C’est la panique qui te gagne lorsque tu reçois ce message t’annonçant le décès du père de ton meilleur ami. Tu sais à quel point il était important pour lui et tu te précipites ainsi à ses côtés pour les soutenir lui et sa sœur jumelle, mais surtout lui, on ne va pas se mentir. Quand bien même clairement, tu aurais préféré que Minhun n’ait pas à traverser cette épreuve, au fond de toi, tel l’égoïste que tu es, tu ne peux t’empêcher d’y voir là une opportunité pour te rapprocher encore plus de lui. Tes sentiments à son égard ont une mauvaise influence sur toi, d’autant que tu sais pertinemment que c’est en vain que tu les nourris malgré toi. Minhun n’est pas comme ça, c’est impossible d’envisager plus avec lui et pourtant, t’as beau essayer de repousser ce que tu ressens, d’enchainer les conquêtes pour ne pas penser à lui, chaque fois que tu le vois, que tu passes du temps en sa compagnie, tes sentiments te reviennent comme un boomerang, te reviennent encore plus fort. Tu essaies tant bien que mal de mettre de la distance entre toi et ce que tu ressens, tu te promets de ne jamais franchir la limite. Promesse mise à mal, suite à de nombreuses disputes entre vous. Tu ne supportes pas ce qu’il fait, qu’il vende son corps comme ça, plus par jalousie que à cause de l’acte en lui-même. Tu aimerais lui faire entendre raison, lui faire cesser cette activité, et plus vous vous disputez à ce sujet, plus un fossé se creuse entre vous. Ça te bouffe, tu ne sais plus quoi faire, ni pour l’aider à ne pas encore plus sombrer, ni pour ne pas totalement le perdre. Contre toute attente, Minhun est celui de vous deux qui refait un pas vers l’autre, ça te fait plaisir et tu ne t’attendais pas à ce qu’il se montre si tactile avec toi. Tu as bien conscience qu’il n’est pas sobre sur tous les plans, et quand il te fait clairement du rendre-dedans, d’une part, tu comprends que tu t’es trompé sur son compte et d’une autre part, tu as bien du mal à résister à la tentation. Il t’offre enfin ce que tu désires depuis si longtemps. Et le désir prend le dessus sur ta raison, tu lui cèdes. Une seule nuit dans ses bras ne peut pas faire de mal, n’est-ce pas ? Au matin, tu sens nul, tu te sens sale d’avoir craquer. Bien sûr que tu as aimé être avec lui, mais tu regrettes d’avoir cédé à la facilité, car tu sais que sans l’emprise de ce qu’il a pris, il n’aurait probablement jamais eu ces gestes envers toi. Tu regrettes et pourtant, tu lui cèdes, encore et encore, totalement incapable de lui résister, quand bien même tu tentes de le repousser. Certes, tu aimerais être avec lui, mais pas comme ça, pas en lui servant de roue de secours que lorsqu’il a besoin d’assouvir ses envies charnelles qu’il ne peut pas avoir avec celui sur lequel il a jeté son dévolu. Parce que oui, Minhun est attiré par un autre que toi et cet autre, ce Levi, quand bien même tu ne le connais pas personnellement -et que tu n’as absolument pas envie de connaître-, tu le détestes profondément. Jaloux, oui, tu es jaloux de lui et tu le hais pour ça. Tu le hais d’avoir son attention en un claquement de doigt alors qu’ils se connaissent à peine, quand toi qui est à ses côtés depuis quasi toujours, tu galères, tu rames pour qu’il t’accorde un minimum d’attention. Tu le hais de te rendre comme ça, aussi froid, aussi désagréable avec lui, quand clairement, il ne t’a rien fait directement. Mais c’est plus fort que toi, tu ne peux pas t’empêcher d’être un pur connard à son égard. Il fait ressortir le pire de toi, cette pire partie de toi que tu avais réussi à mettre derrière toi et que Minhun ne connait pas.


