, la course était beaucoup plus importante. Elle était prête, sur son skate, et attendit le départ de Jung Su pour s’élancer à son tour à vive allure, le sac ouvert qui faisait rentrer le vent afin de la propulser encore plus vite. Elle riait, Dong Joo, parce que c’était un jeu débile et que c’était bien amusant de voir les piétons et automobilistes déconcertés devant ces deux débiles qui avaient l’air de sortir d’un asile psychiatrique. Le problème était l’obstacle qu’elle avait rencontré, à savoir une vieille dame et son chien aussi en fin de vie qu’elle, la faisant dévier et perdre le contrôle de sa planche ainsi que du sac qui s’envola loin. Jung Su était déjà arrêté mais elle, elle n’y parvenait pas, et ce n’était pas faute de le prévenir de son arrivée fracassante et hurlant, avant de le percuter de plein fouet. Elle roula un peu plus loin, se sentant comme l’héroïne d’un film qui avait eu un grave accident sauf que là c’était ridicule. Elle entendait plus loin Jung Su pousser des cris de joie comme si sa victoire était plus importante qu’elle - spoiler alert : non. Elle dit la morte, parce qu’elle se disait que ça serait bien fait pour lui s’il avait peur. Elle n’avait aucune idée de la tête qu’elle avait, toujours immobile et les yeux fermés, sentant seulement une bosse naître sur sa tête, des écorchures sur les genoux et coudes, et sûrement un gros bleu quelque part ailleurs sur son corps pas équipé pour faire boulet de canon, mais seulement boulet tout court.

Pour une raison qui lui échappait totalement, Jung Su n’était jamais pris au sérieux lorsqu’il expliquait que non, il n’est pas si con que ça. Il est vrai qu’il n’est lumineux comme il le prétend, n’est certainement pas en mesure de contredire notre cher Albert mais il n’a pas non plus la capacité de réflexion d’une asperge. C’est vrai quoi, c’est quoi le problème ? On a plus le droit de faire des conneries et de ne pas avoir un QI négatif en même temps ? Donc quoi parce que on a une capacité intellectuelle normale on a plus le droit de s’amuser ? Si c’était cela, eh bien Jung Su se proclamerait volontiers le plus con de l’univers. En attendant il laissait toutes ces pensées de côté pour lancer un : « Sache que je te pardonne pour cet affront Dong Joo. » avant de laisser une mine faussement jugeuse s’installer sur son visage. « Mais t’as déjà de la chance que je daigne penser à t’offrir des sacs poubelles ouais. Tu crois que j’suis Will Smith ? J’ai une gueule à acheter des sacs de luxes à mes potes ? T’sais quoi, t’as même de la chance que je t’offre pas un ticket de caisse. » Honnêtement, ce n’est pas l’envie qui lui manquait. Jung Su aime faire plaisir aux gens et surtout à ses proches. Si il venait à devenir milliardaire, il rincerait très certainement tout le monde. Seulement, ce n’était pas le cas et c’était même plutôt loin de l’être. Il se débrouillait comme il pouvait, enchainait tout les jobs étudiants possibles et imaginables histoire de mettre de l’argent de côté. Il ne pouvait pas se permettre de distribuer des sacs de luxes à tours de bras. Sa dernière folie remontait à sa soirée de bizutage pour les Koryo. Il en avait encore mal au cœur en repensant à son compte en banque après coup mais cela en valait la peine.

Peu importe, l’heure n’était pas aux pensées. Jung Su avait promis de fracasser son amie à la course et il l’a fait ! Vous l’auriez vu, s’envoler tel Thomas Pesquet direction la lune, il était magnifique ! A ce moment-là, on ne pouvait pas faire plus heureux que lui. La collision entre les deux jeunes gens n’était qu’un simple détail et pour preuve : il ne lui fallut quelques secondes pour se relever et taper sa petite danse. S’était-il inquiété une seule seconde pour la jeune femme sur le moment ? Pas du tout, on calcule pas les rageux nous. Non, il prit bien le temps de finir sa petite danse avant de porter son attention sur elle. Attendant une réponse de sa part, la main prête à l’aider à se relever, il poireautait ainsi quelques secondes avant qu’une légère once d’inquiétude ne vienne parcourir son corps. « Dong Joo ? » Il clignait rapidement des yeux, attendant une nouvelle fois une réponse sans en recevoir avant de sincèrement se mettre à paniquer. Machinalement, il vérifiait si elle respirait. OK DE VISU SON VENTRE BOUGE, ELLE RESPIRE. Il se mit donc à lui mettre des petites claques sur la joue, pile sur son hématome et sans faire exprès en hurlant. « ALLO ? ALLO ? » Bon ok Google, comment cacher un cadavre ?