RENVA ✧ bleu pétrole
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RENVA ✧ bleu pétrole | Mar 7 Juil 2015 - 19:15 Citer EditerSupprimer
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REEVA & RENZO
save your happiness for tomorrow, today we'll drown in your tears ✻✻✻ Rivael est morte.
D’un coup sec et limpide, ça frappe et entortille. Ça troue les intestins – foutue inquiétude. Foutue réalité, cette pute qui n’apporte jamais rien qu’une poignée de poussière. De celle qui ne s’évapore pas, celle qui colle aux vêtements, colle aux mémoires. Cette poussière qui est synonyme de mort, qui perturbe les têtes et rougit les yeux. Mais ses yeux restent secs. Secs et noirs. Rien ne les perturbe, alors même que son corps est tendu. Son visage, lui, est toujours impassible, rien ne le perturbe. Rivael est morte. Ses dents grincent : non, rien ne le perturbe. Depuis quelques jours que l’annonce est tombée, glaciale et dérangeante. Depuis quelques jours qu’il garde les épaules droites, parce que c’est son rôle, parce que c’est de sa faute. Il avale sa salive et regarde à sa droite, l’italienne qui avale également sa propre culpabilité. C’est de leur faute. Devant eux, le portail immense et sinistre s’ouvre, tandis qu’un domestique vint à leur rencontre. « Maitresse Reeva et Maître Renzo. » salue le domestique, s’attirant l’habituel grognement de la part de Reeva qui trouve la différence de statut dégradant. Son côté Hermione Granger amuse Renzo mais ce soir, il n’est pas d’humeur à la taquiner. Le chemin jusqu’à la maison est long et silencieux mais c’est un silence tendu. Reeva et Renzo savent parfaitement ce qui les attend à l’intérieur. Le domestique ouvre les lourdes portes en bois tout en s’écartant pour les laisser passer, Renzo ne prend pas la peine de le remercier. Il n’est pas d’humeur aux remerciements. Sa sœur et lui marchent à la même hauteur, s’avançant silencieusement vers l’abattoir. Le nord-coréen n’attend pas que le domestique vienne leur ouvrir la porte du bureau de Père, il l’ouvre violemment sans même s’en rendre compte. Père non plus ne s’en est pas rendu compte. Immobile devant la fenêtre, les mains dans son dos. Pas de regard dans leur direction, pas de paroles, uniquement un silence de mort. La porte se ferme derrière eux. Le silence s’éternise et s’éternise, faisant grimper la tension. Et puis soudainement, Père soupire et se tourne vers eux, avec une lenteur lancinante. Malgré son âge, son aura n’a toujours pas changé : menaçante et palpable. Limite mortelle. Renzo baisse les yeux, sous le regard intense, fixant le tapis persan sur lequel ils se tiennent debout. Père avance de quelques pas dans leur direction. « Rivael est morte. » Ça sonne comme une accusation. Il est certain d’avoir entendu « à cause de vous » mais il n’est pas sûr. Les mots tournent pourtant en boucle dans sa tête, encore et encore ; la culpabilité du grand-frère qui n’a pas pris soin de sa petite-sœur. Et sans les avertir de quoi que ce soit, Père assène une violente gifle à ses deux enfants, chacun à leur tour. « Rivael est morte. » Cette fois-ci, le tremblement s’accroche dans la voix de Père. Le chagrin aussi. Et la colère. Et la douleur. La douleur. La douleur. Sa fille est décédée. Et le châtiment est mérité. Tout est de leur faute. Tout, le commerce illégal, les négociations ratées, le décès de Rivael… Tout. Le sang couvrait déjà leurs mains mais à présent, c’est celui de Rivael qui les tâche complètement. Renzo prolonge le silence de mort, capable seulement d’écouter les mots accusateurs qui s’égrènent dans sa tête.
