Bien installé pour manger ce qu’il avait l’habitude de manger lorsqu’il cherchait de l’inspiration. Beomgyu était assez généreux pour payer le repas à celui qui s’était jeté sur lui, alors qu’il n’avait rien fait de mal à part courir après l’inspiration au dessus d’un pont. Ils discutaient depuis, apprenant à se connaître sans réellement trop en dévoiler, surtout pour le plus âgé des deux qui ne donna pas même son vrai prénom. C’était amusant, mais en même temps dans ses habitudes. Jamais il ne donnait son vrai prénom, personne ne le connaissait à part son oncle. Pourtant, il lui arrivait de plus en plus de donner un autre nom que celui indiqué sur sa carte d’identité, qui lui aussi était faux. Ça riait, plaisantait tout en continuant de donner des informations de l’un ou l’autre. Beomgyu n’avait même pas pensé à ce film sur les vampires qu’il avait trouvé tellement raté qu’il n’avait même pas regardé le premier jusqu’au bout.
En attendant que leurs plats soient servis, les deux garçons continuaient de toujours la discussion, se présentant, plaisantant. Heureusement que le musicien n’était pas du tout comme son oncle et loin d’être un homme dangereux. Car bien que son oncle n’avait rien dit, il connaissait son passé et savait qu’il méritait largement ses jours en prison. Pourtant, la subjectivité lui disait que c’était injuste.

« J’aime beaucoup Erik Satie, plus moderne, mais toujours aussi bien. Très émotionnel. » C’était surtout du piano avec ce compositeur mais ça ne dérangeait pas le coréen, pour qui le piano faisait partie de ses instruments favoris avec le violon. Peut-être que Beomgyu en avait trop dit en se présentant comme quelqu’un du monde de la musique, surtout qu’il avait donné un autre nom. Néanmoins, il pouvait bien en profiter pour s’amuser un peu. Alors il dévoila un sourire en coin, l’un de pensées malsaines, il se voulait surtout taquin. « Si j’ai composé des morceaux connus ? Ça sera à toi de le découvrir. » Il ricana un peu, amusé de sa propre blague qui, en vrai, n’était pas si drôle que ça. « Je t’offrirai un deuxième repas si tu trouves mes sons. » Il aimait les défis, et en donnait malheureusement souvent car ça pouvait très bien se retourner contre lui, comme ça avait été le cas avec une fille par le passé. Et il continuait. Car dans le même domaine il parlait comme s’il était ami avec ce Dalgui, qui n’était autre que son propre nom de scène, de dj aussi. « Oui je le connais, plutôt bien même. » Il continuait de picorer dans son assiette feignant d’être simplement un ami du musicien. « Je sais qu’il n’est pas épanoui, il me l’a dit. » Beomgyu soupira alors en écoutant l’étudiant. Oui c’était frustrant pour lui de faire de la musique populaire, certes c’était toujours de grands succès mais pourtant ce n’était pas ce qu’il aimait faire. Il voulait faire du classique, prendre les gens par les sentiments, les faire bouger sous des mesures d’orchestre et non des chansons d’amour interminables chantés par des célébrités qui parfois ne savaient ni chanter, ni danser. Il était las, mais en même temps il était tellement talentueux qu’il avançait parfois ses propres créations à côté de son travail. « Tant que tu gardes des moments pour faire ta musique, ça devrait aller. » Peut-être essayait-il de se convaincre lui-même.

Néanmoins, il regrettait de lui avoir posé la question sur sa vie personnelle. S’il avait su qu’il portait un aussi lourd bagage, il se serait contenté de finir son plat et partir en payant pour les deux. Seulement, il était de bonne humeur ce soir et avait envie de faire des efforts malgré tout. « Désolé pour ton frère. » Dit-il d’abord avant de demander à la ahjumma une bouteille de soju et deux verres qu’il s’empressa de servir. « non ça ne serait pas une bonne chanson. » Il savait de quoi il voulait parler, personne ne voudrait de telles paroles. « Sauf si tu arrives à retransmettre l’histoire dans les notes de musique, et non les paroles. » C’était l’avantage de la grande musique, à part l’opéra, il n’y avait pas de paroles et tout devait passer dans le rythmes, les tonalités, l’harmonie ou son contraire. « Je suis un bien piètre psy, je ne sais pas quoi de dire, ce ne doit pas être facile, accroche-toi. » A part son oncle, beomgyu n’avait personne de sa famille, il ne savait pas ce que c’était. Il tendit son verre vers Ilkyang. « N’ai pas honte, trinque avec moi à la santé de ton frère. » Il but rapidement son shot, puis continua de manger quelque peu. « Pourquoi tu ne jouerai pas de la guitare, je suis sûr que ahjumma en serait ravie. »