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Seo Il Nam - To be able to forget means sanity.
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Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Dim 3 Mar - 23:30 Citer EditerSupprimer
Seo Il Nam
music is to the soul what words are to the mind
Il parait que... → Il a commencé à fumer à l’âge de 16 ans, époque où ses parents et lui arrêtèrent de se regarder de la même façon qu’avant. Au début, deux cigarettes par jour lui suffisaient largement. Maintenant c’est un paquet entier, sinon deux en cas d’inspiration. Pas de préférence niveau marque, si on lui en propose il accepte avec plaisir, parfois précédant son remerciement d’un joyeux « Bon, puisque tu insistes… ! » → La nuit ? C’est à ce moment de la journée que tous les trucs intéressants se passent. Même s’il a repris les études, il ne peut s’empêcher de sortir trainer un peu, là où ses pieds le mèneront. Comme dirait l’autre : « On ne change pas les bonnes habitudes » ! Par contre, les grasses matinées, c’est terminé. Voilà quatre ans qu’il essaie de s’y faire, en vain. Il ne compte plus le nombre de fois où il s’est pointé en classe avec les cheveux dans tous les sens, des cernes sous les yeux, et une tête comme s’il sortait tout juste d’une bonne grosse rixe. → Il lui arrive parfois d’écrire des chansons inspirées de conversations privées qu’il aurait pu avoir avec quelqu’un. Et si la personne concernée s’en rend compte, soit Ilnam se fait tirer les oreilles, soit, dans le pire des cas, il perd une bonne relation. Mais c’est plus fort que lui. Si ça l’inspire, il ne trouvera pas le sommeil avant de l’avoir écrit. → La vue du sang lui est insupportable. Chaque fois qu’il en voit, il est pris de nausées. Parfois, il perd carrément conscience. → Il adore les animaux. Même lorsqu'il a le moral à zéro, si un animal pointe le bout de son nez, il s'en va immédiatement jouer avec, oubliant complètement ses soucis. → Ça peut sembler étrange, mais il aime bien les grains de beauté. → Mais ce qu'il aime encore plus, c'est changer la couleur de ses cheveux quand bon lui semble, selon son humeur et ses envies. Ça peut même lui donner des idées pour une nouvelle chanson, si si. Allez savoir comment. → Les rumeurs courent qu’il sait jouer de tous les instruments qui existent, ce qui n'est pas tout à fait exact. Il peut en effet, s’il y met un peu du sien, apprendre à jouer d’un instrument à une vitesse bien supérieure à celle que mettrait une personne normale. Mais à ses yeux, connaître les bases est amplement suffisant. Il ne prévoit pas vraiment de se perfectionner dans un instrument autre que la guitare. → On dit que c’est un play-boy. Archifaux. Des années pourraient passer sans qu’il recherche une quelconque relation. Il n'est pas non plus impossible qu’il ait le coup de foudre pour quelqu’un dès la première rencontre. Ça ne se contrôle pas. → On dit aussi qu’il est doublement orphelin, sans toutefois comprendre parfaitement ce que cela veut dire. C’est malheureusement la triste vérité. Comme si perdre la mémoire incluant sa famille biologique ne suffisait pas, il a maintenant également perdu sa deuxième famille alors qu’il pensait avoir enfin trouvé sa place. | Dis nous qui tu es ! Pour commencer, Ilnam est un perfectionniste. Plus jeune, il faisait même les rues à la recherche d'autres virtuoses. Il cherche à aller toujours plus loin, à s’améliorer, même si avec son talent ce n'est plus vraiment nécessaire. Il n'a plus rien à prouver à personne. Bien que son instrument de prédilection soit la guitare, il n’hésite pas à toucher à d’autres, tels que le piano, la batterie, la flute, le violon, même l’harmonica. Peu lui importe le type d’instrument, à vrai dire, il est toujours prêt à tester de nouvelles choses. C’est aussi ce qui lui permet de créer des sons, des accords que les gens n’ont pas forcément l’habitude d’entendre. Rajoutez à cela sa sensibilité au monde extérieur, et vous avez la parfaite recette d’une nouvelle composition "made in Sin". Cet amour pour la musique fait aussi que celle-ci occupe son esprit deux tiers de son temps. Si bien que, même entouré de gens, il lui arrive de se perdre dans ses pensées et, si on lui pose une question, tout ce qu’il a à offrir en réponse est un petit sourire et un regard interrogateur et confus. Le parcours qu’ont effectué Ilnam et Kitae est à la fois surprenant et digne de respect. Il n’est pas donné à tout le monde d’avoir le courage de tout laisser derrière soi pour partir vivre son rêve, ignorant complètement ce que l’avenir a en réserve. Surtout quand on doit affronter la pluie, le vent, le froid, la faim. Les deux amis semblaient n’avoir peur de rien, ni dormir dans la rue, ni se retrouver dans des endroits qu’on leur conseillait plutôt d’éviter. Du moment qu’ils s’avaient l’un l’autre (et bien sûr leurs instruments), rien ne pouvait les arrêter. Ses voyages à travers le pays ont permis à Ilnam de devenir plus sociable et ainsi de se faire de nouveaux amis, ce qui n’est pas une mauvaise chose, comme il a pu le remarquer. Avec toutes ces expériences, toutes ces rencontres, il arrive plus ou moins à trouver la meilleure façon d’aborder certaines personnes. Ça a également développé chez lui un charisme indéniable, bien qu’il ne s’en rende pas forcément compte. Il est devenu beaucoup plus joyeux, souriant, avenant, capable de se faire apprécier en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Mais il sait aussi écouter. Il sait rester calme et sérieux si la situation l'exige. Il arrive toutefois à Ilnam de faire des trucs un peu fous et inattendus, pour ne pas dire bizarres et chelous. Par exemple, il ne faut pas oublier la fois où lui et Kitae sont grimpés sur un mur d’au moins deux mètres de haut et 50cm à peine d’épaisseur pour un petit concert d’extérieur, juste pour que tout le monde puisse les voir. On se demande encore comment ils ont réussi à aller jusqu’au bout sans incident, parce que leur enthousiasme et leur énergie restaient les mêmes, où qu’ils soient. Il y a aussi le jour où, en attendant que quelqu’un accepte de les prendre dans sa voiture, il a fait la sérénade à une vache pour passer le temps. Kitae garde d’ailleurs précieusement cette vidéo touchante dans son téléphone et son ordinateur (on n’est jamais trop prudent). Sa relation avec ses parents n’a pas changé depuis son "coming out". Le seul moment où ils interagissent est désormais lors des appels pour lui demander plus d'argent. Ça le fait doucement sourire : avant, c’était eux qui lui donnaient de l’argent de poche. La situation s’est maintenant inversée. Cela fait d’Ilnam plus ou moins leur vache à lait, et signifie que s’il le décidait, ils pourraient se retrouver endettés jusqu’au cou à moins de se trouver un bon travail. Mais ils savent qu’il ne leur ferait jamais ça. Ils savent le manipuler de sorte à ce qu’il soit celui qui se sente coupable pour tout. « On t’a élevé, tu peux bien faire au moins ça pour nous remercier, non ? » Voilà en gros ce qu’ils voulaient – et y parvenaient sans difficulté – lui faire comprendre. Leur égoïsme voulait forcer Ilnam à tirer un trait sur son rêve, et ils ont failli y arriver au début. Quand cette histoire d’argent a commencé, il a cru qu’il ne lui restait plus qu’à se reconvertir en col bleu et oublier toutes ses aspirations. Mais la musique, c’est toute sa vie. Sans elle, il ne serait pas le Seo Ilnam qu’il est aujourd’hui. Alors il a trouvé un moyen de conjuguer rêve et devoir, et c’est ainsi qu’il a atterri à l’université, avec une bourse, tout en poursuivant sa carrière de musicien sur le côté, avec Illmatic. Dès le moment où leur relation a commencé à partir en vrille, il n'a pas eu d'autre choix que d’apprendre à se débrouiller, à gérer l’argent de poche que lui donnaient ses parents en prévision du jour où il prendrait son envol. Dorénavant, il est seul maître de son destin. « Where there’s a will, there’s a way. » Voilà la phrase préférée d’Ilnam. Celle qu’il se répète et qui le sauve en cas de coup dur, quand il est sur le point de perdre espoir. Il ne peut se forcer à haïr ses parents, car il leur reste d’une certaine façon reconnaissant et se sent redevable malgré ce qu’ils lui ont fait vivre, ou plutôt subir. Peut-être aussi par piété filiale. Ce qu’il a traversé a en partie forgé son caractère, bien que ce n’ait pas toujours été facile. Sa loyauté ne se limite pas à ses parents, cela dit. Il en va de même pour les autres personnes proches de lui. Sournoiserie, tromperie, infidélité, traîtrise sont des mots qui n’existent pas dans son vocabulaire. Il est aussi quelqu’un qui sait prendre du recul, pas du tout impulsif. En cas de dispute (chose relativement rare pour lui), il préfère s’éloigner et réfléchir à tête reposée avant de revenir pour régler le problème, proposer sa solution à lui. C'est ce qu'il avait voulu faire lors de l'histoire avec ses parents, mais cette fois-là il avait compris que, quoi qu'il fasse, quoi qu'il dise, ça aurait été comme s'adresser à un mur. Et comme si cela ne le tourmentait déjà pas suffisamment, il y a cette curiosité, mêlée à la peur, qu'il ressent à chaque fois qu'il a une pensée pour son passé. Plus de dix années se sont écoulées depuis sa décision de ne plus chercher à retrouver la mémoire, et il ne compte pas y déroger. Vu la violence de ses réactions quand il avait essayé de se souvenir, il peut deviner que c'est quelque chose qui serait mieux gardé sous clé au fond de son esprit. C'est à la fois rassurant et frustrant. Ne pas tout savoir à propos de lui-même, rester dans l'ignorance et poursuivre sa vie comme si de rien n'était, comme il l'a si bien fait jusqu'à maintenant... Maintenant qu'il est posé, ne fait plus de tournées, et a un rythme de vie un peu (juste un peu) plus régulier, il ne peut s'empêcher d'y penser de temps en temps. Pas au point d'en faire une obsession, mais tout de même curieux. |
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Dim 3 Mar - 23:30 Citer EditerSupprimer
It's my life...
