Rares étaient les jours où Selyan avait du temps libre. Son temps libre, il le passait habituellement sur ses cours parce qu’ils étaient chargés. Il était en deuxième année de médecine et beaucoup d’élèves s’étaient déjà vus recaler après la première année. Cette poussée de chance ne durerait pas éternellement alors il fallait en profiter, ne pas se laisser submerger. D’ailleurs, il ne sillonnait pas les quartiers de Séoul par pur hasard puisqu’il était venu jusqu’ici pour une raison précise. De nombreux textes étaient mis à la dispositions des étudiants à la bibliothèque du campus universitaire, seulement, quelques uns n’étaient trouvables qu’au coeur même de la capitale et c’était pour cette raison qu’il avait trouvé du temps pour s’y rendre. Il avait besoin de ces livres pour avancer dans ses dossiers, même s’il possédait en soi beaucoup à la matière à la bibliothèque. Il aimait chercher plus loin et pousser ses limites à acquérir toujours plus de connaissances. Il s’abreuvait de ces ouvrages parce que si cela continuait à se jouer en sa faveur, les années défileraient devant ses yeux et il serait capable de retourner sur le terrain militaire.
Il y avait maintes fois réfléchi. Il s’était engagé dans la voie de la médecine pour ne plus qu’il y ait de souffrances mais souhaitait-il rester enfermé dans un établissement quand des milliers d’appels à l’aide se faisaient entendre à l’autre bout du globe terrestre ? Il était un électron libre, il avait besoin d’espace. Il était effrayé à l’idée de retourner là-bas parce que ce n’était pas non-plus gratifiant. Les gens se croyaient à l’abri, cantonnés dans les grandes villes, mais, au-delà, la guerre régnait toujours et semait la terreur. Il ne cherchait pas à devenir un héros, il ne souhaitait qu’agir là où on ne l’avait pas assez fait pour lui. Alors il ne lâcherait pas et il était prêt à tous les moyens pour gagner sa place chaque année dans cette branche d’études. Il était presque arrivé à destination quand l’imprévu se fit entrapercevoir. Une malencontreuse bousculade qui lui valut de faire renverser le café qu’il avait entre les mains sur la jeune femme face à lui.

« Ah, je suis vraiment désolé, dit-il en s’inclinant légèrement, J’espère que je ne vous ai pas fait mal… »

On ne saura pas qui était le réel fautif si ce n’était que le crime était commis. Son café n’avait plus lieu d’être alors il le jeta à la poubelle derrière lui et chercha dans son sac un mouchoir pour venir en aide à son interlocutrice. Il esquissa un sourire maladroit en espérant qu’elle ne lui en tiendrait pas rigueur. À Séoul, peu importait l’heure, tout le monde était pressé.

@jung ae ra

Chaque sortie devenait un exploit; Encore plus lorsqu'elles n'étaient pas accompagnées d'un être s'appelant Han Jae qui te suivait comme ton ombre. Poussant les extrêmes à te promener seule dans la rue tu faisais un effort incroyable à chaque sortie, t'exténuant plus que nécessaire. pour le commun des mortels une marche dans la rue ne semblait pas si fatigante, pas si compliquée. Mais rien que pour aller à ton bureau tu devais mémoriser chaque pas, comme une chorégraphie répétée chaque jour, afin de ne pas te cogner. Il suffisait d'imaginer une rue où tout bougeait, où tout était en éveil, où le bruit assourdissait tes sens et te laissait presque étourdies, les sourcils froncés. Un temps pour tout. Aujourd'hui tu ne déambulais pas dans les rues tel une fille agacée de tout comportement humain pour le plaisir d'être perdue mais bel et bien pour trouver le dernier livre d'un de tes auteurs préférés. Une vraie ironie quand on savait que tu étais incapable de lire.
C'était là toute la beauté de ce qu'il écrivait. Ne se doutant peut être pas que même ceux étant dans l'incapacité de lire chaque mot pouvait apprécier les courbes de ses phrases tu saluais amplement l'artiste sans connaître l'homme. Tu allais donc chercher ce livre pour faire joli dans ta bibliothèque, pour pouvoir distinguer chaque lettre lorsque la vision te seras rendue, car tu en étais sûre, le noir ne finirait pas par t'engloutir, pas entièrement. Stimulée par tant de bruits mais excitée de tenir en main ce nouveau livre que tu téléchargerais en audio très vite tu ne te doutais pas que chaque sortie deviendrait une épreuve psychologique plus dure encore, te faisant croiser des gens plus ou moins étranges.