✻✻✻
D’un coup sec et limpide, ça frappe et entortille. Ça troue les intestins – foutue inquiétude. Foutue réalité, cette pute qui n’apporte jamais rien qu’une poignée de poussière. De celle qui ne s’évapore pas, celle qui colle aux vêtements, colle aux mémoires. Cette poussière qui est synonyme de mort, qui perturbe les têtes et rougit les yeux. Mais ses yeux restent secs. Secs et noirs. Rien ne les perturbe, alors même que son corps est tendu. Son visage, lui, est toujours impassible, rien ne le perturbe. Rivael est morte. Ses dents grincent : non, rien ne le perturbe. Depuis quelques jours que l’annonce est tombée, glaciale et dérangeante. Depuis quelques jours qu’il garde les épaules droites, parce que c’est son rôle, parce que c’est de sa faute. Il avale sa salive et regarde à sa droite, l’italienne qui avale également sa propre culpabilité. C’est de leur faute. Devant eux, le portail immense et sinistre s’ouvre, tandis qu’un domestique vint à leur rencontre. « Maitresse Reeva et Maître Renzo. » salue le domestique, s’attirant l’habituel grognement de la part de Reeva qui trouve la différence de statut dégradant. Son côté Hermione Granger amuse Renzo mais ce soir, il n’est pas d’humeur à la taquiner. Le chemin jusqu’à la maison est long et silencieux mais c’est un silence tendu. Reeva et Renzo savent parfaitement ce qui les attend à l’intérieur. Le domestique ouvre les lourdes portes en bois tout en s’écartant pour les laisser passer, Renzo ne prend pas la peine de le remercier. Il n’est pas d’humeur aux remerciements. Sa sœur et lui marchent à la même hauteur, s’avançant silencieusement vers l’abattoir. Le nord-coréen n’attend pas que le domestique vienne leur ouvrir la porte du bureau de Père, il l’ouvre violemment sans même s’en rendre compte. Père non plus ne s’en est pas rendu compte. Immobile devant la fenêtre, les mains dans son dos. Pas de regard dans leur direction, pas de paroles, uniquement un silence de mort. La porte se ferme derrière eux. Le silence s’éternise et s’éternise, faisant grimper la tension. Et puis soudainement, Père soupire et se tourne vers eux, avec une lenteur lancinante. Malgré son âge, son aura n’a toujours pas changé : menaçante et palpable. Limite mortelle. Renzo baisse les yeux, sous le regard intense, fixant le tapis persan sur lequel ils se tiennent debout. Père avance de quelques pas dans leur direction. « Rivael est morte. » Ça sonne comme une accusation. Il est certain d’avoir entendu « à cause de vous » mais il n’est pas sûr. Les mots tournent pourtant en boucle dans sa tête, encore et encore ; la culpabilité du grand-frère qui n’a pas pris soin de sa petite-sœur. Et sans les avertir de quoi que ce soit, Père assène une violente gifle à ses deux enfants, chacun à leur tour. « Rivael est morte. » Cette fois-ci, le tremblement s’accroche dans la voix de Père. Le chagrin aussi. Et la colère. Et la douleur. La douleur. La douleur. Sa fille est décédée. Et le châtiment est mérité. Tout est de leur faute. Tout, le commerce illégal, les négociations ratées, le décès de Rivael… Tout. Le sang couvrait déjà leurs mains mais à présent, c’est celui de Rivael qui les tâche complètement. Renzo prolonge le silence de mort, capable seulement d’écouter les mots accusateurs qui s’égrènent dans sa tête.
