Elle ne désire pas entendre des ragots. Elle ne s’y intéresse plus depuis qu’elle a été la source de ces derniers, lors de son adolescence. Après sa chirurgie, la belle s’est repliée sur elle-même et surtout, elle a été victime de ses propres ragots, de ses propres pensées. A détester son visage, à trouver des défauts pourtant inexistants pour les autres, par exemple. La mort de son père avait été la cerise sur le gâteau, rendant les commérages accessibles à chaque personne constituant leur voisinage. Néanmoins, la blonde ne cache pas sa déception face au récit très court de son aînée. Il reste préférable d’avoir une routine que des évènements dramatiques dans sa vie. Elle décide donc de mettre un coup de peps en parlant d’un homme qui a le don de lui mettre un coup de pression sur son rythme cardiaque. Non pas qu’il souhaite l’assassiner, ça serait plutôt un homicide involontaire dans ce cas mais fort est de constater qu’il a une certaine capacité à faire fondre l’étudiante. Hantée par cette magnifique vision, Yujin s’exprime à haute voix. Oops. “ Oui. Oh oui, pour la science. Pour quoi d’autre hein. Ah Ah ! “ Elle l’entend Dae Won de loin, lui rappelant que c’est une mauvaise comédienne. Elle pousse un profond soupir après avoir forcé un rire pendant plusieurs secondes. “ Tu crois que c’est déplacé ? “ Ce n’est pas l’australien qui devrait se sentir offensé. Peut-être même qu’il le fait exprès pour se rendre intéressant. Elle ne devrait pas rentrer dans son jeu. Du coup, interroger Yura, qui a sûrement plus d’expérience qu’elle à ce sujet, pourrait toujours la soulager. Les femmes ne peuvent pas dévoiler trop de beau sans se faire juger. Pourquoi il ose transpirer dans les pièces communes de leur appartement ? C’est lui qui mérite d’être sanctionné, pas cette pauvre jeune fille innocente. Changeant malgré tout de sujet de conversation, elle retient un gloussement quand la danseuse met la main dans le sac. “ C’est vrai que ça te va bien. Est-ce qu’il y a un univers que tu apprécies particulièrement ? On pourrait s’en inspirer pour le choix des couleurs. “ Elle hoche la tête. “ Bien sûr, on choisira des nuances qui te vont. “ Un sourire carnassier prend possession de ses lèvres. “ Ma poupée ? Vaudou ? Tu devrais faire attention. Tu sais que je prends un malin plaisir à trouver des cobayes pour mes maquillages fx. On ne parle plus d’une simple manucure à ce rythme. “   

Haussant les épaules, les lèvres finement pincées, tu pouvais que t'excuser et te sentir coupable de n'avoir rien à lui raconter. Pas forcément de ragots mais sur ta vie. Pourtant il en aurait tant à dire – et si peu en même temps. C'était étrange quand t'y pensais, un peu déroutant aussi. T'étais perdue, à ne plus savoir qui tu étais vraiment tout en sachant absolument qui tu voulais être. Tu ne pouvais plus être cette gamine de Daegu. T'étais Yura, tu vivais à Séoul maintenant et tu menais ta vie. Il s'y passait des choses ou plutôt il s'en était passé. Les vagues s'étaient arrêtées et tout était calme désormais. Plus ou moins. La plus grosse tempête était passée, il ne te restait que les bourrasques de temps en temps mais pas éternelles. « Bien sûr. Pour la science », tu secouas le visage de haut en bas, les sourcils froncés, comme imitant une mine concentrée. « C'est toujours une bonne chose de travailler pour la science », ajoutas-tu dans un sourire mutin, plissant un peu le nez, avant de pencher le visage sur le côté, songeuse. « Est-ce que tu le reluques comme un gros lourd des bars avec les regards insistants et mal placés ? Est-ce que tu le fixes comme si c'était qu'un bout de viande ? Juste un truc à mâchouiller le temps d'une nuit puis à jeter ? », lui demandas-tu, le sourcil finement levé, te doutant de la réponse. Du moins tu la connaissais, elle était pas comme les types lourds des bars. Tu disais pas que ça n'existait pas du côté des femmes. Ca existait aussi. Elle faisait de mal à personne en regardant. Puis les femmes avaient cette discrétion en le faisant. « Ah tu trouves ? Merci », tu souris doucement, contentée. « Un univers ? Tu veux dire un film ou quelque chose du genre ? », tu haussas les épaules. « Le Seigneur des Anneaux ? », que tu lanças dans une petite grimace, ne sachant si c'était une bonne réponse. « Ca peut être intéressant. J'adore Legolas », elle t'avait pas demandé un avis si précis... Un rire dans la gorge, tu secouas le visage. « J'ai confiance en toi, je sais que ce sera magnifique et jamais ridicule », tu lui offris un clin d'oeil dans une esquisse douce. « Puis tu sais je me suis déjà déguisée en gardienne de la paix. Ou coccinelle. Ou sauce moutarde », le ridicule ne te faisait pas peur du tout. « Tu crois que je ferais une jolie elfe ? », la questionnas-tu, tournant le visage d'un côté puis de l'autre avant de rire à ta propre bêtise. « Tu penses à quoi ? En me regardant. Un univers qui te vient en tête ? Une idée ? », tu voulais lui faire plaisir avant tout. 