the only sin is the sin of being born
Le premier souvenir d’Ilnam remonte au jour où il fut retrouvé, le 28 février 2001. Cette date devint également sa date d’anniversaire, faute de quelconques documents administratifs le concernant lui ou d’autres membres de sa famille. On lui donna également un nouveau nom : Seo Ilnam. C’est avec ces informations-là et sa jolie bouille mystérieuse qu’il attira l’attention d’un certain couple, qui, drôle de coïncidence, partageait le même nom que l’enfant. Il ne parlait pas, et pourtant ils trouvaient qu’il avait ce petit "quelque chose" que les autres enfants n’avaient pas. Deux mois à peine s’étaient écoulés lorsque les Seo exprimèrent leur désir de l’adopter. C’était d’ailleurs assez surprenant pour un enfant de cet âge. Il était plus courant que les gens adoptent des nourrissons, et, jusqu’à ce jour dans cet orphelinat, l’enfant le plus "âgé" à partir n’avait jamais eu plus de quatre ans. Cependant, l’orphelinat, pensant à l’état psychologique d'Ilnam, qui ne se mêlait jamais aux autres, leur dirent qu’il n’était certainement pas prêt et qu’ils allaient devoir attendre un ou deux ans encore. Mais le psychologue auquel ils firent appel affirma que le meilleur moyen d’aider Ilnam serait de l’intégrer dans un environnement plus "normal", où ils seront en plus petit comité, et où il pourra se détendre plus facilement. Tous doutes et interrogations se dissipèrent lorsque le garçon s’approcha, les regarda tour à tour dans les yeux, puis glissa sa petite main dans celle de monsieur Seo sans rien dire. C’était décidé.
Le couple venait régulièrement à l’orphelinat rendre visite à Ilnam le temps que la procédure d’adoption soit finalisée. Ils jouaient avec lui, pour peu qu’il décidât de faire autre chose que rêvasser, assis dans l’herbe. Ils lui parlaient, même s’ils savaient qu’ils ne recevraient pas de réponse de sa part. Cela ne les empêchait pas de l’aimer de plus en plus chaque jour.
Le 15 mars 2002. Une date qu’Ilnam n’oubliera jamais. Celle où il rejoignit sa nouvelle famille, des personnes qui se faisaient du souci pour lui. Lui, qui n’avait pas sorti un mot depuis sa découverte à la frontière séparant les deux Corées. On avait eu beau lui demander d’où venait le sang sur ses vêtements (clairement pas d’un simple saignement de nez ou d’une petite égratignure), la seule réponse qu’il avait donnée était le silence. Lui-même ignorait pourquoi il s’était retrouvé dans cet état-là. Les lèvres gercées, frigorifié au point où il sentait à peine ses membres ; il avait dû être porté jusqu’à la clinique la plus proche puisqu’il pouvait à peine bouger. A partir de ce jour-là, et pendant presque deux ans, Ilnam n’avait adressé la parole à personne, pas même à ses parents adoptifs. On l’aurait cru muet si, lorsqu’on lui avait demandé son nom, son âge, et où étaient ses parents, il n’avait pas répondu « Je ne sais pas ». Depuis, il n’avait plus dit un seul mot. Il n’en avait ressenti ni l’envie ni le besoin, comme si son subconscient lui disait « Il n’y a rien que tu puisses faire ou dire qui pourrait changer quoi que ce soit. » Mais au fil des jours, des semaines, des mois, des visites chez les psychologues et surtout grâce à l’amour et à la patience admirable de ses parents, il commença à s’ouvrir aux autres, au monde extérieur.
Du blanc. Du blanc à perte de vue et un froid glacial comme s’il se trouvait en tenue d’été à l’intérieur d’une énorme boule de neige, à la seule différence qu’il portait un gros manteau d’hiver et qu’il pouvait se déplacer à l’intérieur, sans toutefois en sortir. Il marchait, puis, après quelques pas s’élançait de toutes ses forces droit devant lui, dans l’espoir de trouver une sortie. Mais il n’en existait pas. Il l’avait compris, et pourtant il continuait de courir, comme si son corps avait coupé les liens avec son cerveau et refusait de s’arrêter. Tout-à-coup, au loin, il aperçut un point. Minuscule, mais signe qu’il devait garder espoir, qu’il allait peut-être enfin pouvoir s’échapper. Après ce qui lui parut être une éternité, il remarqua des traces sur le sol, ressemblant à des empreintes de pieds. Au fur et à mesure qu’il avançait, les traces commencèrent à changer de couleur, d’abord d’un rose presque invisible, pour, à la fin, être colorées d’un rouge sombre brillant, un rouge sang qu’il connaissait très bien puisque sa seule vue le rendait malade. Il s’arrêta brusquement, comme pétrifié, le regard fixé sur le sol. Soudain, il se mit à trembler violemment et eut la sensation d’être transpercé de toutes parts, comme s’il venait d’être frappé par la foudre. Il hurla de douleur et, alors que tout autour de lui devenait noir, s’effondra sur le sol glacé. Quand il rouvrit les yeux, son psy était agenouillé à côté de lui tandis qu’il se trouvait recroquevillé sur lui-même, son corps parcouru de spasmes irréguliers.
Ilnam ne s’en rendait pas compte, mais il avait fait des progrès puisqu’à son premier essai, tout ce qu’il avait vu c’était le plafond de la pièce. Les séances suivantes avaient semblé plus fructueuses, mais n’avaient jamais aucun sens et s’achevaient avec un mal de tête fulgurant et de terribles nausées. A plusieurs reprises il n’avait pu se retenir et avait redécoré un pan du tapis qui se trouvait près du canapé sur lequel il était allongé. Il devrait penser à l’enlever quand j’arrive, ça lui ferait moins de ménage à faire, avait-il pensé.
Mais il avait décidé que ce serait sa dernière tentative. Il en avait assez, de toutes ces heures, toutes ces années perdues à essayer en vain de se souvenir de son passé, qu’il avait perdu 8 ans auparavant. Ce dont il avait envie, maintenant, c’était d’arrêter de souffrir. Il se fichait de passer pour un lâche.
« Je ne veux plus y aller, » déclara-t-il à ses parents, les suppliant presque. « Ça ne m’aide pas du tout. Je crois même que ça a l’effet inverse. »
La mère Seo allait insister, mais son mari l’arrêta en plaçant une main sur son épaule. Même s’ils n’étaient pas physiquement présents aux séances d’hypnose, ils avaient demandé au professionnel d’en enregistrer quelques-unes, et ils avaient bien constaté que cela faisait plus de mal que de bien à leur fils.
