Azriel était peiné de voir que son colocataire souffrait à s'en déchirer le cœur. Il connaissait que trop bien le sentiment qui pouvait comprimer la poitrine de Yeosang. Pour lui ce n'était pas l'amour qui le rongeait, mais bien la solitude et un sentiment d'impuissance. Il avait écouté la réponse du botaniste en serrant les dents, lui caressant amicalement l'épaule dans l'espoir de lui offrir un peu de soutien. Il comprenait ses paroles. Il savait que la société était gérée par des règles, tout comme les religions. Le monde était soumis à des dogmes stricts, comme si c'était plus facile de tout codifier, de tout règlementer alors que la vie elle-même était imprévisible, rempli de hasard et d'un soupçon de magie. Cependant son esprit avait balayé ses pensées lorsqu Yeonsang avait avoué son amour pour quelqu'un. A ces mots il avait cherché son regard. Il était évident qu'il était curieux et peu importe s'il était indiscret. Azriel n'avait pas de mauvaises intentions avec Yeosang, il voulait sincèrement le réconforter et l'aider du mieux qu'il pouvait.

Tu veux dire que tu es amoureux d'un homme ? Est-ce qu'il le sait ? Est-ce que tu lui as dit ?

A la question stupide de son ami, Azriel avait haussé un sourcil en secouant le paquet devant lui. Evidement qu'il connaissait les gouts de Yeosang, il savait que celui-ci ne consommait pas tous les bonbons, aussi il achetait en général ceux qu'aimait Yeosang et pour les nouveautés, il vérifiait la composition. L'héritier avait le budget pour se permettre des achats que certains pourraient qualifier de luxueux. Il avait fourré le paquet dans les mains du botaniste avec un sourire fier. Il l'avait laissé ouvrir le paquet alors que la conversation était revenue sur un sujet plus osé. Azriel n'était pas du genre à parler ouvertement de sexualité. Il n'était pas non plus fermé, cela dépendait de la compagnie qu'il avait. Avec Yeosang il était libre de ses paroles, ce qui était rare alors il en profitait un peu. Pour détendre l'atmosphère Azriel était montré tactile encore une fois. Il avait été inquiet en voyant la grimace passée sur le visage de Yeosang. Il avait froncé les sourcils, questionnant silencieusement son colocataire du regard. Cependant celui-ci s'était renfermé et visiblement le sujet sexuel ne le mettait pas très à l'aise. Azriel avait ri à la mimique de surprise de Yeosang, décidément ce garçon était un saint.

Yeosang arrête de faire l'enfant. C'est quelque chose de naturel tu sais. Tu ne vas quand même pas rester inculte toute ta vie. Tu ne veux pas en parlé ? Autant que ce soit avec moi non ? Tu sais que tu peux tout me dire !

« Oui…Oui je suis amoureux d’un homme. » avoue timidement Yeosang, alors qu’il recommencer à jouer nerveusement avec ses doigts. Pendant un instant il ne dit rien de plus, avant de finalement secouer la tête, puis se résigner pour hausser les épaules. « Je … Je sais pas. Enfin … Si … Mais…C’est compliqué. » lui explique-t-il sans réellement comprendre ses propres paroles. Dans le fond, Yeosang ne connaissait même pas la réponse à la question qu’Azriel venait de lui poser. Est-ce que Changmin savait ? Lui avait-il dit ? Avait-il été assez clair ce jour-là ? Il ne savait pas. Le regard perdu dans le vide Yeosang reste un instant silencieux, avant de finalement porter son attention sur le paquet de bonbons que lui tend Azriel. N’ayant pas encore pris l’habitude à ce que quelqu’un fasse attention à lui, il pose une question bien bête à Azriel qui fronce les sourcils avant de lui fourrer le paquet dans les mains. Gêné, le botaniste frotte nerveusement sa nuque avant de murmurer d’une petite voix « Question bête … J’oublie toujours que toi au moins tu fais attention à moi. » lui dit-il, avant de se tourner vers lui pour lui offrir un tendre sourire. « Merci. » lui dit-il avant que son sourire ne se transformer en grimace douleur. La réaction d’Azriel ne se fait pas attendre, et celui-ci questionne silencieusement l’étudiant du regard. « Ne … Ce n’est rien, ne t’inquiète pas. » lui dit-il avec un petit sourire signifiant qu’il ne voulait pas entrer dans les détails. Il ne voulait pas parler de ça … Pas maintenant. Il n’avait pas le courage de se retrouver à nouveau dans cette foutue position de victime.

Rapidement ils s’éloignent du sujet au plus grand bonheur du beolsae. Bonheur qui ne dure qu’une demi-seconde lorsqu’il comprend que la discussion prend un chemin qu’il n’avait absolument pas envie d’emprunter. Rouge de honte, il panique et commencer à réfuter toute idée de discussion. Gêné par cette discussion qui s’amorce il abandonne le paquet de bonbon qu’il avait d’ores et déjà entreprit d’entamer, pour se jeter sur son oreiller et enfouir sa tête dedans. Il reste dans cette position de longues secondes, avant de découvrir légèrement son visage et secouer la tête. « Je ne suis pas un enfant. » se défend-t-il avant de murmurer « Je … Je ne veux pas parler de ça … S’il te plaît…Parlons d’autre chose, mais … Mais pas de ça. Je … Je n’aime pas ça. » lui demande-t-il presque suppliant, son ventre se retournant même à la simple idée d’aller plus loin. Yeosang était pudique et renfermé … Peut-être trop. Mais il était comme ça et personne sans doute ne pourrait un jour le changer.

