outfits + « Aaah n-naaaan ! » Ce cri un brin dramatique marquait le désespoir de Haru à se faire battre une nouvelle fois par son ami. Le coréen jouait beaucoup moins souvent que Kikunae, cela justifiait sans doute ses défaites successive. Pour autant, ce n'était pas si simple que ça pour son amour propre parce que son ami ne le ménageait pas une seconde. S'affalant à moitié sur le japonais, Haru continua de geindre comme si c'était lui qui avait reçu les coups de son personnage, s'affaissant de plus en plus pour finir allongé au sol, comme une crêpe. Il ne pouvait même pas accuser son ami de tricher, depuis leur rencontre et leurs mois d'amitié, il s'était bien rendu compte que mentir/tricher n'était pas le style de Kikunae. « Mais c-c-commen tu ffffais ?! » Il se redressa et se rassit à côté de son ami, n'appelant pas une vraie réponse puisque c'était la pratique qui expliquait le talent du japonais. Haru attrapa la canette de soda posée non loin, en descendit une grande gorgée avant de la reposer en la faisant claquer légèrement. Il n'était pas énervé mais excité, comme un enfant qui avait mangé trop de sucre (ce qui était peut-être le cas à bien y penser). « O-on change de jjjeu ? » Il fît une petite moue avant de venir poser sa tête sur l'épaule de Kikunae, comme s'il cherchait à l'amadouer. « T-t-tu veux v-vi-vvvisiblement p-pas me laisser g-g-gagner à cccelui-là. » Et avec son petit rire de Gremlin, il se redressa pour laisser Kikunae changer de jeu, observant les gestes de son ami d'un air distrait. Haru ne pourrait peut-être pas rester autant qu'il le voulait. S'il ne travaillait pas, il était d'astreinte à la caserne et si les gars avaient besoin de renfort, ils n'hésiteraient pas à l'appeler. La question de quoi faire s'était posée pour lui, rester tranquille aux dortoirs et attendre un potentiel appel ou profiter. Vous connaissez notre énergumène, il préférait s'épuiser plutôt que perdre un instant. Et après quelques messages envoyés (notamment à la jolie Yu Jeong qui lui avait souhaité une bonne soirée et s'était excusée de ne pas pouvoir la passer avec lui), Haru avait atterri chez son ami. S'il ne connaissait Kikunae que depuis quelques mois, il se sentait très à l'aise avec le japonais, ne retenant pas son besoin de toucher les gens à qui il tenait et bégayant moins en lui parlant. Conclusion, il espérait qu'il n'y aurait pas d'appel, car il passait vraiment une bonne soirée avec le musicien. Ce dernier se replaça à côté de lui et Haru se colla à son côté, reprenant la manette. « T-t-tu as choisi qu-quoi cette fffois ? »

+ La journée s’est déroulée telle une longue agonie aux yeux de Kikunae. Oui, bon, il reconnaîtrait volontiers qu’il y a exagération. Sauf devant le principal intéressé cela va de soi. Sa conversation avec Ryuu lui est souvent revenue à l’esprit. Il y a réfléchi. Il ne sait toujours pas quoi faire. Est-ce qu’il éprouve réellement des sentiments pour le musicien ? Ou est-ce qu’il aime tout simplement passer du temps avec quelqu’un qui lui ressemble ? Ils ont de nombreux points en commun quand on y pense. C’est donc plus facile pour Nae de s’ouvrir, de parler… Est-ce que cela explique tout pour autant ? Pas sûr. Le Japonais n’est pas d’un naturel tactile. Son seuil de tolérance est plus élevé avec certaines personnes de son entourage, Hayden par exemple, mais de toute façon, son meilleur ami adore l’embêter et il sait que c’est un excellent moyen. Avec Haru… Kikunae n’a pas souvenir d’avoir été dérangé par la proximité qu’il impose parfois entre eux. C’est déstabilisant par moment, il a peur que les battements de son coeur n’échappent pas à la vigilance du skateur. Non seulement, Nae ne repousse jamais Haru, mais en plus… Il a l’impression d’en vouloir toujours plus. Plaisir, qu’il ne s’est encore jamais accordé. Il a bien trop peur de se trahir.

La perspective qu’Haru vienne passer la soirée chez lui pour jouer aux jeux-vidéos, l’a enchanté toute la journée. Pourtant ces soirées sont devenus régulières avec le temps. Quand Haru réussi à se libérer, entre ses disponibilités à la caserne, ses études, son groupe… En réalité, cela faisait un certain temps qu’ils n’avaient pas pu se voir, autrement que pour une boisson chaude rapide, avant qu’Haru ne reparte courir après le temps. Il commençait à lui manquer. Kikunae n’est pas sans savoir que son ami peut être appelé à tout moment s’il y a une urgence, il tâche de ne pas y penser. Ce qui est drôle, c’est que perturbé par ses sentiments pour Haru, il n’a pas réussi à se concentrer sur le jeu la dernière fois avec Ryuu. Ce soir, le jeune homme est juste à côté de lui et il gagne encore haut la main. Il essaie de se focaliser autant que possible sur l’écran, certains diraient qu’il cherche peut-être à impressionner celui qui fait battre son coeur.