Si tu ne vis pas le jeune homme arrivé, ni son café tu senti la chaleur et le liquide se répandre sur ton corps te laissant ouvrir la bouche dans un son muet de surprise. Quel destin était-ce la ? Un long soupire t'échappant tu attrapais -entre deux de tes doigts le tissu trempé qui collait à ta peau.

" C'est chaud"

Fut ta seule réponse. que dire que faire ? Tu désespérais toi même ne captant aucune subtilité de la gestuel de ton interlocuteur. Tu ne compris ses intentions qu'en sentant le mouchoir.

" Ca ne suffira pas .. "

La gentillesse avait surement dû se pencher sur ton berceau et partir chez un autre. Mais là n'était que le masque perpétuel qui se brisait de plus en plus à ton plus grand malheur.

" Vous avez un autre mouchoir ? "

Tu faisais mine de vérifier l'état de tes vêtements mais seule la sensation de mouillé te donna l'étendu des dégâts, te faisant te redresser pour apparaitre bien droite. " Il y a beaucoup de dégâts? " Lui seul pouvait te dire, te laisser imager. Tu comptais donc sur ses yeux, pour pouvoir l'engueuler par la suite.

@Jong Selyan

Et il continuait d’avoir la tête dans les étoiles, Selyan. Il s’efforçait rageusement de garder les pieds sur terre mais, parfois, il n’était pas là et l’inévitable se produisait. Café renversé, ennuis en perspective. Personne n’appréciait de voir sa journée prendre une mauvaise tournure par un liquide s’imprégnant de ses vêtements. Liquide chaud, tâchant, et plus qu’un pressing ne suffirait pas à réparer les dégâts. Lui non-plus n’aurait pas apprécié et ne sut pas comment prendre le ton de la jeune femme face à lui. Elle avait l’air en colère, l’était-elle ? Bien sûr qu’un mouchoir commun ne suffirait pas à minimiser les dégâts, au contraire, la tâche prenait de l’ampleur. Il eut bien du mal à ne pas faire la grimace parce que le haut de son interlocutrice n’avait plus rien de sophistiqué.

« Je n’ai pas envie de vous mentir, ce n’est pas joli… »

Il fouilla dans son sac à la recherche de son paquet de mouchoirs car cela serait plus simple. Il le lui tendit et se passa une main dans les cheveux. Il n’avait pas de temps à perdre dans ces futilités, la journée était déjà bien avancée. Les boutiques ne tarderaient pas à fermer et il avait besoin de ces livres pour progresser dans ses cours. Il n’était pas certain d’avoir du temps libre dans les jours à venir pour revenir en plein Séoul. Peut-être pourrait-il demander à quelqu’un d’y aller pour lui et ils se retrouveraient sur le campus pour faire la transaction.
Et, sa petite-amie, comment l’aurait-elle pris si du café s’était renversé sur elle ? Elle n’en avait pas l’air mais elle se serait probablement mise en colère. Et Reo ? Systématiquement, il pensait à lui quand il pensait à elle et c’était un cercle vicieux. Reo avait été son sex friend jusqu’à ce qu’il accepte de sortir avec cette étudiante et depuis, leur relation était chaotique. Il osait à peine songer à leur dernière rencontre remplie de révélations. Il ne méritait que ce qu’il avait récolté. Il avait fait l’autruche pour mieux se voiler la face et ce qui avait été inévitable s’était produit de manière plus brutale qu’il ne l’avait cru. Le coeur en vrac, les esprits désordonnés, il avait du mal à composer avec ce qu’il avait lors de ses journées et c’était pour cette raison qu’il avait la tête ailleurs. Pourtant, il allait devoir se reprendre parce que ce malencontreux incident n’était pas dérisoire.

@jung ae ra

 Tout semblait t'indiquer de rentrer chez toi. D'arrêter de jouer à la femme indépendante qui n'avait aucune faiblesse mais qui ne pouvait voir un café foncé droit sur elle. Une femme en talon qui ne discernait qu'un bruit de fond incessant et assourdissant qui la rendait irritable au possible. Et pourtant. Cette chaleur non voulue, ce liquide sur ton beau tee shirt tout indiquait la fin de vie de ce jeune homme désolé de son geste. Encore heureux. Tu lui aurais couper la langue sinon. Mais une excuse ne réparait pas le fait. Trempée, mais chaud. Impatiente mais incapable de bouger tu ne cherchais qu'à voir l'ampleur sans la distinguer. Cette fichue noirceur te cassait ce que tes parents ne t'avaient jamais donné physiquement. Et pourtant tu en avais assez souvent. Un énième soupire t'échappa. Au moins il était honnête.