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Re: RENVA ✧ bleu pétrole | Mar 7 Juil 2015 - 21:01 Citer EditerSupprimer
(music) Les évènements s’enchainent sans qu’elle n’y prête une quelconque attention. Elle est comme anesthésiée, en train de se mouvoir dans un monde parallèle qui n’est pas le sien et où elle parait décalée. Elle entend vaguement les domestiques les appeler, Renzo et elle, maître et maîtresse ; mais elle ne relève pas, trop détachée, et se contente de grogner pour cette fois. L’allée menant à la lourde porte n’est pas ensoleillée, la présente de Renzo à ses côtés n’est pas assez rassurante. Elle se blinde pour faire bonne figure, mais l’envie de vomir à l’idée de rencontrer son père pour la première fois depuis la mort de Rivael s’installe durablement au creux de son estomac. Puis vient la maison, glaciale ; les escaliers, trop hauts, les pieds trop lourds, trop difficile de marcher. Renzo ouvre la porte du bureau, la violence du geste contrastant avec l’ambiance trop lente ; et déjà la dite porte se renferme derrière eux, comme le ferait celle d’un cercueil. Antonio se retourne avec une lenteur qui exaspère sa fille et qu’elle juge trop théâtrale. « Rivael est morte. » L’évidence prononcée ne provoque pas d’électrochoc chez Reeva, qui semble encore refuser la nouvelle ; la culpabilité l’a déjà trop rongée pour durer encore et seule subsiste la haine, accompagnée d’un soupçon de néant.
Puis vient soudainement le réveil, la gifle. Et le coup la laisse pantelante, sonnée. Son métier l’a pourtant déjà amenée à souffrir. Souvent, et beaucoup. Mais rien n’est comparable avec la portée que les actes de son père peuvent avoir. Ce n’est pas un simple bleu qu’elle aura sur la joue, d’ici quelques heures, c’est du sel qu’Antonio rajoute sur des blessures anciennes et terriblement profondes. Des désastres psychologiques qui ne se sont jamais refermés. Une Reeva en ruine, détruite depuis le plus jeune âge, pas même reconstruite par Renzo qui aura pourtant essayé, à sa manière. « Rivael est morte » répète alors Tony, la voix lourde de reproches. Reeva sent alors quelques vagues de culpabilité l’assaillir, mais derrière cet horrible sentiment trône une sensation nouvelle : de la haine. De la haine pour son propre père et l’injustice qu’il est en train de leur faire subir. Leur rejeter la faute sur les épaules, comme s’il n’avait aucun tord dans l’histoire. « Comme c’est pratique, fait alors remarquer Reeva, hargneuse, comme c’est facile de rejeter l’entière faute sur nous. » Elle ne parle pas, elle crache. Ses yeux verts lancent des éclairs, dont la puissance est accentuée par ses cheveux nouvellement teints en noir. Toute ressemblance avec Rivael a été soigneusement annihilée ; elles ne partagent officiellement plus rien. Si sa petite soeur était encore là, Reeva pourrait contempler à quel point elles seraient aux antipodes : la blonde aux cheveux peints et au sourire éclatant en face de la sombre brune, au visage mort et au regard torturé. Plus rien, plus rien en commun. Ne reste plus qu’à rejeter les souvenirs, mais après, après l’immonde dispute qui sévit. « Tu es tout aussi responsable ! Tu nous as menés à notre perte, tu nous as élevés comme des chiens de garde, tu nous as fait à ton image. » Elle entend vaguement la voix de son père qui lui demande d’arrêter, mais elle est trop engagée sur le chemin des reproches pour retourner en arrière.