Tu n’es pas un enfant de cœur, loin de là, mais tu as été pire que ça dans le passé, ce passé que ton meilleur ami ne connait pas. Tu ne t’es jamais exprimé sur les réelles raisons qui t’ont amenée à changer d’établissement scolaire, à redoubler une année, pour ainsi te retrouver à être dans la même classe que lui. Tu regrettes ce que tu as fait plus jeune, tu regrettes ton comportement, tu regrettes tes actes, mais tu ne regrettes absolument pas que cela t’a conduit à faire la rencontre de Minhun. Avant ce changement, avant cette rencontre, tu étais ce qu’on appelle un bully, oui tu as harcelé les autres, riant de leur malheur à leur dépends. Avec le recul tu cherchais juste très maladroitement l’attention que tu n’avais pas à la maison. Ça t’a amené à être cet être ignoble qui s’en prenait aux plus faibles sans une once de remords. Tu passais ton temps à enchainer les conneries, sans compter les nombreuses bagarres que tu déclenchais sans aucune raison valable. Te changer d’école, te faire refaire une année en te plaçant donc avec des enfants plus jeunes que toi, n’était à priori peut-être pas la meilleure des idées, c’était mettre le loup directement dans la bergerie. On te déplacer pour te mettre avec toute une classe qui aurait pu être une cible de choix pour toi. Avoir un an de plus que ces gamins c’était être en position de force. Pourtant, ça été l’inverse. Te retrouver avec d’autres ayant tous un an de moins que toi, ça ta remis les pendules à l’heure, enfin, en parti. Ça ne t’a pas changé du tout au tout, mais ça a créé un sentiment de honte qui t’a calmé sur l’envie de t’en prendre à plus faible que toi. Déjà, t’étais le petit nouveau, l’étranger, quand tous les autres se connaissaient déjà, avait créé des amitiés. T’intégrer c’était pas gagné. Sans compter sur ta rencontre avec Minhun. Ça a de suite cliqué entre vous deux et êtes devenus rapidement inséparables. Avoir un véritable ami, quelqu’un qui t’apprécie vraiment, qui fait réellement attention à toi, ça t’a aidé à mieux te comporter. Très vite, plutôt que de faire du mal aux autres, ton meilleur ami t’a donné envie de le protéger, de prendre soin de lui. Tu étais l’aîné de votre duo, c’était à toi de faire attention à lui. Cela n’empêchait nullement les bêtises, ni les bagarres, vous vous ressemblez sur certains points et vous entrainiez mutuellement dans les conneries. Mais à l’époque, rien d’aussi grave que ce que tu as pu faire, dans ton ancienne école. A ce moment là tu étais très loin d’imaginer que cette relation forte qu’il y avait entre vous, allait t’amener à franchir la mince ligne qui sépare l’amitié de l’amour et que ça te ramènerait à cette mauvaise partie de toi.