« Tu sais que nous ne voulons que ce qu’il y a de mieux pour toi. Si c’est ton choix, on ne te forcera pas la main. »
Peut-être qu’au fond, il avait oublié pour son propre bien. Peut-être valait-il mieux ne pas rouvrir les plaies du passé.
Et ainsi, Ilnam cessa d’espérer qu’un jour il se souviendrait de sa vie d’avant. Il était déterminé à ne plus vivre et penser qu’à l’instant présent. C’était ce qu’un ado de 13 ans normal était censé faire.
La musique. La musique fait partie intégrante d’Ilnam, ancrée dans son âme. Peu de temps après son adoption, ses parents remarquèrent qu’il y portait une attention particulière, faisant pratiquement abstraction de ce qui l’entourait. Pensant que cela pourrait l’aider à se réadapter, à s’ouvrir à eux, ils l’emmenèrent dans un magasin de musique. Mais au lieu d’un piano – l’instrument que la plupart des enfants de son âge choisissaient de jouer –, il jeta son dévolu sur celle qui allait devenir sa première guitare et amie. On l’inscrit dans une école de musique mais, après une leçon, Ilnam refusa d’y retourner. Il apprit à sa manière, qui visiblement lui convenait le mieux.
Au collège, une fois arrêtées les séances chez le psy, Ilnam reporta sa complète attention sur la musique. Il passait les trois quarts de son temps avec sa guitare. Et même quand il dormait, il rêvait de musique, de tous les morceaux qu’il comptait apprendre à jouer. Il n’avait pas besoin de partitions, il lui suffisait d’entendre une mélodie deux ou trois fois pour pouvoir la reproduire, parfois même l’améliorer selon ses goûts. De temps en temps, il retournait au magasin de musique, le proprio duquel était pratiquement devenu son ami, pour s’essayer à d’autres instruments ; sa guitare restait néanmoins sa petite favorite. Si bien que dès l’entrée au lycée, lui et son meilleur ami Kitae décidèrent de former leur duo, s’inspirant de leurs propres prénoms pour s’appeler Illmatic, lui à la guitare et au chant tandis que Kitae gérait plutôt la basse, incorporant parfois d’autres musiques de fond qu’il apprenait à créer avec son matériel de débutant. Au début, ils se produisaient seulement lors des fêtes et festivals, présentant surtout des covers de chansons mainstream. Ils savaient que cela attirerait des spectateurs, et les rendrait plus populaires. Pendant ce temps, les garçons découvraient la composition dans la salle de musique ou dans le garage de Kitae. Ses parents furent ses premiers fans, et faisaient de leur mieux pour l’aider à faire ce qu’il aimait.
A leur entrée au lycée, le duo Illmatic commença à élargir petit à petit ses horizons, se postant une ou deux fois par semaine aux coins de rue, incluant parfois leurs compos. Ilnam avait encore un peu de mal avec la composition, il n’avait que 15 ans et pas assez d’expériences à conter. Mais il savait que ça allait venir.
Il eut quelques petites amies, mais il ne lui fallait pas plus de quelques semaines pour se rendre compte qu’elles lui demandaient trop de temps, temps qu’il préférait passer en compagnie de sa guitare qu’avec une autre fille. En plus, elle ne lui demandait pas ce qu’il faisait à toute heure de la journée. Puis il y eut une certaine soirée organisée par un groupe de potes, qui avaient réussi à passer incognito avec quelques bouteilles de bières et autres alcools un peu plus forts. Ce soir-là, il perdit à un jeu et fut obligé à embrasser un autre gars (punition typique quand les mecs jouent entre eux). Alors que les gars riaient tout en affichant un air dégoûté, au fur et à mesure qu’il perdait, puis buvait, puis exécutait ses punitions (qui par ailleurs devenaient de plus en plus agaçantes), Ilnam se rendait compte que tout cela ne lui déplaisait pas.
Il commença à sortir avec un mec, de deux ans son aîné, qui l’avait abordé dans la rue pour complimenter sa musique. L’un comme l’autre étaient des passionnés de musique, alors Ilnam s’était dit Pourquoi pas ? A son grand étonnement, leur relation se poursuivit sans embrouilles.
2010 fut l’année où tout bascula. Il fut surpris une fois par Kitae alors que lui et son copain se bécotaient dans un coin de rue normalement désert. Le jour même, il se présenta avec appréhension à la maison de son meilleur ami. Certes, il vivait pour la musique, mais il le considérait presque comme son frère, et leur amitié comptait énormément pour lui. Il n’aurait pas supporté de le perdre. Le cœur battant à toute allure et un nœud dans l’estomac, Ilnam resta planté sur le pas de la porte même quand Kitae l'ouvrit. Ce dernier soupira, le paniquant encore plus, et le traina par le bras jusqu’à sa chambre. Il ne lui demanda aucune explication. A vrai dire, il n’avait même pas pensé à faire un quelconque reproche à Ilnam, mais à la vue de son air angoissé, Kitae se sentit obligé de le rassurer. Il parla pendant deux bonnes minutes, mais de son discours Ilnam ne retint qu’une phrase : « Tu es mon meilleur ami, et qui que tu voies, quoi que tu fasses, quoi qu’il arrive, je serai toujours là pour toi. »
Il se dit qu’il était peut-être temps d’en parler à ses parents. D’habitude, il racontait toujours tout à sa mère, mais cette fois-là il avait été trop effrayé pour lui dire quoi que ce soit à ce sujet. Mais après la réaction positive de Kitae il se dit qu’en fin de compte, il n’avait pas besoin de dramatiser, et juste être franc avec sa mère et son père. Malheureusement, rien ne se passa comme il l’avait prévu, et Ilnam se retrouva face à ses deux parents qui le regardaient d’une expression mi-horrifiée mi-écœurée. Sa mère, les larmes aux yeux, s’exclama : « Mais tu es sorti avec des filles ! Tu nous en as même présenté ! »
Après s’être rappelé ce fait, il sourit : « Ah oui, c’est vrai ça… Bon ça devrait vous rassurer alors, vous aurez une chance sur deux d’avoir des petits enfants ! »
Sa mère, sous le choc, lâcha l’assiette qu’elle avait dans les mains et celle-ci vint se briser sur le sol, sans pour autant détourner l’attention de quiconque. Pour le père Seo, cette déclaration insouciante fut la goutte qui fit déborder le vase, et il ne réfléchit pas une seconde avant de le gratifier d’une claque telle qu’Ilnam tituba et, ne parvenant pas à se rattraper à temps à la table de la cuisine, s’effondra sur le sol, s’ouvrant par la même occasion l’avant-bras gauche avec le gros débris d’assiette qui s’était retrouvé à ses pieds. La plaie disparut quelques semaines plus tard, ne laissant aucune séquelle autre qu’une fine cicatrice presque invisible d’une dizaine de centimètres à peine juste en dessous du coude. Sa relation avec ses parents, quant à elle, Ilnam savait qu’elle ne serait plus jamais la même.
Ironiquement, c’est cet événement qui fut à l’origine de sa première vraie chanson. Celle qu’il intitula « Sin », qui était son nom de scène, composé de ses initiales, mais aussi "sin" dans le sens de "péché". Celle dont les paroles et la mélodie, exécutées avec sa voix et ses émotions, semblaient laisser celui qui l’entendait voir au plus profond de son âme, qu’on avait presque l’impression de la ressentir soi-même. Il y parlait d’une personne qui passait brusquement d’une vie heureuse et insouciante à celle de quelqu’un qui ne trouvait plus sa place nulle part, trahi et abandonné par ceux qui lui étaient les plus proches, si bien qu’il finissait par se demander si tout n’était pas, en fin de compte, sa faute, s’il avait péché et était en réalité celui en tort, remettant en question son entière existence. Ce fut également la première chanson qu’il posta sur Internet et qui, suivie d’autres chansons d’Illmatic, commença à mieux les faire connaître. Il ne la chante que très rarement de nos jours, mais lorsqu’il le fait, il ne peut s’empêcher de verser une larme au souvenir de sa vie d’avant, celle qu’il avait précédant le jour où il choisit de tout balancer et partir suivre son propre chemin sans un regard en arrière.