La science est une excuse peu valable et elle sait qu'elle n'échappera pas aux remarques. C'est bien là le cœur du problème chez Yujin. Soit elle en dit trop, soit pas assez comme si elle était incapable de faire dans la demie-mesure. Tout ceci ne lui ressemble pas, encore moins cette histoire du truc à machouiller le temps d'une nuit ? Elle regarde la professeur de danse avec une mine surprise sur le visage. La comparaison est peu flatteuse et la blonde aurait pu en rire si elle n'était pas aussi gênée par cette conversation. Yujin ne peut que s'en vouloir sur ce point. " Demande-moi de le siffler aussi. " Jamais, elle n'oserait de se comporter de manière aussi irrespectueuse. Peut-être qu'elle devrait plutôt s'entraîner à ne pas prendre les choses au premier degré.


Par chance, l'opportunité se présente pour dévier sur un autre sujet de conversation bien plus passionnant. Enfin, passionnant autrement. " Legolas ? Ça pourrait se faire. Je vais juste devoir réfléchir à la réalisation avant. Yujin est plus habituée aux zombies qu'aux elfes. " Tu es sûre de ne pas préférer Dobby " C'est qu'elle préfère Harry Potter au seigneur des anneaux. Elle ne crache pas du tout sur cette œuvre. Les goûts et les couleurs. Et puis, elle qui craque facilement sur les blonds, la demoiselle risque d'apprécier la documentation. " Sauce moutarde ? J'étais le ketchup moi ! " C'est sûrement pour cette raison qu'elle continue de rougir comme une tomate. Elle rigole à sa question, sans prendre la peine d'y répondre. " Je pourrais faire une danseuse à la Black Swan mais version horrifique. On aurait pu monter un projet vidéo ! " La belle ne va pas tarder à s'emballer si Yura ne la coupe pas de suite dans son élan. 

« Certains le font », dis-tu dans une petite grimace, haussant les épaules avant de secouer le visage. « Je sais que t'es pas comme ça », et t'en étais sûre que tu l'affirmais. Elle n'avait rien à voir avec tous ces types un peu louches qui traînaient dans les bars. Ou ces femmes. Car après tout tout était possible, et s'il y avait des pervers ici, il y en avait là aussi. Mais les hommes avaient cette fâcheuse tendance à ne pas être discret et à reluquer comme s'ils allaient pouvoir se refaire les dents. C'était ignoble – et souvent, ton genou te démangeait. Tu lui souris, la main venant rapidement se perdre dans sa tignasse. Qu'elle ne se fasse pas trop de soucis, elle en était loin, de ces types.

« C'est vrai ? Tu pourrais faire ça ? », lui demandas-tu, les sourcils levés dans un air émerveillé. Tu serais tellement heureuse, t'adorais ces films et ce personnage surtout. Tu clignas des paupières ensuite, penchant le visage sur le côté avant de rire. « Alors il est bien mignon et tout mais je préfère quand même Legolas », sans vexer qui que ce soit. Tu préférais aussi l'univers du Seigneur des Anneaux à celui de Harry Potter. « C'était donc toi ma moitié ! », lanças-tu, les bras ouverts, riant une nouvelle fois, comme une bienheureuse. Tes doigts vinrent à peine pincer sa joue, trouvant adorable les rougeurs qui se trouvaient là. « Version horrifique... j'ai envie de voir maintenant », tu lui souris discrètement. « Et on peut toujours monter un projet vidéo. On a le temps », rien n'était gravé dans la roche et puis vous pouviez faire ça juste pour le plaisir de le faire. Si ensuite Yujin voulait le montrer, le publier ou tu ne savais quoi encore, elle en avait le droit. « Si t'es partante, je le suis », après tout, t'étais pas fermée aux passions des autres non plus. Puis si ça pouvait lui faire plaisir, t'étais sûre que ça te ferait plaisir aussi. « T'en dis quoi ? Tu veux qu'on tente un petit projet vidéo du genre ? », que tu lui demandas, le sourire mutin et le regard pétillant. « Tu me dis où, quand et comment et je suis toute à toi », tu lui offris un clin d’œil, la frimousse amusée. « Je veux juste pas être un zombie. Pas que ça me fasse peur mais je ne sais pas imiter un zombie », c'était bien là ton plus grand souci : ton manque de talent pour copier le zombie.

