Kyungmi jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule, ses yeux bruns se posant sur la silhouette de Jaejin un peu plus loin. Le garçon était au téléphone et vu les expressions qu'il affichait, la jeune femme devinait sans mal qui il pouvait bien avoir à l'autre bout du fil. Parce que si elle avait eu son père au téléphone, elle aurait eu les mêmes alors ce n'était pas bien compliqué de comprendre qu'il était en pleine discussion avec sa mère et qu'encore une fois il y avait des commentaires qu'elle aurait dû garder pour elle. Elle connaissait un peu la femme, leurs parents étaient amis ou plutôt des connaissances mais dont les intérêts étaient similaires, ça rapprochait il parait. En tout cas ça n'avait pas rapproché les enfants des parents c'était certain, mais quand bien même Jaejin et elle n'étaient pas dans le même cursus, les deux avaient fini avec le temps par se trouver des points communs et à parler à l'autre quand ça n'allait pas. Elle savait ce qu'il vivait autant que lui comprenait combien les remarques de son père étaient dures à encaisser. Se concentrant à nouveau sur ses notes, elle attendit patiemment que Jaejin raccroche et qu'il la rejoigne, lui adressant un petit sourire triste quand il vient s'asseoir à nouveau auprès d'elle. « C'était pourquoi cette fois-ci ? » Question posée à voix basse, presque comme si elle ne voulait pas lui demander, ce n'était pas dans ses habitudes de mettre son nez dans les affaires des autres mais ils en avaient parlé suffisamment entre eux pour qu'elle ose avec le garçon. Malgré tout si Jaejin ne voulait pas en parler, elle ne le forcerai pas. « Je me disais qu'on pourrait aller manger un bout une fois qu'on aura fini de réviser, ça te dit ? »

Les lèvres faiblement pincées, un léger son ronronna dans ta gorge pour participer au minimum à la conversation. Tes sourcils se levaient à peine, ta frimousse bloquée dans un air à la fois perturbé, inquiet et peut-être même un peu peiné. Les pupilles cavalant dans le vide, tu semblais chercher un point sur lequel t'accrocher pour ne pas trop glisser dans tes mauvaises pensées – mais les mots chantés à tes tympans te coulaient alors que ta tête était à peine hors de l'eau. Tu savais que ta mère ne pensait pas à elle et qu'elle s'inquiétait quand elle parlait de la vie d'idole, ou de cette carrière qui n'en était pas une. Tu savais aussi qu'elle ne voulait pas te blesser quand elle te parlait des réussites de ton frère et de ta sœur. Comme si elle n'avait rien à vanter sur toi. Ou peut-être bien allais-tu chercher trop loin. Mais tu savais qu'ils faisaient mieux que toi, tous les deux, et qu'ils la rendaient fiers. Alors que toi non, apparemment. Les épaules basses, tu raccrochas dans un souffle, passant ta main dans ta nuque comme si un poids venait de s'y loger, appuyant sur ton corps entier, éveillant une douleur muette. « Comme d'habitude », dis-tu lentement, bougeant vaguement les épaules, le même sourire que Kyungmi étirant tes lèvres. « Elle s'inquiète, parce qu'être idole n'est pas un vrai métier », pas comme ton frère ou ta sœur avaient un vrai métier. Tu te pinças les lèvres, ne parvenant pas à relever plus librement tes pommettes. Les pupilles tournant vers Kyungmi, tu l'observas un instant, le visage penché à sa proposition. « Pourquoi pas oui. J'irais probablement m'entraîner plus tard », t'en avais pas vraiment l'envie pour le moment – mais t'en avais cruellement besoin. Passant tes mains sur ton visage, tu semblais étudier le livre devant toi. La couverture, du moins. T'avais pas vraiment envie de réviser non plus. Et tu gardas le regard fixe, les sourcils faiblement levés, une expression perdue au visage. « Il te reste beaucoup à réviser ? », que tu lui demandas alors, les yeux vers elle. « Je pense que je réviserais plus tard aussi », après l'entraînement. Puisque de toute façon l'entraînement était plus important. « Je crois que j'arriverais à rien retenir », soufflas-tu, presque désespéré. « Tout va bien sinon ? », l'interrogeas-tu, le menton posé contre ta paume alors que tu la regardais.