- C’est le talent ! Reconnaît Nae, exagérément vantard.

Ce qui ne colle pas le moins du monde à sa personnalité, mais la présence d’Haru lui donne envie de rire et de le taquiner.

- Si tu veux.

Smash Bros est un de ses jeux préférés, il le connaît en long, en large et en travers. Il peut bien accorder cela à Haru. Il n’a que l’embarra du choix dans tous les jeux que le gamer possède en physique et en dématérialisé. De même que pour les consoles, switch, playstation, xbox… Tout y passe, il joue même sur PC et sur son téléphone.

- Non, je te laisse choisir, je te dois bien ça pour me faire pardonner.

Kikunae sourit, essayant désespérément de cacher son trouble, tandis qu’Haru est encore bien trop proche de lui. Il a littéralement la tête posée sur son épaule. S’il pouvait entendre ce qu’il se passe dans l’esprit de Nae à cet instant précis… Il aurait peut-être peur. Il repense à une conversation qu’il a eu avec Ryuu… Il devrait peut-être dire à Haru ce qu’il ressent réellement ? Cependant… Ce serait prendre le risque de le perdre ? Nae peut difficilement s’y résoudre...

outfits + Plus doué sur une planche de skateboard ou même au cœur d'une intervention sur un accident de voiture, Haru avait des lacunes pour ce qui était des jeux vidéos. Il était loin d'être un cas perdu, il avait eu l'occasion de jouer un peu avec les consoles de son grand frère quand celui-ci l'y autorisait mais face à un professionnel comme Kikunae, il n'avait aucune chance. Ce qu'il appréciait, c'était que le japonais ne faisait pas semblant de moins bien jouer juste pour lui faire plaisir. Il jouait normalement et tant pis s'il piétinait l’ego de Haru (heureusement, il n'en avait pas beaucoup). C'était ce qu'il appréciait chez le musicien, c'était son honnêteté et son côté vrai. Cette part de son caractère avait mis à l'aise Haru très rapidement, il savait que si Kikunae ne montrait aucun signe de gêne sur son bégaiement, aucune curiosité mal placée, ce n'était pas qu'il se retenait de le questionner ou de lui faire des réflexions, c'était qu'il était réellement okay avec qui était, avec ce qu'était Haru. C'était pour toute ces raisons que le coréen pouvait être entier, aussi chiant que collant lorsqu'il en avait envie.

Une moue sur le visage, Haru prenait un air dramatique bien plus que la situation ne l'exigeait. À défaut de pouvoir gagner un jour à Super Smash Bros (c'était vraiment peine perdue), le coréen proposa de changer de jeu pour au moins avoir un mince espoir de ne pas se faire humilier. Mais là encore, son ami était sans pitié, l'obligeant à choisir l'arme avec laquelle il serait fusillé (n'oubliez pas, Haru est dramatique). Tel une mission commando, le jeune bègue rampa jusqu'à l'endroit où Kikunae rangeait tous ses jeux. La première fois que Haru avait vu sa collection, il avait été émerveillé par tout le choix qu'il avait, autant en thème qu'en console. Loin de juger le japonais, il avait vu sa collection comme l'expression de sa passion. Certains collectionnaient les timbres, les films, les livres et son ami, lui, les jeux. Craignant d'être rappelé par la caserne, il préféra choisir un jeu sur la même console pour ne pas perdre de temps à devoir faire le changement. Pour avoir une autre dynamique que se taper dessus, Haru sortit un autre jeu phare de cette console, Mario Kart. Il le sortit avec une exclamation triomphante avant de se permettre de faire le changement lui-même, quelque chose qu'il avait déjà fait souvent depuis qu'ils étaient amis. « C-c-c'est quoi un kart sssi ce n-n'est un gros s-ssskate ? » Il se tourna vers Kikunae, son air de Gremlin sur le visage. « Et on sssait que s-sur des r-r-rrrroulettes je sssuis le m-meilleur. » Le pauvre genou du japonais devait s'en souvenir. Son épaule calée contre celle du musicien, Haru se concentra pour faire les bons choix de personnages, de véhicules et d'options. Il tourna la tête vers Kikunae. « Ça te p-p-paraît bien c-comme ça ? » Et après quelques modifications, il était prêt à en découdre ! Et sans doute à perdre avec un peu plus de panache. « L-l-let's goooo ! » Le feu vert s'afficha et Haru lança son personnage sur le circuit. Au bout de deux tours, il était certain qu'il ne pourrait pas gagner la course alors il préféra mettre des bâtons dans les roues de Kikunae, lui lançant des carapaces, lançant des éclairs et des tâches d'encre autant qu'il en fût capable. À chaque lancé, il poussait une exclamation ou un rire, s'amusant plus à être chiant qu'à gagner. Il s'amusait aussi donner des petits coup d'épaule dans celle de son ami. À la fin, son ami était le premier de la course mais au regard qu'il lui lança, il était certain que Haru ne lui avait pas facilité la tâche. Pour tout commentaire, le jeune bègue lâcha un ricanement sonore avant de lui tirer la langue. Perdre certes mais avec classe (oui enfin...).

