Quel est le point commun entre Guwon et un guet-apens ? Les deux noms commencent par la même lettre, certes mais la réponse n’est pas aussi superficielle, ni si évidente à première vue. L’origine de cette question repose sur un simple appel : celui de sa mère. Pendant l’échange téléphonique, il entend du bruit derrière lui. Il imagine qu’elle est encore au travail, une fois de plus. Parfois, il aimerait que sa mère ne travaille pas aussi tard le soir. Elle a des employés à sous-exploiter, elle ne devrait pas avoir honte de les utiliser à sa sauce. Pour autant, la requête permet au garçon de relativiser : il est chargé d’acheter quelques desserts. Le bon fils à sa maman ne tarde pas trop à suivre cette quête. Un gamer impatient n’aurait pas honte de délaisser cette quête annexe pour accomplir des missions plus importantes mais il n’a jamais su lui dire non. Il comprend l’envie soudaine de manger du sucré. Il regrette seulement d’écourter cette prestation hebdomadaire. Ses spectateurs habitués sont un peu surpris de voir le chanteur masqué s’envoler si rapidement ce soir. Guwon presse le pas pour s’arrêter dans une supérette, dans l’espoir de trouver les gourmandises préférées de sa mère. Ce n’est pas forcément évident vu l’heure et il n’a pas non plus envie de faire plusieurs magasins, surtout qu’il est chargé avec son matériel de chanteur ambulant. Il est confiant sur son choix, ignorant que c’est lui qui va finir dévoré tout cru.

Arrivé sur les lieux du crime, le piège se referme sur lui quand il met sa main sur la poignée de la porte. Il ignore ce qui l’attend, même quand il repère une paire de chaussures inconnue à l’entrée. Sa mère a peut-être fait les magasins dernièrement même si le style est bien différent de ce qu’elle porte d’habitude. Il tilte un peu, pose ses affaires avant de lâcher. “ Mam’, c’est moi. “ Avec un gâteau en moins dans la boîte, car oui, il a cédé pendant le trajet. Que voulez-vous ? Chanter lui avait creusé l’appétit. Un sourire se dessine sur ses lèvres quand il entend l’agitation venant du salon. Elle doit avoir des invités, d’où sa demande tardive. Sûrement les voisins, comme d’habitude… Mais apparemment, sa mère et son frère ont décidé de se lancer dans un repas de famille sans même l’avoir confié. Ses sourcils se froncent et la question se pose de nouveau. Quel est le point commun entre Guwon et guet-apens ? Eh bien, ils sont tous les deux issus d’une mère. Celle-ci est bien entremetteuse. Mais pas forcément entre cette charmante demoiselle, dont la présence est inattendue, et lui. Son regard est fixé sur elle… Oh, il a eu l’occasion de voir son visage sur des affiches ou bien sur internet. Mais en vrai, de ses propres yeux, c’est tellement différent. La nostalgie fait battre son cœur un peu plus fort et se serre en même temps quand il voit son grand frère se tenir à ses côtés. C’est le moment de se la jouer cool. De l’eau a coulé sous les ponts. “ Je ne savais pas que tu recevais du monde ce soir. “ Il regarde finalement la boîte contenant les gâteaux avant de l’observer à nouveau, comme par instinct. “ J’ai bien fait de prendre du chocolat. “

