Joo Hee se sentait toute excitée. Aujourd’hui et enfin après tout ce temps, ils allaient faire du shopping pour le bébé. Elle avait enfin un large temps libre rien que pour elle mais ce n’est pas pour cette raison qu’elle allait trainer les choses. A part le berceau, ils n’ont encore rien, le temps passe bien plus vite qu’on ne se l’imagine et puis, personne pas même elle-même n’est à l’abri d’accoucher avant terme. Depuis qu’elle connait le sexe du petit être qu’elle couve en elle, elle n’a fait que de rêver de ce moment. Une fille ! Elle s’y voyait déjà, du rose et du blanc partout. Pour avoir feuilleté de nombreux magazines spécialisés, Joo Hee savait exactement ce qu’elle voulait, il ne reste plus qu’à Ji Hoon et aux vendeuses d’être patients. Rest in peace.

Masque noir sur le visage, lunettes noires, capuche sur la tête alors qu’elle quitte son domicile aux côtés de Ji Hoon, la jeune femme est bien décidée à passer ni vue, ni connue et encore moins reconnue. Elle voulait que ce moment soit réservé à leurs couples et non pas exposés dans les pages d’un magazine ou d’un site people, depuis que sa grossesse a été annoncé les paparazzis sont particulièrement à l’affut. Bien sûr qu’elle ne repoussera personne si quelqu’un vient à la reconnaître, mais elle ne tient pas non plus à ce que cela arrive toutes les cinq minutes. Alors, elle s’était parée. « T’es prêt ? » Demande-t-elle à Ji Hoon alors qu’ils entraient dans la zone commercial, le début de l’enfer pour lui sûrement ! Elle laisse son regard vagabonder sur les enseignes avant de s’exclamer soudainement : « Il faut qu’on aille ici ! » Ni une, ni deux, pas de temps à perdre qu’elle l’entraine déjà à l’intérieur.

Main dans la poche, tasse de café dans l'autre main, je scrute attentivement le paysage, ainsi debout devant la vitre qui mène au balcon. J'avale quelques gorgées du liquide chaud salvateur. La neige s'est abattue sur Séoul, et l'hiver s'est installé dans notre foyer. Les magazines people ont vite fait de quitter notre table basse pour laisser place à des magazines consacrés à la grossesse ou des magasins spécialisés. Une lubie de Joo Hee, assurément. Il m'arrive de temps en temps d'y jeter un oeil, mais je sais que ça tient surtout à coeur pour elle de s'occuper des préparatifs. La chambre de notre petite fille a été aménagée, et à présent seul le berceau y règne en maître. Par chance, les activités de mon épouse ont diminué afin qu'elle puisse se reposer durant sa grossesse, et aujourd'hui il est enfin temps de nous occuper de notre fille. Un après-midi shopping bébé en perspective, voilà pourquoi je regarde l'horizon en sirotant mon café. Pas que ça ne m'enchante pas de faire les boutiques pour notre fille à naître: sortir de chez nous sans nous faire courser par les paparazzis relève désormais du miracle. Je hais la popularité de ma femme parfois.

Après avoir quitté le confort de notre foyer, nous arrivons ensemble au centre commercial. Si pour Joo Hee, c'est mode ninja, pour ma part je suis plus détendu. On ne me reconnait pas forcément dans la rue, je suis en sécurité. Alors, ne craignant, je sers de soutien pour Joo Hee qui ne perd pas en vitalité. Même cachée derrière sa casquette, ses lunettes et son masque, elle est énergique et ne se dégonfle pas. Je me fais emporter dans ce tourbillon d'hormones qu'elle représente, bien impatiente à l'idée de faire les achats pour bébé. Alors je la suis difficilement, restant à son bras et évitant de rentrer dans des passants. Ce serait idiot d'attirer l'attention alors qu'on fait tout pour l'en empêcher. Une première enseigne repérée, et nous nous engouffrons à l'intérieur. Joo Hee a de la poigne, ça je ne le contredirai jamais. « Bien, alors tu avais repéré quoi ici ? » J'ôte mes mains des poches de mon manteau, attendant que Joo Hee me présente une liste bien précise de ses futurs achats. Si je vais m'y opposer ? Certainement pas. S'il y a bien une chose que j'ai appris depuis le début de sa grossesse, c'est de toujours aller dans son sens. Car cette femme est pire qu'un pitbull quand je n'y mets pas du mien.