+ Cette soirée est exactement comme Nae l’avait espéré. Haru lui donne toute son attention et il réussit à le faire rire. Le musicien est comme une bouffée d’air frais pour le jeune homme. Il adore ces moments passés ensemble pour jouer aux jeux-vidéos ou aller faire du skate, bien qu’il ne soit pas spécialement doué. Ils ont la musique en commun, mais il se font découvrir l’un et l’autre, de nouveaux centres d’intérêts, pour apprendre à mieux se connaître. Kikunae pourrait faire exprès de laisser Haru gagner pour lui faire plaisir. Cependant, une partie de lui a envie de l’impressionner, alors il joue comme il le ferait avec n’importe qui. Heureusement, le jeune pompier ne semble pas s’offusquer de perdre. S’il avait été aussi mauvais joueur qu’Hayden, ça aurait pu coincer. Pourtant, cette proximité entre eux le déstabilise à plusieurs reprises. Nae sent son coeur s’emballer dans sa poitrine, il lutte contre l’envie de sourire bêtement et agit comme si de rien était, autant qu’il peut. Il s’efforce de rester concentré sur le jeu et de ne pas se laisser distraire. Il remporte une énième partie sur Super Smash Bros Ultimate, l’opus sur Switch, il faut dire qu’Haru n’a pas de chance, c’est un des jeux favoris de Nae. Il en passé des heures à se perfectionner.

Pour le prochain jeu, il laisse Haru choisir. C’est sa façon de lui demander pardon pour ne lui laisser aucune minute de répit quand ils jouent.

- On peut voir ça comme ça, il répond avec un petit sourire. Je ne peux pas te contredire là-dessus. Tu as déjà constaté mon absence de talent pour le skate. Par contre, à Mario Kart je ne suis pas mauvais, tu devrais faire attention. Chez moi on dit : 捕らぬ狸の皮算用, soit « Compter la peau des ratons-laveurs avant de les avoir capturés », vous avez une expression comme ça en coréen ?

Il a beau vivre à Séoul depuis quelques temps maintenant, les expressions idiomatiques, ce n’est pas son domaine de prédilection. Lui faisant totalement confiance, Nae laisse Haru s’occuper du changement de jeu. Il en profite pour grignoter quelques chips et boire une gorgée de soda. Les deux joueurs ont la possibilité de choisir leur personnage et de personnalisé leur kart avant de commencer, dans la limite des options disponibles. Nae sait déjà quelle combinaison il va choisir. Pour le personnage : Wario, et pour le reste, inutile d’entrer dans les détails, mais il choisit rapidement et reporte son attention sur ce que fait Haru.

- Tu devrais prendre Toad et ces accessoires là. Attends…

Il se penche contre lui pour pouvoir accéder à sa manette. Nae s’efforce de ne pas réagir en sentant la chaleur d’Haru tout contre lui. Il choisit un kart, des roue et un parapente.

- Tu auras un meilleur contrôle avec ce véhicule et le personnage n’est pas trop lourd, tu auras moins de mal à accélérer.

Kikunae se redresse pour se réinstaller contre le canapé, jetant tout de même un coup d’oeil à Haru en coin.

La course débute et dès les premiers tours, Nae se positionne en tête de file. Il est donc la cible de nombreux pièges, notamment les carapaces bleus qui s’attaquent systématiquement au premier. Si ça n’avait été que ça, il a l’habitude, Hayden ne lui fait jamais de cadeau non plus et ils sont souvent au coude-à-coude. Ce qui le déconcentre davantage c’est de sentir Haru se rapprocher, le toucher, le frôler… Nae prend sur lui pour ne pas détourner son regard de l’écran. Il obtient la première victoire, mais cela s’est joué à rien pour qu’il perde la tête du podium. Il lance un regard à Haru, même s’il a du mal à lui en vouloir, surtout quand il le voit faire l’idiot. La légèreté et la bonne humeur du jeune homme sont contagieuses, même avec l’ours qu’est Nae.