ootd   —  La douceur de la nuit, la chaleur d’une maison et les rires des siens – voilà le réconfort qu’elle était venue chercher en retrouvant sa seconde famille de cœur. Assise en tailleur sur le canapé et sirotant sa canette de bière à l’aide d’une paille, l’amertume a un arrière-goût particulièrement sucré ce soir. La demoiselle est contente de les retrouver, comme à chaque fois, mais c’est la première fois qu’elle reste aussi longtemps – la dernière fois remonte à loin, au temps où il n’y avait qu’une ou deux qui les séparait. Rien n’a changé, du moins, rien depuis que c’est toujours la même personne qui manque à l’appel. Son expression s’assombrit quand elle repense à lui, quel imbécile; elle ne comprend pas pourquoi cela semble aussi dur pour lui de simplement lui dire qu'il ne veut pas la revoir, sale traître. Parce que sa morosité ne passe pas inaperçu, elle relève la tête quand Wonbin appelle son prénom, le visage inquiet penché sur le sien, la main posée contre son front. « Oh, ce n’est rien Oppa, c’est simplement la fatigue qui retombe » répond-elle d’une voix flûtée, avant de réaliser la soudaine proximité de celui qu’elle n’a jamais cessé de regarder. Clignant des paupières, elle est alors prise d’un premier hoquet, suivi d’un deuxième, sans qu’elle puisse s’arrêter. Elle porte sa main libre contre sa bouche, embarrassée, espérant étouffer cette disgracieuse symphonie dont elle maîtrisait ni le rythme, ni la mélodie. Elle n’a pas besoin de rajouter un mot, encore fallait-il qu’elle réussisse, pour qu’il se lève et parte en direction de la cuisine pour lui chercher un verre d’eau. L’actrice pose sa canette sur la table basse et le suit du regard – le revoir reste fascinant. Avant qu’il arrive, elle se lève pour recevoir le précieux verre, elle entend une porte s’ouvrir mais n’y prête pas réellement attention, pensant que c’est sa seconde maman. « Merci, … hic. Beaucoup » bafouille-t-elle en grimaçant, gênée en l’entendant glousser doucement et ajouter qu’elle devrait freiner un peu avec la boisson. À ses yeux, elle reste un enfant alors que plus que quiconque, elle a cherché à grandir plus vite pour se défaire de cette étiquette. Lui lançant un regard noir (ou presque), elle avale d’une traite son verre d’eau – mais manque de s’étouffer quand une voix familière se fait entendre.

Fixant la silhouette qui venait de faire son apparition, elle en oublie de respirer qu’elle est prise d’une petite quinte de toux. Agrippant le bras du frère ainé du dernier invité afin de ne pas tomber, elle se met à rire. « Oppa, je crois que je devrais vraiment arrêter de boire » murmure-t-elle entre deux éclats de rire, la boisson devait vraiment lui être monté à la tête pour qu’apparaisse, comme par magie, un absent. Il était particulièrement difficile à rencontrer, pire que la célébrité qu’elle était – elle aurait pu porter sa disparition au commissariat s’il ne lui donnait pas, des nouvelles (et encore, c’était plus des réponses, courtes, plus qu’autre chose) tous les 31 de chaque mois. « Je crois, qu’il y a un fantôme ici qui ressemble comme deux gouttes d'eau à cet imbécile », elle marque un silence avant de continuer « le chocolat… c’est pour me soudoyer ? » Elle ne voulait pas encore suivre la grande faucheuse, pas avant d’avoir tué en premier celui dont elle portait les traits.

Il repère un indice mais n’y prête pas assez attention pour pouvoir faire demi-tour. Guwon se contente de poser son sac de rangement dans un recoin avant d’avancer dans le couloir. Il n’est pas question de laisser un indice à son tour. Sa mère est plutôt douée pour mener l’enquête et si Guwon tient bien à quelque chose dans sa vie, c’est sa street credibility. Il ne faudrait pas qu’il soit reconnu dans la rue en train de chanter des musiques mielleuses pour attendrir le cœur des jeunes femmes. Un comble quand la seule qui avait su l’intéresser - et ce, pendant des années - n’a jamais réussi à fondre en sa présence. Peut-être qu’il devrait s’entraîner plus dur alors que sa popularité auprès des autres étudiantes n’est clairement pas dans les choux.