Cette session shopping n’était pas de celles où l’on flâne, où l’on hésite et durant lesquelles on rentre dans des enseignes au hasard. Non. Joo Hee savait parfaitement et exactement ce qu’elle voulait et où se le procurer. Cela ôtait un peu de son charme à la balade mais à ce moment même, peu lui importait. Elle voulait le meilleur pour sa fille et quitte à passer énormément de temps dans sa chambre, autant le rendre aussi agréable que possible. Alors c’est sans le moindre remords qu’après s’être exclamée qu’elle voulait se rendre dans un magasin qu’elle l’entraînait à l’intérieur. Avec ses hormones qui pètent la plupart du temps les plombs, Ji Hoon n’est en aucun cas en mesure de discuter. A vrai dire, elle n’est même pas certaine de vouloir le laisser prononcer le moindre avis négatif qui pourrait remettre en doute tout ce qu’elle a imaginé. « Des plaides, une commode, des peluches … » Oui non, il serait bien trop long de tout lister. Elle hausse alors les épaules. « Tu verras. » Lance-t-elle finalement avant de s’élancer dans les rayons de la boutique. « Han regarde ! » Eclate-t-elle soudainement mais pas trop fort en bougeant le bras de son époux telle une enfant et pointant une peluche lapin blanc vraiment adorable absolument immense, à peine un peu plus petit qu’elle, un peu plus loin. « Trop mignon ! » Elle tourne la tête vers lui, les yeux remplis d’espoir. « On a la place dans la chambre non ? » Bien sûr qu'il y a assez de place ! Ce n’était absolument pas prévu dans la liste qu'elle s'était faite, enfin si elle voulait des peluches néanmoins pas de ce format, mais elle même n’est pas à l’abri d’un coup de cœur.

Bien sûr, c'est trop long de lister, et j'imagine bien que Joo Hee a énormément de choses en tête. Je ne sais même pas pourquoi j'ai dit ça en fait, parce qu'elle semble savoir exactement ce qu'elle veut et je lui fais confiance. Arpenter les rayons pour acheter ce genre de choses, ça ne fait pas partie de mes qualités alors je préfère laisser ça à Joo Hee, surtout qu'elle y prend un certain plaisir. Cela ne veut pas dire que je ne suis pas impliqué dans notre couple ou même notre famille à venir. La preuve, je suis là avec elle, à subir ses sautes d'humeur. Bien, alors des plaids, une commode et des peluches. Je verrai, ou plutôt je subirai. Alors, nous commençons notre périple, gardant le pas lent pour nous permettre de tout regarder attentivement. Si on rate ne serait-ce qu'un article, Joo Hee entrera dans une colère noir. Un pitbull, un pitbull je vous dis. Pour ma part, je divague. Je lui tiens le bras sans réellement réagir, jusqu'à ce que Joo Hee ne s'agite autour de moi. Allez, ça commence. Je soupire silencieusement et me tourne vers l'objet de ses convoîtises. Une putain de peluche d'un mètre cinquante de haut. Putain elle veut ma mort. Je ne suis pas venu ici pour souffrir, ok ? « Et bien oui, la chambre est suffisamment grande pour la peluche, mais tu es sûre de toi là ? » Je la regarde avec un air dubitatif. Joo Hee fonctionne souvent au coup de coeur et j'ai bien peur qu'elle en ait plusieurs cet après-midi. Et la liste exhaustive qu'elle avait dans sa tête va considérablement s'allonger. Mais, voyant qu'elle n'en démord pas, je finis par rouler des yeux et sortir mes mains de mes poches. « Fine... Attends-moi là. » On n'allait définitivement pas pouvoir nous trimballer une peluche pareille le temps de notre shopping. Je m'éclipse quelques secondes de mon épouse pour aller chercher un caddie grande taille, puis je reviens et m'approche de la fameuse peluche. Maintenant, admirez mon corps de lâche qui essaie de foutre cette maudite peluche par la tête dans le caddie. Difficilement, j'y arrive, et je frotte mes mains, satisfait de mes efforts. « C'est la seule de cette taille qu'on prend, on est d'accord chérie ? On n'aura plus la place après. » Vient le moment de négocier. Si je vais perdre ? Oh bah sûrement. Et c'est bien ça qui m'inquiète.