- Concentre toi, ça se joue en trois courses, ne t’avoue pas déjà vaincu, il rétorque avec un petit sourire. Si tu m’embêtes trop, je choisi la piste Arc-en-ciel pour la dernière course, tu vas moins rigoler !

Pour les joueurs peu aguerris, c’est un parcours pas toujours simple. Il n’y a pas de bord, ni d’herbe, c’est le vide autour de la piste et beaucoup tombe dans le vide, perdant un temps précieux. Il y a aussi beaucoup virages qu’il faut anticiper et des zones d’accélération qu’il faut contrôler. Pour la deuxième, Nae n’a pas été si méchant, il a choisi une piste classique.

- Que le meilleur gagne ! Moi, évidemment. Si tu me bats, je t’offrirai une récompense.

Il le taquine bien évidemment. Sur ces mots, Nae lance la seconde course, toujours aussi concentré sur la partie, il fait de son mieux pour ne pas se laisser distraire. Il ne disait pas ça dans le vide, il avait quelque chose en tête. Quelque chose de complètement fou, qu’il n’osera de toute façon probablement pas faire. Il mise sur le fait qu’il va encore l’emporter...

outfits + Haru était des plus amicale si les gens faisaient l'effort de passer outre ses difficultés à s'exprimer, il était une personne chaleureuse qui adorait rigoler et s'amuser. Malheureusement, son bégaiement amenait les gens à rapidement le juger et Haru avait mis longtemps à avoir des amis. Aujourd'hui, il avait su s'entourer et avait autour de lui des personnes qui lui permettaient d'être complètement lui-même. Kikunae était une de ces personnes. Avec lui, Haru se sentait complètement à l'aise, il n'avait donc pas peur de parler mais aussi d'exprimer toute sa personnalité par ses gestes, son affection et son faux mauvais caractère. D'ailleurs, son ami ne sembla pas du tout impressionné. Kikunae accepta de changer de jeu mais restait toujours aussi sûr de lui pour gagner et il y avait de grandes chances pour qu'il ait raison.

Manette en main, Haru essayait quand même de jouer les types assurés. À croire que certains clichés de type "macho et assurance" s'étaient quand même bien inscrits dans sa petite tête. « T-t-tu es mmmeilleur a-avec des fffausses roulettes p-plutôt que d-des vvvraies. » Son nez froncé par un tic facial resta en place dans une petite moue taquine. Il réfléchit à peine à la question de Kikunae, content d'aider son ami à assimiler la langue et la culture coréennes. « Ou-oui. « t-tteok jul ssssarameun senggakdo a-a-anneunde gimchitgukbuteo mmmasinda. » En g-gros ça vvveut dire qu'il nnn'y p-personne pour te d-d-donner des t-tteok mmmais tu bois dé-déjà une sssoupe de ki-kim-kimchi et de t-t-tteok. » Il inclina légèrement la tête. « Mmmais m-maintenant on d-dit sssurtout « k-kimchi buteo mmmashinda. » » À bien se rendre compte, c'était quelque chose que sa mère lui disait souvent et sans doute par mimétisme, Haneul également.

Haru laissa le japonais le guider pour choisir son personnage et ses équipements. Il lui laissa sa manette mais resta collé à lui pour regarder les manipulations qu'il faisait et écouter ses recommandations. Le coréen repensait parfois au jour où il avait rencontré le musicien et c'était presque fou à quel point il parlait à présent, Haru n'était pas le seul à se sentir à l'aise. « D-d-dis que jjje suis l-lent tant que t-t-tu y eees ! » Il avait du mal à accélérer qu'il disait... Non mais ! D'ailleurs, dans sa grande maturité, Haru lui tira la langue, ce qui ne troubla pas Kikunae un instant. À croire qu'il était bien trop habitué à ce type de comportement. Il remporta la partie haut la main malgré tous les obstacles et mauvais coups qu'avait pu essayer Haru. Ce n'était pas très fairplay mais le japonais était imperturbable. « A-ah ! La mmmenace du c-ci-circuit aaarc en ciel ! C'est p-p-pas fffairplay ! » Comme si lui l'était depuis le début de la première course.

