Il a toujours eu cette lâcheté en lui, incapable de voir la réalité en face, d’avouer ses torts et encore moins ses faiblesses. Sa plus grande faiblesse ; celle de ses mains qui ne savent plus fonctionner comme elles le pouvaient avant, chaque tremblant le faisant tomber un peu plus bas ; rappel constant d’un rêve qu’il frôlait de ses doigts avant de se l’ôter sauvagement de ses propres actions. Elio était un visage qui traçait les contours de ses rêves, contempler son faciès prouvait un peu plus ses échecs. « J’ai mes limites… » Si l’art n’en avait plus, lui était à présent incapable de donner forme à chacune de ses idées et pensées. Il ne pouvait plus peindre Elio comme avant, se laissait subjuguer par sa beauté comme il l’avait fait tant de fois. Et en cet instant, ce n’était pas ses mains qui tremblaient, c’était son corps tout entier en frissons quand le garçon le rejoint (proximité accablante). « Vas t’en, je t’en supplie… » sa voix est basse, un supplice entre ses lèvres alors qu’il fait un autre pas en arrière, cherche à tout prix à fuir un fantôme. Il ne répond à aucune de ses questions. « Oublie-moi. »

Comment le laisser tomber ? Comment partir ? Comment oublier ? Elio se rapproche à nouveau de lui. il caresse sa joue du bout des doigts craignant de le voir s’envoler, comme si la pâleur de sa peau pouvait le consumer. Comme si un simple touché pour le faire disparaitre. Ne disparait pas Nova …. J’ai encore besoin de toi. Elio le repousse à l’intérieure de son penthouse qu’il ne connait que trop bien. Plongé dans la pénombre, la lumière extérieure filtré par les rideaux. Elio le repousse doucement, encore, le fait reculer jusqu’à pouvoir refermer la porte derrière lui. « La chaleur … » c’est la chaleur qui lui a manqué … Le jeune italien se saisit avec plus d’audace le visage de son mentor, en coupe entre ses mains, il le fixe d’un air tendre et vivifiant. Il le voit. Il existe. Il le touche. Il est là, sous son emprise. Il ne lui ferait jamais de mal Elio, mais refuse plus encore de le laisser mourir ainsi … Il l’attire à lui, attrape ses mains tremblantes pour les poser sur son torse. Sent ma chaleur, caresse là comme une amante délicate, n’en ai pas peur, elle ne te fera que du bien. Elio caresse sa nuque en venant coller son front au sien. L’intimité du moment et la quiétude de son souffle contre le sien les réunis comme deux âmes en perdition qui s’unissent pour affronter la noirceur de leur chemin pavé de détresse. Je suis là. Elio plie délicatement les doigts de Nova sur le tissu de sa veste et l’oblige à la faire tomber sur le sol. Il attrape lui-même le reste de ses vêtements qu’il retire. Ne gardant que son jean. Il recule jusqu’à le faire buter contre l’étage contenant les pots de peinture. L’odeur âcre et fruitée lui ravive tant de souvenir que s’en est presque douloureux. « Tu as oublié … » murmure-t-il loin d’être un reproche mais un constat. Il embrasse sa joue, la commissure de ses lèvres, glisse dans son cou alors qu’il plonge la main abimée du plus jeune dans la peinture avant de venir l’étaler sur son propre torse. Il peut sentir la main tressaillant de son mentor mais n’en fais pas fit … il ne veut pas d’œuvre d’art pour aujourd’hui. Il veut son touché, son regard. Il veut être sa toile. Il presse son corps au sien, comme on s’accrocherait à une bouée pour ne pas sombrer.  « Peint moi … » souffle-t-il dans une supplique gémissante à son creux d’oreille. Il glisse sa canine sur son lobe qu’il vient taquiner. Peint moi … Jamais les deux n’ont franchi la limite de l’acte charnel, comme une pudeur et un geste qu’ils préféraient qu’imaginer au travers de leur session de dessin. Mais Elio était un de ses amants, un amant de son âme … ils se fondues l’un en l’autre de tant de façon que le sexe paraissait soudain futile à leur yeux … « Peint moi. » répète-t-il comme si l’absence des mains de Nova sur son corps le brûlait et lui faisait du mal … sauve moi, sauve toi.