Tu l’aimes, tu le détestes. Tu détestes le fait de l’aimer. Tu TE détestes de le désirer. Quand tu as fini par comprendre ce que tu ressentais pour lui, t’as plongé dans des travers que tu aurais préféré éviter. Tu as utilisé l’alcool puis la drogue pour essayer d’oublier tes sentiments, pour tenter de les annihiler, en vain. Tu as commencé rapidement à aller de bras en bras et surtout de draps en draps, pour échapper à cette douleur que tu ressentais au plus profond de toi, d’être tombé amoureux de la seule personne que tu ne pourras jamais avoir. T’as obtenu ton diplôme par tu ne sais quel miracle, mais avec aucune ambition pour la suite. Tu ne savais que faire de ta vie, tu étais en train de totalement sombrer, tu n’avais plus goût à rien, te lever le matin était devenu une véritable corvée. Tu ne sais plus trop ni comment, ni pourquoi, ni grâce à qui, tu as fini par décider de t’enrôler, d’accomplir ton service militaire et ce avant d’en arriver à commettre l’irréparable -idée qui t’a traversé l’esprit une paire de fois déjà-. Tu as tout juste 21 ans quand tu pars accomplir ton devoir de citoyen. Probablement la meilleure décision de ta vie, ça t’a littéralement sauvé la vie. Déjà, ça t’a sevré de la drogue. Les débuts ont été difficiles, mais tu n’avais pas le choix, impossible de craquer en étant éloigné de tout, les six premières semaines. C’est durant cette période que tu t’es découvert une passion pour la musique et plus particulièrement pour la guitare, y’avait un artiste avec toi. Il a perçu ta détresse et t’as soutenu, te faisant découvrir les joies et surtout les vertus que peut avoir la musique sur l’être humain. Dès ta sortie de l’armée, tu t’es plongé corps et âme dans l’apprentissage de cet instrument. Tu es autodidacte, t’avais clairement pas les moyens de te payer des cours, mais plus le temps passait et plus tu savais que tu avais envie d’en faire ton métier. Ce passage par l’armée t’a aidé à t’améliorer, à te donner une certaine discipline que tu n’avais pas, à te redonner un peu confiance en toi. A te donner enfin un but. Reprendre des études dans la musique. Seulement, les études, ça coûte cher et avant de pouvoir te lancer là-dedans, tu vas avoir besoin de mettre de l’argent de côté. Pour cela, tu prends et enchaine de nombreux petits boulots pendant plusieurs années. T’es pas devenu un saint non plus grâce à l’armée, t’as ton toujours ton foutu caractère de merde, impulsif, ta trop grande gueule parfois, et il est difficile pour toi, de garder un même emploi sur du long terme, tu finis toujours en conflit avec quelqu’un, client, collègue, patron. Bosser majoritairement dans le milieu de la nuit te fait aussi rapidement retomber dans quelques-uns de tes travers, l’alcool notamment. Tu ne replonges pas aussi fort que tu as pu l’être dans le passé, mais au revoir l’abstinence et la sobriété.


Pour le bien de tes études, que tu as enfin pu commencer l’année dernière, tu essaies d’éviter de te foutre dans la merde autant que tu le peux. T’as enfin réussi à garder cet emploi de serveur à temps partiel qui te permet de continuer à payer tes études, et de survivre comme tu le peux. T’essaies de prendre sur toi pour ne pas faire de vague quand quelque chose te soule, parce que même si tu te fiches du job, t’en as besoin. A côté, tu donnes aussi des cours de guitare ici et là, ça met un peu de beurre dans les épinards de temps en temps. Mais surtout, tu te tiens éloigné le plus possible de la vie universitaire en dehors des heures de cours et de ce que tu as à faire pour tes cours. Histoire de ne pas t’attirer plus de problème que nécessaire. Tu ne peux pas toujours éviter toutes les soirées, mais déjà, tu ne t’impliques dans aucune confrérie, aucun club, c’est préférable pour tout le monde, pour toi, comme pour les autres. Tu te connais que trop bien. Surtout en ce moment. La jalousie qui te consume par rapport à Minhun et ce Levi, ça te fait partir en vrille pour un rien. T’es sur les nerfs constamment, même quand ils ne sont pas dans ton champ de vision. Alors autant épargner aux autres ta mauvaise humeur, c’est déjà assez compliqué à la gérer pour toi-même. Tu ne sais pas trop où tout ça va te mener, t’as l’impression que plus tu t’enfonces dans cette jalousie, plus tu te perds et tu le perds. Pourtant, tu restes dans la plus parfaite incapacité à prendre du recul, et surtout à ne pas lui céder, dès qu’il revient vers toi. Tu te sens nul, utilisé, rien de plus qu’une bouée de secours, et pourtant tu restes là, tu t’accroches à ce maigre espoir, que quand bien même tu n’es qu’une bouée de secours, il semble avoir besoin de toi, alors tu restes là pour lui, avec aucune volonté de lui résister, quand tu aimerais être capable de parfois lui dire non, pour ton propre bien. Mais Minhun passera toujours avant tout le monde, avant toi-même.