Bom Chan avait passé des jours, des semaines, des insomnies entières à trouver le moyen de faire sortir Rei de prison. Pas seulement de lui éviter la peine de mort et lui sauver la vie mais de lui rendre sa liberté.  Une totale liberté.  Et il bossait encore sur le dossier de son meilleur ami avec deux avocats de renoms que lui avait conseillés Wen Yi.  Évidemment ils avaient un coût.  La caution de Rei aussi. Et il lui avait fallu du temps et de l’énergie pour rassembler la somme nécessaire. La chinoise lui avait donné la moitié de la somme nécessaire. Le reste il l’avait soutiré à ses parents de la façon la plus maligne qui soit. Il voulait tout faire pour que le dossier qui visait à la liberté de son meilleur ami soit parfait. Il se débattait bien plus pour son frère qu’il ne l’aurait fait pour lui. Et si au départ tout ça semblait annoncer des jours bien sombres pour Rei il devait bien admettre que la piste exploitée jusqu’à aujourd’hui semblait être une porte de sortie idéale. Les avocats avaient exposés leur dossier d’une manière si théâtrale que Bom Chan lui-même en avait le cœur fou. Il avait écouté le plaidoyer au premier rang. Juste derrière son frère. Il l’aurait soutenu même en enfer. Wen Yi était assise dans le fond. Toujours bien mise.  Une robe de circonstance qui moulant son corps généreusement.  Loin d’être vulgaire elle était d’une classe folle. Même le coréen se complaisait à l’admettre.  Il avait brièvement Échangés quelques paroles avec elle et il avait aisément deviné son stress. Elle avait même plaisanté en lui avouant qu’elle était à deux doigts de tourner de l’œil.  Elle aussi vivait se procès avec ces tripes. Et pendant un instant Bom Chan se demandait jusqu’où leur histoire de coucheries les mènerait.  Dès l’instant où son frère était entré dans la salle Wen Yi avait repris contenance et affichait un air serein et plein d’assurance.  Son sourire rayonnant n’existait q pour Rei et Bom Chan se sentait presque redevable du mal qu’elle se donnait pour garder son pessimiste de meilleur ami à flot. Les mots avaient fusées pendant de longues minutes pour finalement vider la salle dans un vacarme oppressant. Bom Chan avait retiré sa cravate et il attendait désormais qu’on l’autorise avoir Rei. Au vu de l’expression de Wen  il se doutait qu’elle voulait le voir aussi mais à cet instant Bom Chan aurait refusé tout l’or du monde pour rester 5 minutes avec son frère.  Finalement assis à une table en bois il attendait qu’on lui amène Rei le cœur battant et un sourire féroce aux lèvres.  Ils vont s’en sortir. Ensemble.

Si Rei avait un tant soi peu d’états d'âme, un tant soi peu d'amour propre, il pourrait mal vivre le fait d'être une balance. Mais il s'en foutait totalement. Tellement que ça pourrait être presque inquiétant. Bom Chan lui avait trouvé deux avocats, des machines de guerre, ils étaient même un peu flippants. Ils avaient monté un dossier de fou. Outre le fait d'accentuer à quel point l'accident et la fin de carrière de Rei avaient été traumatisant, ils avaient amené un possible accord. Rei n'était pas le cerveau de l'affaire, c'était une petite main. Les avocats proposaient la tête du commanditaire contre la liberté sous condition de ce pauvre, de ce malheureux Rei. Les conditions de sa libération étaient une compensation astronomique et des heures de travaux d'intérêt général, il en aurait pour plus d'un an à tout réaliser. Mais si ça fonctionnait, c'était le prix de sa liberté. C'était ça ou crever. L'audience était finie depuis quelques heures maintenant, Rei était épuisé, vidé. Le jury délibérait, ça pouvait durer des heures, des jours même... Un gardien vint le chercher dans sa cellule, il avait une visite, c'était soit Bom Chan, soit Wen Yi. Tous les deux se battaient pour lui, chacun à leur façon. Rei se disait souvent qu'il ne méritait pas autant d'efforts... Il avança en boitant jusque la salle des visites. Il trouva Bom Chan assis à une table, lui aussi avait des putains de cernes, mais son attitude entière respirait la confiance en lui. Rei sourit de ses lèvres gercées, et avança pour venir lourdement s'asseoir sur la seconde chaise. Il regarda son meilleur ami, feignant un désinvolture certaine. « T'étais si sexy avec ta cravate chéri... »

