Sori avait débloqué, elle avait tout laché. Absolument tout. Tout ce qui la blessait, la rendait folle. La faisait vivre son horreur quotidien. Car Su Nah avait tout simplement laché. Et elle n'était pas sûre de survivre une deuxième fois à un rejet, de pouvoir se reconstruire par derrière, de pouvoir continuer à sourire et même soutenir ses proches. Sa question la fit flancher. Néanmoins. Elle avait sa réponse. « Je le ferais quand même. » Et bien que sa réponse pouvait paraître froide, sa réponse était logique.   « Parce que je ne vis pas pour eux. Ils trouveront quelqu'un pour eux. Et ils partiront. Je vis pour moi. Pas pour eux. Et ça, même si ça serait extrêmement douloureux. » Car ils étaient tout pour elle. Absolument tout. Mais Su Nah était son avenir, elle le savait. Puis elle l'écouta. Tout dire. Des choses qu'elle avait déjà bien avant. Rien qu'en sortant avec son frère.
Sori n'aima même pas cette déclaration d'amour. Elle était empoisonnée, douloureuse. Comme si tout était de sa faute. C'était de la faute de Sori de lui faire ça. Si elle était née homme, tout aurait été mieux non ?

Et le pire dans tout ça était qu'elle lui demandait la solution. La solution aux problèmes qui avait crée leur séparation. Et Sori devait toujours et encore souffrir de ça. Elle tourna la tête, pleurant silencieusement de son côté. Elle déglutit difficilement. « C'est a moi de te donner la solution Su Nah ? Réellement ? » Elle aurait aimé avoir des paroles tendres et douces pour la réconforter. Mais c'était compliqué, dans cette situation. « Tu veux que je te demande de choisir ? Pour que tu me haïsses de t'avoir fait abandonner ta famille ? Que tu me claques dans les bras après t'être rongé de culpabilité de leur côté ? » Sa voix était enrouée alors que la douleur ne faisait que transparaître. Comment pouvait-elle lui demander son choix. Évidemment qu'elle voudrait être choisi, de pouvoir vivre avec elle, l'embrasser comme elle le souhaite. La réconforter à l'heure actuelle, la voyant pleurer ainsi. « Pourquoi est-ce que je dois toujours être celle qui porte tout Su Nah ? Celle qui contrôle tout ? Ma famille, notre relation. A chaque fois. Et quand je craque, ça donne ça ? Pourquoi Su Nah ? » Ce n'était pas un reproche. Mais une constatation. On attendait toujours de Sori de diriger, de choisir pour les autres. De porter le fardeau des décisions. Pourquoi ? Sori n'était plus aussi stable émotionnellement parlant. Surtout maintenant. Elle descendit du bureau, se rhabillant parfaitement. « C'est à toi de choisir si tu veux vivre ta vie pour eux. Ou vivre ta vie. »

Bien sûr, elle avait raison, mais depuis quand faire ce qui était le plus logique était le plus judicieux ou même le plus facile. Qui ne leur dit pas que dans 15, 20 ou 30 ans elles se quittent. Su Nah n’avait pas envie de douter de leur relation, mais elle restait une jeune femme terre à terre, peut-être trop. Et ce romantisme des films elle n’y croyait plus. Elles n’avaient jamais vraiment parlé et maintenant qu’elles le faisaient c’était dans une situation chaotique. Plus Su Nah l’écoutait parler et plus elle se sentait déçu. Elle aurait préféré que Sori lui dise qu’elle n’y arrivait plus, qu’elle était plus que dépassée par l’attitude de Su Nah, elle aurait préféré que Sori lui dise qu’elle n’avait plus envie de l’attendre et que si elle devait choisir c’était maintenant. Parce qu’il était évident qu’elle devait choisir. Pour son propre bien mais surtout pour le bien des autres. Elle savait que Sori avait supporté beaucoup à cause d’elle. Elle s’en était déjà excusée, s’était promis un million de fois de ne plus lui faire de mal ainsi … Et finalement … Su Nah lui avait avoué à demi-mot qu’elle était sur le point de la choisir et … ce n’était pas suffisamment. Non ce n’était plus suffisant. Plus rien ne semblait atteindre Sori qui avait trop espéré. Elle avait tout gâché alors hein. Su Nah la fixait et aurait aimé qu’elle puisse la comprendre sans avoir à utiliser des mots … parce que tout était déformée et perçue maladroitement. Sori n’avait alors rien compris de ce que lui disait Su Nah … Et surtout Su Nah ne compris pas de quel contrôle elle parlait pour leur relation … car c’était toujours Sori qui avait fait le premier pas vers elle, même si jamais Su Nah ne l’avait repoussé … Elle se redresse et souffle « Je ne t’ai jamais demandé de me donner LA solution, de choisir pour moi … jamais j’aurais eu l’égoïsme de te demander ça. » sa voix peine à être stable mais elle ajoute. « Parce que tu ne sais pas faire autrement Sori. » murmure-t-elle. Et ce n’était pas un reproche. Mais personne n’attendait d’elle de choisir quoique ce soit … De ce que Su Nah avait compris Lyvan avait eu besoin de sa sœur comme d’un soutien sans faille ce qui avait été épuisant pour la jeune femme à ne pas en douter, mais jamais Lyvan lui avait demandé de se battre à sa place contre ses parents. Elle lui avait demandé de soigner ses blessures et de lui tenir la main pour qu’elle ne soit plus seule. Su Nah ne lui avait jamais demandé de choisir, non jamais. Mais si la solution paraissait aussi évidente pour Sori, elle aurait aimé que son ex petite amie ait assez d’empathie pour comprendre que pour Su Nah ce n’était pas aussi … évident. « Tu veux tellement que tes proches soient bien que tu décides de choisir pour eux. Sori tu sais pas déléguer, tu subis ta pression parce que tu te donnes un rôle que tu penses être uniques … tu ne sais pas demander de l’aide. L’as-tu déjà fait une seule fois dans ta vie ? » elle secoue la tête « Ce n’est pas un reproche Sori, j’ai toujours vu comme une force chez toi …mais finalement si tout ça ce n’était qu’une façade ? Tu craques oui, et t’as le droit. Mais t’as le droit de dire non. De demander de l’aide toi aussi. » elle le fixe et ajoute « Tu n’es pas toute seule, même quand tu crois l’être … tu l’es pas. » Elle ravale ses larmes et souffle « J’n’ai pas ta capacité à faire un choix radical aussi … aussi radicalement. Et ça ne veut pas dire que je ne t’aime pas. Bien au contraire, si je m’en moquais de toi j’aurais depuis longtemps tiré un trait sur toi. Mais je ne peux pas vivre sans toi. » termine-t-elle dans un sourire triste en se laissant tomber sur sa chaise. « Si je t’ai déjà perdu alors j’accepterais cette punition … mais si quelque part … tu penses pouvoir m’attendre … rien qu’un peu … alors je combattrais ma peur. » sa gorge la serre. Ses petits poings aussi. Elle fixe son bureau pour s’éviter d’éclater en sanglot et avec le peu de courage qui lui reste lève son visage vers Sori prête à recevoir la colère et la tristesse de la jeune femme. Su Nah n’aura jamais dit ça pour la faire souffrir, ni la blesser, mais parce que c’était ce qu’elle pensait et qu’elle aimerait être là pour l’aider … autrement qu’avec du sexe et des engueulades. Elles valaient mieux que ça …