~ Je veux bien jouer le jeu quelques temps, écrire des articles pour participer à la bonne humeur de la préparation de Noël… Mais au bout d’un moment ça me lasse, voire me crispe. Parce que j’avoue avoir du mal à comprendre pourquoi déployer toute cette énergie chaque année en l’honneur de Noël, une fête qui personnellement me paraît si insignifiante ! Bon, j’exagère peut-être un peu.

Ça me fait plaisir que les gens soient heureux de se retrouver, de se faire tout plein de cadeaux, et de préparer de la bonne nourriture pour l’occasion. Ce qui m’embête c’est la démesure, et surtout cette espèce d’injonction à fêter Noël que je ressens. Tous les ans c’est pareil, je me retrouve, à la même période, à commencer à angoisser parce que je n’ai pas un rond et que je vais devoir acheter des cadeaux à tous mes proches d’un coup… Non pas que ma famille m’en voudrait si j’arrivais les mains vides, mais j’ai l’impression de sentir cette pression sociale sans cesse renouvelée de Noël, dont les cadeaux font partie. Les cadeaux, mais aussi le rituel : vêtir nos plus belles tenues de soirée avant de nous ruiner pour un repas avec des gens qu’on aime, et d’autres dont on se fout, mais qu’on voit tous les ans parce que, quand même, c’est la famille…

Mais comme en réfléchissant à cet article j’avais vraiment l’impression d’être une rabat-joie aigrie, j’ai sondé quelques personnes en leur posant la question : pourquoi fêtez-vous Noël ? Parmi les 15 réponses que j’ai eu, en voici quelques-unes.

  — Parce que c’est obligé.
   — À la base pour se retrouver en famille, mais aujourd’hui je ne sais plus.
   — Parce que c’est la tradition, c’est dans la culture. Ça semble difficilement concevable de ne pas le fêter.
   — Pour être avec ma famille que je vois rarement, les bons repas, la chaleur humaine, les rires…
   — Parce que ça ma rappelle mon enfance, et que j’aime cette période de l’année.

Noël, LA fête familiale par excellence. L’année dernière, le 24 décembre au soir, j’ai passé le réveillon avec ma sœur et mon père dans la famille de la compagne de mon père. Je l’aime beaucoup, j’aime beaucoup ses fils, et j’ai rencontré tout le reste de la famille. J’ai passé tout le repas en face d’un macho de première qui faisait des remarques dégueulasses à sa femme enceinte assise à côté de lui, à essayer de me contenir pour ne pas mettre une « mauvaise ambiance » à table. Au même moment, dans une conversation que j’ai avec trois amies, l’une d’elle racontait le merveilleux moment qu’elle passait à s’engueuler avec sa mère… Pendant qu’une autre nous expliquait comment elle faisait face à sa tradition familiale qui veut que les femmes soient à la cuisine et fassent le service pendant que les hommes font des blagues, un verre à la main. Et à cet instant précis je me suis vraiment demandé : pourquoi s’infliger ça ? ~

J'entends, alors, des voix s'élever et redresse la tête. J'arrête la lecture de l'article que je venais d'imprimer. J'aimais cette plume. Ce style. Je m'inspirais beaucoup de cette femme étrangère pour mes propres projets d'écriture. Pour mes propres articles. Et ce qu'elle décrit de Noël me parle. Bien plus qu'on ne pourrait le croire. Je souffle doucement et laisse l'article posé sur mon petit bureau. Je vais, ainsi, rejoindre le reste de la fraternité. Qu'ont-ils à crier de la sorte ?

Un fier sourire aux lèvres le président des Beolsae s'était rendu avec impatience dans les couloirs, réveillant un à un les étudiants endormis avant de retourner dans le salon où il se mit à dresser la table. Il placa alors les chocolats chauds sur un dessous de verre, avant de sursauter en entendant la voix familière de Selene  « Oh ! Selene ! » s'étonne-t-il en souriant de plus belle, avant d'hausser les épaules  « Tu sais c'est une heure normal pour se réveiller... Puis pour boire du chocolat chaud.  » se justifie-t-il avant de repartir dans la cuisine pour récupérer les cookies. Il les installa alors soigneusement dans de jolies assiettes rouge sous le thème de Noël, avant de retourner au salon.  « Installe toi les autres ne vont pas tarder.  » dit-il avant d'apercevoir dans le coin de la pièce la jeune Hyemi  « Toi aussi Hyemi, vient manger ça te videra la tête. Te connaissant tu dois encore être entrain de travailler. » lui dit avant de déposer les assiettes de cookies encore fumants  sur la table.  « Oh enfaite j'y pense, j'ai invité les cheonglyong à venir déguster ce petit déjeuner de Noël avec nous. Ça ne vous dérange pas ?  »