Bom Chan avait envie d’y croire, parce que c’était pour lui impossible que son meilleur ami puisse mourir, ou pourrir en taule loin de lui. Il était prêt à croire en l’impossible pour lui, et quand on y croit assez fort tout peut arriver. Quand on veut on peut. Ouais, Bom Chan était prêt à se raccrocher  à tous ces foutus dicton pour avoir le courage de croire que son meilleur ami pourrait se faire libérer. Là. Bientôt. Sous peu. Dans quelques heures, si ces connards l’acceptaient. Pourquoi insulter si féroce ceux qui avait le pouvoir de libérer son meilleur ami, justement parce qu’il avait ce putain de pouvoir … Bom Chan ne tenait pas en place sur sa chaise et ne cessait de changer de position en tapotant sur la table en bois, impatient. Puis on lui amenait finalement son frère et son sourire s’agrandit. Pourtant il connaissait assez Rei pour voir que ce dernier était moins emballé que lui pour ce verdict. Si la situation avait été inverse et leur rôle inter changé, Bom Chan ne doutait pas que Rei aurait été le premier a exulté de joie. Mais il était toujours plus sévère avec lui-même. Bom Chan ricane à sa remarque, d’humeur à plaisanter. « Je voulais que tu n’aies d’yeux que pour moi mon chéri, c’est qu’on se bat presque avec ta meuf pour attirer ton attention. » dit-il d’un air badin en papillonnant des yeux. Il ricane et cogne le poing de son meilleur ami en guise de salut avant de lui adresser un immense sourire. « Tu sens cette odeur. » dit-il comme un chien fou contenant son excitation. « Cette odeur de liberté. » Ses dents blanches parfaitement alignés s’étiraient entre ses lèvres exaltées. Il y croyait lui. Dur comme fer.

Si sa vie n'avait pas été une vaste tragédie, alors peut-être que Rei aurait été plus optimiste quant à ce nouveau verdict. Mais il avait déjà tant perdu, il ne serait pas surpris que le destin s'amuse aussi à lui enlever ce qu'il lui restait de liberté. Il essayait de prétendre y croire, mais il n'y arrivait pas. Bom Chan s'en rendrait vite compte, alors le japonais le laisserait croire pour eux deux. Il sourit un peu énigmatique mais très amusé par la remarque de son meilleur ami. « C'est pas ma meuf. Elle est mariée j'te rappelle. » Et ça, ça le faisait crever de l'intérieur. « Pis t'es mon âme sœur alors sois pas jaloux. » Il tapa dans son poing comme pour ponctuer cette déclaration dite en riant mais on ne peut plus sincère. Il s'assit lourdement sur la chaise en face de Bom Chan. « A force de m'être fait péter le nez j'dois plus avoir d'odorat tu vois ! » Il ne la sentait pas la liberté, mais laissait son meilleur ami y croire même si cela rendait le choc du verdict plus rude. « Ils ont dit que la délibération pourrait durer un moment, p't'être même des jours. Tu devrais aller te changer, te faire beau pour moi, tout ça quoi ! » Il eut un rire rauque. Lui resterait dans cette foutue tenue orange qui lui donnait un teint cireux et maladif. Il s'affala un peu plus sur la table, il était crevé. Ça faisait bientôt six mois qu'il était là, six mois sans une seule nuit de sommeil correcte. « Allez, fais moi rêver, si je sors j'ai quoi à bouffer ? » La bouffe ici ressemblait à du vomi, et autant dire qu'il n'avait aucun appétit, il avait maigrit d'ailleurs depuis son incarcération.