Pendant ses deux dernières années de lycée, sa relation avec ses parents continua de se détériorer, au point qu’ils ne s’adressaient pratiquement plus la parole, et ne mangeaient que très rarement ensemble, dans un silence de cathédrale. Après un certain temps, Ilnam ne rentrait plus que pour dormir… et encore, il créchait souvent chez Kitae, dont les parents se montraient exceptionnellement compréhensifs. Les seuls moments où ses parents "interagissaient" avec lui étaient quand ils lui laissaient un peu d’argent de poche sur la table de cuisine. Ils ne s’inquiétaient même pas s’il passait plusieurs jours dehors. L’atmosphère dans la maison était devenue insoutenable. Alors il commença à économiser pour le jour où il prendrait les voiles, parce qu’il savait que c’était inévitable. A sa dernière année, il se contentait d’un kimbap par jour, ce qui n’était bien évidemment pas la meilleure solution pour sa santé, mais c’était le dernier de ses soucis. Ilnam était de plus en plus distrait en cours ; on le trouvait à rêvasser, parfois notant des paroles où des symboles que lui seul pouvait déchiffrer. Bien évidemment, ses notes dégringolèrent, et ses relations avec ses autres camarades, à qui il adressait désormais rarement la parole, battaient tout autant de l'aile. Pourtant, par on ne sait quel miracle, il parvint à obtenir son année.
Vint enfin le moment de mettre les voiles. Avec ses économies, Ilnam acheta un ampli pour sa guitare, un nouveau téléphone, et un blouson en cuir (parce que ça faisait classe). Il fourra quelques affaires dans un sac à dos et claqua la porte, laissant à ses parents seulement son numéro, au cas où, ainsi qu’une courte lettre qui, en gros, disait « Bonne continuation. » Il rompit également avec son copain, qui le prit étonnamment bien, lui souhaitant même bonne chance, assurant qu’il suivrait sa musique de près, et qu’il devait rester fort et ne jamais baisser les bras.
Kitae quant à lui n’eut aucun souci pour partir, ses parents lui passant même ses affaires avec quelques billets pour que leur fils ne meure pas de faim sous un pont. Ils avaient accepté sans difficulté son choix, faisant juste promettre aux deux garçons de prendre soin d’eux-mêmes. Sans doute avaient-ils vu l’effet qu’avait eue sur Ilnam sa rupture avec ses parents, et pour cette raison ils avaient préféré prendre sur eux pour ne ruiner ni la vie de leur fils, ni leur relation avec ce dernier.
Les deux musiciens s’élancèrent donc à la redécouverte du pays, par leurs propres moyens et à leur manière à eux. Ils passaient autant de temps qu’ils voulaient où ils voulaient, se produisant surtout dans la rue et dans des bars. Au début, ils n’existaient pas. Aux yeux des autres, ils n’étaient que des gosses parmi tant d’autres, qui cherchaient à se faire connaître uniquement pour pouvoir admirer la vue du haut du podium. Il ne fallut cependant pas longtemps aux deux amis pour prouver qu’ils n’étaient pas de simples wannabes, et qu’ils aimaient la musique bien plus que la célébrité.
Ils ne prenaient jamais les transports en commun. Leur unique moyen de déplacement était leurs pieds et le stop, quand des conducteurs étaient assez sympa pour les emmener jusqu’à la ville suivante. Celle qu’ils préféraient était Busan, pour ses plages, et en particulier Haeundae, où ils pouvaient jouer sans limite de temps ou de places. C’est là-bas que commença réellement leur carrière, avec leurs premiers fans. C’est également là-bas qu’Ilnam et Kitae louèrent pour la première fois une petite salle de concert, qui, à leur surprise, fut si rapidement remplie qu’ils en restèrent sans voix (qu’ils retrouvèrent bien évidemment quand le concert commença). Avec l’argent gagné, ils préféraient améliorer leur matériel plutôt que leur confort de vie, voulant faire toujours mieux. Ils se fichaient de passer la nuit dans un jjimjilbang ou un motel miteux, du moment qu’ils avaient un lit et une douche. Quand ils avaient de la chance, ils squattaient chez des gens qu’ils venaient tout juste de rencontrer en échange de bons services ; ils étaient pratiquement multifonctions, du ménage au copulage, rien n’était plus important que la survie pour pouvoir poursuivre leur rêve. Lorsqu’ils repassaient dans la même ville ils faisaient à nouveau signe à ces personnes, qui, au fil du temps, étaient devenues un peu plus que de simples étrangers, fans, ou coups d’un soir. Parfois, quand ils avaient moins de chance mais un peu quand même, ils tombaient sur un sdf assez gentil pour leur prêter un ou deux de ses cartons. Et dans leurs pires jours, tout ce qu’ils pouvaient faire était se poser dans un coin de rue, blottis l’un contre l’autre pour garder de la chaleur. Ces jours-là, plutôt que dormir (ils en auraient été incapables quand il faisait 5°C), ils profitaient de ce temps pour composer.
Leur muse était la réalité. Ils préféraient laisser les arcs-en-ciel et les licornes aux autres idéalistes et utopistes. Non, eux trouvaient l’inspiration avec la réalité du monde actuel, les expériences vécues, les personnes rencontrées… Et c’est pour ça qu’on les aimait, pour ça que leurs salles de concert se remplissaient instantanément. A plusieurs reprises ils s’étaient fait aborder par des scouts pour rejoindre une compagnie, une maison de disques, mais à chaque fois leur réponse était la même : ils se plaisaient dans l’underground et comptaient bien y rester. Leur rêve n’avait jamais été de devenir des musiciens mainstream. Ce qu’ils voulaient, eux, c’était créer leur propre musique. Ils ne cherchaient pas à avoir des millions de fans, ni à remplir des stades entiers. L’idée d’avoir des gardes du corps les faisait également frissonner. Pour cette raison, ils ne louaient jamais de grandes salles. Non, ils privilégiaient la qualité à la quantité. Il leur était plus important de pouvoir se mêler à leurs fans, parce que justement, ils n’étaient pas simplement des fans : ils étaient devenus une famille, soudée, et les deux musiciens voulaient en faire partie.
En parlant de famille, celle d’Ilnam agissait comme si ce dernier n’existait plus à leurs yeux. Il leur avait laissé son numéro, mais leur téléphone ne faisait jamais sonner le sien. Il les appelait quelques fois par an, sans toutefois exprimer son désir de refaire partie de leur vie. Ils ne lui en donnaient ni l’envie ni l’occasion. Quand, ou plutôt si ils décrochaient… la conversation ne durait pas plus de deux minutes, et ils ne lui posaient jamais aucune question, ce qu’il faisait, s’il allait bien. Ils lui faisaient bien comprendre qu’ils n’avaient plus rien à lui dire. A leurs yeux, il était celui qui avait brisé leur famille.
Quelqu’un qui ne connaissait pas Ilnam l’aurait qualifié d’étrange, puisque la douleur entrainée par ces rares interactions l’avait une nouvelle fois inspiré pour une chanson. Mais il vivait son rêve, en compagnie de son meilleur ami, et c’était ce qui lui permettait de ne pas se laisser baisser les bras.
Cela faisait déjà presque trois ans que lui et Kitae avaient pris la route, quatre fois qu’ils avaient fait le tour du pays, quand Ilnam reçut pour la première fois un appel d’une personne dont il pensait ne plus jamais entendre la voix. Sous le choc, il faillit échapper son portable. Il fixa l’écran pendant un bon moment, pensant qu’il hallucinait. Pourtant, l’appel venait bien de sa mère, qui avait pour la première fois pris l’initiative de le contacter. Décrochant avec appréhension, il lui demanda comment elle allait. Comme si elle avait attendu cette question, elle se mit à lui raconter que l’entreprise dans laquelle les deux parents travaillaient avait mis la clé sous la porte, et qu’ils se retrouvaient désormais sans emploi. La seule question qu’elle posa – qui ne semblait même pas en être une – était s’il pouvait leur envoyer de l’argent le temps qu’ils se remettent sur pied. Bien évidemment, il accepta. Quel fils serait-il s’il ne supportait pas ses parents dans le besoin ?
Mais au fil du temps, ils demandaient de plus en plus, et avec ses modestes gains, il restait à Ilnam de moins en moins d’argent pour subvenir à ses propres besoins. Lorsqu’il mentionna ce fait à sa mère, celle-ci rétorqua : « Il faut bien qu’on survive avec ton père, non ? Est-ce qu’on se plaignait, nous, quand on t’achetait des choses ? Ta guitare, tu crois qu’elle était d’occasion ? Non, tu as eu la meilleure. Et ton école ? Les médecins ? Tu ne penses pas qu’il est grand temps que tu arrêtes de te tourner les pouces et fasses quelque chose d’utile pour une fois dans ta vie ? » Le jeune homme resta bouche bée, le temps d’assimiler tout ce qu’elle venait de lui balancer sur un ton presque dédaigneux. Il ne savait que répondre. Mais elle n’avait pas fini. Elle comptait bien lui faire comprendre qu’il n’avait pas le choix. « Ne nous fais pas regretter de t’avoir adopté, » déclara-t-elle sèchement avant de raccrocher.
