_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _


Ji Yong râla pour la première fois de sa vie dans un hôpital privé de Séoul, entouré par une famille aimant et une maman bien exténuée par des heures de travail. Il n'était même pas né qu'il menait déjà la vie dure à son entourage, d'autant plus qu'il était prévu pour bien plus tard. Mais ce n'était pas grave, ses parents étaient très heureux d'accueillir leur deuxième fils, et son grand frère, d'avoir une petite réplique de lui à qui il allait pouvoir tout apprendre. La famille de Ji Yong n'était pas n'importe laquelle, entre une mère mannequin à l'international et un père propriétaire de la chaîne d'hôtel Zeus qui avait pointé rapidement le bout de son nez dans les plus grandes villes du pays. Partout où il y avait des riches, il y avait les Do. Il était évident que les parents avaient énormément de travail, et les enfants passaient beaucoup de temps ensemble. Ji Yong a principalement été élevé par son grand frère et sa nourrice, n'ayant pas particulièrement le temps de nouer des liens avec ses parents. Mais pour lui c'était normal et ne s'en plaignait pas, surtout à cause de la dureté de son père et son exigence, moins il le voyait mieux il se portait. Leur mère était aimante mais très occupée, et si parfois il arrivait qu'elle emmène ses fils sur les lieux de ses shooting, c'était davantage pour exhiber ses beaux enfants. Cependant, elle n'eut pas longtemps l'occasion de le faire. Vous savez, on parle souvent du père qui part acheter un paquet de cigarettes et qui ne revient jamais. Madame Do partit acheter le dernier sac Chanel mais visiblement elle ne retrouva jamais son chemin au retour. C'est littéralement ce qui s'est passé. Leur mère les a abandonné, son mari aussi au passage, sans explication pour personne. La famille de cette dernière non plus ne savait pas où elle était passée, c'était comme si elle n'avait jamais existé. Le plus dur pour Ji Yong fut d'encaisser ça sachant que la veille il s'était disputé avec elle, à cause d'une broutille comme d'habitude, ou sûrement du fait qu'elle ne passait pas assez de temps avec eux, et que ses derniers mots furent qu'il aurait voulu qu'elle ne soit jamais sa mère. Depuis, il était persuadé que tout était de sa faute, bien que personne ne lui en portait rigueur. Leur père mit tout en œuvre pour la retrouver, tout les moyens financier et humain qu'il avait en sa possession, mais rien ne fonctionna. Il se demandait même si elle était toujours en vie. Après cet incident, bien qu'il soit âgé de seulement cinq ans, Ji Yong se renferma sur lui-même, se sentant à la fois coupable, triste et trahi. Une tristesse qu'il transforma d'ailleurs en colère. Son père ne cessait de le répéter : les hommes n'étaient jamais triste. Ce qu'il finit par vraiment croire, voyant que son père n'était même pas triste du départ de sa femme. Et pourtant...