Bom Chan ricane mais n’insiste pas concernant Wen Yi, il attrape la main de Rei et lui embrasse la paume pour plaisanter. «  Je sais bébé. » il papillonne des yeux presque naturellement et rit  avant de libérer son meilleur ami de son emprise. Il grogne légèrement face au pessimisme de son meilleur ami mais il ne peut que comprendre. Comment réagirait-il à sa place si la sentence qui pesait au-dessus de sa tête allait définir sa vie ou sa mort. Mais Bom Chan voulait y croire pour deux, pour eux. « Tu parles, j’aurais un vieux jogging pourri et un t-shirt sale, vu l’entrain que tu mets à croire que je me suis cassée le cul pour toi pour rien. » Bien sûre que non ce n’est pas ça, bien sûr que Rei lui sera éternellement reconnaissant de s’être donné autant de mal, et qu’il se doute que ce que lui a montré Bom Chan jusqu’ici n’était le haut de l’iceberg mais Bom Chan avait envie de lui faire un petit électrochoc, et que Rei, même s’il n’y croyait pas, ferait l’effort de lui faire croire le contraire. Si c’était dur pour Rei ça l’était tout autant pour Bom Chan. Il ne dormait plus, mangeait par nécessité et était d’une humeur massacrante depuis que Rei avait été enfermé. Il ne vivait pas l’incarcération de son meilleur, il ETAIT l’incarcération de son meilleur ami. Parce que tout ce que vivait Rei, Bom Chan le vivait aussi. Ils n’étaient qu’un et ca Bom Chan se l’était toujours persuadé. L’image des âmes sœurs était encore trop sage, trop gentille, trop polie pour eux. Il ne prétendait pas souffrir plus que lui, ni même autant, mais la douleur d’imaginer la perte que causerait celle de son meilleur ami lui est intolérable. Bom Chan a beaucoup trop de fierté pour admettre qu’aux jours les plus sombres de l’incarcération de Rei il a chialé comme une merde, comme un enfant. Il le sait déjà, si Rei meurt, Bom Chan ne sera plus rien, et s’il ne se tue pas, ça sera uniquement pour Shin Bom. Et Syu. Mais sa vie n’aura plus aucun sens, et il sait déjà qu’il fera payer au monde entier qu’on lui ait arraché son frère, sa vie. il serre les dents et souffle avant de retrouver un air enjoué pour lui lancer « Udon ? Phô ? Maki ? Sashimi ? Un putain de burger bien fat et bien gras ! Des frites ! Des putains de frites de patates douce mon gars. Du gros en perfusion ! Tu vas t’éclater le bide et boire des litres d’alcool. » Il ricane et ajoute d’un air faussement inquiet « Non parce que là tu dois avoir que du sang dans les veines, c’est chaud. » il grimace et ajoute « Du cholestérol en barre mon gars, je te fais rêver ? »

L'optimisme était loin d'être une seconde nature chez Rei. Il s'en voulait presque de ne pas croire à sa libération pour laquelle c'était battu Bom Chan, mais la vie lui avait tellement prit. Il n'imaginait pas que la vie puisse lui donner quelque chose. Avoir Bom Chan dans sa vie lui apparaissait comme quelque chose d'assez énorme en soi. Rei eut un sourire en coin, presque désolé, il avait l'impression de le trahir presque. « Je sais tout c'que tu as fait mec. J'aurais pas pu rêver meilleur frère que toi. » Il était son ancre, son phare. Bom Chan était la personne qui permettait à Rei de ne pas complètement perdre pied. Quoique vu ce qu'il avait fait, le japonais était face à son addiction et sa propre chute. Il avait voulu faire ça seul, il n'avait pas voulu impliquer Bom Chan là dedans, il n'avait pas voulu l'entraîner avec lui. Mais le japonais avait oublié que c'était souvent lorsqu'ils étaient ensemble qu'ils étaient le plus fort. Rei s'était planté, il en était là aujourd'hui parce qu'il avait essayé d'être sans son meilleur ami. Mais ça ne marchait pas. Ils étaient les deux faces d'une seule même pièce. Bom Chan était le reflet en un peu plus beau de Bom Chan, ce qu'il pourrait être et à la fois ce qu'il ne pourrait pas être. L'enfer c'était les autres dit-on, mais le coréen était tout sauf l'enfer, il était son salut. Avachi sur sa chaise, il essaie de montrer à Bom Chan qu'il essaie d'y croire, il veut s'imaginer des plats, ce qu'il pourrait manger et boire s'il venait à sortir. Il sentit son estomac se serrer de faim et de frustration. Il avait envie de bouffe, d'alcool, de cachets et de sexe. Les besoins basiques d'un homme, d'un homme dépendant. Il ferma les yeux, sentant la salive affluer dans sa bouche. « Putain, ça m'excite encore plus qu'un banc de meufs nues sur mon lit tout ça... » Il se redressa un peu. « Je veux un truc blinder de fromage fondu... De viande... De sauce... » Il poussa un soupir. « Et à boire... L'eau ça fait rouiller. Et avec les vis que j'ai dans le corps c'est mauvais ! » Il eut un rire rauque, sans joie réelle, mais c'était sa façon à lui de plaisanter. « Si je sors, tu m'emmènes me faire péter le bide dans la foulée. » Il n'y croyait pas, mais essayait de se projeter, sinon il allait craquer à l'idée de rester enfermer toute sa vie. De toute façon, il avait son plan, s'il prenait perpétuité, il se foutrait en l'air. Il serra les dents à cette pensée, détestant l'idée d'abandonner son frère. « Tu sais que si ça n'a pas marché, je te demanderais de m'aider, une dernière fois ? » Que Bom Chan le veuille ou non, s'il prenait la perpétuité il n'allait pas rester derrières les barreaux.

