C’est l’histoire de deux adolescents qui se sont rencontrés alors qu’ils allaient finir le lycée. Elle, son père venait de Chine. Lui, ses parents avaient immigré en Australie pour y ouvrir leur restaurant coréen et y vivre bien. Différents mais pourtant si attachants, ils ne s’étaient plus lâchés. Pourquoi se priver après tout ?

Ta mère t’a eu jeune, mais elle ne l’a pas regretté. Tu étais désiré. Et tu as été accueilli dans les meilleures conditions possibles.

Tu as toujours été un enfant facile. Gâté, tu ne piquais pourtant pas des crises en plein milieu du supermarché pour avoir un peu plus d’attention. Calme et attentif, tu demandais toujours tout bien poliment – et c’était rare qu’on te refuse quelque chose.

Les week-ends, tu les passais au restaurant familial, où travaillaient encore à l’époque tes grands-parents – depuis, ils ont pris une retraite bien méritée et ont tout légué à leur fils et à sa femme, ta mère – et tu t’y amusais bien. Non seulement tu pouvais manger absolument quand tu voulais, mais il y avait tout le temps quelqu’un pour t’apprendre quelque chose. Puis, les clients appréciaient ta petite bouille quand tu passais entre les tables pour aller dire bonjour – le seul mot en coréen qu’à l’époque tu connaissais, ton père ne t’ayant pas transmis sa langue maternelle, privilégiant plutôt l’anglais.

À l’école, tu n’avais pas de problèmes. Tu n’en as jamais eu. Du moins, concernant le savoir et ton travail scolaire. Ta relation avec les autres était plus problématique. Tes excellents résultats attisaient la jalousie, tes traits fins faisaient parler d’eux. Plus tard, on t’a comparé plus d’une fois à une fille, pensant que tu étais gay. Oh, par chance, tu avais des amis fidèles grâce auxquels tu n’as pas sombré dans la dépression, mais tu avais chaque matin une petite boule au ventre en imaginant avec quel sobriquet stupide on allait encore t’appeler.

C’est en partie pour cela que tu as voulu faire du droit. Car tu as connu le harcèlement et tu aurais aimé que ceux qui t’ont embêté subissent une remontrance ferme. Et surtout parce que dans ton école, un adolescent s’est suicidé. Lui, il n’a pas eu ta chance, il n’avait personne autour de lui. Il a craqué. C’était tellement injuste, et si tu avais su, tu l’aurais aidé.

Mais avant de commencer tes études, tu as décidé de passer une année en Corée pour renouer avec des traditions que tu ne connaissais presque pas. Tu voulais apprendre la langue, à connaître ce pays d’où tu venais, du moins en partie. Tu t’en es allé avec une valise, le cœur plein d’espoir. Tu es tombé amoureux de cette nation, de son langage, de ses habitants si proches mais pourtant si éloignés de ce que tu étais. Tu t’es éclaté, a profité de chaque moment. Tu as fait une tonne de photos, as tout essayé, es allé partout. Tu as vibré avec la Corée.

Le retour à la réalité australienne a été dur. Tu as commencé ta première année de droit, mais n’as pas du tout accroché. Les gens de ta classe n’étaient pas amicaux, tu as eu du mal à te faire des amis. C’était trop compétitif, trop superficiel, tu as lâché au bout de quelques mois. Tu as travaillé à la place, réfléchissant à ce que tu pourrais faire l’année prochaine. Continuer des études ? Avec plaisir, tu ne voyais pas quoi faire d’autre. Mais où ?

C’est à ce moment que tu as repensé à ton voyage, le plus beau de toute ta vie. Et si tu t’inscrivais dans une université coréenne ? Et si tu t’essayais à une nouvelle vie là-bas ? Tu as réfléchi, encore. Tu en as parlé à tes parents. Ils n’étaient pas contre. Tu as contacté plusieurs établissements avant d’arrêter ton choix sur la Yonsen, car tu avais besoin de cette vie sociale que tu n’avais pas pu avoir du côté de Melbourne. Ton choix d’option s’est fait un peu sur un coup de tête, dans l’espoir que ces nouvelles études te parlent plus.

Et enfin, tu t’es envolé avec ta moto, avec tes bagages, prêt pour de nouvelles aventures, prêt pour te faire de nouveaux amis, et plus si affinités.