"Merci pour l'honnêteté. Mais qu'est ce que vous fichez à marcher aussi vite ??  "

Tu aimerais savoir pourquoi l'avait si distrait, si ailleurs qu'il avait ignoré une personne marchant à une allure respectable. Tu en étais presque curieuse bien qu'il n'avait aucune excuse valable, tu refusais de croire que quelque chose était plus important que ton livre que tu ne lirais pas mais écouterais. Le paquet tendu tu ne le vis et compris qu'en cognant dans sa main à cause d'une maladresse, d'un geste trop grand dans l'espoir de "sécher" ton haut.

" Les mouchoirs ne suffiront pas finalement... Achètes moi un autre haut.  "

Peut être que tu n'étais pas doté de ces attributs souvent dépeint comme le courage inné, mais tu n'avais clairement pas froid aux yeux. Ceux si porté sur lui sans même le voir distinctement. Tu ne faisais que posé un regard presque inutile sur une silhouette flou.

"Je dois aller acheter un livre je n'ai pas le temps.  "

Peut être pouviez vous clôturer cet incident assez rapidement, et oublier la rencontre malencontreuse pour passer une bonne journée. Même si c'était peu envisageable. Il y avait l'espoir en toi qui te rendait presque magnanime dans ton univers stricte et froid. Aujourd'hui tu pourrais faire glisser cette erreur dans le seul but de rentrer rapidement chez toi, d'oublier ces difficultés que tu rencontrais dans la facilité des autres . Oublier ton handicap que tu refusais de voir, de comprendre, d'accepter. Tu voulais juste profiter.

" Ah ! Accompagnes moi et je te pardonne !  "

Qui voulait ton pardon ? Qui voulait t'aider ? Rien n'avait de sens mais ta confiance restait intacte ta main se levant dans le vide pour la tendre vers lui. Tu lui communiquerai l'adresse si il t'aidait à t'y rendre sans encombre. Comprendrait il le but ? Non. Mais peu t'importait, ta destination en tête rien d'autre n'avait d'importance. Il avait fauté il devait se racheter, la logique restait donc vos pas vers le magasin.

"  "
@Jong Selyan

Il était plus fatigué que jamais. Il s’échinait face à ses études qui demandait toujours plus de travail et sortait plus souvent qu’à l’accoutumée. Pour la retrouver, elle, se plonger dans ses bras en espérant y trouver du réconfort quand il n’y avait que du vide. Si même elle ne le remplissait pas, qui le ferait ? Elle ne semblait pas voir qu’il fonçait la tête droit dans le mur plus qu’il ne l’avait fait auparavant, prise des les affres des premiers jours de leur idylle et lui la laissait faire parce qu’à ce stade-là ça n’avait plus d’importance. Il ne savait plus où il en était et il savait qu’il n’agissait pas de la bonne façon au point que ça finirait par avoir des conséquences sur son corps. Comment espérait-il pouvoir retourner sur le terrain à l’armée dans de telles conditions ?
Et il resta interdit face aux mots de son interlocutrice. Il haussa un sourcil en tentant de savoir si elle plaisantait ou si elle était sérieuse. Dans le deuxième cas, c’était la toute première fois qu’il avait affaire à une femme qui en venait à le forcer à lui acheter un nouveau haut pour un café renversé. Les moeurs en Corée du Sud avaient-elles encore changé ? Il ne sut pas sur quel pied danser et l’écouta se plaindre d’une oreille distraite. Lui non-plus n’avait pas le temps et une veine commença à battre plus la mesure dans son cou de par ce contre-temps dont il était le premier fautif. Il s’éclaircit légèrement la voix et chercha les mots justes qui ne puissent pas énerver plus la demoiselle qu’il ne l’avait fait déjà.

« Excusez-moi mademoiselle pour ma maladresse mais, à moins de vous donner un dédommagement, je n’ai pas le temps d’aller flâner dans les boutiques pour que vous puissiez vous trouver un nouveau haut. »

C’était le moins qu’il puisse dire. Il fouilla dans son sac à la recherche de son portefeuille et se mordit légèrement la langue en voyant les seuls sous qu’il possédait. C’était la fin de mois, il ne restait plus grand-chose. Il attrapa un billet qui suffirait à réparer les dégâts et le lui tendit en espérant qu’elle le prenne et le laisse retourner à ses occupations.