C’était difficile de faire revivre la frat. Les gumiho étaient tombé bien bas avec la descente de la crimson. On s’était retrouvé en très petit comité. Pourtant on ne voulait pas abandonner, alors on avait repris les choses en main, petit à petit en commençant par un nouvel emblème. Je m’étais retrouvé président de la frat, prêt a reprendre la place qu’on avait à une époque dans cette école.
Avec tout ça, une nouvelle fratrie avait fait son apparition, gagnant rapidement en popularité. D’ailleurs leur président. Yi Min Seok nous avait gentiment invité à un petit déjeuner de Noël. C’est avec plaisir que j’avais accepté.
Ce matin là, je m’étais levé en premier, faisant le tour des rares chambres encore occupée par les désormais CheongLyong pour les réveillés. Leur demandant de me rejoindre dans le dortoir des Beolsae pour ce déjeuner. J’avais pris le chemin en premier, rejoignant les bâtiments des oranges encore un peu endormi. Sur place je m’étais dirigé vers Min Seok, comme je ne connaissais pas encore vraiment les autres membres.

« Salut, c’est vraiment sympa de nous avoir invité, les autres ne devraient pas tarder »

Je n'avais pas vraiment envie d'être là. Mais je n'avais pas le choix. Jusqu'à maintenant, j'avais toujours refusé de faire partie d'une fraternité. Pourquoi ? La raison semble pourtant évidente, à mes yeux. Je détestais ce genre de "guerre" puérile que certains élèves se faisaient subir. Je ne voulais pas être mêlée à tout ça. Je souhaitais simplement me concentrer sur mes études et sur mon rêve. Ma future carrière compte énormément pour moi et il n'y a que ça qui m'intéresse. Voilà pourquoi, même à la période de Noël, je suis sans cesse plongée dans le travail. Je suis comme ça. Mais c'était sans compter l'intervention des autres membres de ma fraternité et plus particulièrement du président. Quelle idée de tous nous réunir, franchement. J'en avais des boutons sur tout le corps. Oui. Une allergie. Je suis allergique au monde qui m'entoure. C'est une façon de parler, bien entendu, mais tout de même. Si je décide d'aller prendre place c'est uniquement parce qu'il y a des cookies. Mais aussi parce qu'il y a Selene. On ne s'est que très peu parlé mais elle reste une femme. Cela me suffit pour l'apprécier et me sentir en sécurité avec elle. Même si, au fond, je savais que Min Seok était tout aussi gentil que mes plus proches amies.

- Est-ce que nous avons le choix... ? me murmurais-je, à moi même, lorsqu'il parla de l'arrivée d'une autre fraternité.

C'est alors que, très rapidement, j'entendis la voix d'un garçon que je ne connaissais pas. Voilà, c'est parti. Le défilé des inconnus. Un défilé de garçons que je me tue à fuir depuis le début de mes études. J'aurais mieux fait de rester au lit, moi, ce matin.

Mei était réveillée depuis longtemps, mais elle n’avait pas forcément envie de se lever pourtant, il fallait bien qu’elle se bouge. Voir la fraternité aussi vide, aussi morte l’avait beaucoup peinée, même s'il lui arrivait de râler de se faire réveiller par des étudiants bourrés, par des éclats de rires ou encore par la musique maintenant personne ne pourrait entendre si quelqu’un se faisait tuer dans la chambre d’à côté. Mais ils l’avaient rebaptisée, une refonte complète des renards qui sont maintenant devenue de beaux et majestueux dragons et Mei en était la vice-présidente pour son plus grand bonheur. Déjà qu’elle ne dormait pas beaucoup la nuit à cause de l’hôpital, maintenant avec ses nouvelles responsabilités elle n’allait quasiment plus dormir du tout. Mais soit, c’était son choix, ses décisions.

Après quelques instants, la poupée avait enfin décidée de se lever et de se préparer pour le petit-déjeuner qu’elle allait partager avec les oranges, cette nouvelle fraternité qui avait éclos il y a peu. Saluer les nouveaux élèves qu’elle ne connaissait pas du tout. Qui sait, peut-être se faire de nouveau ami ? Mei était comme ça, elle voyait toujours le verre bien trop rempli. Elle se dirige vers la maison des colibris avant de faire son entrée un grand sourire sur le visage. Du haut de son mètre soixante-quatorze, elle part directement voir son collègue, le président de la fraternité afin de le saluer.