Joo Hee n’avait pas même songé à dévier un seul instant à la liste qu’elle s’était fixée. Pourtant, lorsque son regard à croisé celui de ce lapin géant, elle ne put résister. Il était grand, il semblait si beau et si doux, tellement merveilleux qu’elle le voulait dans la chambre de sa fille. Alors elle avait tourné les yeux vers Ji Hoon, remplie d’espoir même si en réalité, elle ne lui laissait pas réellement le choix. La jeune femme est de base plutôt capricieuse mais alors depuis que les hormones s’en sont mêlées, c’était pire. Ce fut limite un réel outrage de l’entendre lui demander si elle était sûre d’elle. « Bien sûr, pourquoi ? » Quelle question ! Elle continue de récupérer quelques articles qu’elle avait précédemment remarqués sur les magazines et présent dans ce rayon. Les objets dans les bras, elle attend le retour de Ji Hoon et qu’il ait foutu le lapin géant dans le caddie avec grand mal pour lui lister. « Jouet pour quand elle fera ses dents, peluche normal et une qui chante une berceuse et fait de la lumière. » Les peluches, c’est fait ! Enfin, c’était fait jusqu’à ce qu’elle ne voit la même peluche géante mais sous la forme du chat blanc dans les aristochats. « Tiens moi ça stp. » Elle lui refourgue tout ce qu’elle avait en main pour échanger les peluches géantes. Elle n’allait pas lui demander, il allait commencer à gueuler. Comme lui elle galère un peu mais fini par y arriver. « Le chat est bien plus mignon que le lapin ! » Déclare-t-elle comme si elle avait besoin de se justifier, elle récupère ce qu’il a dans les bras pour le mettre dans le caddie. L’homme bien trop lent ! « Tu crois que le chauffe-biberon on l’assortit à la pièce ou on le prend en rose ? Peut-être autant prendre une couleur neutre, on sait jamais. » Ca pourrait servir pour d’autres ou pour eux.

J'étais assez fier de moi. Me sentant utile pour Joo Hee, même si je me retiens de rouspéter avec ces achats compulsifs, j'ai au moins concédé à la prendre cette grande peluche. Alors je la regarde, tandis qu'elle me liste les petits objets qu'elle a récupéré en mon absence. Je n'ai rien à redire, je trouve ça mignon et utile, notre fille ne manquera de rien à ce niveau-là. Je hoche simplement la tête, prêt à replonger mes mains dans mes poches. Sauf que le regard avisé de mon épouse la força à me refourguer toutes les affaires dans mes bras. Je réceptionne le tout un peu maladroitement, à la va-vite, faisant attention de ne rien faire tomber. Et là, elle m'inflige un spectacle des plus blasants. Ah bah oui, un chat c'est plus mignon qu'un lapin. Et encore, je la trouve raisonnable puisqu'elle échange elle-même les peluches. J'aurais quand même voulu qu'elle me le demande pour qu'elle ne se fatigue avec son ventre. Mais quand Joo Hee est déterminée, rien ne peut l'arrêter. Je ne dis rien de plus, souriant simplement à sa déclaration, avant de la laisser mettre le reste des achats dans le caddie. Me voilà libéré. Puis, alors que je tends mes bras pour mieux disposer la grosse peluche dans le caddie, je l'écoute. En effet, une couleur neutre serait mieux. « Va pour du blanc alors. Comme tu dis, on ne sait jamais. » Un bref moment de complicité entre nous, je passe délicatement ma main dans son dos pour caresser son omoplate. J'observe son visage caché par le masque, les lunettes et la casquette. J'en profite pour glisser une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. « Demande-moi pour porter les affaires, d'accord ? Ne va pas t'épuiser inutilement. » Tendre, voulant être un réel soutien pour Joo Hee, je lui embrasse la joue avant de tirer le caddie pour continuer notre périple. Je me demande s'il y a encore beaucoup de choses à acheter, car j'ai déjà l'impression que le caddie est plein à craquer avec l'immense peluche de chat.