Rejoignant finalement le salon, il a presque la sensation d’halluciner quand il aperçoit cette fameuse jeune femme, assise en tailleurs à quelques mètres de lui. Pourquoi elle se trouve ici ? Il est arrivé chez sa mère beaucoup trop vite et elle n’a pas encore eu le temps de s’échapper ? La confusion se lit dans son regard. Compliqué de lâcher ses beaux yeux - bien que légèrement rouges - alors qu’il arrive comme un petit cheveu sur la soupe. Mais, pas question de l’avouer, il préfère se la jouer cool, comme si ça ne faisait pas une éternité qu’il avait décidé de snober son amie d’enfance. Dans tous les cas, ses proches ne vont pas le questionner à ce sujet devant la principale concernée. La famille, c’est censé être loyal et être de votre côté… Pas vrai ? Pour autant, ce sentiment de trahison revient à la surface quand il la voit agripper le bras de son frère aîné. C’est étonnant, comment certaines choses ne sont prêtes à changer, même avec les années. Constat désolant qu’il détermine froidement quand il parle finalement à sa mère, une bouée de sauvetage quand les restes de son cœur brisé se serrent. “ Du monde ? Enfin Guwon, Taehee est une membre de la famille. “ Cet idiot surréagit quand ses yeux s’écarquillent légèrement. Elle voit bien que son fils cadet ne la fréquente plus ? Alors pourquoi cette réflexion ? A t-il raté un épisode ? Son instinct l’invite à chercher un nouvel indice sur la main gauche de son ancienne camarade. Plus précisément son annulaire gauche. C’est une réaction excessive et il mérite amplement de se faire traiter d’imbécile. Pour autant, Guwon prend légèrement la mouche et se défend aussitôt de ce surnom ridicule. “ Quand on ne tient pas l’alcool, on évite de trop boire. Même un imbécile le sait. “ Des salutations qui leur sont propres, bien évidemment. “ Pourquoi j’aurais besoin de te soudoyer ? “ Terrible erreur de poser une telle question en son état. “ Un coup du sort. “ Comme cette malchance de la croiser au domicile de sa mère. D’ailleurs, cette dernière décide de tirer son dernier vers elle pour l’obliger à s’asseoir à côté d’elle. “ Allez, viens boire un verre avec nous. “ Celle-ci semble plus heureuse de voir ses trois enfants autour de la même table. Pour autant, Guwon fronce les sourcils. “ Tu aurais dû le proposer avant. Vous avez commencé sans moi… Je pense que je ferais mieux de partir. J’ai déjà ma part de gâteau sur le trajet en plus. “ Sa mère le juge du regard et demande à l’assemblée. “ Qui se charge de lui tirer les oreilles ? “  

ootd   —  Même cette matérialisation de son esprit, trop inhibé par l’alcool, ne pouvait pas s’empêcher de le rendre aussi irritant que le vrai ; était-ce vraiment trop demander qu’il puisse esquisser un sourire et sembler heureux de la voir ? Apparemment, il fallait qu’il tire la tronche et qu’il commence déjà à rechigner. C’est là le contraste entre la réalité et les dramas qu’elle tourne, les male leads baignés dans un halo de lumière soudainement souriant et bienveillant, inquiet et doux, face à une héroïne au cœur brisé, ça n’existe pas. C’est de la poudre à perlimpinpin. L’alcool est traitre et anti-romance. Elle voulait tant le revoir, et la seule apparition qui lui était permise, était cet énergumène à l’expression refrognée et peu agréable. Toutefois, il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre qu’elle n’était pas la seule à voir ce fantôme dans ce salon. Un éclair de lucidité. Oh !

