Guo ne pouvait pas abandonner, encore moins maintenant qu’il approchait du but. Il n’avait de cesse de chercher son petit frère sans savoir ce qu’il pouvait faire d’autres pour affiner ses recherches … voilà près de dix ans qu’il avait entreprit de retrouver Yibo, et en dix il n’avait réussi qu’à trouver son pays d’adoption. Il n’était même pas certain que Yibo soit toujours ici, qu’il ait gardé le même prénom … tout ce qu’il savait c’est qu’il avait été vendu à une famille pour adoption mais que les papiers qui leur avait été fourni était factice … son petit frère avait disparu dans la nature et pourtant il était là … juste là, quelques parts, près de lui il le sentait. Guo avait dédié sa vie à la recherche de Yibo et ne cesserait ses recherches que lorsqu’il aura retrouvé le plus jeune, sa dépouille, son corps ou qu’importe … mais il n’abandonnerait jamais. Pas tant qu’il aura la certitude que le gosse qu’il aurait devant lui était son frère. Il s’était donc mis en tête de faire une affiche qu’il distribuera un peu partout dans les rues de la capital en attendant de savoir si Yibo est resté à Seoul ou bien s’il est partie dans une autre ville … tout lui paraissait si immense, c’était pire encore que de chercher une aiguille dans une botte de foin. Guo était en âge de construire une relation sérieuse, de fonder une  famille, de se trouver une carrière, un boulot qui lui plaise … de se construire son chez lui … mais il était incapable d’y penser si ce n’était pas avec Yibo … cela faisait un moment qu’il restait devant cette photocopieuse à s’imprimer de nombreuses feuilles … mais l’imprimante semblait tout aussi capricieuse que lui et fonctionnait une fois sur deux. Assez pour lui mettre les nerfs. Il soupire mais tente de prendre sur lui. « Allez putain fonctionne. » jure-t-il en chinois.

Dix jours. Il les a compté, un après l’autre, secondes qui se transforment en minutes, glissent en de lentes heures. Infernales. Son corps crie son besoin mais il ne l’écoute pas. Il ignore les protestations de son système qui quémandait sa dose d’alcool et de drogue. Envie soudaine, celle de tout arrêter. Il sait qu’il en sera incapable sur le long terme, il ne voulait pas prendre soin de lui-même ou de sa santé. Il avait simplement entendu les paroles d’un ami durant une soirée, lui proposant de ne plus toucher à rien pendant autant de jours que possible, jusqu’à ce que le manque arrive à son comble et alors il se sentira s’envoler au premier rail de coke. Il y’avait plus de choses pour une overdose aussi de cette façon, et il mentirait s’il disait que ce n’était pas une éventualité qui le charmait particulièrement. Le seul problème, la lenteur du temps. Il sentait chaque minute et comptait les secondes. Il dessinait rarement et passer ses journées à dormir ou à simplement errer dans les rues de la ville. Il n’a croisé aucune de ses rares connaissances puisqu’il savait qu’ils l’entraineraient tout de suite dans un bar, sachant bien qu’il leur paiera tout après quelques verres. Aujourd’hui aussi, il marchait sans dessein, jusqu’à ce que son regard croise une librairie. Il pourrait surement s’acheter quelques babioles de peinture. « Tu veux de l’aide ? » murmure-t-il en voyant l’homme devant la machine. Il se pince les lèvres, incapable de saisir pourquoi il avait prononcé ces quelques mots.

Ce n’est pas dans ses habitudes de venir en aide et il en est le premier surpris, pas qu’il n’aime pas les autres, mais il n’a jamais été assez sobre pour s’intéresser à eux. Il perçoit l’accent de l’homme qui lui a doucement répondu, une certaine gêne dans le ton. Chinois peut-être ? Définitivement pas coréen en tout cas. Il s’approche de l’imprimante quand le brun lui laisse la place et lis d’une voix basse les réglages jusqu’à repérer le problème. L’étranger avait surement appuyé sur le mauvais bouton sans faire exprès. « De l’encre ? » prononce-t-il en même temps que lui, mais en coréen pour sa part, un sourire éclairant son visage fatigué aux cernes de plus en plus apparente. Il tapote rapidement sur le bouton qu’il pense être le bon. « Ça devrait aller maintenant. » Puis son regard capte le papier qu’il lui a montré, le visage d’un enfant et un texte qui attire son attention. « Ton frère ? Il a disparu dernièrement ? » Il est surpris qu’un homme de cet âge ait un frère aussi jeune et craint presque qu’il se soit trompé en traduction et parlait plus de son fils.

Guo affiche un petit sourire triste en prenant une feuille imprimée et en hochant la tête. « Oui … il y a bientôt 20 ans. » murmure-t-il. Il se sentait un peu bête d’avouer ça. Courir après un fantôme. « Disons que c’est particulier … et  que l’espoir fait vivre. » ajoute-t-il en frottant sa nuque. Il déglutit et se penche pour ramasser les feuilles. Il grimace un peu, la photo ne rend pas vraiment bien, à force de l’imprimer on reconnait de moins en moins le visage du petit garçon de trois ans qui se tenait fièrement au côté d’un Guowei plus âgé. « On le reconnait à peine sur cette photo … » dit-il contrit avant de sortir la photo originale qu’il avait fait travailler pour pouvoir agrandir le visage du petit garçon nettement. « Vous qui le connaissez pas je peux vous demander si vous arrivez à comparer les deux photos ? Ça va quand même ou bien … ? » Demande-t-il d’un air remplie d’espoir bien qu’il ne soit pas bête … Guo savait dans le fond que même si Yibo trouvait  cette photo il ne pourrait jamais se reconnaitre ….