Dix-neuf heure vingt-trois. C’était bientôt la fin pourtant les quelques minutes restantes semblaient être les plus intenables. Comment elle avait eu l’idée d’attendre Seo Eon si longtemps juste pour pouvoir l’entraîner et lui faire un anniversaire surprise ? Elle-même l’ignorait. Elle n’était pas le genre de fille à penser à ce genre de choses : à la limite, elle préférait organiser quelque chose avec l’accord de la personne. C’était risqué, il se pouvait qu’il ait déjà quelque chose de prévu. Avec une autre fille. Mais l’idée ne plaisait pas vraiment à Ji Eun et elle avait déjà attendu ici pendant plus d’une heure, sachant qu’il finissait à dix-neuf heure trente mais ignorant s’il resterait jusqu’à la fin.
Dix-neuf heure vingt-six. C’était si long. Tout n’était pas prévu à la minute pour l’anniversaire de Seo Eon, bien au contraire. Elle s’était juste dit qu’elle l’amènerait manger quelque part, ce qu’il voulait manger. Elle aurait pu réserver un restaurant mais elle voulait vraiment lui faire plaisir, pas lui imposer des plats dont il n’avait pas forcément envie. Était-elle devenue folle ? Sans doute. Seo Eon et elle ce n’était qu’un jeu. Au début ce n’était qu’un jeu, or personne ne prenait autant de mal pour un jeu. Elle n’était pas mauvaise perdante, d’habitude.
Dix-neuf heure vingt-huit. Elle soupira. Est-ce que le temps passait plus lentement ou est-ce qu’elle avait cette sensation parce qu’elle avait hâte qu’il quitte cette salle ? Pourquoi fallait-il qu’il reste jusqu’à la fin de toute façon ? Il aurait pu sécher une demi-heure, par exemple. D’accord, ce n’était pas la meilleure chose à faire mais elle n’aurait pas eu à attendre aussi longtemps.
Dix-neuf heure trente-et-une. Une minute de retard. Décidément même quand il ne le voulait pas, il était en retard – mais finalement elle vit des étudiants quitter le lieu et elle se releva pour ne pas le louper. Il y avait peu de chance qu’elle le loupe, de toute manière. Puis enfin, elle le vit dépasser le seuil de la porte et se plaça en face de lui afin d’être certaine qu’il ne lui passe pas à côté sans même la remarquer. Le connaissant, il en était capable.
« À partir de maintenant, tu dois me donner au moins… cinq heures de ton temps. »
Elle avait dit le chiffre au hasard, sans vraiment se rendre compte que rester avec lui cinq heures, c’était rester avec lui jusqu’à minuit et demi. Mais bon, ça ne la dérangeait pas de rester avec lui tant de temps. Elle aimait sa présence.
Surprise event (#SeoEun)
Contrairement aux apparences, le sango resta quatre heures à noter soigneusement son cours dans son bloc-notes, ne baissant sa plume que pour regarder les diapositives projetées sur le tableau par le professeur, ou alors lorsqu’il jugeait que la partie de cet exposé n’était pas important à transcrire et que sa mémoire avait déjà assimilé l’information. Ce n’était pas sa jolie camarade à sa droite qui avait réussi à la déconcentrer les dix dernières minutes restantes, mais simplement l’odeur de la nourriture. Il avait les crocs, et le paquet de chips ouvert à l’autre bout de la pièce, avait suffi à faire crier famine à son estomac. Il écoutait le cours d’une oreille plus distraite, lorgnant sur la table au fond, où la personne semblait tranquillement prendre une pause goûter bien tardive. Ce n’est que lorsque le prof annonça la fin de la séance par son traditionnellement « nous verrons cela la fois prochaine », que le garçon commença à ranger son sac mais doucement puisque sa voisine, ayant enfin une réponse de sa part, continuait à discuter avec lui. S’il avait que Jieun l’attendait à la sortie de l’amphithéâtre, pour sûr qu’il aurait coupé court à la discussion, mais ne le sachant pas, il échangea des mots, rien de méchant.
