@Shim Ruby ⤷ YOU GOT ME LOOKING FOR ATTENTION
C'était au lycée. Dans la même classe. La nouvelle qui s'était assise à la table juste devant lui en cours. Qui crayonnait sur ses cahiers au bout de dix minutes et qui passait son temps à regarder les nuages par la fenêtre. Suffisait d'une simple mouche pour la distraire. "Quelle idiote" avait-il pensé alors en soufflant sans humour. Et puis un jour, elle est venue le trouver.

"Est-ce que tu pourrais m'aider à réviser les cours ?" A-t-elle demandé d'un sourire outrageusement adorable. (Il s'est empressé de bannir cette image de sa tête.)
"Nan." Clair. Concis. Efficace. Y'en a même certains qui ont ricané autour d'eux et elle affichait ce visage mi-choqué mi-déçu qui lui aurait presque fait regretter sa décision s'il en avait eu quelque chose à faire. Mais malgré l'insolence, ce n'était pas encore suffisant pour la faire reculer.
"Ca, c'est pas très gentil."
"Qu'est-ce que tu veux que ça m'fasse." Quelle plaie celle-là.
"Allez, aide-moi... s'il te plaît ? A défaut de partager ta bonne humeur tu pourrais au moins partager tes cours non ?" C'est là que ça a fait clic dans sa tête. Au même moment où dans la classe on entendait des ouuuh qui ne plaisaient pas à son petit ego. Il s'était alors levé pour s'approcher dangereusement d'elle.
"Je t'aiderai pas. Même ça t'es trop bête pour comprendre ? J'perds pas mon temps avec les cas dans ton genre alors va jouer ailleurs." Elle aurait sans doute riposté si la cloche n'avait pas sonné et elle venait sans même le savoir d'entrer dans son viseur pour de très mauvaises raisons. Ce qui ne l'inquiétait pas plus que ça puisque lui aussi était entré dans son viseur... pour de toutes autres raisons.

Et ça a continué pendant un moment cette drôle de tension qui émanait d'eux chaque fois que l'un était en la présence de l'autre. Le pire c'est qu'elle trouvait toujours le moyen de le déstabiliser quoi qu'il faisait, par sa spontanéité, par son naturel et par son manque de filtre en société.

Tout a changé le jour où il a manqué l'école trois jours d'affilé sans donner de nouvelles. Personne n'était jamais venu chez lui jusqu'alors et c'est elle qui a récupéré tous les devoirs et qui est venu lui apporter ses cours un soir après l'école.

Quand la porte s'est ouverte, c'est un homme qui empestait l'alcool qui se tenait difficilement devant elle. Il était rustre, presque impoli et dès l'instant où elle s'est présentée comme une camarade de classe, Yoonsu est apparu dans l'encadrure de la porte derrière lui. Un hématome terminait de cicatriser au niveau de sa joue et une fine plaie lui coupait le coin de la lèvre.

Il s'est figé puis, porté par un élan de panique, s'est empressé de traverser la pièce pour lui attraper le poignet et l'emmener avec lui quelques blocs de maisons plus loin.

"Qu'est-ce que fous ici ?!" Il lui tournait le dos mais elle devinait sa mâchoire serrée.
"Tu- comme t'étais malade je t'ai apporté les cours..." Il ne l'avait jamais entendue autant bégayer et peiner à chercher ses mots.
"Tss. Qu'est-ce que tu veux que je fasse avec les cours de l'étourdie de service ?" D'habitude, ça suffisait à les faire se chicaner pendant des heures mais cette fois, il sentait que ça ne prendrait pas.
"Yoonsu..."
"Tais-toi." Il l'avait brusquement coupée en assumant enfin lui faire face. "Ne dis rien." Et comme une mimique de leur premier échange, c'est lui qui quémandait à présent. "Je t'aiderai à réviser après les cours. Si tu promets de garder tout ça pour toi." C'était affreux ce qu'il lui demandait et il en avait conscience. Mais il avait encore deux ans à tirer tout au plus avant de se barrer de cette maison. Ca devrait le faire pas vrai ? Elle avait gardé le silence.
"C'est vraiment ce que tu veux ?" Elle se détestait d'obéir à un ordre aussi abjecte. Mais il avait acquiescé alors, elle aussi. "Ok." Il avait alors pris le tas de papier qu'elle tenait à bout de bras et s'était volatilisé en une fraction de secondes.

(...)

"Bon. On va commencer par la dernière évaluation de coréen, t'as eu combien ?"
"34."
"Pourcent !?"
"Ben oui."
"...mais j'y crois pas t'es vraiment débile !"
"Je vais te faire manger mon contrôle."

(...)

Il n'arrêtait pas de passer sa main sur sa nuque et hisser de douleur au moindre mouvement brusque. Au beau milieu de la bibliothèque, elle avait posé son stylo pour la énième fois et avait attiré son attention.
"Yoonsu"
Oh putain... "Quoi encore ?"
"Tu t'es fait mal ?" Derrière sa question, il y en avait une autre plus inquiète mais lui n'avait pas tout de suite compris.
"C'est rien qui te regarde alors arrête de parler et continue de bosser."
Ca a marché un moment avant qu'elle ne revienne à la charge.
"Tu peux venir chez moi si t'as besoin."
Alors là, c'est lui qui s'est stoppé net. Quoi ? Comment ça ?
Avec un visage aussi innocent, dire des trucs pareils ?!
"Mais ça va pas ?!" Il s'était emporté. Voilà pourquoi la bibliothécaire leur avait servi son regard le plus sévère pour les faire taire.
"Dis pas ce genre de choses !" Murmurant, étouffant dans cet outrage qu'elle venait de faire. Il s'était pincé l'arrête du nez en soupirant.
"Pourquoi ?"
"PARCE QUE !... on invite pas des mecs chez soi comme ça, sans raison !"
Elle est bête ou quoi ?
"J'aime pas te voir souffrir et savoir que je peux rien faire pour t'aider."
...pouf... en une fraction de seconde l'agacement s'était envolé et la culpabilité de l'avoir entraînée là-dedans toquait de nouveau aux portes de son cœur. Il avait cherché quoi dire pendant un long moment puis, ne trouvant rien, s'était finalement laisser allé à un soupir moqueur mais presque attendri.
"Idiote. Tu te fais du soucis pour rien." Pour cette fois en tout cas. "C'est mon Maître. Il m'a mis une râclée hier sur le dojo... un jour il verra de quel bois je me chauffe !"
Il n'empêche, cette conversation se rejoue constamment dans sa tête.
Elle s'inquiétait vraiment pour lui ?
Avant elle, personne n'avait jamais pris la peine de le faire comme ça.

(...)

Je pourrais continuer pendant des heures sur des petites anecdotes pour illustrer leur relation mais la suite de leur histoire est un chemin que nous écrirons à deux