S’il avait voulu l’insulter, il n’aurait pas pu trouver mieux ! Non, non, pas en la traitant de coincée de cul, mais déjà avant : Être comme lui ? Les yeux grands ouverts en se retournant vers lui, Hera se demanda si elle n’avait eu une hallucination auditive. Croyait-il seulement une seule seconde qu’ils puissent être considérés comme des égaux ? Il aurait beau amené tous les arguments possibles et inimaginables, jamais, il ne pourrait aboutir à une conclusion faisant d’eux des semblables. C’était juste une loi établie par la hiérarchie naturelle aussi terrestre que céleste qu’elle lui était en tout point supérieure. Certes, ils partageaient la même corvée, mais ce n’était pas parce qu’elle avait la charité aux communs des mortels qu’ils devaient prendre la confiance ! S’amuser à s’offrir des cadeaux minables entre personne qui n’ont pas forcément de liens affectifs entre eux ? Non, désolée – ou pas – mais elle ne voyait ni intérêt, ni distraction à cette mascarade.  Et quand il se tira, Hera ne put que lui souhaiter bon vent !
« Je préfère de loin être la princesse du royaume des coincées que le seigneur des morpions… » marmonna-t-elle sans se soucier de savoir si Seo Heon en entendrait ou non ses propos tandis qu’il s’éloignait déjà.

Hera partit donc dans une direction séparée. Ce n’était pas plus mal de toute façon ! Et elle se félicitait de ne pas avoir répondu ouvertement à sa provocation immature. Elle était coincée ? En l’occurence, comment la jeune femme pourrait vraiment démentir ? Elle en avait conscience. Elle était pudique et inexpérimentée. Hyeon était le second petit ami et le précédent datait de sept année auparavant. En-dehors de ses deux histoires sérieuses, Hera n’avait guère ne serait-ce que jamais flirté alors avoir eu des relations sexuelles… Mais, le laisser sur cette impression d’être parvenue à lui clouer le bec la contrariait au plus haut point ! En vérité, la singapourienne ne se satisfaisait en rien d’avoir jouer la carte du snobisme en feignant de l’ignorer. De plus, il devait être bien trop content de s’être débarrassée d’elle ! Il ne méritait pas un tel répit. C’était décidé ! Rien que pour lui pourrir sa journée, elle ne le lâcherait plus avant la fin de leurs achats ! Hera tourna les talons alors qu’elle marchait à travers les allées et s’en retourna pour rejoindre Seo Heon qu’elle retrouva au bout de quelques minutes assis à une terrasse de café. La jeune femme se dirigea donc directement vers lui, accrocha la hanse de son sac au dossier de la chaise sur laquelle elle s’assit ensuite en face de lui. S’il avait cru pouvoir être tranquille, il s’était fourré le doigt dans l’oeil !
« Le royaume des coincées du cul comme tu dis serait curieux d’en apprendre plus sur la notion du plaisir de la part d’un si grand expert ! »
Là, aussitôt ses mots prononcés, Hera se maudit. Elle s’infligea une gifle mentale et grimaça. Stupide spontanéité, pour le coup, la jeune femme avait été prise à revers par ses paroles dont le contenu résonna à ses oreilles. Mais quelle conne ! Encore l’influence des gumiho pour l’avoir amenée à sortir une phrase pareille sans en mesure le sens ambiguë en la formulant à haute voix ! Si elle avait voulu le faire exprès, elle n’aurait pas pu faire mieux ! Ou pire, en l’occurence… Combo intégral. Le coeur battant avant de se prendre un retour de manivelle, Hera s’empressa d’essayer de corriger le tir :
« Je veux dire…  Eh bien, puisque cette mascarade est un jeu, explique moi en quoi est-ce amusant ? »
Pourquoi cette formulation là n’était pas la première s’être présentée à ses lèvres ? Sans doute à cause de son mépris et de son désir d’ironie insipide à l’égard de son interlocuteur. Cependant, sa question était sincère. Puisque elle devait se prêter à ce jeu contre son gré autant essayer d’en saisir un peu le sens, de comprendre pourquoi les autres membres des Choego trouvaient cela amusant. La collectivité et le sens de la communauté s’avéraient encore bien étranger à celle qui se revendiquait sans honte comme une princesse. Bien sûr, à l’adolescence, elle aussi avait déjà participé à des sports collectifs – et encore, rarement car dès que le choix s’offrait pour une discipline individuelle, elle saisissait l’occasion – mais c’était différent. Et puis, la cohésion au sein des établissements scolaires qu’elle avait fréquenté à Singapour n’était qu’une belle façade hypocrite. Que ce soit l’esprit de fraternité ou l’unité d’une équipe comme les Choego, Hera tâtonnait encore. Bien droite sur sa chaise, toujours élégante, un peu trop « distinguée » sans doute parfois, mais avec son statut d’égérie elle ne pouvait plus non plus se permettre d’y déroger. L’oisillon avait commencé à prendre son envol vers le large lorsque les barreaux d’une nouvelle cage s’étaient finalement dressé devant elle à nouveau.
« Les cadeaux n’ont que deux valeurs, l’une est monétaire, l’autre sentimental, or dans le cas de cet échange, ils n’ont ni l’un, ni l’autre, donc quel en est l’intérêt ? »
Elle avait conscience qu’il saisirait sans doute la perche pour se moquer d’elle mais tant pis, au point où ils en étaient déjà. De plus, pourquoi devrait-elle se laisser affecter par les mots d’une personne qui l’indifférait – était censé l’indifférer.