Alors qu’Antonio commence à nier, les paroles de sa fille gagnent en virulence. « Renzo était destiné à ça ! Il n’est même pas capable de t’appeler papa ! Tu l’as gardé dans l’unique but de l’envoyer à la boucherie, alors ne vient pas pleurer parce que la famille a subi une perte. » La deuxième gifle ne se fait pas attendre, plus puissante que la première, et cette fois-ci Renzo le silencieux est épargné. Reeva se retient de porter la main à sa joue et sent la brulure se répandre ; alors enfin elle commence à se rendre compte de l’ampleur de ses dires, mais une seule chose l’inquiète : le mal qu’elle a probablement fait à son frangin adoptif en déballant ainsi des faits qu’il n’avait fait que deviner. Véritable tabou dans la famille, personne n’a jamais abordé la raison pour laquelle Renzo est devenu un Armani ; ni même la manière dont il est arrivé, comme par hasard, après le décès de ses parents biologiques. Elle, bien que curieuse, n’a jamais voulu fouiller de ce côté-là et s’est contentée de la version officielle. De peur de se brûler les ailes. De ne pas tenir le coup. « Tu oses réduire ta soeur à l’état de dommage collatéral ? » « Elle était déviante. » Un silence de mort s’installe suite à cette réponse venue en une seconde, comme naturelle. Comme une pensée qu’elle aurait depuis toujours en tête, mais qu’elle aurait jusque là gardé en cage. Un regard en biais à Renzo la conforte dans l’idée qu’elle parle comme un monstre. La voix de son père vient confirmer le fait : « Qu’est-ce que tu es devenue… » Ce n’est pas une question, plus une constatation, et le choc est rude. Mais enfin, elle peut pleurer. Enfin elle s’effondre, suffoque, s’enfonce les ongles dans la peau avant de s’accrocher au bras de Renzo, l’air de vouloir lui dire que si l’insensible et la furie sont des monstres, alors au moins ils sont deux, et qu’ils devraient rester ensemble.
✻✻✻
You come through like a light
in the dark, give me sight
(music) Les évènements s’enchainent sans qu’elle n’y prête une quelconque attention. Elle est comme anesthésiée, en train de se mouvoir dans un monde parallèle qui n’est pas le sien et où elle parait décalée. Elle entend vaguement les domestiques les appeler, Renzo et elle, maître et maîtresse ; mais elle ne relève pas, trop détachée, et se contente de grogner pour cette fois. L’allée menant à la lourde porte n’est pas ensoleillée, la présente de Renzo à ses côtés n’est pas assez rassurante. Elle se blinde pour faire bonne figure, mais l’envie de vomir à l’idée de rencontrer son père pour la première fois depuis la mort de Rivael s’installe durablement au creux de son estomac. Puis vient la maison, glaciale ; les escaliers, trop hauts, les pieds trop lourds, trop difficile de marcher. Renzo ouvre la porte du bureau, la violence du geste contrastant avec l’ambiance trop lente ; et déjà la dite porte se renferme derrière eux, comme le ferait celle d’un cercueil. Antonio se retourne avec une lenteur qui exaspère sa fille et qu’elle juge trop théâtrale. « Rivael est morte. » L’évidence prononcée ne provoque pas d’électrochoc chez Reeva, qui semble encore refuser la nouvelle ; la culpabilité l’a déjà trop rongée pour durer encore et seule subsiste la haine, accompagnée d’un soupçon de néant.
Puis vient soudainement le réveil, la gifle. Et le coup la laisse pantelante, sonnée. Son métier l’a pourtant déjà amenée à souffrir. Souvent, et beaucoup. Mais rien n’est comparable avec la portée que les actes de son père peuvent avoir. Ce n’est pas un simple bleu qu’elle aura sur la joue, d’ici quelques heures, c’est du sel qu’Antonio rajoute sur des blessures anciennes et terriblement profondes. Des désastres psychologiques qui ne se sont jamais refermés. Une Reeva en ruine, détruite depuis le plus jeune âge, pas même reconstruite par Renzo qui aura pourtant essayé, à sa manière. « Rivael est morte » répète alors Tony, la voix lourde de reproches. Reeva sent alors quelques vagues de culpabilité l’assaillir, mais derrière cet horrible sentiment trône une sensation nouvelle : de la haine. De la haine pour son propre père et l’injustice qu’il est en train de leur faire subir. Leur rejeter la faute sur les épaules, comme s’il n’avait aucun tord dans l’histoire. « Comme c’est pratique, fait alors remarquer Reeva, hargneuse, comme c’est facile de rejeter l’entière faute sur nous. » Elle ne parle pas, elle crache. Ses yeux verts lancent des éclairs, dont la puissance est accentuée par ses cheveux nouvellement teints en noir. Toute ressemblance avec Rivael a été soigneusement annihilée ; elles ne partagent officiellement plus rien. Si sa petite soeur était encore là, Reeva pourrait contempler à quel point elles seraient aux antipodes : la blonde aux cheveux peints et au sourire éclatant en face de la sombre brune, au visage mort et au regard torturé. Plus rien, plus rien en commun. Ne reste plus qu’à rejeter les souvenirs, mais après, après l’immonde dispute qui sévit. « Tu es tout aussi responsable ! Tu nous as menés à notre perte, tu nous as élevés comme des chiens de garde, tu nous as fait à ton image. » Elle entend vaguement la voix de son père qui lui demande d’arrêter, mais elle est trop engagée sur le chemin des reproches pour retourner en arrière.