Le musicien se replaça donc correctement pour la seconde course, montrant un peu de bonne volonté. « U-u-une récompense ?! O-okay. Jjje vois que t-t-tu aaaimes les ch-challenges. » Il tendit la main comme s'il signait un contrat. « S-s-si tu g-gagnes t-tu auras une ré-récompense aussi. » Quoi, il ne savait pas du tout, il avait le temps de la course pour réfléchir. Ou alors, il déconcentrait assez son ami pour ne pas avoir à y réfléchir, c'était aussi une solution. Il s'appliqua donc à être le même gremlin qu'à la première course. Il s'appliqua quand même à rouler un peu mieux et pas seulement à embêter Kikunae. Pour ne pas perdre d'attention en devant parler, il poussait donc de nombreux cris et exclamations pour exprimer ce qu'il avait trop de mal à dire en mots. Son ami plutôt habitué avait la belle habitude de les interprétés plutôt justement. La ligne droite se dessina devant lui, le verdict était pour bientôt, ils étaient à un cheveu l'un de l'autre !

Action réussie : Haru leva les bras au ciel et poussa une exclamation de triomphe. Contre toute attention, le premier de la course, c'était lui ! Sa tactique de diversion avait fonctionné, certes ce n'était toujours par fairplay mais avouez que cela a été efficace. Une mine très fière sur le visage et un sans doute qui devait être très énervant collé sur le visage, il tendit la main devant Kikunae, s'appuyant sur lui au passage. Il agita ses longs doigts de bassiste, réclamant son dû. « A-a-allez, la rrrrécompense ! »

Action ratée : Haru leva les bras au ciel et poussa une exclamation de triomphe. Seule soucis : trop tôt. Il relâcha le bouton d'accélération une fraction de seconde trop et Kikunae le doubla. Sans surprise, le japonais était à nouveau vainqueur mais de justesse. Le manque de fairplay de Hary avait été efficace. Affalé sur son ami d'un air absolument défait (mais toujours en ricanant parce qu'il était très amusé par ses petits coups de triche) il prit un air très dramatique. « Qu-que'est-ce que tu vvveux en ré-récompense ? Je sssuis ou-ouvert aux su-suggestions ! »

+ Les jeux-vidéos, c’est comme la musique pour Kikunae. Il a conscience de ses capacités et de ses talents. Ce qui ne veut pas dire qu’il se croit meilleur que tout le monde, loin de là, mais il sait ce qu’il vaut. Plus ou moins, il lui arrive de douter, surtout quand il s’agit de musique. Il a des rêves et des ambitions dans le domaine, pas les plus accessibles et il lui arrive de ne pas avoir la certitude d’y parvenir un jour. Depuis qu’il a terminé ses études, il se contente surtout de donner des cours privés : violon, piano, japonais, tout ce qu’il maîtrise suffisamment pour avoir la prétention d’être capable de pouvoir apprendre quelque chose à quelqu’un. Il ne perd pas de vue son envie d’intégrer un orchestre… Cependant, il faudrait peut-être qu’il s’inscrive au Conservatoire de Tôkyô pour parfaire sa technique et gagner en expérience. C’est en projet. Quand il aura moins peur de l’éventualité d’échouer aux auditions. Il a conscience de ce dont il est capable, ce qui ne veut pas dire que sa perception ne se trouve pas biaisé par moment. Quand il s’agit de jeux-vidéos, Nae le prend davantage à la légère. Il est doué avec une manette dans les mains, mais ce n’est qu’un passe-temps. Sauf s’il se lance dans l’e-sport, néanmoins ce parcours ne fait pas partie de ses ambitions.

- Eh, ce n’est pas ma faute si ta planche ne m’aime pas !

Comme si un morceau de bois peint avec des roulettes pouvait y être pour quoi que ce soit. Kikunae vit à Séoul depuis deux ans maintenant. Dans la vie quotidien il parle coréen sans grandes difficultés, contrairement à ses premiers mois dans la capitale. Son accent est toujours présent, il se fait comprendre malgré tout et il a de moins en moins de mal à comprendre les locuteurs natifs. Même si parfois, il a besoin qu’on lui répète. Toutefois, il y a un domaine auquel il ne se frotte pas beaucoup, trop compliqué, trop imagé : les expressions idiomatiques. Il lui arrive d’en traduire littéralement du japonais, ce qui lui vaut des regards intrigués et confus.

- Je n’ai pas dis ça ! Mais il y a des personnages et des véhicules plus difficiles à manier. Je t’aide à mettre des chances de ton côté, je pourrais faire exprès de te faire perdre ! il lui répond taquin.

Pris par le moment et surtout trop préoccupé par ce qu’il ressent pour Haru, Nae ne se rend pas compte qu’il devient plus loquace. Ce n’est pas si surprenant venant de lui. Vrai loup-solitaire la plupart du temps, quand il se sent à l’aise avec quelqu’un et d’autant plus quand on aborde des sujets qui lui parle, le Japonais devient soudainement bien plus bavard.

- Parce que tu l’es toi peut-être ? Tu crois que je ne t’ai pas vu essayer de me déconcentrer, il plisse le nez dans une moue faussement contrariée.