« Nam' oppa ! »

Mei n'était pas la plus à l'aise avec des inconnus, alors elle préférait se rapprocher du visage qu'elle connaissait, celui de son président.

Ma grande malchance dans la vie était d’avoir toujours eu le sommeil léger. Pour cette raison, quand le président de la fraternité s’était levé pour réveiller les autres, je n’avais pas eu d’autre choix que d’émerger de ma somnolence, moi aussi. J’avais lutté un instant, essayant de tirer par-dessus ma tête la couverture dans laquelle j’avais passé la nuit à me rouler, puis je m’étais résigner à quitter mon lit pour me préparer, moi aussi, à rejoindre le dortoir des Beolsae.

Bâillant allègrement, j’avais rapidement passé la main dans mes cheveux pour les remettre en place, bien qu’ils demeurent en bataille, avant d’enfiler une tenue plus ou moins décontractée, d'attraper un de mes appareils photo numériques, et de rejoindre le dortoir des oranges. Je ne connaissais aucun visage là-bas, mais ce n’était pas plus mal : j’aimais ma tranquillité.

« Bonjour~ » Chantonnai-je malgré tout, avant de désigner l’appareil photo que j’avais autour du cou. « Ça vous dérange pas si je prends des photos ? Je vous les transmettrai bien sûr. » S’ils me disaient non, ce n’était pas grave, mais je ne manquais jamais une occasion d’immortaliser les autres.

Les autres, rares, membre des Cheonglyong commençaient à faire leur apparition dans la salle commune des oranges. J’étais content qu’ils soient venu, j’étais content que ce petit déjeuner comment se fasse, entre deux petites frat, la plus ancienne et la toute dernière, fraichement arrivée à la Yonsei.
Après moi, c’était Mei qui était arrivée. Au moins on faisait bonne impression en tant que dup présidentiel en arrivant en premier, je la saluais de la main en la voyant venir dans ma direction.

« Salut Mei, bien dormi? Je te présente Min Seok le président des Beolsae »

Puis c’était Sawyer qui avait débarqué, au moins il était venu c’était bien. Une tête de mule ce jeune homme, mais très intelligent, peut-être un peu trop. Il manquait de … comment dire détente ? Enfin je le trouvais parfois un peu trop sérieux. Il fallait qu’il profite de la vie un peu, il avait même pas 22 ans.

« Salut, euh … oui j’imagine »

Je me tournais un peu vers Min Seok en l’interrogeant du regard.

« ça nous fera des souvenirs je trouve que c’est une bonne idée. »

On pourrait peut-être en faire un album de fratrie, ou afficher les meilleurs clichés dans notre salle commune.

D'autres personnes. De nouvelles arrivées. Je me renferme. Trop de monde. Je ne suis pas à l'aise. Je me perds dans mes pensées. Ma façon, à moi, de m'évader d'une situation inconfortable. J'ai l'impression d'être dans une autre dimension. Je bouge au ralenti mais tout ce qui est autour de moi bouge tellement vite. Et je ne veux qu'une chose moi... Revenir à ce qui était avant. Quand je n'étais pas la pauvre Hye Mi assise sur cette chaise avec... Avec tant d'inconnus pour seul compagnie en cette période de fêtes. Oui, mais c'est ce qui se passe. Alors je reste ici. Je ne peux pas. Je ne peux, tout simplement, pas bouger. Et je ressens la pression de tous ceux qui sont là à tourner autour de moi, qui aimerait que je fasse quelque chose, que je dise quelque chose, que je pète les plombs, que je hurle, que je pleure et... Et j'aimerais bien pouvoir faire ça, j'aimerais pouvoir dire ce qu'on attend de moi, faire ce qui rassurerait tout le monde. Oui, j'aimerais beaucoup. Mais je ne sais pas comment faire, je ne sais pas comment être cette personne. Je ne sais pas qui est cette personne aujourd'hui. Comment est-ce arrivé ? Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi suis-je aussi seule ?!

- Hye Mi !

Une voix résonne dans mon oreille et je sens un coup de coude venir percuter mon bras. Je me réveille et me lève, d'un seul bond. Les regards se posent sur moi et je me sens encore plus mal. Avant j'aimais ce genre de rencontres mais là je n'ai qu'une envie. Pleurer. Puis fuir. Mais je ne montre rien. C'est dans ma nature de tout conserver au plus profond de moi. Je souris du mieux que je peux à cette autre fraternité et les salue respectueusement avant de reprendre ma place.

- Faites comme chez vous !

Je grimace intérieurement. Faites comme chez vous. Je me donne envie de vomir.