Bom Chan souriait, il se voulait confiant, il l’était d’ailleurs tellement que c’était impensable pour lui que l’issue de ce procès soit négatif. Il y avait pourtant cette mini part d’inquiétude qui lui vrillait le ventre mais qu’il cachait divinement bien à son frère. « Evidemment, je t’emmène au buffet à volonté que tu aimes ! Et on se fera péter le bide. On ira se bourrer la gueule et peut être qu’à ce moment-là je te laisserais rentrer chez toi ! » Lâche-t-il en riant. Il voit bien l’effort que fait son frère pour y croire lui aussi, alors dans un élan qu’il n’a pas réfléchi il lui attrape la main l’air de rien et la serre. Juste il la serre. Parce qu’après tout ils sont tous les deux maladroit avec les mots et incapable de réellement exprimer ce qu’ils ressentent. Jamais Bom Chan ne s’était senti aussi stressé. Il savait très bien que son dossier tenait la route et qu’il avait la thune pour faire sortir son frère de là. Il avait un chèque de banque sur lui pour pouvoir payer tout de suite et le libérer le plus rapidement possible. Bom Chan avait tout prévu. Tout. Ils ont besoin de cette thune et du nom de son commanditaire pourquoi s’encombrer d’un homme de main, même pas proche de la tête des opérations. Rei n’était qu’un pion gênant et étranger. Leur haine pour les japonais ne surpassera jamais leur envie d’argent et de fausse justice. Il resserre sa main et aux paroles de Rei son regard se durci et il serre les dents. « Si tu veux t’évader je serais là. Si tu veux crever va te faire foutre Rei. » Dit-il simplement comme s’il ponctuait là la conversation. Il le fixe soudain si froidement que Bom Chan n’a pas envie d’écouter les explications qu’il connait déjà de son meilleur ami. « N’y pense même pas » Grogne-t-il en le toisant furieux. Mais sa fureur n’a d’égale que la peur de le perdre …

Son sourire était doux-amer. Rei rêvait grâce aux paroles de son meilleur ami, c'était pas grand chose pourtant. Un repas, des bières, des rires, être ensemble, la liberté quoi. C'était comme un songe, un fantasme qu'il ne pourrait plus jamais toucher du doigt. « Ça a l'air cool tout ça... » Sa voix était lointaine, comme son regard. Son esprit était dehors l'espace d'un instant. Et puis la réalité le rattrapa. Le orange de sa combinaison de détenu lui brûla les yeux. Le retour à la réalité était dur, comme une chute au sol après des centaines de mètres de chute libre. La façon dont ses tripes se serraient, dont l'air lui manquait, c'était la preuve qu'il ne pourrait pas rester derrière les barreaux indéfiniment. S'il prenait perpétuité, il fallait qu'il s'en aille vite. Il deviendrait fou, il allait pourrir, il préférait une mort rapide à l'agonie. Le regard froid de Bom Chan lui noua la gorge, il savait ce qu'il allait dire, mais le japonais avait voulu le prévenir, lui faire comprendre ce qu'il avait en tête. « Si je prends perpet' j'aurais pas le choix frère... Je préfère ça à la folie, à l'agonie... » Il passa une main sur son visage épuisé et livide. « Si je dois mourir, ce sera de ta main. » Ça pouvait sembler cruel voir même morbide, mais pour Rei c'était une déclaration d'amour, de l'amour pur, sans phare, sans mensonge. Il planta son regard dans le sien, le regard en colère de son frère d'âme avalant le sien, il y lisait tout ce qu'il y avait à lire, et inversement. Dans ceux de Bom Chan, la peur et la colère, dans ceux de Rei, le désespoir et la résignation. Il s'en voulait le japonais de ne pas savoir être plus positif... Il finit par lâcher un rire rauque, presque froid, comme le son de métal que fait une porte de prison. « Tu t'es battu pour moi et c'comme ça que j'te remercie... T'as le droit de m'en coller une, fais toi plaiz' ! »