Pour être tout à fait honnête, Haru n’a pas besoin de faire grand-chose pour distraire le musicien… Il suffit qu’il s’approche un peu trop pour que son coeur s’emballe et que son regard soit irrésistiblement attiré. Difficile de se concentrer sur le circuit dans ces conditions. Pourtant, il remporte encore une victoire haut la main. Dommage, Nae aurait bien donné une récompense à Haru plutôt que le contraire. Du moins, il avait une idée derrière la tête. Aurait-il été capable d’aller jusqu’au bout ? Rien n’est moins sûr. Il a eu beaucoup de chance sur ce coup-là. Déstabilisé de voir Haru prendre la tête de la course et pensant à la récompense qu’il lui avait promis, Nae a perdu ses moyens. Si Haru avait été plus attentif, il aurait gagné. Fidèle à lui-même, le voilà à nouveau complètement affalé sur un pauvre Kikunae qui ne parvient plus à mettre de l’ordre dans ses pensées. Tant pis pour la récompense, il veut juste passer à autre chose avant qu’Haru ne remarque à quel point son coeur bat la chamade.

- R-rien, c’était juste une blague. Tu veux refaire une partie ?

Il butte sur son premier mot, concentré sur le fait qu’Haru est bien trop proche de lui. Ce n’est pas désagréable, c’est… Déstabilisant. Apparemment, ça lui fait fondre les neurones aussi… Sans réfléchir, porté par les battements de son coeur, Nae se redresse sur ses coudes et embrasse furtivement les lèvres de son ami. Kikunae se fige en réalisant ce qu'il fait, et ose à peine regarder Haru, comme s’il attendait juste qu’une quelqu’un sentence lui tombe dessus. Pendant une poignée de secondes, pourtant, il se demande ce qu’il se passerait si son ami lui retournait son attirance. Est-ce que c’est possible ? Une partie de lui le ramène à ce qu’il pense être la réalité, non, c’est impossible. Il va se faire jeter et perdre un ami pour une bêtise. Tout ça parce qu’il n’a pas été fichu de se contrôler, mais… Haru était si proche de lui et ce qu’il ressentait était si agréable. Il n’a pas réfléchi… C’était totalement impulsif. Il n’aurait pas dû...

outfits + Dire que c'était la faute de l'outil et non la faute de celui qui l'utilisait pour expliquer un échec était une chose commune. Entendre Kikunae dire que ses difficultés au skate venaient de la planche de Haru et non des jambes et du sens de l'équilibre du japonais était aussi une chose commune. Haru se contenta donc de lever les yeux au ciel, sa planche était innocente ! Kikunae était tout simplement plus à l'aise lorsque les roues étaient en 3D dans un écran que dans la vraie vie. Et pour le coréen ? Et bien c'était l'inverse. Il était bien plus doué sur son skate (alors que c'était au final bien plus dangereux) que sur la console. Et tout comme son ami, il faisait bien savoir que c'était injuste et rejetait même la faute sur le japonais, criant au sabotage. Haru lâcha un rire franc en entendant son ami râler en retour. Il aimait voir à quel point leurs échanges avaient évolué. Au début, le coréen avait l'impression d'être celui qui faisait toute la conversation. Au fil de leurs rencontres, Kikunae s'était ouvert, il parlait, il râlait, il révélait vraiment toute l'étendue de sa personnalité et Haru le trouvait vraiment attachant. Il était ravi de pouvoir dire qu'ils étaient amis à présent. « M-mais tu p-pourrais pas au-autant te la p-p-péter si tu gaaagnais en tr-trichant. On sssait que tu le f-ffferas pas. » Et il lui tira la langue, Haru était prêt à quand même essayer de se défendre au mieux. Il lança même un challenge, histoire de faire miroiter l'idée qu'il pensait pouvoir gagner.

Ce qui n'arriva pas d'ailleurs, la défaite était cuisante et attendue. Haru feignit l'innocence face aux accusations de son ami. Il posa une main sur son torse, ouvrant la bouche dans un air faussement outré. « Mmoi ? J-ja-jamais. » Quand avait-il tenté de le déconcentrer ? Quand il le bousculait ? Quand il parlait fort et faisait des blagues pour le faire rire ? Non c'était purement de la diffamation. Au second tour, malgré la récompense comme « carotte » pour essayer de gagner, Haru perdit une nouvelle fois. Et malgré le fait que cela soit sans surprise, il s'affala sur Kikunae d'un air défait. La vie était si injuste avec lui... Bon, il vivait de belles choses ces derniers mois, il ne pouvait pas être un as des jeux vidéos en prime. Résigné, il était prêt à répondre à la promesse, Kikunae avait mérité sa récompense.

