Le coton contre sa peau frotte – inconfortable. Ce n’était pas pourtant un choix ce matin quand il a fallu enfiler cette chemise au lieu d’un simple tshirt, malgré la chaleur étouffante énoncée pour la journée. Il fallait bien cacher ces traces qui se forment petit à petit sur ses bras, après la crise d’hier. Un dîner avec sa mère, rien de plus rien de moins. Et pourtant assez pour marquer sa peau quelque temps, quelque chose qu’elle ne compte pas annoncer à qui que ce soit. Ni son père. Ni sa belle-famille. Ni ses amis. Personne n’est au courant des crises de sa mère, de l’alcool qui la pousse à faire des choses hors des limites, parfois. Souvent. Chaeyi n’en a jamais parlé – elle a peur qu’on les sépare une bonne fois pour toute. Certes, sa mère n’est pas toute blanche, loin d’être parfaite ; mais qui l’est ? Ce n’est pas sa faute si la vie l’a abîmé plus que nécessaire et qu’elle ne trouve que le calme dans un certain état d’ivresse. Et puis, hier… Hier n’était qu’un accident. Un simple accident. Jamais sa mère n’a voulu pousser sa fille dans les escaliers de l’appartement – Chae n’est même pas sûre d’avoir été poussée, peut-être a-t-elle seulement trébuché durant leur dispute. La gogu souffle en remontant ses manches face au miroir des vestiaires, elle a attendu que le bâtiment se vide pour oser. La brune fixe quelques instants ses bras, avant d'extraire la crême à l'arnica de son sac. Les tâches bleutées se dessinent sur le blanc immaculé – signe que la soirée n’a été de tout repos. Du bout des doigts, elle couvre une à une les marques. « Aie. ». Si Chaeyi est sûre de rien n'avoir de casser, elle se demande si la marque violette sur son poignet n'est pas plus grave qu'elle n'en a l'air. Après tout, la fracture vieille de plusieurs années au même endroit a mis des mois à guérir, et elle a toujours une certaine faiblesse et sensibilité à cet endroit. Elle espère qu'elle n'est pas repartie pour des semaines de plâtre ou de bandages. Alors qu'elle continue d'appliquer l'arnica en quantité généreuse, la porte des vestiaires s'ouvre pour son plus grand malheur. La personne a l'air tout aussi étonné qu'elle de trouver quelqu'un dans les sanitaires à cette heure-ci, puis son regard se pose sur les bras abîmés de la brune. De ses grands yeux de biche, elle fixe la personne d'air surpris, apeuré – si bien qu'elle finit par faire tomber le tube de crême qu'elle tenait dans sa main. « C’est – hm, c’est pas ce que vous croyez ! » – ok, le mensonge et elle, ça fait dix très clairement. Il faut dire que son état d'esprit ne l'aide aucunement à se poser et à réfléchir à ses propos. Chaeyi creuse sa propre tombe – comme d'habitude, remarque-t-elle mentalement. Alors la brunette se mord la lèvre, cherchant désespérément à fermer sa trop grande bouche. Et instinctivement, Chae se dépêche de tirer sur le tissu de ces manches pour couvrir ses bras.