L'aveux hésitant de ton ami te serre le cœur. Tu ne t'es jamais retrouvé dans un amour impossible. Quoi qu'en réfléchissant bien, tu as bien eu une peine de cœur à l'adolescence. Cela n'a rien à voir avec ce que vit Yeosang, pourtant cette relation était impossible et tu as d'ailleurs été obligé de tirer un trait dessus. C'est pour cette raison qu'aujourd'hui tu as emmuré ton cœur, refusant de le laisser s'attacher encore à quelqu'un au risque de le perdre. Comme Yeosang ta vie est compliqué pour des raisons différentes et pourtant tu as toi aussi ta croix à porter. Lorsqu'il te remercie de prendre soin de lui, tu lui ébouriffes les cheveux amicalement en pouffant de rire. Tu n'aurais jamais cru d'entendre avec tes colocataires et pourtant c'est le cas. Tu adores le botaniste pourtant si différent de toi. Tu le considères comme ton petit frère. Tu n'as jamais été dans le rôle du grand frère mais avec lui c'est l'impression que tu as et cela te fait du bien. Tu détournes donc la conversation sur un sujet délicat, voir tabou : le sexe. A sa réaction tu comprends qu'il n'est pas prêt à parler. Tu ne veux pas le brusquer, ni même le forcer. Après tout tu ne peux pas l'obliger à parler, tu peux juste être présent et tu fais comprendre qu'il peut compter sur toi s'il a besoin. Tu t'installes donc à cote de lui, piochant une poignée de bonbons que tu manges un par un.

D'accord Yeosang mais tu sais que je suis là hein ?! Si t'as des questions n'hésites pas j'ai....je connais un peu ces choses là

Tu ne veux pas avouer que tu as fait ça avec un homme. Tu n'es pas non plus un coureur de jupons, juste que tu sais deux trois choses qui pourraient lui être utile. Tu attrapes la bouteille de limonade et lui donne la sienne pour trinquer avec un sourire.

Allez changeons de sujet. Raconte-moi ta journée, t'as avancé sur tes projets en cours ?

Tu sais que Yeosang sera plus à l'aise sur des sujets moins personnels. Peut être qu'au cours de la soirée il aura envie de revenir sur certaines choses. En attendant vous allez parler de la pluie et du beau temps pour lui changer les idées. Toi-même tu préfères éviter de parler d'amour, vu ton point de vue tranché sur la question. Même si ce n'est pas un problème pour toi, une partie de cœur souffre de la prison dans laquelle tu l'enfermes. Tu aimerais pouvoir toi aussi vivre une histoire d'amour sincère, pouvoir aimer qui tu veux sans craindre que le choix ne plaise pas à tes parents. Tu aimerais avoir quelqu'un avec qui tu pourrais être toi-même, avouer toutes tes peurs et tes doutes. Mais ce jour n'est pas prêt d'arriver alors tu te réconfortes avec la compagnie de ton ami, avec qui tu discutes de tout et de rien toute la soirée.

Sans que Yeosang ne puisse réagir et interrompre son geste, Azriel vint lui ébouriffer amicalement les cheveux, entraînant bien vite une vague de protestation de la part du jeune homme. « Yaaah mes cheveux ! » se plaint-il avec une petite moue boudeuse sur les lèvres, une moue qui très vite se transforme en un doux sourire qu’il offre à son colocataire « Je suis sincère Azriel. Merci de prendre soin de moi lorsque personne ne souhaite la faire. » lui dit-il, avant de se jeter sur le paquet de bonbons, détournant au passage la conversation de ce sujet que trop délicat à ses yeux. « Oui je … Je sais. Mais je n’ai pas envie d’en parler … Je n’aime pas ça. » lui explique-t-il tandis que son visage blêmit quelque peu lorsque le souvenir des mains de ces garçons sur sa peau s’insinue dans son esprit. Voilà des années qu’il avait été touché de la sorte, n’allant plus loin que quelques attouchements et pourtant il n’arrivait réellement à passer au-dessus. C’était trop douloureux, plus encore car tout ceci n’était le résultat qu’une d’un groupe … En le harcelant les Majors avaient déclenché une vague de haine sur sa personne, une vague qui avait faillit l’engloutir plus d’une fois. Pourtant Yeosang avait pardonné, sincèrement. Il avait pardonné aux Majors, à Changmin … à tout ceux qui avaient fait de sa vie un enfer. Mais aujourd’hui il en gardait des stigmates plus profonds que quiconque n’aurait pu ni le comprendre ni le voir.

Un sourire triste aux bords des lèvres il pose son regard sur Azriel et la canette qu’il lui tend. Pendant quelques secondes le botaniste reste sans bouger, avant qu’un immense sourire ne se dessine sur ses lippes et qu’il ne prenne entre ses doigts la boisson citronnée. Ensemble ils triquent joyeusement, et très vite la discussion revient sur un sujet plus que banal. Loin de l’amour interdit, loin des souvenirs douloureux et loin de la gêne. « J’ai bientôt terminé mon herbier pour mon cours de botanique. Il est très joli je trouve, et j’ai trouvé des plantes très rares dernièrement. J’espère recevoir une bonne note et toi ? Les cours ça va ? »