Yujin est heureuse de pouvoir concrétiser un futur projet avec Yura. Le professeur de danse est beaucoup estimé par la cadette et celle-ci ne peut pas s’empêcher de se sentir fière d’être suffisamment douée pour qu’elles puissent travailler ensemble. Elle espère que cette fois-ci, elle aura plus d’imagination qu’aujourd’hui. C’est pour cette raison qu’elle s’est présentée dans cette salle : pour se plaindre ou se changer les idées ainsi que dévorer une pizza. Cette dernière est avalée au fil des minutes par les deux jeunes femmes affamées de créativité et du reste. “ Comment je pourrais refuser ? Bien sûr que je suis partante ! “ Elle lève le bras d’un air déterminé comme le ferait un superhéros dans les films Marvel. Heureusement il n’est pas question de se déguiser en Iron Man pour cette chorégraphie. Les pauvres finiraient par crever sous le poids de leurs costumes. La blonde compte faire autrement pour se démarquer des autres. Si le talent de Yura attirera les curieux, l’étudiante souhaite y mettre du sien. Si on peut encore douter de ses compétences de danseuse (il faut avouer qu’elle a commencé tardivement par rapport aux autres), personne ne serait en mesure de rivaliser avec ses doigts de fée concernant le make up fx. Qui a été invitée dans les grands plateaux de tournage ? Bibi. Pas une autre. Un sourire excité reste collé à ses lèvres. “ Je t’envoie un message quand je suis prête pour le maquillage, le temps de m’entraîner et de faire quelques tests. “ Yujin se met à rire. “ Je te donnerais un cours pour avoir la démarche d’un zombie. Tu es libre ce week end ? On pourrait réfléchir à la chorégraphie ensemble ?  Je t’avoue que j’ai trop mangé pour faire un truc ce soir... “ Elle illustre son désarroi en posant sa main sur son estomac qui affiche complet. “ Je pense même que tu vas devoir me traîner en dehors de la faculté... Eonnie. ” La demoiselle est connue pour être une grande gourmande mais elle ne parvient pas forcément à se relever de ses sessions de bouffe. Et bizarrement, elle se sent incapable de rouler en boule jusqu’à son appartement voire même le dortoir des baekje !  

Tu avais hâte de te lancer dans cette aventure. Tu allais tout écouter, ses avis, ses idées. Tu allais la laisser parler, l'entendre, la comprendre. Avant de tenter de trouver l'inspiration ici ou là, de proposer tes idées, des gestes pour rendre le tableau complet, et l'image parfaite. Tu voulais faire plaisir à Yujin, et si c'était en agissant ainsi que ça fonctionnait, tu le faisais sans hésiter. En plus de ça, tu aimais danser, créer un projet. Tu aimais réfléchir, proposer – si tu n'aimais pas, tu n'en aurais pas fait ton métier non plus. Tu appréciais tout autant enseigner et donner l'envie aux autres. Partager ta passion. Tu te vantais de pouvoir le faire car les personnes pouvant le faire n'étaient pas nombreuses. « Oh motivée à ce que je vois. C'est une bonne chose », chuchotas-tu dans la confession, gratifiant la jeune femme d'un clin d’œil complice et d'une esquisse douce. Tu étais sûre qu'elle allait trouver. Que son travail allait être remarquable. Elle avait un talent, un grand talent, et c'était cela qui attirera l'attention, t'en étais persuadée. Elle avait la passion, aussi. L'envie. Des éléments importants pour ce genre de choses. Elle avait de l'or au bout des doigts, Yujin. « Pas de soucis, je reste à ta disposition », articulas-tu dans un sourire malicieux, avant de rire discrètement. « J'en aurais besoin je pense », tu plissas le nez. « Plus maintenant », t'allais être occupée ce week-end : t'allais apprendre à devenir un zombi. « On peut faire ça, je suis dispo. Prenons le temps de bien digérer avant de nous lancer », tu ris quelque peu. Puis c'était mieux le week-end, sans la pression des cours – à suivre ou à donner. Ton index vint doucement appuyer sur son ventre, bougeant le visage pour approuver. « Ah oui quand même », tu clignas des paupières avant de rire, la tête basculée en arrière. Elle essayait de t'amadouer là ? Tu vins doucement prendre son visage entre tes paumes, mimant un air attendri. « Tu préfères que je te porte sur le dos, en sac à patates ou bridal style ? », offris-tu dans un sourire mutin, le regard pétillant. « Le sac à patates ça risque d'être dangereux cela dit... », maronnas-tu après réflexion, tes mains relâchant lentement son visage, le rire vibrant dans ta gorge alors que tu commençais à ranger la pièce. « Allez, grimpe », offris-tu en désignant ton dos, le rire à la bouche.