@jung ae ra

 Jamais à court d'idées, jamais réellement coincée tu vivais ta vie à un rythme effréné tout en redoutant le lendemain. Comme si tout devais être accompli en une journée , de peur que demain n'arrive pas. Finalement ce n'était pas tant l'absence de demain qui te faisait peur mais bel et bien sa disparition physique. Que le jour ne se lève plus et que l'obscurité ne gagne la bataille. L'ombre prenait du dessus, chaque jour, chaque minute, et tu t'épuisais sûrement à faire comme is de rien n'était. Comme si tout était sous contrôle. Comme si rien ne t'effrayais pas même les bruits assourdissant de la rue, les rencontres pouvant t'apporter des désastres en continue. Tu faisais comme si rien n'avait changé, chargeant ton emploi du temps comme un âne, t'endormant sans presque aucun mal le soir, sans oublier tes calmants. Finalement t'avait tout changé dans ta vie, pour le pire et le meilleur.
Et si tu n'y voyais rien, tu ne t'attendais pas à ce que quelqu'un se retrouve avec la même vision. Du moins assez pour te percuter de la sorte, et malgré les gestes maladroits, les mots plutôt bien choisi rien n'y faisait. Ce haut ou un autre tu n'en avais cure. Mais son refus t'offusqua presque. L'argent, tu n'en avais pas besoin. Ton livre ? Beaucoup plus.

" Et je n'ai pas besoin de ton argent mais de tes yeux. Peu importe si je n'ai pas de haut mais j'ai besoin d'un livre. Tes parents ne t'ont pas appris la politesse lorsqu'on fait une erreur ? "

Les parents, ils étaient doués pour nous dire que faire, pour taper le bâton mais jamais pour réellement nous apprendre la vie. Tu avais eu le caractère le plus ignoble plus possible grâce à eux, tu étais devenu ce que tout le monde redoutait, ce que tout le monde détestait. devais tu les remercier ? A la place d'être devenue faible et pleine d'amour ? Ou devais tu les détester de ne pas avoir su te donner la chaleur d'un foyer ?

"Je ne vois rien , tu veux bien m'aider maintenant ?  "

Et pour toute preuve tu tentais de lui montrer un regard voilé. Si tu voyais, un peu, mais l'avouer ainsi, ce n'était que du profit, jamais tu n'aurais été te plaindre au premier venu si tu n'avais pas eu besoin. Le chantage tout ça.

"  "
@Jong Selyan

Comme si le malheur lui collait à la peau. Avait-il jamais été heureux ? Il se le demandait. Peut-être une fois, oui. Dans l’une des familles d’accueil où on les avait mis avec ses frères et soeurs de coeur et malgré les conditions déplorantes dans lesquelles ils avaient vécu pendant quelques mois, ça avait été une sorte de trêve. À la pointe de l’adolescence, ils y avaient connu les meilleurs instants comme si des étoiles s’étaient éparpillées devant leurs yeux enfantins. En y repensant, ça lui collerait presque un sourire au visage mais il y avait plus urgent à s’occuper et ce n’était pas doté de chance. Voilà pourquoi il se dit que le malheur s’acharnait sur lui, à croire qu’il manquait une pièce du puzzle dans la matrice. Laquelle ? Dites-la moi et je m’acharnerais pour le garder contre moi. Il fut bien contrarié de la réponse de cette femme qui continuait d’insister à ce qu’il l’accompagne et désormais, ce n’était plus pour un haut mais pour un livre ! Perplexe, il ne sut sur quel pied danser, encore moins quand elle entama le sujet sur les parents.

« Je… Mais avouez quand même que ça devient délicat cette situation !, s’exclama-t-il malgré lui, Vous dites avoir besoin que je vous rachète un haut et maintenant ça n’a plus d’importance parce que vous avez besoin d’un livre ?, la questionna-t-il, les sourcils haussés, Vous ne pouvez pas profiter comme ça vous chante du temps des gens, même après un geste maladroit. »

Il décida de ne pas relever sur les parents, ce serait une perte de temps. Il se passa une main dans les cheveux et poussa un léger soupir. De toute façon, il avait besoin lui aussi d’aller à la librairie. Enfin, une en particulier, mais mademoiselle trouverait avec un peu de chance ce qui lui plairait. Il lui passa devant et lui fit signe de le suivre pour tourner au carrefour sur la gauche et entrait dans la boutique dans laquelle il n’attendait plus que ça d’y être. Il longea les rayons jusqu’à ceux de la médecine et chercha des yeux l’ouvrage qui l’intéressait. Il l’avait emmenée jusqu’ici, vu son âge, elle était capable de se trouver un livre toute seule. Pourquoi est-ce que ça n’arrivait qu’à lui ?