Alors qu’Antonio commence à nier, les paroles de sa fille gagnent en virulence. « Renzo était destiné à ça ! Il n’est même pas capable de t’appeler papa ! Tu l’as gardé dans l’unique but de l’envoyer à la boucherie, alors ne vient pas pleurer parce que la famille a subi une perte. » La deuxième gifle ne se fait pas attendre, plus puissante que la première, et cette fois-ci Renzo le silencieux est épargné. Reeva se retient de porter la main à sa joue et sent la brulure se répandre ; alors enfin elle commence à se rendre compte de l’ampleur de ses dires, mais une seule chose l’inquiète : le mal qu’elle a probablement fait à son frangin adoptif en déballant ainsi des faits qu’il n’avait fait que deviner. Véritable tabou dans la famille, personne n’a jamais abordé la raison pour laquelle Renzo est devenu un Armani ; ni même la manière dont il est arrivé, comme par hasard, après le décès de ses parents biologiques. Elle, bien que curieuse, n’a jamais voulu fouiller de ce côté-là et s’est contentée de la version officielle. De peur de se brûler les ailes. De ne pas tenir le coup. « Tu oses réduire ta soeur à l’état de dommage collatéral ? » « Elle était déviante. » Un silence de mort s’installe suite à cette réponse venue en une seconde, comme naturelle. Comme une pensée qu’elle aurait depuis toujours en tête, mais qu’elle aurait jusque là gardé en cage. Un regard en biais à Renzo la conforte dans l’idée qu’elle parle comme un monstre. La voix de son père vient confirmer le fait : « Qu’est-ce que tu es devenue… » Ce n’est pas une question, plus une constatation, et le choc est rude. Mais enfin, elle peut pleurer. Enfin elle s’effondre, suffoque, s’enfonce les ongles dans la peau avant de s’accrocher au bras de Renzo, l’air de vouloir lui dire que si l’insensible et la furie sont des monstres, alors au moins ils sont deux, et qu’ils devraient rester ensemble.