Kyungmi ne voulait pas se montrer trop curieuse car en toute honnêteté ça ne la concernait pas qui le garçon avait au bout du fil, de quoi ils pouvaient bien parler et pourquoi il mettait autant de temps à revenir. Mais ça serait mentir de dire qu'elle n'avait pas une idée sur qui cette personne était pour le retenir aussi longtemps. Et pour voir de telles expressions sur le visage de son ami. Ce n'était pas très compliqué. Depuis qu'ils se connaissaient, Kyungmi avait rapidement compris qu'une seule personne était capable de mettre Jaejin dans un état pareil alors quand le jeune homme raccrocha enfin et qu'il revient à leur table, elle n'alla pas par quatre chemins... après tout elle connaissait les difficultés qu'il avait avec sa mère tout comme il connaissait celles qu'elle avait son père. C'était un bien triste point commun. « Elle a essayé pour justifier penser ça ? » Kyungmi marmonne en levant les yeux au ciel, on dirait tellement son père avec son discours sur le fait que la pâtisserie n'était pas une vraie vocation. Comme si en disant cela il n'insultait pas la mère de son épouse. Proposant au garçon de manger quelque chose, elle ne fut pas surprise de sa réponse, parce que d'une part son métier lui y obligeait un peu mais aussi parce qu'il lui faisait penser à Yechan dans ces moments-là. Peu importe qu'il fasse jour ou nuit, parfois il pouvait s'entraîner jusqu'à pas d'heure. Hochant la tête doucement, elle le regarda plusieurs instants tenter de se concentrer à nouveau sans parvenir à le faire, riant quand il reprit la parole en secouant la tête. « Non, j'ai pu avancer pas mal quand tu étais au téléphone. » Elle murmura, adressant un léger sourire hésitant au garçon à ses mots, elle imaginait sans mal oui que le moral n'était pas forcément aux révisions. « On peut déjà y aller si tu veux ? » Ils n'étaient pas obligés de rester ici. « Ça va, pour le moment mon père me laisse tranquille même si je sais qu'il reviendra à la charge comme à chaque fois. » Certains parents ne comprenaient pas.

Le sourire appliqué avec finesse sur ta bouche n'était que l'ombre de celui que tu portais vraiment. Ce sujet de conversation revenait souvent entre les lèvres de ta mère, et si tu comprenais qu'elle puisse s'inquiéter, t'en avais toujours le cœur lourd une fois la discussion terminée. C'était comme si elle n'était pas fière de toi, pas fière de ce que tu voulais faire ni de ce que tu arrivais à faire. Parce que tu ne faisais pas comme les autres, comme ton demi-frère ou ta demi-sœur et ce n'était pas bien. Tu ne demandais pas grand chose, simplement qu'elle te soutienne. Les moments où vous n'étiez que deux te manquait terriblement. Ca te pourrissait la vie – car peu importait ce que tu faisais, t'en venais toujours à fixer le voisin ou la voisine en te disant qu'il faisait mieux. Parce que c'était ce qu'on t'avait répété, directement ou non. C'était ainsi que tu l'avais toujours compris et ainsi que tu le comprenais. « Tant mieux », dis-tu simplement, incapable de te concentrer sur le texte sous tes yeux. Continuer les études ne te plaisait pas, car ça ne faisait pas parti de ton rêve mais tu le faisais pour faire plaisir. Tu passas la main dans tes cheveux, le souffle discret, comme un môme indiscipliné incapable de rester en place, le pied tapant faiblement contre le sol. « Tu es sûre ? », que tu lui demandas, l'air brusquement coupable. A ses mots suivants, le coin de tes lèvres se leva dans une esquisse compatissante, et désolée. « Espérons qu'il ne revienne pas à la charge de si tôt », qu'il lui laisse le temps de souffler – ou qu'il ne revienne pas sur le sujet tout court. Les parents ne se doutaient pas à quel point ça pouvait être lassant, épuisant et blessant. « Si ça va pour toi, on peut y aller », annonças-tu en rangeant tes affaires avec lenteur, ne voulant pas la presser non plus. Mais t'avais besoin d'air. Et une fois à l'extérieur, tu pus prendre une grande inspiration, soupirant tout aussi bruyamment. « C'est vraiment épuisant », ta mère, cette conversation, les cours, la vie, tout. Toi-même tu ne savais pas vraiment de quel sujet en particulier tu parlais. « Tu veux manger quelque chose alors ? », comme elle l'avait proposé plus tôt. « Tu avais un endroit particulier en tête ou peu importe ? », que tu parlais tout en avançant, les pupilles contemplant parfois le vide, parfois le ciel, parfois sa frimousse. « J'aurais bien besoin d'une bonne boisson sucrée », commentas-tu, malicieux – tu le regretteras probablement plus tard mais pour le moment tu voulais quelque chose pour te booster un peu. « Je reprendrais les révisions ce soir... en espérant pouvoir retenir un truc. C'est épuisant aussi, les cours »