Rendez-vous annulé au dernier moment, Iwan s’était retrouvé sans aucun plan une après-midi d’été où le soleil brillait. Il ne pouvait pas en vouloir à la personne, il allait juste falloir qu’il trouve autre chose à faire. Ce n’était pas un gros souci pour lui de contacter tous ses proches et de faire un plan à la dernière minute, Iwan était quelqu’un de suffisamment social pour trouver une activité en dix minutes à peine. Marchant sans trop regarder sa direction et les yeux plantés sur son téléphone pour contacter des amis, il ne vit pas trop ce qui se passait en face de lui. Tout ce qui était certain, c’était qu’une jeune femme qu’il n’avait jamais vue se retrouva contre lui et faillit faire tomber son téléphone au passage. Il y avait sans doute une raison – bien que narcissique pour plaisanter, il savait qu’il n’était pas le genre d’homme qui faisait tomber les foules à son passage. Mais la jeune fille avait beau garder un visage neutre, ça n’avait pas échappé à Iwan qu’elle avait une voix un peu tremblante.

Il l’observa un peu quelques secondes. Il ne savait pas trop comment s’y prendre. Bien sûr que ça ne l’avait pas dérangé et qu’il n’était pas en colère, mais cette jeune femme paraissait tellement gênée et en même temps imperturbable qu’il ne savait pas trop quoi lui répondre ou comment agir. Elle lui était juste rentré dedans, qu’est-ce qui rendait cette ambiance si lourde ? Iwan se mit à rire légèrement, pour détendre un  peu l’atmosphère ; et fidèle à lui-même, il dit : « Les choses vont beaucoup trop vite entre nous, vous ne trouvez pas ? ». Sans doute que ça allait embarrasser la jeune femme encore plus mais Iwan n’était pas un homme qui réfléchissait tant que ça non plus, il avait juste balancé la première phrase susceptible de rendre l’atmosphère un peu moins lourde. Il espérait quand même qu’il n’allait pas la faire fuir, il voulait juste la taquiner… après tout elle avait été beaucoup trop gênée pour rien.

De toute évidence, la jeune femme ne semblait pas être la gentillesse en personne. Elle ne lui décrochait pas un seul sourire et surtout, elle lui répondait comme s’il avait commis l’un des plus grands crimes de l’univers. Tout ce qu’il avait fait, c’était détendre l’atmosphère en la taquinant, pourquoi le prenait-elle aussi mal ? Elle pouvait être embarrassée, c’était normal, mais de là à l’agresser, lui. Il n’y était pour rien, si elle avait peur des abeilles et si le seul refuge qu’elle avait trouvé, c’était ses bras. Lui, il trouvait la situation amusante, pas si gênante que ça. Il avait vécu bien pire que ça… il fallait qu’elle se détende, un peu. Relativiser. C’était mieux de tomber dans les bras d’un inconnu que de trébucher devant tout le monde, par exemple. « Franchement ? Je pense que je suis quelqu’un d’hilarant. », répondit-il avec le même sourire. Ce n’était pas une fille à l’humeur massacrante qui allait changer son enthousiasme habituel. Pensant que c’était terminé et que je ne reverrai plus cette femme au sourire visiblement très cher, je me remis à avancer aussi – mais c’était sans compter l’abeille qui semblait trouver en l’inconnue une très bonne amie. Iwan ne jugeait pas, mais il était certain que l’abeille aurait pu trouver plus chaleureux. Il laissa la jeune femme se cacher derrière lui, ignorant s’il devait juste attendre et ne rien dire ou continuer de la taquiner pour lui montrer que ce n’était pas dramatique. Il n’hésita pas si longtemps, ce n’était de toute façon pas son style de se taire dans une telle situation. « Qu’est-ce qui vous fait si peur ? Elle est mille fois plus petite que vous et peut-être mille fois plus gentille aussi ! » Iwan ne reprochait pas à l’inconnu son manque d’amabilité. Des personnes comme elle, il y en avait beaucoup. Elle avait peut-être une mauvaise journée, ou une vie déprimante et une raison plus que suffisante d’être telle qu’elle était. Plus qu’un reproche, il voulait juste rire un peu. « Vous voulez que je sois votre garde du corps jusqu’à la sortie du parc ? » demanda t-il. Avec son éternel sourire taquin sur les lèvres, elle pouvait penser qu’il se moquait d’elle ; mais il proposait réellement ça, si ça la terrifiait autant. Lui, ce dont il avait la phobie, c’était les reptiles… et à Singapour, des reptiles, des crocodiles, il y en avait. Alors il savait ce que c’était.