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Re: RENVA ✧ bleu pétrole | Sam 12 Sep 2015 - 15:13 Citer EditerSupprimer
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REEVA & RENZO
save your happiness for tomorrow, today we'll drown in your tears ✻✻✻ Si la gifle l’avait réduit au silence instantanément, ce n’était rien comparé à la haine émanant de Reeva. Les yeux se Renzo sont baissés, fixent sans voir le tapis. Ce n’est qu’un pion docile, formaté, ah ! – il ne réfléchit même plus par lui-même, en présence de Père. Il se terre dans le silence et attend sa punition. Comme d’habitude, comme toujours. C’est malsain d’encaisser autant et de trouver toute cette histoire normale. Mais c’est comme ça que Père l’a élevé, réduit à un état robotique, sans émotion, sans bon sens. Contrairement à Reeva dont le crâne n’est pas contrôlé par Père. « Comme c’est pratique, comme c’est facile de rejeter l’entière faute sur nous. » La panique commence à se diffuser en lui, même si son visage reste impassible. L’homme docile a envie de mettre une main sur la bouche de Reeva et de l’obliger à se taire. Lui dire que Père a toujours raison, qu’il ne faut pas le décevoir. Non, Père leur a tout donné. Lui a tout donné. Il faut plier l’échine et lui être reconnaissant. Oui, c’est exactement ce qu’il faut faire. Mais l’homme indépendant qu’il est devenu a envie de laisser la tigresse cracher sa haine. Il n’y a que Reeva qui est capable d’une telle chose, de par le choix de ses mots percutants. Il n’y a que Reeva qui est capable de remettre les idées en place à n’importe qui – même à Antonio. Alors il garde ses mains près de son corps et ne bâillonne pas Reeva. « Tu es tout aussi responsable ! Tu nous as menés à notre perte, tu nous as élevés comme des chiens de garde, tu nous as fait à ton image. » Ils ne sont que de simples pions fabriqués dans l’usine Armani prêts à aller à l’abattoir. Des pions défectueux à l’origine mais l’expérience leur a permis d’éliminer les erreurs. Avant Renzo, il y avait un autre type qu’Antonio considérait comme son homme de mains. Mais il l’a envoyé se faire égorger et éventrer par la mafia russe. Il n’a pas pris Renzo sous son aile par compassion. Il l’a élevé par ambition. « Renzo était destiné à ça ! Il n’est même pas capable de t’appeler papa ! Tu l’as gardé dans l’unique but de l’envoyer à la boucherie, alors ne vient pas pleurer parce que la famille a subi une perte. » Père gifle une nouvelle fois Reeva. Il déglutit, n’osant même pas jeter un coup d’œil dans la direction de Père. Pourtant, il sent son regard, trop intense sur lui, cherchant la laisse de son âme. Renzo ne sait que trop bien ce qu’il cherche à lui faire faire : le rendre docile, pour qu’il lui nie les accusations dont sa fille biologique lui porte. C’est le contrôle qu’il a toujours eu sur le nord-coréen, le rendant trop dépendant à cette famille, à ce nom, au point d’en être même reconnaissant de respirer le même air qu’eux. Peut-être qu’entre temps, Antonio s’est réellement pris d’affection pour lui mais ce n’est pas avec des peut-être qu’ils changeront le monde. Et puis, le regard le quitte, braque Reeva. « Tu oses réduire ta sœur à l’état de dommage collatéral ? » « Elle était déviante. » La discussion le dérange, il a envie de quitter cette pièce, cette maison, ce pays – partir, loin, ailleurs, se terrer dans une grotte. Se couper du monde. Fuir. Mais la fuite n’existe pas dans les gènes Armani. Il déglutit. Il n’est pas un véritable Armani. Juste de nom, juste sur le papier. « Qu’est-ce que tu es devenue… » Il sent les ongles sur son bras, les doigts qui enserrent sa chair. Il sent mais ne fait pas un geste pour s’en dégager. Il relève uniquement la tête et braque ses yeux froids sur Antonio. « Elle a raison. » Sa voix est tout aussi froide et si faible, pourtant, presqu’un murmure. « C’est toi qui nous as créé. Nous sommes devenus ce que tu voulais qu’on devienne. La famille, il prend une pause en jetant un coup regard vers Reeva, c’est important. Tu as élevé tes filles dans ces magouilles. Tu m’y as traîné ensuite. Tu nous as appris les affaires, à tenir une arme, à tuer – putain… » Cette fois-ci, il se dégage de la poigne de Reeva mais uniquement pour entremêler leurs doigts. Sa façon à lui de dire qu’ils sont ensemble dans cette merde, ensemble jusqu’au bout du monde. « Les monstres créent des monstres », termine-t-il en serrant les doigts un peu plus fort.
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