Il se redressa à peine de sa position affalée sur son ami, grognant à l'idée de jouer une nouvelle partie, laissant Kikunae interpréter si c'était un « oui » ou un « non ». Il le regarda du coin de l’œil alors que le japonais bougeait. En un battement de cils, le visage de son ami était à quelques centimètres de lui sans que Haru ne puisse comprendre. Il n'eut le temps de rien faire, pas même de penser alors qu'un contact indéniable se fît sur ses lèvres. Presque aussi rapidement qu'il s'était rapproché de lui, Kikunae se recula un peu. Assez pour que Haru puisse expirer et reprendre le souffle qu'il n'avait pas eu conscience de retenir. Le coréen mit quelques instants à réaliser ce qui venait de se passer : son ami venait de l'embrasser. Haru était perdu, se demandant comment ils en étaient arrivés là. Est-ce que ses gestes, ses attitudes avaient mené Kikunae à se méprendre ? Lui ne s'était jamais rendu compte que le japonais était attiré par les hommes et encore moins attiré par lui... Il était dans l'incompréhension la plus totale et, évidemment, il eut une pensée pour Yu Jeong, ayant presque une sensation de trahison envers elle après ce baiser volé. C'est en pensant à elle qu'il se recula finalement, mettant un peu de distance entre lui et Kikunae, pour qu'il ne se fasse pas plus d'idées que ce qu'il avait déjà en tête. Il ouvrit la bouche plusieurs fois avant de réussir à parler, son bégaiement à son paroxysme dans ce moment. Ses tics faciaux lui échappaient aussi complètement. « J-j-j-jjjje s-s-sssors a-a-av-avec qu-qu-quelqu'uuun. » Il était vrai que Haru n'avait jamais parlé de Yu Jeong à Kikunae. Il en avait parlé avec peu de personnes, c'était encore si récent. Et puis, il était hétérosexuel, il ne pouvait imaginer être attiré autrement que amicalement par son ami. « D-d-dé-désolé. » De quoi vraiment, il ne saurait pas vraiment le dire. Il n'arrivait pas à comprendre ce qu'il venait de se passer, son amitié pour le japonais lui semblait évidente mais il ne pensait pas que Kikunae ait d'autres sentiments. « P-p-p-pourquoi ? » Lui-même ne comprenait pas cette question mais dans l'immédiat, Haru ne parvenait pas à vocaliser quoique ce soit de ce qui s'agitait dans sa tête.

+ Tout s’est fait naturellement avec Haru… Dès le départ, Nae s’est pris de sympathie pour le musicien, leur passion commune n’étant pas étrangère à cet attachement particulier. Il a toujours le contact plus facile avec une personne ayant l’âme mélomane. Moins solitaire, il accepte les petites conversations… Cette heureuse coïncidence entre eux à donner naissance à une amitié, puis… Kikunae a commencé à se demander si ce n’était que de l’amitié. La présence d’Haru lui était agréable, peut-être trop ? Il n’avait jamais autant cherché la compagnie de quelqu’un avant. La seule exception c’était Ryuu. La personne vers laquelle Nae a l’instinct de se tourner quand ça ne va pas… Le Japonais est comme son cocon sécuritaire, sa « safe-place »… Puis, Haru a eu aussi ce privilège, Kikunae ne rechignait jamais de passer du temps avec lui, parler musique pendant des heures, aller au concert de The Rock-Ets : « juste comme ça, pour les soutenir », mais surtout pour croiser le bassiste. Nae s’est voilé la face un moment ou peut-être qu’il ne réalisait pas l’ampleur de ce qu’il ressentait. Ce n’est pas un sentiment avec lequel il est familier… Heureusement que Ryuu a été là pour lui ouvrir les yeux. Ou peut-être pas… Maintenant qu’est-ce qu’il est censé faire ? Prendre le risque de perdre son ami ? Tenter de lui avouer ce qu’il a sur le cœur ?

- Bien sûûûûûr, ça ne te vas pas du tout de jouer les innocent comme ça.

Lorsque Kikunae accuse Haru de le déstabilisé volontairement, il n’en pense pas un mot. Du moins, il ne lui en tiendrait pas rigueur. Après tout, ce n’est pas désagréable de sentir sa présence tout près et sa chaleur rassurante… Le violoniste n’est pas tactile. Haru ne se rend pas compte de la chance qu’il a. Même Hayden a le droit à son lot de protestation quand il abuse, aux yeux du Japonais. Néanmoins, Nae n’ose pas être proche physiquement d’Haru, par crainte de vendre la mèche sur ce qu’il ressent. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a qu’avec Ryuu qu’il a pu être volontairement câlin, et encore, il reste fidèle à lui-même.