Ce magasin était en quelque sorte une boutique de vêtement deux point zéro. Joo Hee avait une liste bien précise en tête, elle savait ce qu’elle voulait, comme d’habitude d’ailleurs, mais il faut croire que dévier était totalement inévitable. Cette peluche géante de lapin puis de chat semblable à celui du dessin animé de Disney l’avait faite craquée. C’était à croire que c’est sa fille qui s’égarait pour elle finalement. Les peluches échangées avec de légères difficultés pour la déloger mais pas pour la porter –honey please, c’est une peluche- et les autres articles remis dans le caddie, elle ne peut s’empêcher de sourire d’un air satisfait. Enfin, cela ne dura à peine que quelques secondes, jusqu’à ce qu’elle interroge son mari sur la couleur parfaite du chauffe biberon. Rose ou blanc ? L’enfant qu’elle attend est une fille, encore enceinte de celle-ci il est encore un peu difficile de penser à un potentiel deuxième enfant mais après tout, on ne sait jamais ? Joo Hee aimerai deux ou trois enfants mais elle ignore ce qu’en pense Ji Hoon. Finalement, peut-être que l’être qui grandit en elle leurs fera tellement la misère qu’elle demandera la castration de Ji Hoon ? Ou peut-être pas ? Seul l’avenir nous le dira. « En blanc alors ! » Et puis, dans l’hypothèse qu’ils ne font pas d’autres enfants, ce sera plus facile à revendre. Enfin, sûrement. Pendant un léger instant, elle laisse les mains de Ji Hoon se balader légèrement dans son dos puis ses doigts remettre une de ses mèches. « C’est juste une peluche. Je peux t’en porter deux en développer coucher à la salle. » Affirme-t-elle avant de se mettre à rire. Après tout elle est juste enceinte, elle n’est pas malade. « Mais ne t’en fait pas, pour tout ce qui est énormeee, je te les laisse ! » Ouais elle est pas malade mais faut pas abuser non plus. « Bon aller, on a encore trop de trucs à acheter ! » Se ressaisit-elle finalement avant de tourner les yeux vers Ji Hoon. « Tu voulais acheter un truc spécial ? Quelque chose que tu avas repéré ou genre je sais pas, un truc qui fait ton éloge ? J’ai déjà trouvé des body qui montrent combien sa mère est merveilleuse et même des baskets identiques aux miennes pour qu’on soit assorties ! »

Joo Hee, cette femme forte en tous points. Je pense ne jamais m'y faire. Même dans la pire des situations, elle fera tout d'elle-même. Je suis sûr que ça ne lui a même pas traversé l'esprit de me demander de l'aide. Quelle frustration, quelle impuissance de la voir si indépendante. Je pense trop m'inquiéter pour elle, en fait. Surtout depuis qu'elle est enceinte, j'éprouve le besoin de tout faire à sa place, pour la soulager. Mais Joo Hee ne s'avoue jamais vaincue, là est le problème. C'est une autre raison pour laquelle je l'aime et que j'ai décidé de l'épouser. Joo Hee, cet électron libre que je serai probablement incapable de dompter. J'aime les choses qui me résistent, cette femme est décidément faite pour moi. Pour qui d'autre sinon ? Personne d'autre que moi. Et elle aura beau m'épuiser avec ce shopping si particulier, je ne compte pas m'enfuir. Alors je la regarde, je l'admire, elle me fascine. C'est comme si des flammes s'embrasaient dans ses yeux quand elle parle. Elle est d'une telle dévotion que je m'en veux presque d'être si calme. Mais je suis l'eau qui dort, et elle est le soleil qui brille. Ca a toujours été comme ça entre nous. Et tandis qu'elle me fait part de sa multitude d'achats compulsifs qu'elle a fait, je commence à réfléchir ce que moi je pourrai bien offrir à notre fille. Je n'y ai jamais réellement pensé, avant aujourd'hui. Ca me semble tellement loin, tellement irréel et pourtant, elle sera bientôt parmi nous et je devrai me réveiller. Des bodys, des petits baskets, qu'est-ce que c'est à côté de tout l'amour que je veux donner à cet enfant ? Je cligne simplement des yeux, comme pris sur le fait, avant de souffler et de me confesser. « Pour être honnête, je n'en sais rien. » Au moins c'est dit, et je sais très bien que je vais recevoir les foudres de ma femme en pleine face. Je ne la laisse donc pas répondre, continuant sur ma lancée. « Je n'ai rien à lui offrir de matériel, en fait. Je voulais jouer du violon pour elle quand elle s'endormira... » Pour dire la vérité, je n'apporte pas vraiment d'importance à tout ce qui est matériel. La symbolique me parle beaucoup plus. Je ne suis pas sûr que Joo Hee puisse le comprendre et afin de ne pas la rendre verte de rage, je reprends le caddie et m'éloigne dans les rayons. « On va acheter des livres. Pour lui raconter des histoires. Et des CDs avec de jolies musiques dessus. » Je fais des efforts, non ? Pas sûr cependant que ce soit assez pour Joo Hee la tempête.