Bom Chan n’a jamais eu envie de frapper Rei, jamais réellement tout du moins. Si ce n’est quelques tics nerveux ou des chamailleries sans conséquence, il n’avait jamais levé la main sur son frère, et c’était bien là la dernière chose qu’il ferait sur cette terre. Pourtant à cet instant, l’envie et si furieuse dans son poing qu’il se contraint à planter ses ongles dans sa paume pour ne pas céder à l’envie. Il fixe Rei avec une telle colère. Son meilleur ami peut bien dire ce qu’il veut, Bom Chan n’a pas envie de l’entendre, c’est tellement absurde et inenvisageable pour lui. L’évasion, se faire incarcérer, tout autant de mauvais plans que le jeune professeur s’était imaginé pour faire sortir de son frère de là. Mais la mort n’a jamais été une solution envisagé. Cette idée affreuse et ridicule ne lui avait même jamais effleuré l’esprit. Bom chan savait que s’il devait y croire c’était pour deux. Que les efforts à faire, s’était pour deux. Que son ami, loin d’abandonner totalement, n’était pas ceux très optimiste, trop réaliste sûrement. Tout se passe en quelques secondes, une chaise qui racle le sol, qui tombe dans un boucan soudain. Son poing qui se referme sur le col de Rei pour le soulever. L’ancien champion de taekwondo semble aussi léger qu’une plume sous la poigne de son meilleur ami. Bom Chan plaque son frère au mur, aussi surpris, sûrement, que l’était Rei. Son éclat de fureur n’avait d’égale que la peur panique qu’il ressentait à l’idée de perdre son frère. « Si tu fais ça je te tue ! » c’était bien ironique comme exclamation, et un brin ridicule. Il secoue la tête et serre les dents sans lâcher prise. « Je te jure que j’irais te chercher en enfer pour t’achever si tu me lâches comme ça ! » grogne-t-il comme un animal blessé prêt à bondir. Il en a mal à la mâchoire a trop serrer les dents ainsi. Il en a mal au cœur … Son corps si tendu semble se relâcher très légèrement. Alors qu’il porte son frère a bout de bras – sa part d’inconscient l’obligeant à ne pas forcer Rei a prendre appuie sur sa jambe douloureuse – Bom Chan fini par remplacer son poing sur l’encolure de sa chemise par une étreinte lourde et pleine de non-dit. Il soutient son frère et le serre contre lui, le forçant à coller son front contre son épaule. « Tu lâches rien frère … tu me lâches pas, je te lâche pas … » geint-il soudainement avec une pointe de tristesse. Ce n’est pas maintenant que tu dois abandonner. « On va réussir, je te le promets … » je te le promets.

Bien sûr que les deux frères s'étaient parfois accrochés. Des mots parfois plus hauts que l'autre, des insultes, voir même des menaces, mais jamais ils ne les avaient réellement pensé. Parce que c'était ça les frères, s'engueuler pour se montrer qu'on s'aime. Ils n'en étaient jamais venu aux mains, même si le japonais avait plus d'une fois promis à Bom Chan de lui en coller une. Il ne l'avait jamais fait, il n'avait aucune raison de le faire. L'élan soudain de son meilleur ami le surpris, mais il resta étrangement calme, placide, ne faisant preuve d'aucune réaction. Il espérait même qu'il le frappe, pour enfin ressentir quelque chose, pour enfin souffrir pour une bonne raison. Il avait envie de lui répondre que c'était ce qu'il voulait, qu'il voulait mourir de sa main. Mais si Rei avait osé prononcer ces mots, Bom Chan l'aurait vraiment frappé, et il se serait fait sortir dans la seconde. « L'enfer j'y suis déjà. » Parce qu'il était enfermé, qu'il crevait de douleur, de manque, et il était sans lui, et sans elle... Il n'était plus rien, absolument plus rien, si ce n'est une coquille vide. Finalement, Rei baissa les armes, et se laissa aller contre Bom Chan quand il l'encouragea à le faire à sa façon. Le front contre son épaule, il laissa son poids reposer contre le corps du coréen, rassuré de savoir qu'il le retiendrait quoiqu'il arrive. Il serra les dents en sentant ses yeux brûler. Il ne pleurerait pas, oh non, mais ce n'était pas l'envie qui lui manquait, en témoignait la boule qu'il avait dans la gorge. « Je pourrais plus tenir très longtemps... » Il lâcha un soupir tremblant. « Je peux rien te promettre... » Finalement, il se redressa et lâcha un rire rauque en voyant quelques codétenus le regarder. « Surtout que maintenant des mecs vont me demander de devenir leur copine... » Il préférait en rire, ça le rassurait, ça lui faisait du bien. « Je sais que la délibération peut prendre des semaines... Je suis prêt à tenir jusque-là, je te l'promets. » Tout dépendrait ensuite du verdict. « Mais j'lâche pas. » pour toi. Parce que si tout dépendait de lui, Rei aurait déjà tout abandonné. « Hey les gonzesses c'est pas un baisodrome ici on se rassoit ! » Rei lâcha un nouveau rire rauque sans réel joie. « Je t'avais dis, tu viens de me ficher. »