@jung ae ra

 La vie n"était pas des plus sympathiques. Tu étais des partisans qui aimaient le savoir mais pas le dire. Rien ne servait de se sentir affublé des pires maux de la terre. Avancer, voilà comment on énervait les gens, comment on prenait notre revanche. Et tu la savourais chaque jour où tu t'avançais dans un domaine qui ne plaisait pas à tes parents mais à ta personne. Tu savourais chaque minute où tu ne patinais plus, sans pour autant oublier ta condition dégradante qui ne pouvait être contrôlé par ton moral. On disait que la santé devait se garder, précieusement, tu ne comprenais que trop tard qu'elle était précieuse. Tout comme ce haut que tu avais mis. Mais tu t'en préoccupais moins, n'aimant tout de même pas cette malencontreuse rencontre qui te ralentissait et faisait de toi une personne perdue. Te rappelant que tu ne voyais rien, pas même l'étendue des dégâts, autre que des points de couleurs flous. Tu tentais donc le chantage, faire jouer sa culpabilité. Parce que tu étais comme ça, par manque d'éducation peut être, ou comme beaucoup le pensaient; la racine était pourrie. Née dans la mauvaise famille, devenue la mauvaise fille.

"Ah non ? Pourquoi ? Je ne suis pas en tord.  "

L'innocence de ne pas comprendre que ta demande était trop. Pas assez considérée et sûrement déplacée. Tu voulais tu demandais, tu faisais. C"était aussi simple que bonjour. Là où les autres réfléchissaient à un moyen de faire, de demander, tu prenais les devants, passant pour rude. Et la preuve que ça marchait fut encore ce jeune homme qui passait devant toi. Jeune homme qui vit son haut légèrement agripper pour que tu ne le perdes pas.

" Je te suis.  "

Tu ne rigolais pas quand tu disais ne rien voir. Les couleurs et la lumière n'étaient plus suffisantes lorsqu'autant de monde se bousculait. Une fois rentrée dans la librairie tu le lâchais, perdant sa présence aussitôt. Diantre il était parti. Au moins tu étais dans un endroit voulu. Perdue. Mais au bon endroit. Soupirant légèrement tu t'aventurais avec lenteur dans les rayons sans but. Si ton but était précis, mais tu étais incapable de trouver ce livre et tu sentais la frustration grandir dans tes veines. " Il y a quelqu'un qui travaille ici ??  " L'impatience, le ton désinvolte, le coeur battant d'énervement. Ta situation t'énervait bien plus que tout le reste, quand bien même personne ne serait là, si tu pouvais te servir seule tu n'en aurais rien à faire.

" Café man ?  "

Tu l'avais rencontré à cause de ça non? Il se surnommerait ainsi point. Où était il quand tu avais besoin de lui? Rapprochant un livre à porter de main jusqu'à presque toucher de ton visage tu soupiras de nouveau. Ce n'était pas ça. Cette situation était elle sérieuse ?

"  "
@Jong Selyan

Il possédait un quotient intellectuel plus élevé que la moyenne, n’en avait pas vraiment conscience. Il avait dévoré bon nombres de livres, les connaissait presque tous par coeur sans avoir à les rouvrir. Il se disait qu’il avait simplement une bonne mémoire photographique car sa vie était déjà un foutoir pour avoir à se soucier du fait qu’il serait capable d’aller plus loin que ses espérances. Il n’avait pas envie de voir la vie en grand, Selyan, il ne désirait qu’avoir le nécessaire l’entourant. Alors, en soi, même s’il n’avait pas forcément les moyens de se permettre des achats sur des livres de médecine parce que ceux-ci étaient le plus souvent à des prix exorbitants, il n’avait qu’à ouvrir le livre pour en avaler le contenu d’une traite. Facilité qui en déconcertait plus d’un, qui pour lui l’aidait grandement dans ses dépenses. Il trouva ce qu’il recherchait, espéra malgré tout que le prix serait convenable parce qu’il était plus aisé d’avoir l’ouvrage sous les yeux pour travailler que sa mémoire. Il y avait aussi celui-ci, celui-là, le choix serait ardu, d’autant plus qu’il y avait le problème de cette jeune femme à régler.
Il l’entendit au loin, poussa un léger soupir. Il avait le don pour se retrouver dans les pattes des personnes à problèmes. Il se passa une main dans les cheveux et se demanda quelle éducation avait-elle pu recevoir pour qu’à son âge elle soit incapable de se débrouiller seule. À devoir quémander de l’attention constamment. Il se pencha légèrement sur le côté pour voir où elle était et ne la vit pas. Il haussa les épaules, ce n’était pas plus son problème si elle ne trouvait pas son livre. Il n’était pas vendeur en librairie, il ne connaissait que ce rayon. Néanmoins, ce fut plus fort que lui. Quand il eut trouvé ce qu’il cherché, il prit sous son bras le livre et la rejoignit.