Ilnam resta planté là en silence, le téléphone encore collé à son oreille. Pour la première fois, tous les sons qu’il avait l’habitude d’entendre au quotidien s’étaient volatilisés, laissant seulement place à l’écho de la phrase cinglante prononcée par sa mère. Pour la première fois, aucune envie d’écrire ne s’était manifestée.
2016. Ilnam entra officiellement en deuxième année à Yonsei après un an de cours en tant qu’étudiant libre, parvenant même à décrocher une bourse grâce à son talent, son expérience, et un travail acharné qu’il n’avait pas l’habitude de fournir, faute d’un dossier très favorable après le lycée. Il intégra le cursus arts du spectacle avec bien sûr la musique en spécialité. Il n’eut d’autre choix que de se poser définitivement, chose qu’il n’avait pas faite depuis près de quatre ans. Il avait tellement pris l’habitude d’aller de ville en ville, de loger dans des endroits pas toujours accueillants, inconfortables, qu’il avait l’impression d’avoir été attaché, restreint dans ses mouvements. Au début, il lui arrivait même de faire des crises de panique dans sa chambre, tellement il se sentait à l’étroit.
2019. La relation entre Ilnam et ses parents ne s’est pas améliorée, loin de là. Il a beau leur demander pourquoi ils ne travaillent toujours pas depuis tout ce temps, chaque fois il parviennent à retourner sa question contre lui. Kitae lui a maintes fois répété qu’il était grand temps qu’ils commencent à se débrouiller tout seuls, mais il lui est simplement impossible de tourner le dos à ceux qui l’ont élevé, qui lui ont permis de vivre agréablement. Il est incapable de leur refuser quoi que ce soit. Ils le manipulent comme bon leur semble et il ne s’en rend même pas compte. Après tout, c’est son devoir en tant que fils de faire tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir ses parents, non ?
Il s’habitue encore à la vie "ordinaire", vêtements sobres, moins de maquillage… (si leurs fans le voyaient dans sa tenue de tous les jours, il est fort probable qu’ils ne le reconnaissent même pas). En revanche, rester attentif en cours est toujours aussi difficile, étant donné qu’il n’est pas parvenu à complètement réajuster son rythme de sommeil. Il demeure l’oiseau de nuit qu’il était devenu lors de ses tournées. Il sort autant qu’il peut, que ce soit pour aller à une soirée de folie, en boîte, ou une simple promenade dans le parc. Hors de question de rester cloitré chez lui et faire métro, boulot, dodo. Même une chasse au trésor lui paraîtrait plus intéressante. Vivre au jour le jour, voilà ce qu’il a fait jusqu’à maintenant, et ce qu’il continuera de faire jusqu’au bout.
Ses tournées avec Kitae ont pris fin, sans toutefois qu’ils cessent complètement les concerts. La différence est que désormais, ils ne se déplacent pas plus loin que les alentours de Séoul, et font moins de représentations qu’auparavant. Malgré cela, ils continuent de composer, présentant leur musique dans les bars de la ville, parfois dans de petites salles de concert, et postant leurs mixtapes sur le net.
Le couple venait régulièrement à l’orphelinat rendre visite à Ilnam le temps que la procédure d’adoption soit finalisée. Ils jouaient avec lui, pour peu qu’il décidât de faire autre chose que rêvasser, assis dans l’herbe. Ils lui parlaient, même s’ils savaient qu’ils ne recevraient pas de réponse de sa part. Cela ne les empêchait pas de l’aimer de plus en plus chaque jour.
Le 15 mars 2002. Une date qu’Ilnam n’oubliera jamais. Celle où il rejoignit sa nouvelle famille, des personnes qui se faisaient du souci pour lui. Lui, qui n’avait pas sorti un mot depuis sa découverte à la frontière séparant les deux Corées. On avait eu beau lui demander d’où venait le sang sur ses vêtements (clairement pas d’un simple saignement de nez ou d’une petite égratignure), la seule réponse qu’il avait donnée était le silence. Lui-même ignorait pourquoi il s’était retrouvé dans cet état-là. Les lèvres gercées, frigorifié au point où il sentait à peine ses membres ; il avait dû être porté jusqu’à la clinique la plus proche puisqu’il pouvait à peine bouger. A partir de ce jour-là, et pendant presque deux ans, Ilnam n’avait adressé la parole à personne, pas même à ses parents adoptifs. On l’aurait cru muet si, lorsqu’on lui avait demandé son nom, son âge, et où étaient ses parents, il n’avait pas répondu « Je ne sais pas ». Depuis, il n’avait plus dit un seul mot. Il n’en avait ressenti ni l’envie ni le besoin, comme si son subconscient lui disait « Il n’y a rien que tu puisses faire ou dire qui pourrait changer quoi que ce soit. » Mais au fil des jours, des semaines, des mois, des visites chez les psychologues et surtout grâce à l’amour et à la patience admirable de ses parents, il commença à s’ouvrir aux autres, au monde extérieur.
***
Du blanc. Du blanc à perte de vue et un froid glacial comme s’il se trouvait en tenue d’été à l’intérieur d’une énorme boule de neige, à la seule différence qu’il portait un gros manteau d’hiver et qu’il pouvait se déplacer à l’intérieur, sans toutefois en sortir. Il marchait, puis, après quelques pas s’élançait de toutes ses forces droit devant lui, dans l’espoir de trouver une sortie. Mais il n’en existait pas. Il l’avait compris, et pourtant il continuait de courir, comme si son corps avait coupé les liens avec son cerveau et refusait de s’arrêter. Tout-à-coup, au loin, il aperçut un point. Minuscule, mais signe qu’il devait garder espoir, qu’il allait peut-être enfin pouvoir s’échapper. Après ce qui lui parut être une éternité, il remarqua des traces sur le sol, ressemblant à des empreintes de pieds. Au fur et à mesure qu’il avançait, les traces commencèrent à changer de couleur, d’abord d’un rose presque invisible, pour, à la fin, être colorées d’un rouge sombre brillant, un rouge sang qu’il connaissait très bien puisque sa seule vue le rendait malade. Il s’arrêta brusquement, comme pétrifié, le regard fixé sur le sol. Soudain, il se mit à trembler violemment et eut la sensation d’être transpercé de toutes parts, comme s’il venait d’être frappé par la foudre. Il hurla de douleur et, alors que tout autour de lui devenait noir, s’effondra sur le sol glacé. Quand il rouvrit les yeux, son psy était agenouillé à côté de lui tandis qu’il se trouvait recroquevillé sur lui-même, son corps parcouru de spasmes irréguliers.
Ilnam ne s’en rendait pas compte, mais il avait fait des progrès puisqu’à son premier essai, tout ce qu’il avait vu c’était le plafond de la pièce. Les séances suivantes avaient semblé plus fructueuses, mais n’avaient jamais aucun sens et s’achevaient avec un mal de tête fulgurant et de terribles nausées. A plusieurs reprises il n’avait pu se retenir et avait redécoré un pan du tapis qui se trouvait près du canapé sur lequel il était allongé. Il devrait penser à l’enlever quand j’arrive, ça lui ferait moins de ménage à faire, avait-il pensé.
Mais il avait décidé que ce serait sa dernière tentative. Il en avait assez, de toutes ces heures, toutes ces années perdues à essayer en vain de se souvenir de son passé, qu’il avait perdu 8 ans auparavant. Ce dont il avait envie, maintenant, c’était d’arrêter de souffrir. Il se fichait de passer pour un lâche.
« Je ne veux plus y aller, » déclara-t-il à ses parents, les suppliant presque. « Ça ne m’aide pas du tout. Je crois même que ça a l’effet inverse. »
La mère Seo allait insister, mais son mari l’arrêta en plaçant une main sur son épaule. Même s’ils n’étaient pas physiquement présents aux séances d’hypnose, ils avaient demandé au professionnel d’en enregistrer quelques-unes, et ils avaient bien constaté que cela faisait plus de mal que de bien à leur fils.
« Tu sais que nous ne voulons que ce qu’il y a de mieux pour toi. Si c’est ton choix, on ne te forcera pas la main. »
Peut-être qu’au fond, il avait oublié pour son propre bien. Peut-être valait-il mieux ne pas rouvrir les plaies du passé.
