•✦• L'étiquette. Collée sur ton front comme un post-it impossible à enlever. Les règles étaient précises, dures et innombrables. Apprises par cœur depuis petit, elles venaient régir tes réactions, tes positions, tes mots. Un rôle parfaitement endossé dans un costume sur mesure, pourtant inconfortable. Aucune tâche ne sera acceptée, comme ces erreurs de gamins que tu n'oseras faire. Les pas toujours prudents, la mine fermée dans un sérieux précoce.

•✦• Si jouer du piano allait de soi, c'est pour une lubie plutôt étrange que tu te retrouvais sous les projecteurs dès bébé. Une sorte de trophée qu'on brandissait à la moindre occasion, faisant quelques couvertures dans tes plus jeunes années. Souvent les articles parlaient de tes parents, comme des entrepreneurs de haut grade, des gens d'exception, des riches à la vie incroyable. Une vie qui te faisait supporter les flashs dans des iris fragiles.

•✦• Quelques personnes peuvent se vanter de t'avoir vu suivre leur ombre,  rire à gorge déployé à leurs blagues. Ces personnes te connaissaient bien trop. Ta cousine laissant un peu de douceur dans ta vie, dans cette famille que vous partagiez comme un fardeau, pourtant bien différent. Et ta meilleure amie, ou petite amie. Le statut a changé plusieurs fois. Aujourd'hui tu cherches ce qu'il reste d'une idylle aussi vieille que vous.

•✦•  C'est avec cette dernière que tu t'es marié en primaire, une bague bonbon au doigt tandis que tu promettais de rester à ses côtés. Calomnies. Cette même fille avec qui tu partageais tout, grandissant à ses côtés malgré les deux ans qui vous séparait. Une relation qui a évolué jusqu'à ce moment ambitieux : le couple. Un statut qui a fait rougir tes pommettes mais qui s'st fini trop tôt, inéluctablement rappeler à la réalité.

•✦• Avec cette tête qui est la tienne, mais surtout ton air fermé et froid, tu en as impressionné plus d'un. Il ne fallait jamais très longtemps pour que ton identité soit révélée. Le fils de.. un statut qui t'éloignait des autres autant qu'il les rapprochait. Un tout qui avait conduit à des malentendus. Des snacks et boissons se retrouvant sur ta table comme une demande muette. Tu découvriras quelques jours plus tard que tes petits camarades t'ont  pris pour un bully et cherchaient à s'attirer tes faveurs et non tes foudres.

•✦• Et ce ne fut pas le seul malentendu. En arrivant aux États-Unis tu n'avais pas un mot à dire. Ni dans ta langue natale qui n'avait jamais observer de longue conversation. Pas plus qu'en anglais où tu ne maîtrisais qu'une partie, assez pour survivre mais pas assez pour t'intégrer. C'est alors que certains de ta classe ont pensé que tu étais muet, commençant à t'envoyer des mots plutôt que de te parler naturellement. A ce jour, tu ne comprends toujours pas pourquoi une personne muette ne saurait entendre leur voix.

•✦•  C'est sûrement là bas que tu as compris ce que c'était de parler une autre langue. De pouvoir comprendre quelqu'un avec une culture totalement différente, à l'opposé de soi. C'est ce qui a commencé à te fasciner, trouvant une grande satisfaction dans l'apprentissage. Bien sûr, tes parents t'ont toujours appris qu'il était bon de connaître plusieurs langues, commençant par le japonais. Tu es donc considérer comme polyglotte.

•✦•  La famille n'est pas une affaire d'amour, de se sentir soutenu mais un flambeau à relever. Construire un empire et le passer de génération en génération. Pour la même raison, une liste de candidates parfaites a été établies sûrement depuis ta naissance. Des dossiers qui s'empilent pour ton plus grand malheur. Diners, meeting, appelez ça comme vous voulez. Tu détestes toujours t'y rendre mais c'est avec politesse que tu fais acte de présence avant de repartir sans laisser le moindre espoir.