Visage du passé, sublimes traits qui n’auraient jamais dû survivre son présent. Elio, souvenir de son talent, de ses doigts qui tenaient gracilement les pinceaux, mélange de couleurs et de soupirs mutins. Elio, Elio. Sa beauté qui lui a coupé le souffle, son corps qui a été sa muse pendant si longtemps. Ils ont été l’artiste et sa belle poupée, un portait qui défie les millénaires, relation si usuelle pour un peinte qu’importe l’époque mais pourtant unique et spéciale aux yeux de Nova. Parce que les autres n’avaient pas eu Elio en muse, il n’a été que le sien. Parce qu’il l’avait fait sien sous les coups de pinceaux, leurs regards lourds de sens. Il l’a aimé sur sa toile, s’est obsédé durant de long mois de son image, jamais lassé de reproduire à la perfection la divinité de son visage. Elio. Rappel de l’artiste, de l’homme qu’un jour Nova avait été, avant de s’ôter ce privilège d’entre ses mains. « Tais-toi… » souffle-t-il difficilement, il recule, comme un animal apeuré en recherche d’un refuge. Mais Nova était déjà dans sa tanière, il n’avait nulle part autre où fuir, seulement l’obligation à accepter ce regard. A parler, peut-être. « Ta gueule. » grogne-t-il, le juron s’échappant plus vulgairement d’entre ses fines lèvres, comme si le fait d’utiliser ce langage-là suffirait à éloigner le garçon de lui. Mais Elio ne fait que s’approcher davantage. Il le tue, il le brûle, à chaque pas fait, chaque centimètre diminué entre leurs deux corps. Jusqu’à ce qu’ils se touchent. Peau contre peau, chaleur consumante, ils n’ont jamais été si proche physiquement. Son visage se retrouve prisonnier des grandes mains d’Elio, comme tout son corps du sien et il dévie du regard, vaine tentative de souffler la distance entre eux. Elio est si proche, c’est impossible d’ignorer sa présence, il le dévore entièrement. Les lèvres d’Elio finissent par s’égarer sur sa peau, sa joue, sa mâchoire, sa gorge et Nova ferme les yeux, pris par les sensations agonisantes. Sa main est prise dans la sienne, il sent la texture de la peinture contre elle – familière et étrangère à la fois, il ne sait pas de quand date la dernière fois qu’il a osé s’approcher de pots. Et sa réaction est naturelle, il panique, les tremblements de sa main se font plus intenses. Il suffoque de leur promiscuité. « Elio… » son prénom est presque un gémissement entre ses lèvres, sa lobe sensible à ses attentions. « Je sais plus… » sa main se ferme en un poing contre le torse du jeune homme, elle retombe un peu plus bas le long de son estomac, laissant une autre trace de peinture. Il n’est pas certain qu’Elio soit au courant de son accident, ou si quelqu’un lui en avait fait part, car Nova avait disparu de sa vie à ce moment. « Mes mains ne servent plus à rien. » Sa voix se brise de rage, il ouvre ses paumes moites de peinture et les repose des deux côtés de la taille d’Elio.

« Tu n’as pas besoin de savoir … juste de faire … » lui souffle Elio avec une pointe de sagesse. Pour lui, ce qu’ils avaient, ne peut s’oublier. C’était quelques choses de biens plus fort que le sexe, que l’amour, ou la maladie. C’était quelque chose d’unique, qui n’appartenait qu’à eux … il vient coller son front au sien en soufflant « fais … fais sans réfléchir … tu n’as pas besoin de créer … juste de faire … » il glisse sa main dans son cou pour l’attirer à lui, la proximité de leurs deux corps donnait l’impressions qu’ils étaient sur le point de s’embrasser. Mais c’était tellement plus … « Touche moi… » gémit le plus jeune comme une supplique douloureuse. Il avait besoin du touché de son mentor sur lui, que ses doigts osseux et fébrile traces des courbes impensées sur sa peau et qu’il fasse de son corps une toile immaculée. Les doigts tremblants d’Elio se glisse sous le débardeur trop ample de Nova et le lui retire lentement. Il n’avait jamais envisagé son corps autrement que comme une œuvre d’art. il s’en voudrait de le souiller de pensées malsaines et pourtant tout était lié. Son désir de ne faire qu’un, son désir de se fondre contre son corps, celui de raviver cette flamme et cette chaleur dans son cœur et son regard. Elio lui attrape ses mains pleines de peintures qui tremblaient légèrement et les embrasse, souillant sa bouche de peinture coloré mais se moquant bien de ce goût acre qui perlait sur ses lèvres. Il niche sa joue vierge de couleur dans cette paume coloré et malade, et la lui fait caresser sa peau. Il soupire d’aise, retrouvant cette main contre laquelle il se lovait si parfaitement bien. C’était si délicat et doux. Plaisant et grisant. Elio redresse son visage où la trace des doigts de Nova se fondait sur sa peau, il le fixe vient coller son torse à celui désormais nu du plus vieux. Il y imprime son empreinte et se plaque contre ce mur comme pour l’empêcher de fuir … ses lèvres se perdent sur sa mâchoire et se glisse dans son cou. Il leur fallait une flamme, un désir ardent pour retrouver cette envie de peindre, surpasser cette peur. « Peint moi. » geint-il en venant marquer le cou de Nova d’un suçon douloureux, lui rappelant qu’il appartenait à la vie et que la mort n’était qu’un lointain présage qu’Elio s’évertuait à repousser. « Peint moi. » répète-t-il en serrant les dents pour contrôler son envie de le pousser plus encore … tout lui était offert, son corps, son âme … Nova n’a qu’à se laisser tomber dans cette chute libre vertigineuse qu’était l’audace.