Peut-être par peur d’être déçue, elle n’avait jamais essayé de s’imaginer leur retrouvaille (enfin presque) - mais c’est la douche froide. Il ne semblait pas si ravi de la revoir, les pieds en direction de la sortie, en un claquement de doigt et il pouvait disparaître comme il était apparu. Elle a ce petit pincement dans la poitrine, mais elle le refoule (par fierté).  L’actrice fronce les sourcils, non pas dans l’espoir que sa vision lui joue des tours et qu’il se révèlerait souriant, mais à cause de quatre syllabes. Si elle était une imbécile, qu’en était-il de lui ? Plus qu’un crétin, un sombre lâche. « Je n’ai pas de leçon à recevoir de la part d’un abru- », son regard glisse en direction de sa petite maman de cœur et elle se racle la gorge discrètement, avant de se corriger, « de toi ». En même temps qu’elle repose son verre d’eau sur la table basse, elle se rassoit au fond du canapé après avoir manqué de glisser. « J’ignore, c’est à toi de me le dire » rétorque-t-elle en haussant les épaules avec dédain – après tout, c’est lui qui semblait la fuir sans qu’elle en connaisse la raison. Elle essaie de jouer la carte de l’ignorance, tout comme lui mais il lui est difficile, dans cet état, de faire la comédie comme elle a l’habitude de le faire. « Et comme par hasard, mes préférés » ne pouvait-elle s’empêcher de relever avec une petite moue, ne touchant pas aux chocolats posés devant elle. Sa tristesse n’était pas si visible, car l’ainé du garçon qui venait de faire éruption et sa mère continuait comme si de rien n’était. « Je suis volontaire », elle bondit presque du sofa, « il mériterait bien plus ! »

Pas évident de garder la face quand elle est dans les parages. Ce n’est plus comme avant entre eux, ce n’est peut-être plus tout court. Des témoins sont présents et il sait bien qu’il a commis plus d’une erreur avec la jeune femme. C’est aussi pour cette raison qu’il a conscience de ne pas être assez bien pour elle. Après tout, il n’est qu’un imbécile tandis que seul le succès rime parfaitement avec son quotidien. Souffre-t-il d’un complexe d’infériorité ? Non, à choisir, il aurait préféré. Il fronce les sourcils. Il ne gagnera pas la manche et les incompréhensions ne vont pas tarder à s’enchaîner. Les mots doux ne sont déjà pas de la partie. Les retrouvailles ne sont pas évidentes pour les deux camps, surtout s’ils restent fermement sur leur position. “ Parce que tu attends quelque chose d’un ab- “ Attention, Guwon, les témoins peuvent devenir les alliés de la demoiselle. “ De moi ? “ Pourquoi il joue au malin ? Au plus con ? Le destin l’a empêché de déclarer sa flamme. Maintenant, il est trop tard pour évoquer ces sentiments d’un ancien temps, pas vrai ? Néanmoins, ses plaintes ont tendance à l’attendrir, un peu comme quand ils étaient mômes. Guwon esquisse un petit sourire quand il la voit regarder les chocolats en faisant la moue. “ Tous les chocolats sont tes préférés. “ Sa remarque est-elle aussi stupide aux yeux de la jeune femme ? Qu’elle serait encore plus belle que dans ses rêves, si elle n’avait pas un coup dans le nez. Non, il ne peut pas penser ainsi. Il faut fuir mais c’est sans compter sur sa mère qui continue de lui mettre des bâtons dans les roues. Pire, elle réclame qu'on lui roue de coups. La vie n’épargne personne. Il grimace. “ Quoi ? “ Guwon écarquille les yeux et met ses mains en évidence. “ C’est bon. C’est bon, je m'assois. “ La punition était bien pour avoir décliné l’invitation ou était-elle pour le grignotage ni vu ni connu ? Dans ce deuxième cas, le garçon est loin d’être sain et sauf. Il s’installe à côté de sa mère, surveille du coin de l’oeil si le démon est dans les parages. Il craint pour ses oreilles, il craint pour sa vie. “ Du coup, c’était quoi le sujet de conversation avant que je débarque ? Vous pouvez continuer, hein. “ Voilà une bonne idée pour rester discret, tout en prenant une bière au passage. Il en a besoin de se donner du courage, réalisant qu’il va devoir se tenir face à elle. Quelque part, il se demande pourquoi son frère et Taehee ont trouvé bon de s’asseoir devant sa mère, comme un charmant petit couple. Pestant intérieurement, il ne fait pas attention et renverse une partie de sa bière à côté du verre. " Fais attention petit frère ! "