Elle avait tout préparé Joo Hee. Elle avait une liste entière avec un tas de vêtements et accessoires complètement gaga avec écrit dessus combien sa mère est parfaite ainsi que des articles assortis aux siens. Mais Ji Hoon, lui, est-ce qu’il avait des choses en tête ? Ce fut donc tout naturellement que Joo Hee lui posait la question. Après tout, peut-être qu’il n’avait pas osé en parler bien qu’elle en doute très fortement. Joo Hee a un fort caractère certes mais pas non plus au point d’écraser son compagnon ni de l’empêcher de parler ou d’exprimer son avis. Alors, lorsqu’il lui annonçait qu’il n’en savait trop rien du moins rien de matériel, cela ne l’étonna pas. Vu comme ça, on pourrait facilement s’imaginer que la venue prochaine de sa fille lui est insignifiante, qu’il s’en fout un peu d’elle, qu’il ne l’aimera pas. Mais Joo Hee sait que ce n’est pas le cas. Si au début elle doutait que la venue de cet enfant lui fasse plaisir, elle n’en doute plus réellement aujourd’hui. Elle le sait juste encore et sûrement trop apeuré à l’idée de devenir papa pour s’enflammer comme elle. Cela viendra sûrement avec le temps. Elle le suit donc lorsqu’il reprit son chemin vers d’autres rayons. « Et pourquoi tu ne me joues pas de violon pour m’endormir à moi ? » Elle hausse les sourcils dans une fausse indignation avant d’ajouter. « Tu sais que à ce qu’il paraît ils entendent ou ressentent la musique je ne sais plus ? Je l’ai lu dans un magazine ! Faudra que je te montre ! » Après tout, Joo Hee s’est mise à lire tellement de magazine et livres sur la grossesse et le développement de l’enfant qu’elle finit parfois par tout s’emmêler et de d’oublier certaines informations. Elle ne s’en inquiète pas pour autant, ce n’est pas tous ce ouvrages qui vont la faire devenir maman, sa fille par contre oui.

« Parce que je sais t'endormir autrement. » Réponse sortie du tac au tac, faisant partie de notre petite complicité que j'aime partager avec elle. Parce qu'elle sait où je veux en venir, et que ça m'amuse plus que de raison. Les rayons défilent devant moi, avec des tonnes d'accessoires pour bébé. Tout me semble si irréel, si lointain. Un avenir que j'ai pourtant embrassé dès lors que j'ai dit oui à Joo Hee devant cet autel. Nous avons fait un bond fulgurant vers notre futur à deux. C'est la suite logique des choses, avoir un bébé. Pas vrai ? Un souhait auquel Joo Hee s'est toujours accroché. Le traumatisme de ce premier être perdu par ma faute. De mauvais souvenirs qu'elle cherche à dissimuler avec cette nouvelle grossesse. Je le sais, je peux la comprendre. Mais je suis différent d'elle. Si différent... L'excitation dont fait preuve mon épreuve, je la ressens également, mais une part d'ombre anime également mon coeur. Cette part d'appréhension, de crainte de devenir père du jour au lendemain. Je pense que c'est normal de ressentir ça, surtout à ce stade de la grossesse où je peux voir le corps de Joo Hee changer. Je ne veux pas être un échec pour elle, ni même pour notre fille à naître. Et même si je me doute qu'elle me comprenne quand je dis ne pas être matérialiste, je reste anxieux. Et mes pas sont moins assurés. Plus lents, plus lourds. Je m'appuie contre le caddie en soufflant, extériorisant par la même occasion un nouveau pic d'anxiété. Joo Hee me rejoint ensuite avec son naturel enjoué, me parlant des vertus de la musique sur le foetus. « Ca doit être pour ça qu'ils proposent des casques ventraux. » Je lui pointe du bout du doigt l'étalage avec la multitude de casques à disposer sur le ventre. Encore un beau produit de consommation ça. Pourtant, je n'éprouve pas le besoin d'en acheter un. Je ne sais pas pour Joo Hee, mais ça, c'est moins mon truc. Je m'éloigne, restant dans le même rayon, pour regarder quelques CDs et DVDs. Que des trucs qui ne m'inspirent rien. Je n'ai pas envie que ma fille écoute n'importe quoi après tout. Non, ce n'est définitivement pas dans ces rayons que je trouverai de quoi égayer ma curiosité. « Chérie, et si on allait voir les poussettes ? Je commence à étouffer ici. » Trop de choses. Trop d'informations, trop de réalité en pleine face. Joo Hee a déjà tout prévu dans sa tête. Elle sait quoi acheter. Mais moi, c'est le néant le plus total. Alors me raccrocher à quelque chose de plus concret comme une poussette, cela semble être plus de mon ressort.