« N’êtes-vous donc incapable de vous débrouiller seule ou ne sortez-vous jamais ?, haussa-t-il un sourcil, On se demande réellement qui a été mal éduqué. »

Elle n’avait pas été des plus courtoises à son égard tout à l’heure, il n’irait pas prendre la peine d’être plus aimable à son encontre. Il vit qu’un libraire était en train de ranger un rayon alors il l’interpella et lui fit signe d’aider sa connaissance d’infortune. Après quoi il partit payer son livre à la caisse. Il avait mieux à faire que de continuer à perdre son temps avec elle.

@jung ae ra

 Idiote. Bonne à rien. Incapable. Capricieuse. Tu te moquais de tout ce que les gens pouvaient dire ou penser de toi. Ta mère avait longuement soupirer ce genre de qualificatifs te concernant, t'enlevant toute sensibilité quant à leur utilisation. Tu n'avais jamais entendu que tu faisais bien, que tu y arrivais, que tu étais intelligente, jolie, ou douée. Seuls les journalistes semblaient vouloir te complimenter pour des exploits qui ruinaient ta santé et ton mental. Pouvais tu t'échapper de ce cercle infernal ? Tu avais longtemps cru qu'en poussant la sirène d'alarme, en venant vers ton patriarche tout allait changer. C'est en le voyant te tourner le dos que tu compris : rien ni personne n'allait t'aider. Tu devais te sortir de ça seule.
Entendre que tu ne valais rien, que tu étais une incapable n'avait donc aucun sens pour toi. Qui sait ec que tu avais vécu. Qui savait réellement ce que tu accomplissais seule? Montant ta propre boîte malgré ta vue qui baissait. Et pourtant tu t'appuyais sur plus d'une personne, dépendant de la situation. Han Jae étant celui qui te permettais de vivre correctement dans ton monde professionnel, tu devais avouer que la vie personnelle n'était pas toujours rose. Utilisant certains passants après avoir perdu toute ta patience, tu n'allais pas clamer qu'il était facile de vivre comme toi, mais la tête haute, la fierté grande et élevée tu osais. Et c'est ce qui dérangeait : tu osais.
Loin du modèle de la victime parfaite tu préférais être hautaine, une peste dont tout le monde voudrait la mort, mais pas de pitié, pas de yeux larmoyants. Tu n'étais pas une victime mais une battante. Qui avait besoin de quelqu'un en ce moment même. Mais une battante qui l'avouait et appelait cet homme avec ferveur.

La voix du café man venant à tes oreilles tu croisais les bras le menton levé. " Je peux me débrouiller toute seule. Je suis sortie comment à ton avis ? " Quelle drôle de question. Retournant ton accusation de tout à l'heure tu te mis à sourire doucement. " Je n'ai pas été éduquée. Je m'en suis occupée seule. Les parents ne servent à rien. ON est jamais mieux servis que par soi même. "

Et en demandant de l'aide. Mais il aurait fallu te torturer pour te le faire avouer. Le libraire à ton service tu lui demandais simplement ton livre, un ton moins sec que tu n'avais eu. Une fois celui ci sous le bras tu te faisais raccompagné à la caisse auprès de "ton ami" par ce gentil monsieur, surement plus impressionné par ton sourire que ton nouvel ami.

"Mettez les ensemble. " Indiquais tu à la caissière, ou caissier, ignorant combien d'item il avait. " Comment tu t'appelles café man ?  "

Avant qu'une complainte ne vienne détruire ton envie généreuse tu tendais ta carte pour payer le tout, non pas que tu avais une envie de faire plaisir. Mais tu détestais être redevable, même de la gentillesse de quelqu'un. Tout s'achetait non ?

"  "
@Jong Selyan