À la seconde où ses lèvres frôlent celle d’Haru, Kikunae regrette son geste. Son cœur s’emballe, ses mains deviennent moites et les pensées qui tourbillonnent dans sa tête s’arrête une seconde pour repartir de plus belle. Il n’est pas spécialement anxieux, par contre, Nae est observateur. Il voit l’expression de son ami changer et son cœur se serre. Au fond de lui, il sait… Le regret est amer. Il se sent stupide. Pourquoi est-ce qu’il a fait ça ? Perdre l’amitié qu’il partageait avec Haru lui fera terriblement mal… Est-ce qu’il va lui en vouloir ? La première phrase qui brise le silence, brise aussi son coeur. Il avait envisagé cette possibilité. Nae s’est laissé porter par l’euphorie du moment. Ils riaient ensemble… Ses sentiments trop longtemps refoulés se sont exprimés malgré lui. Il aimerait ne pas avoir cédé à cette pulsion… Haru n’a pas a être désolé. Il n’a rien fait de mal. Kikunae a été trop naïf, du moins c’est ce qu’il pense. Pendant un instant, il s’est dit que peut-être…  Le Japonais fuit le regard de son ami. Pourquoi ? Si seulement il avait une réponse à lui donner. Il ne sait pas quoi lui dire. Il aimerait avoir la capacité de disparaître sur commande. Déjà, ça éviterait qu’on vienne lui parler quand il n’a aucune envie d’être sociable, soit souvent, et ça pourrait le tirer de ce type de situation délicate…

- J’espère que tu es heureux avec cette personne alors.

C’est tout ce qu’il arrive à lui dire. Est-ce qu’il est jaloux ? Bien évidemment, il le sent et c’est un sentiment humain. Cependant, il est incapable de souhaiter quelque chose de mal à son ami, alors qu’il a toujours été prévenant et adorable avec lui.

outfits + Par son métier, Haru savait que certaines situations pouvaient tourner du tout au tout en une fraction de seconde. Ici, il n'y avait pas de drame, pas d'accident, pas d'ambulance à appeler en urgence, heureusement. Pour autant, il y avait un gouffre énorme entre les rires et les plaisanteries qu'ils se faisaient à peine une minute auparavant et le froid soudain que Haru ressentait. Certains hommes seraient sans doute choqués ou écœurés par le fait d'être embrassés par un autre homme. Ce n'était pas le cas de Haru, enfin, il n'avait pas l'impression que ce soit le cas. Il était surtout interpellé par le fait que son ami ait pu nourrir ce genre de désir ou de sentiment à son encontre. À aucun moment il n'aurait pensé que c'était le cas.

Haru était souvent rendu muet mais la majorité du temps, c'était par choix. Là, ce n'était pas le cas. Il ne savait pas quoi dire, ni ne savait quoi faire. Il se demandait si c'était des choses qu'il avait pu dire ou faire qui avait mené Kikunae à voir une ouverture avec lui. Et aussi, que dire ou quoi faire pour ne pas lui faire de mal, ne pas lui faire de peine et aussi ne pas abimer leur amitié. Sa première réaction et surtout sa première pensée fût Yu Jeong. Commençant à bien connaître le japonais, Haru remarqua bien l'éclat particulier de son regard. Même s'il ne savait pas complètement l'interpréter, il lui semblait évident qu'il lui avait fait de la peine. Haru ignorait si c'était parce qu'il avait déjà quelqu'un dans sa vie ou parce qu'il ne lui en avait encore jamais parlé que Kikunae était blessé. Au final, c'était sans doute le mélange des deux, réfléchis un peu Haru. « Ou-oui e-elle est vvvraiment ch-chouette. » Parce qu'il n'allait pas lui mentir pour autant, ce serait pire selon lui. Pour autant, il n'allait pas non plus se lancer dans un long discours pour lui expliquer à quel point Yu Jeong était une femme géniale et unique. « Ca n-nnne fait p-p-pas sssi l-lon-longtemps qu-qu'on est en-ensemble. C'est p-p-pour ça que jjje n-nnn'en ai p-pas encore p-pa-parlé. » Et était-ce bien le moment d'en parler alors qu'il rejetait les sentiments ou, du moins, la proposition de Kikunae. « Mmmais t-toi aussi t-t-t'es v-vvvraiment chou-chouette Nae. » Vraiment. Mais son choix de mots n'était-il pas un peu malheureux ?

Pour une rare fois, en plus de ne pas savoir quoi dire, Haru ne savait pas quoi faire. Devait-il se lever et partir ? Devait-il réconforter Kikunae ? Mais s'il le prenait dans ses bras, c'était un message contraire à son rejet, non ? Il avait l'impression que l'amitié construite au fil des mois avec le japonais était en train de s'échapper sous leurs pieds. « Jjje s-suis dé-désolé Nae. »