Iwan sentait bien que la jeune femme ne l’aimait pas et il n’avait pas pour habitude de traîner avec les personnes qui ne le voyaient pas à sa juste valeur. Il aimait attirer les regards, l’attention et l’affection. Quand il n’attirait pas les trois en même temps, il ne perdait pas son temps et allait charmer ceux ou celles qui se laissaient bien charmer. Cela dit, il était aussi un jeune homme qui aimait bien s’amuser et taquiner. Si la vie lui offrait une si belle opportunité de titiller une jeune femme se pensait bien supérieure à lui et bien plus intelligente, il ne s’en priverait pas. Si elle était plus agacée qu’autre chose par son comportement, lui il s’amusait bien. Et l’abeille semblait être du même avis, puisque dès que l’inconnue se remettait à marcher la tête haute, elle réapparaissait pour lui rappeler que ce n’était pas encore fini. Est-ce que la jeune femme employait des mots durs parce qu’elle souhaitait dissimuler son embarras – ou bien était-elle toujours ainsi ? Il avait bien envie de le découvrir. Il préférait toujours ceux qui le regardaient de haut que ceux qui mimer de l’apprécier pour mieux lui cracher dans le dos, principalement parce qu’il se rendait compte toujours trop tard de qui étaient les hypocrites. « Vous avez raison. Par exemple, vous êtes petite mais vous êtes dangereuse. Ça ne doit pas être une question de taille. Vous aussi vous mourrez quand vous piquez avec vos mots ? » demanda t-il, l’air faussement innocent. Il eut cependant presque décontenancé à la réaction de l’inconnue et à sa réponse. « Qui a dit que je vous accompagne jusqu’à la fin du parc en tant que père ? Je vous accompagne en tant que garde du corps, ça n’a rien avoir avec le fait d’être un enfant ou un adulte ! Ce sont les princesses qui ont des gardes du corps. » surenchérit-il, en souriant.

« Puisque je vous vois encore vivante, j’en déduis que piquer les autres avec vos mots ne vous tuent pas… vous devez plus être une guêpe alors. » compléta t-il sans prendre en considération une seule seconde la demande de la jeune femme de ne pas la comparer à ces insectes. Soo Hwan se fichait bien de laisser une bonne ou une mauvaise image à cette inconnue. Vu le comportement de cette dernière, elle n’aurait de toute façon pas apprécié Soo Hwan rien que par fierté ; le simple fait d’avoir eu besoin de se cacher derrière lui à cause d’une abeille et de montrer une de ses faiblesses avait dû  blesser si fort son égo qu’elle n’aurait jamais souri à la personne qui connaissait une de ses faiblesses. En conclusion, foutu pour foutu, autant y aller à fond ; lui, ça l’amusait. Elle était toute petite et toute mignonne mais elle balançait des mots crus et froids, en quelque sorte, il trouvait que ça la décrédibilisait pas mal. Un peu comme les petits chiots, comme les caniches, qui aboyaient forts mais dont les morsures ne laissaient que de petites empreintes. « Si vous n’aviez pas envie que je vous protège, vous n’aviez qu’à pas vous cacher derrière moi en premier lieu. », releva t-il en ayant un léger rire. « J’ai tout mon temps devant moi, ça ne me dérange pas de rester immobile au milieu de ce parc simplement pour faire un mur entre vous et l’insecte, je proposais juste de vous escorter au cas où vous ayez quelque chose à faire. » Comme par exemple rencontrer des amis ; mais il doutait fort que cette jeune femme soit le genre de personne à avoir un grand nombre d’amis.

Il haussa les épaules à la supposition de la femme. Il se fichait bien de ce qu’elle pensait de lui, ça lui allait très bien de rester un imbécile, il trouvait même que ça lui correspondait plutôt bien, imbécile. Contrairement à elle, qui semblait prendre vraiment à coeur qu’il la compare à un insecte, lui s’en fichait vraiment. « Je suis plutôt d’accord. Pour être moins poli, je dirais même que je suis un con, tu trouves pas ? » rajouta t-il en souriant. S’il pouvait l’agacer encore plus en disant ça, il le ferait. Ça l’amusait beaucoup trop. « Et pourquoi tu regrettes de le dire ? » demanda Soo Hwan, en laissant tomber la politesse. Il s’en foutait, de toute façon ils n’allaient probablement pas s’entendre alors à quoi bon rester formel ? Il avait l’excuse d’avoir grandi aux États-Unis si elle se mettait en colère. « J’ai dis moi même que j’étais un mur entre toi et l’abeille, je vois pas pourquoi tu regrettes de le dire. » Et voilà comment il se mettait à jouer sur les mots dans le simple objectif de faire perdre le calme de cette jeune femme. Il explosa de rire en observant l’inconnue essayer de partir sans lui répondre et revenir en courant derrière lui à la vue de cette abeille qui semblait avoir décidé de notre destin. Le spectacle était tellement hilarant, il ne pouvait pas se priver de se moquer. « Tant pis pour toi, c’est toi qui a dit que tu voulais pas d’une escorte, alors il va falloir que tu me supportes jusqu’à ce que l’abeille change de proie. », dit-il entre deux rires moqueurs.