Et ainsi, Ilnam cessa d’espérer qu’un jour il se souviendrait de sa vie d’avant. Il était déterminé à ne plus vivre et penser qu’à l’instant présent. C’était ce qu’un ado de 13 ans normal était censé faire.
***
La musique. La musique fait partie intégrante d’Ilnam, ancrée dans son âme. Peu de temps après son adoption, ses parents remarquèrent qu’il y portait une attention particulière, faisant pratiquement abstraction de ce qui l’entourait. Pensant que cela pourrait l’aider à se réadapter, à s’ouvrir à eux, ils l’emmenèrent dans un magasin de musique. Mais au lieu d’un piano – l’instrument que la plupart des enfants de son âge choisissaient de jouer –, il jeta son dévolu sur celle qui allait devenir sa première guitare et amie. On l’inscrit dans une école de musique mais, après une leçon, Ilnam refusa d’y retourner. Il apprit à sa manière, qui visiblement lui convenait le mieux.
Au collège, une fois arrêtées les séances chez le psy, Ilnam reporta sa complète attention sur la musique. Il passait les trois quarts de son temps avec sa guitare. Et même quand il dormait, il rêvait de musique, de tous les morceaux qu’il comptait apprendre à jouer. Il n’avait pas besoin de partitions, il lui suffisait d’entendre une mélodie deux ou trois fois pour pouvoir la reproduire, parfois même l’améliorer selon ses goûts. De temps en temps, il retournait au magasin de musique, le proprio duquel était pratiquement devenu son ami, pour s’essayer à d’autres instruments ; sa guitare restait néanmoins sa petite favorite. Si bien que dès l’entrée au lycée, lui et son meilleur ami Kitae décidèrent de former leur duo, s’inspirant de leurs propres prénoms pour s’appeler Illmatic, lui à la guitare et au chant tandis que Kitae gérait plutôt la basse, incorporant parfois d’autres musiques de fond qu’il apprenait à créer avec son matériel de débutant. Au début, ils se produisaient seulement lors des fêtes et festivals, présentant surtout des covers de chansons mainstream. Ils savaient que cela attirerait des spectateurs, et les rendrait plus populaires. Pendant ce temps, les garçons découvraient la composition dans la salle de musique ou dans le garage de Kitae. Ses parents furent ses premiers fans, et faisaient de leur mieux pour l’aider à faire ce qu’il aimait.
A leur entrée au lycée, le duo Illmatic commença à élargir petit à petit ses horizons, se postant une ou deux fois par semaine aux coins de rue, incluant parfois leurs compos. Ilnam avait encore un peu de mal avec la composition, il n’avait que 15 ans et pas assez d’expériences à conter. Mais il savait que ça allait venir.
Il eut quelques petites amies, mais il ne lui fallait pas plus de quelques semaines pour se rendre compte qu’elles lui demandaient trop de temps, temps qu’il préférait passer en compagnie de sa guitare qu’avec une autre fille. En plus, elle ne lui demandait pas ce qu’il faisait à toute heure de la journée. Puis il y eut une certaine soirée organisée par un groupe de potes, qui avaient réussi à passer incognito avec quelques bouteilles de bières et autres alcools un peu plus forts. Ce soir-là, il perdit à un jeu et fut obligé à embrasser un autre gars (punition typique quand les mecs jouent entre eux). Alors que les gars riaient tout en affichant un air dégoûté, au fur et à mesure qu’il perdait, puis buvait, puis exécutait ses punitions (qui par ailleurs devenaient de plus en plus agaçantes), Ilnam se rendait compte que tout cela ne lui déplaisait pas.
Il commença à sortir avec un mec, de deux ans son aîné, qui l’avait abordé dans la rue pour complimenter sa musique. L’un comme l’autre étaient des passionnés de musique, alors Ilnam s’était dit Pourquoi pas ? A son grand étonnement, leur relation se poursuivit sans embrouilles.
***
2010 fut l’année où tout bascula. Il fut surpris une fois par Kitae alors que lui et son copain se bécotaient dans un coin de rue normalement désert. Le jour même, il se présenta avec appréhension à la maison de son meilleur ami. Certes, il vivait pour la musique, mais il le considérait presque comme son frère, et leur amitié comptait énormément pour lui. Il n’aurait pas supporté de le perdre. Le cœur battant à toute allure et un nœud dans l’estomac, Ilnam resta planté sur le pas de la porte même quand Kitae l'ouvrit. Ce dernier soupira, le paniquant encore plus, et le traina par le bras jusqu’à sa chambre. Il ne lui demanda aucune explication. A vrai dire, il n’avait même pas pensé à faire un quelconque reproche à Ilnam, mais à la vue de son air angoissé, Kitae se sentit obligé de le rassurer. Il parla pendant deux bonnes minutes, mais de son discours Ilnam ne retint qu’une phrase : « Tu es mon meilleur ami, et qui que tu voies, quoi que tu fasses, quoi qu’il arrive, je serai toujours là pour toi. »
Il se dit qu’il était peut-être temps d’en parler à ses parents. D’habitude, il racontait toujours tout à sa mère, mais cette fois-là il avait été trop effrayé pour lui dire quoi que ce soit à ce sujet. Mais après la réaction positive de Kitae il se dit qu’en fin de compte, il n’avait pas besoin de dramatiser, et juste être franc avec sa mère et son père. Malheureusement, rien ne se passa comme il l’avait prévu, et Ilnam se retrouva face à ses deux parents qui le regardaient d’une expression mi-horrifiée mi-écœurée. Sa mère, les larmes aux yeux, s’exclama : « Mais tu es sorti avec des filles ! Tu nous en as même présenté ! »
Après s’être rappelé ce fait, il sourit : « Ah oui, c’est vrai ça… Bon ça devrait vous rassurer alors, vous aurez une chance sur deux d’avoir des petits enfants ! »
Sa mère, sous le choc, lâcha l’assiette qu’elle avait dans les mains et celle-ci vint se briser sur le sol, sans pour autant détourner l’attention de quiconque. Pour le père Seo, cette déclaration insouciante fut la goutte qui fit déborder le vase, et il ne réfléchit pas une seconde avant de le gratifier d’une claque telle qu’Ilnam tituba et, ne parvenant pas à se rattraper à temps à la table de la cuisine, s’effondra sur le sol, s’ouvrant par la même occasion l’avant-bras gauche avec le gros débris d’assiette qui s’était retrouvé à ses pieds. La plaie disparut quelques semaines plus tard, ne laissant aucune séquelle autre qu’une fine cicatrice presque invisible d’une dizaine de centimètres à peine juste en dessous du coude. Sa relation avec ses parents, quant à elle, Ilnam savait qu’elle ne serait plus jamais la même.
Ironiquement, c’est cet événement qui fut à l’origine de sa première vraie chanson. Celle qu’il intitula « Sin », qui était son nom de scène, composé de ses initiales, mais aussi "sin" dans le sens de "péché". Celle dont les paroles et la mélodie, exécutées avec sa voix et ses émotions, semblaient laisser celui qui l’entendait voir au plus profond de son âme, qu’on avait presque l’impression de la ressentir soi-même. Il y parlait d’une personne qui passait brusquement d’une vie heureuse et insouciante à celle de quelqu’un qui ne trouvait plus sa place nulle part, trahi et abandonné par ceux qui lui étaient les plus proches, si bien qu’il finissait par se demander si tout n’était pas, en fin de compte, sa faute, s’il avait péché et était en réalité celui en tort, remettant en question son entière existence. Ce fut également la première chanson qu’il posta sur Internet et qui, suivie d’autres chansons d’Illmatic, commença à mieux les faire connaître. Il ne la chante que très rarement de nos jours, mais lorsqu’il le fait, il ne peut s’empêcher de verser une larme au souvenir de sa vie d’avant, celle qu’il avait précédant le jour où il choisit de tout balancer et partir suivre son propre chemin sans un regard en arrière.