À peine un pied dehors qu’il se fait agresser visuellement et verbalement par une demoiselle qu’il reconnait immédiatement. Il tapota l’épaule de sa camarade dont il n’avait pas retenu le nom, du moins, celui-ci lui reviendra à l’esprit plus tard, en signe signe de goodbye avant de se concentret sur Jieun, sourire aux lèvres. « Cinq heures ? Pourquoi ? Tu vas te transformer en petite souillon, bondir dans un taxi-citrouille et me laisser un p’tit souvenir que je vais devoir te rapporter ? » demanda-t-il avec son ton taquin, avant lui attraper l’épaule pour l’éloigner de la porte. À rester ainsi, les gens allaient finir par la bousculer et ça aurait été dommage de devoir ramasser la demoiselle en miette. « Sinon, yo ! J’savais pas que tu m’attendais, si j’avais su, j’aurais séché »
L’attente avait rendu l’apparition de Seo Eon encore plus désirable que d’habitude. Déjà en général, elle aimait bien être avec lui, mais cette heure d’attente n’avait fait qu’augmenter ce sentiment. C’était sans doute pour ça qu’elle eut un grand sourire quand elle le vit sortir, et pour la même raison qu’elle lui avait sauté dessus sans lui laisser une seule seconde de répit. Elle eut un rire à la phrase de Seo Eon mais elle secoua la tête. « Oh non ! Bien sûr que non, cinq heures c’est le minimum… si tu veux rester avec moi plus longtemps, j’accepte avec joie. » Ji Eun n’aurait jamais pensé qu’elle apprécierait ainsi la présence de quelqu’un, en dehors de sa sœur et de Kwang Jin. Pourtant c’était le cas. Quand elle était avec Seo Eon, elle était heureuse et elle pouvait être elle-même. Elle n’avait pas besoin d’être sérieuse, pas besoin d’être mature, pas besoin d’être à l’écoute. Elle pouvait juste plaisanter avec lui.
Pour autant, si un jour l’envie lui venait, elle aimerait que Seo Eon se confie à elle. Leur relation actuelle ne leur permettait pas vraiment ce genre de moments sérieux – ils passaient leur temps à se chamailler et se taquiner. Ça ne voulait cependant pas dire qu’elle n’était pas prête à l’écouter, bien au contraire. Sans doute, Seo Eon était la première personne dont elle avait envie de tout savoir, la personne qu’elle pourrait écouter se confier pendant des heures sans s’ennuyer. « Cela dit, ce n’est pas totalement faux que je vais te laisser un petit souvenir… » On ne pouvait pas appeler ça comme ça : plus communément, c’était un cadeau d’anniversaire, qu’elle avait acheté et caché dans son sac à main. Elle n’avait pas vraiment su quoi lui acheter, après tout, en dehors des taquineries, il ne lui avait jamais vraiment dit ce qu’il aimait ou voudrait avoir. « Je ne voulais pas être coupable de ton échec scolaire en te demandant de sécher et je voulais te faire une surprise, même si j’avoue que l’attente était fatigante. Tu sais quel jour on est aujourd’hui, au moins ? » Elle le regarda d’un air suspicieux. Le connaissant, il était parfaitement capable de l’ignorer…. Mais si d’autres avant elle lui avaient souhaité son anniversaire, alors il en avait conscience.
Pour le coup, le jeune homme ne s’attendait absolument pas à voir Ji Eun l’attendre à la sortie de son amphithéâtre. Il était agréablement surpris de sa présence : certes il trainait plus souvent avec, mais généralement, à moins que ce soit une coïncidence, ils s’envoyaient des messages pour se fixer un point de rendez-vous. Heureusement que le cours n’était pas annulé ou reporté, elle aurait pu attendre pour rien pendant longtemps ou juste venir pour rien. « Cinq heures, c’est long mine de rien ! Par ta faute, je vais rater ma soirée préférée des films naze du jeudi soir » déplora-t-il faussement en se disant qu’il avait bien fait, au final, de refuser de remplacer son ami à la supérette comme il l’avait l’habitude de le faire. Taewoo allait lui manquer, mais Ji Eun était là donc il était le grand gagnant de l’histoire. « Mais je retiens, tu as déjà donné ton consentement à rester au-delà de tes cinq heures impartis si jamais l’envie me prenait. » En disant cela, Seo Eon n’avait pas forcément d’idée en tête, mais il se connaissait, ce n’était pas à minuit qu’il allait rentrer pour aller se coucher : s’il le faisait, il passerait au moins une bonne heure à jouer à des jeux en ligne. De façon générale, il dormait peu, du moins il rattrapait les heures de sommeil le week-end ou les jours où l’envie de sécher le prenait violemment.
Non pas qu’il feigna de ne pas entendre Ji Eun, mais le couloir était si bruyant qu’il venait de couvrir la voix de cette dernière. De sa phrase, il n’entenda que souvenir, et pensa juste que des souvenirs, c’était certain qu’ils allaient s’en faire car de toute, chaque sortie avec elle était mémorable, comme sa tenue à la Saint-Valentin, et la pince dans ses cheveux qu’elle avait. « Sympa ta broche au fait, j’espère que tu ne l’as pas mise juste pour me voir ? » fit-il avec le même sourire moqueur qu’il avait eu lorsqu’il avait posé la même question le jour où il était sorti au parc d’attraction, avant de répondre à ses propos avec nonchalance « au pire, tu devras prendre tes responsabilités pour le restant de tes jours et j’aurais une bonne excuse pour te soutirer de l’argent de poche et ainsi, dépenser de l’argent sans avoir à bosser ». Il s’arrêta un instant, avant que des lueurs malicieuses pétillent dans son regard « le jour où le mode vibreur de mon téléphone devient le mode par défaut ? »