ça te peine de la voir dans cet état. tu ne sais pas ce qui se passe et tu as quand même envie de l’aider à aller mieux. t’as ce syndrome du superhéros en carton. tu veux aider tout le monde et tout le temps et au final tu prends le malheur des autres sans jamais rien dire. mais toi ? qui t’aide ? personne, parce que tu ne les laisses pas faire, sauf quand c’est toi qui le demande comme tu as fait avec yury la dernière fois. mais là c’est elle qui a besoin de toi et de compagnie. tu lui tends donc les sushis et tu t’apprêtes à partir quand elle te demande si tu veux manger avec elle. tu hausses les épaules avant de poser le regard sur la jeune femme. « t’es sûre ? » demandes-tu malgré le fait que tu veuilles rester près d’elle. « t’as l’air d’avoir besoin d’être seule. » tu supposes que ce soit le cas vu la façon dont elle a quitté sa maison. tu ne veux pas être un poids pour elle, surtout si elle n’a pas envie d’être en compagnie de gens. mais tu sais que dans ce genre de moment, il vaut mieux rester avec des gens. cependant chaque personne est différente et chaque personne à sa façon de surmonter les épreuves. peut-être que la jeune femme ne te dit ça que parce qu’elle veut être polie et pas te demander en t’envoyant chier de quitter les lieux. « à moins que tu veuilles en parler… » tu insinues de cette façon que puisque tu l’as vu sortir de chez elle, tu as vu l’état dans lequel elle était. tu lui laisses le choix de t’en parler ou non. tu ne la forcera pas à te parler si elle ne le veut pas.

Si elle avait besoin d’être seule ? Alana n’était plus certaine de rien. Elle se sentait constamment seule, même entourée de sa famille. Elle ne sortait que peu souvent, pour le boulot la plupart du temps, et n’avait pas réellement l’envie d’aller boire des verres ou de trainer la nuit. Elle se forçait bien évidemment, craignant de trop s’enfermer dans sa bulle si elle ne partait pas à la conquête du monde. Elle est du genre complexe Alana, ne sait jamais sur quel pied danser. Elle aime sa bulle, déteste la nuit, puis finit par détester sa bulle et vivre pour la nuit … elle ne connait que l’ambiance électrique et parfois calme de ce qu’offre Seoul à la nuit tomber. Elle aimerait pouvoir se noyer dans l’agitation du jour, se fondre dans une foule de gens pressés et de mauvaise humeur. Elle ne connait que la luxure et les joies de l’après travail. Elle n’aime d’ailleurs l’hiver que pour ces nuits longues qui tombent tôt sur la ville. Elle se faufile parmi les gens qui débauchent, s’imaginant les côtoyer tout au long de la journée. N’était-ce pas là stupide ? Qui pourrait comprendre ? Elle lève ses yeux vers lui et finit par hausser les épaules. « Il n’y a rien à dire … » dit-elle sincère, ou toute l’histoire d’une vie à raconter. Pas ce soir. Elle s’appuie contre le dossier du banc et attrape un sushi après avoir soulevé le couvercle en plastique. Coincé entre ses doigts elle fixe le petit sushi fourré et le glisse jusqu’à sa bouche dans un silence religieux. C’était les meilleures de la ville et elle lui avait déjà dit. Ça lui faisait toujours du bien de pouvoir en manger … Elle lui tend sa barquette pour qu’il puisse se servir, l’invite à utiliser ses doigts, elle se moquait bien de l’hygiène à cet instant. Elle voulait juste … partager quelque chose, avec quelqu’un. N’était-ce pas maladroit et étrange ? « C’est pas juste … » murmure-t-elle. Rien n’était vraiment juste dans ce monde de toute façon. Elle tourne son visage vers lui et ajoute « Tu connais mon prénom, mais je ne connais pas le tien ... » et pour la première fois elle esquisse un petit sourire. Elle passait commande en utilisant son nom et son prénom, d’ailleurs inscrit sur le ticket agrafé au sac plastique. Elle aurait simplement pu lui demander son prénom, mais Alana ne faisait jamais dans la simplicité. Jamais.