***
Pendant ses deux dernières années de lycée, sa relation avec ses parents continua de se détériorer, au point qu’ils ne s’adressaient pratiquement plus la parole, et ne mangeaient que très rarement ensemble, dans un silence de cathédrale. Après un certain temps, Ilnam ne rentrait plus que pour dormir… et encore, il créchait souvent chez Kitae, dont les parents se montraient exceptionnellement compréhensifs. Les seuls moments où ses parents "interagissaient" avec lui étaient quand ils lui laissaient un peu d’argent de poche sur la table de cuisine. Ils ne s’inquiétaient même pas s’il passait plusieurs jours dehors. L’atmosphère dans la maison était devenue insoutenable. Alors il commença à économiser pour le jour où il prendrait les voiles, parce qu’il savait que c’était inévitable. A sa dernière année, il se contentait d’un kimbap par jour, ce qui n’était bien évidemment pas la meilleure solution pour sa santé, mais c’était le dernier de ses soucis. Ilnam était de plus en plus distrait en cours ; on le trouvait à rêvasser, parfois notant des paroles où des symboles que lui seul pouvait déchiffrer. Bien évidemment, ses notes dégringolèrent, et ses relations avec ses autres camarades, à qui il adressait désormais rarement la parole, battaient tout autant de l'aile. Pourtant, par on ne sait quel miracle, il parvint à obtenir son année.
Vint enfin le moment de mettre les voiles. Avec ses économies, Ilnam acheta un ampli pour sa guitare, un nouveau téléphone, et un blouson en cuir (parce que ça faisait classe). Il fourra quelques affaires dans un sac à dos et claqua la porte, laissant à ses parents seulement son numéro, au cas où, ainsi qu’une courte lettre qui, en gros, disait « Bonne continuation. » Il rompit également avec son copain, qui le prit étonnamment bien, lui souhaitant même bonne chance, assurant qu’il suivrait sa musique de près, et qu’il devait rester fort et ne jamais baisser les bras.
Kitae quant à lui n’eut aucun souci pour partir, ses parents lui passant même ses affaires avec quelques billets pour que leur fils ne meure pas de faim sous un pont. Ils avaient accepté sans difficulté son choix, faisant juste promettre aux deux garçons de prendre soin d’eux-mêmes. Sans doute avaient-ils vu l’effet qu’avait eue sur Ilnam sa rupture avec ses parents, et pour cette raison ils avaient préféré prendre sur eux pour ne ruiner ni la vie de leur fils, ni leur relation avec ce dernier.
***
Les deux musiciens s’élancèrent donc à la redécouverte du pays, par leurs propres moyens et à leur manière à eux. Ils passaient autant de temps qu’ils voulaient où ils voulaient, se produisant surtout dans la rue et dans des bars. Au début, ils n’existaient pas. Aux yeux des autres, ils n’étaient que des gosses parmi tant d’autres, qui cherchaient à se faire connaître uniquement pour pouvoir admirer la vue du haut du podium. Il ne fallut cependant pas longtemps aux deux amis pour prouver qu’ils n’étaient pas de simples wannabes, et qu’ils aimaient la musique bien plus que la célébrité.
Ils ne prenaient jamais les transports en commun. Leur unique moyen de déplacement était leurs pieds et le stop, quand des conducteurs étaient assez sympa pour les emmener jusqu’à la ville suivante. Celle qu’ils préféraient était Busan, pour ses plages, et en particulier Haeundae, où ils pouvaient jouer sans limite de temps ou de places. C’est là-bas que commença réellement leur carrière, avec leurs premiers fans. C’est également là-bas qu’Ilnam et Kitae louèrent pour la première fois une petite salle de concert, qui, à leur surprise, fut si rapidement remplie qu’ils en restèrent sans voix (qu’ils retrouvèrent bien évidemment quand le concert commença). Avec l’argent gagné, ils préféraient améliorer leur matériel plutôt que leur confort de vie, voulant faire toujours mieux. Ils se fichaient de passer la nuit dans un jjimjilbang ou un motel miteux, du moment qu’ils avaient un lit et une douche. Quand ils avaient de la chance, ils squattaient chez des gens qu’ils venaient tout juste de rencontrer en échange de bons services ; ils étaient pratiquement multifonctions, du ménage au copulage, rien n’était plus important que la survie pour pouvoir poursuivre leur rêve. Lorsqu’ils repassaient dans la même ville ils faisaient à nouveau signe à ces personnes, qui, au fil du temps, étaient devenues un peu plus que de simples étrangers, fans, ou coups d’un soir. Parfois, quand ils avaient moins de chance mais un peu quand même, ils tombaient sur un sdf assez gentil pour leur prêter un ou deux de ses cartons. Et dans leurs pires jours, tout ce qu’ils pouvaient faire était se poser dans un coin de rue, blottis l’un contre l’autre pour garder de la chaleur. Ces jours-là, plutôt que dormir (ils en auraient été incapables quand il faisait 5°C), ils profitaient de ce temps pour composer.
Leur muse était la réalité. Ils préféraient laisser les arcs-en-ciel et les licornes aux autres idéalistes et utopistes. Non, eux trouvaient l’inspiration avec la réalité du monde actuel, les expériences vécues, les personnes rencontrées… Et c’est pour ça qu’on les aimait, pour ça que leurs salles de concert se remplissaient instantanément. A plusieurs reprises ils s’étaient fait aborder par des scouts pour rejoindre une compagnie, une maison de disques, mais à chaque fois leur réponse était la même : ils se plaisaient dans l’underground et comptaient bien y rester. Leur rêve n’avait jamais été de devenir des musiciens mainstream. Ce qu’ils voulaient, eux, c’était créer leur propre musique. Ils ne cherchaient pas à avoir des millions de fans, ni à remplir des stades entiers. L’idée d’avoir des gardes du corps les faisait également frissonner. Pour cette raison, ils ne louaient jamais de grandes salles. Non, ils privilégiaient la qualité à la quantité. Il leur était plus important de pouvoir se mêler à leurs fans, parce que justement, ils n’étaient pas simplement des fans : ils étaient devenus une famille, soudée, et les deux musiciens voulaient en faire partie.
En parlant de famille, celle d’Ilnam agissait comme si ce dernier n’existait plus à leurs yeux. Il leur avait laissé son numéro, mais leur téléphone ne faisait jamais sonner le sien. Il les appelait quelques fois par an, sans toutefois exprimer son désir de refaire partie de leur vie. Ils ne lui en donnaient ni l’envie ni l’occasion. Quand, ou plutôt si ils décrochaient… la conversation ne durait pas plus de deux minutes, et ils ne lui posaient jamais aucune question, ce qu’il faisait, s’il allait bien. Ils lui faisaient bien comprendre qu’ils n’avaient plus rien à lui dire. A leurs yeux, il était celui qui avait brisé leur famille.
Quelqu’un qui ne connaissait pas Ilnam l’aurait qualifié d’étrange, puisque la douleur entrainée par ces rares interactions l’avait une nouvelle fois inspiré pour une chanson. Mais il vivait son rêve, en compagnie de son meilleur ami, et c’était ce qui lui permettait de ne pas se laisser baisser les bras.
***
Cela faisait déjà presque trois ans que lui et Kitae avaient pris la route, quatre fois qu’ils avaient fait le tour du pays, quand Ilnam reçut pour la première fois un appel d’une personne dont il pensait ne plus jamais entendre la voix. Sous le choc, il faillit échapper son portable. Il fixa l’écran pendant un bon moment, pensant qu’il hallucinait. Pourtant, l’appel venait bien de sa mère, qui avait pour la première fois pris l’initiative de le contacter. Décrochant avec appréhension, il lui demanda comment elle allait. Comme si elle avait attendu cette question, elle se mit à lui raconter que l’entreprise dans laquelle les deux parents travaillaient avait mis la clé sous la porte, et qu’ils se retrouvaient désormais sans emploi. La seule question qu’elle posa – qui ne semblait même pas en être une – était s’il pouvait leur envoyer de l’argent le temps qu’ils se remettent sur pied. Bien évidemment, il accepta. Quel fils serait-il s’il ne supportait pas ses parents dans le besoin ?
Mais au fil du temps, ils demandaient de plus en plus, et avec ses modestes gains, il restait à Ilnam de moins en moins d’argent pour subvenir à ses propres besoins. Lorsqu’il mentionna ce fait à sa mère, celle-ci rétorqua : « Il faut bien qu’on survive avec ton père, non ? Est-ce qu’on se plaignait, nous, quand on t’achetait des choses ? Ta guitare, tu crois qu’elle était d’occasion ? Non, tu as eu la meilleure. Et ton école ? Les médecins ? Tu ne penses pas qu’il est grand temps que tu arrêtes de te tourner les pouces et fasses quelque chose d’utile pour une fois dans ta vie ? » Le jeune homme resta bouche bée, le temps d’assimiler tout ce qu’elle venait de lui balancer sur un ton presque dédaigneux. Il ne savait que répondre. Mais elle n’avait pas fini. Elle comptait bien lui faire comprendre qu’il n’avait pas le choix. « Ne nous fais pas regretter de t’avoir adopté, » déclara-t-elle sèchement avant de raccrocher.
Ilnam resta planté là en silence, le téléphone encore collé à son oreille. Pour la première fois, tous les sons qu’il avait l’habitude d’entendre au quotidien s’étaient volatilisés, laissant seulement place à l’écho de la phrase cinglante prononcée par sa mère. Pour la première fois, aucune envie d’écrire ne s’était manifestée.
***
2016. Ilnam entra officiellement en deuxième année à Yonsei après un an de cours en tant qu’étudiant libre, parvenant même à décrocher une bourse grâce à son talent, son expérience, et un travail acharné qu’il n’avait pas l’habitude de fournir, faute d’un dossier très favorable après le lycée. Il intégra le cursus arts du spectacle avec bien sûr la musique en spécialité. Il n’eut d’autre choix que de se poser définitivement, chose qu’il n’avait pas faite depuis près de quatre ans. Il avait tellement pris l’habitude d’aller de ville en ville, de loger dans des endroits pas toujours accueillants, inconfortables, qu’il avait l’impression d’avoir été attaché, restreint dans ses mouvements. Au début, il lui arrivait même de faire des crises de panique dans sa chambre, tellement il se sentait à l’étroit.
2019. La relation entre Ilnam et ses parents ne s’est pas améliorée, loin de là. Il a beau leur demander pourquoi ils ne travaillent toujours pas depuis tout ce temps, chaque fois il parviennent à retourner sa question contre lui. Kitae lui a maintes fois répété qu’il était grand temps qu’ils commencent à se débrouiller tout seuls, mais il lui est simplement impossible de tourner le dos à ceux qui l’ont élevé, qui lui ont permis de vivre agréablement. Il est incapable de leur refuser quoi que ce soit. Ils le manipulent comme bon leur semble et il ne s’en rend même pas compte. Après tout, c’est son devoir en tant que fils de faire tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir ses parents, non ?
Il s’habitue encore à la vie "ordinaire", vêtements sobres, moins de maquillage… (si leurs fans le voyaient dans sa tenue de tous les jours, il est fort probable qu’ils ne le reconnaissent même pas). En revanche, rester attentif en cours est toujours aussi difficile, étant donné qu’il n’est pas parvenu à complètement réajuster son rythme de sommeil. Il demeure l’oiseau de nuit qu’il était devenu lors de ses tournées. Il sort autant qu’il peut, que ce soit pour aller à une soirée de folie, en boîte, ou une simple promenade dans le parc. Hors de question de rester cloitré chez lui et faire métro, boulot, dodo. Même une chasse au trésor lui paraîtrait plus intéressante. Vivre au jour le jour, voilà ce qu’il a fait jusqu’à maintenant, et ce qu’il continuera de faire jusqu’au bout.
Ses tournées avec Kitae ont pris fin, sans toutefois qu’ils cessent complètement les concerts. La différence est que désormais, ils ne se déplacent pas plus loin que les alentours de Séoul, et font moins de représentations qu’auparavant. Malgré cela, ils continuent de composer, présentant leur musique dans les bars de la ville, parfois dans de petites salles de concert, et postant leurs mixtapes sur le net.
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 12:25 Citer EditerSupprimer
bienvenue ici
très très bon choix de scénario et je peux t'assurer que tu es encore attendu
bon courage pour ta fiche
si tu as un soucis n'hésite pas à contacter le staff
très très bon choix de scénario et je peux t'assurer que tu es encore attendu
bon courage pour ta fiche
si tu as un soucis n'hésite pas à contacter le staff
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 12:26 Citer EditerSupprimer
MON BROOOOOOO
Désolé de t’avoir fait attendre j’édite en rentrant à la maison
Mais tu es clairement treeeees attendu !!!!
EDIT: voilà voilà je suis de retour !!!
t'as vu comment ils sont tous adorable sur ce forum ! ils ont laissés ta fiche vide pour que je puisse venir te bienvenuter en premier
puis la belle demoiselle au dessus de moi est même venu me voir en pv pour me dire que t'avais posté ta fiche (trois autres joueuses sont aussi venue me le dire, si c'est pas de l'amour)
je te dis d'hors et déjà 10 000 merci de tenter mon pv, mon précieux ! j'ai tellement besoin de ilnam dans ma vie que tu ne pouvais pas me faire meilleure surprise (et j'ai besoin de ton Discord pour te pourrir d'amour !)
viens me voir, pose moi autant de questions dont tu as besoin, fais toi plaisir, je n'attends que toi et je t'aime d'un amour fou (même si les deux mecs se connaissent pas encore, amnésie bjr) :bago:
encore bienvenue mon chou et bonne chance pour ta fiche ! que la force des Twins soit avec toi
Désolé de t’avoir fait attendre j’édite en rentrant à la maison
Mais tu es clairement treeeees attendu !!!!
EDIT: voilà voilà je suis de retour !!!
t'as vu comment ils sont tous adorable sur ce forum ! ils ont laissés ta fiche vide pour que je puisse venir te bienvenuter en premier
puis la belle demoiselle au dessus de moi est même venu me voir en pv pour me dire que t'avais posté ta fiche (trois autres joueuses sont aussi venue me le dire, si c'est pas de l'amour)
je te dis d'hors et déjà 10 000 merci de tenter mon pv, mon précieux ! j'ai tellement besoin de ilnam dans ma vie que tu ne pouvais pas me faire meilleure surprise (et j'ai besoin de ton Discord pour te pourrir d'amour !)
viens me voir, pose moi autant de questions dont tu as besoin, fais toi plaisir, je n'attends que toi et je t'aime d'un amour fou (même si les deux mecs se connaissent pas encore, amnésie bjr) :bago:
encore bienvenue mon chou et bonne chance pour ta fiche ! que la force des Twins soit avec toi
Invité
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 14:45 Citer EditerSupprimer
Bienvenueeeeeeeee
J'osais pas poster cette nuit quand t'as drop ta fiche pour laisser le first à Yohan (La Jimin's girl en moi a eu bcp de mal à se contenir je demande un award MERCI ) Anyways très bon choix de scénario J'espère que tu t'amuseras bien parmi nous eeeeeet bonne continuation pour ta fiche
J'osais pas poster cette nuit quand t'as drop ta fiche pour laisser le first à Yohan (La Jimin's girl en moi a eu bcp de mal à se contenir je demande un award MERCI ) Anyways très bon choix de scénario J'espère que tu t'amuseras bien parmi nous eeeeeet bonne continuation pour ta fiche
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 14:50 Citer EditerSupprimer
Bienvenue
Bon courage pour ta fiche
Bon courage pour ta fiche
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 15:53 Citer EditerSupprimer
pareil j'ai pas osé te souhaiter la bienvenue avant le twin donc me voilà
bienvenue parmi nous
jimiiiiiin quoi
bienvenue parmi nous
jimiiiiiin quoi
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 16:28 Citer EditerSupprimer
Merci tout le monde pour tous ces chalereux messages de bienvenue
C'est une véritable joie de savoir qu'on veut bien de moi par ici
@Yohandlkfkjsdl ; Je t'ai envoyé un mp y'a genre un ou deux jours, mais on dirait que tu ne l'as toujours pas lu :bago:
PS: C'est quoi Discord ? D:
C'est une véritable joie de savoir qu'on veut bien de moi par ici
@Yohandlkfkjsdl ; Je t'ai envoyé un mp y'a genre un ou deux jours, mais on dirait que tu ne l'as toujours pas lu :bago:
PS: C'est quoi Discord ? D:
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 19:33 Citer EditerSupprimer
team j'ai vu ta fiche dans la nuit mais je n'ai pas voulu poster avant yohan bonsoir
bienvenue à toi sur stw ! ♡♡♡
quel bon choix de pv ! en espérant que tu t'amuses parmi nous
bon courage pour la rédaction de ta fiche ♡♡♡
bienvenue à toi sur stw ! ♡♡♡
quel bon choix de pv ! en espérant que tu t'amuses parmi nous
bon courage pour la rédaction de ta fiche ♡♡♡
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Re: Seo Il Nam - To be able to forget means sanity. | Lun 4 Mar - 19:41 Citer EditerSupprimer
team j'ai pas vu ta fiche et je la vois maintenant bienvenue parmi nous, on voit double bon courage pour ta fiche
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