_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _


Ji Yong continua sa vie avec cette douleur ancrée en lui, mise sous silence. Il n'était pas particulièrement intéressé par l'école, et avait adorait se battre et draguer les filles. C'était ce qu'on appelait grossièrement un chieur. Il savait tout sur tout, détestait qu'on lui fasse des remarques et se moquait ouvertement de tout ce qu'on pouvait lui dire. Il aimait attirer l'attention, amuser les autres, et faisait l'unanimité auprès des filles. Mais une seule l'intéressait : celle qui ne voulait pas de lui. Ji Yong aimait le défi, et se dire qu'il pourrait l'avoir alors qu'elle ne voulait pas de lui, lui donnait des frissons. Elle était belle et intelligente, pas particulièrement populaire, plus concentrée sur les études - elle voulait devenir médecin - et malgré leur jeune âge, son avenir était tout tracé. L'exact opposé de Ji Yong qui était totalement perdu, embêtait les autres parce que lui-même s'ennuyait, avec des passions qu'il n'exploitait pas à cause d'un paternel trop sévère qui attendait de lui le meilleur. Il avait de la chance d'avoir un grand frère qui reprendrait l'entreprise familial, ce qui permettrait à son cadet de trouver sa voie. Mais le plus proche avenir qu'il se voyait, c'était dans les bras de cette fille. Malgré ce que tout le monde en pensait, elle comprit, il réussit à la séduire. Ils passaient le plus clair de leur temps ensemble et c'était les meilleurs moments de sa vie. Elle avait réussi à l'adoucir et à l'encourager à se trouver des passions, des buts autres qu'elle dans sa vie, parce que comme elle le disait si bien, rien n'était éternel. Passionné de rock, Ji Yong commença à jouer de la batterie et il était incroyablement bon et très vite doué. Une passion qui ne dura pas très longtemps à cause de son père. La musique, ce n'était pas sérieux, après tout. Il attendait de lui qu'il soit bon à l'école, et qu'il puisse s'investir rapidement avec Zeus. Alors, l'amour de sa vie, Mina, l'aida, même si elle n'adhérait pas à l'idéologie de son père, parce qu'elle voulait que son bien et surtout que son paternel leur fiche la paix. Cet amour idyllique dura deux ans. Il aurait pu durer toute une vie, parce qu'ils s'étaient  sincèrement projeté ensemble. Mais rien n'était éternel. Victime d'une maladie du cœur, Mina savait qu'elle ne vivrait pas toute sa vie. Les projets et l'avenir qu'elle avait imaginé avec lui, c'était pour imaginer ce qu'elle aurait pu vivre. Mais ça, Ji Yong ne le sut jamais. Il lui avait confié le départ de sa mère, et elle ne voulait pas qu'il s'inquiète, qu'il souffre en attendant que le moment fatidique arrive. Alors un jour, elle ne se réveilla tout simplement pas. Ca a l'air triste comme ça, mais elle reposait littéralement en paix, puisque c'était un jour où ses parents avaient accepté que Ji Yong dorme chez eux. Evidemment, théoriquement pas ensemble, mais vous connaissez les enfants. Elle poussa ses derniers soupires dans ses bras, heureuse. Un sentiment qu'il ne ressentit pas vraiment à son réveil...


_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _


Les hommes n'étaient jamais tristes. Mais ils souffraient intérieurement. Ji Yong était complètement détruit et avait décidé de ne plus jamais croire en l'amour. Il prétendait que tout allait bien, mais pas du tout en réalité. Il perdait les personnes qu'il aimait le plus et finissait par croire que tout était de sa faute. C'était sa faute. Il était maudit ou portait malheur, il ne savait pas. En tout cas, il poursuivait sa vie, sans but, à part extérioriser sa douleur par les bagarres puis plus tard, les courses de moto illégales qui lui permettait de se faire un peu d'argent. La première moto qu'il eut lui fut prêtée car il n'était pas majeur et ne pouvait pas s'en offrir une, une moto qu'il remboursa par la suite grâce aux courses. On pourrait croire qu'aussi riche que lui il avait de l'argent de poche tout les mois, mais monsieur Do pensait que tout salaire se méritait et que ses fils n'avaient pas à être payé sous simple prétexte qu'ils étaient des enfants de riches. Ils devaient donc travailler, et puisque Ji Yong refusait de faire quoique se soit pour lui, il préférait faire quelque chose d'illégal. Ji Yong n'était pas un fervent défenseur de l'amitié, et pourtant, c'est au lycée qu'il rencontra les personnes qui jusqu'à présent, étaient les seules choses qui le maintenaient en vie. Cette petite bande qu'il prétendait ne pas apprécier plus que ça et pourtant pour qui il se surprendrait à faire n'importe quoi. Il rencontra aussi cette fille, avec laquelle il pensa panser ses blessures sentimentales. Elle était différente et avec elle il pouvait partager sa passion pour la musique. Au début, c'était difficile, parce qu'il ne s'autorisait toujours pas à aimer, et elle n'avait pas le caractère si doux de Mina. Elle lui ressemblait un peu trop, et ce n'était plus le même genre d'amour pur d'enfant. Alors au bout d'un moment, il connut sa première séparation, mais contrairement aux autres, il pouvait voir encore la personne. Ji Yong avait trop l'habitude des séparations directes et définitives. Il comprit que parfois, deux personnes pouvaient ne plus s'aimer mais toujours être amis, et que parfois prendre ses distances c'était mieux. Parce que franchement, c'était une relation beaucoup trop toxique entre jalousie et prise de tête. Et puis sûrement, il y avait quelqu'un d'autre là-dessous...


_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _


La vie de Ji Yong continuait, rythmée par ses amis, ses courses et ses bagarres. En grandissant, il s'était rendu compte que celle qu'il aimait était sous son nez depuis longtemps, et qu'il fallait aussi qu'un jour il se préoccupe un peu plus de son avenir. Il suivit ses amis jusqu'à Yonsei, une université qui plaisait aussi à son père par chance, mais il n'allait pas franchement en cours. Il passait ses journées à traîner avec des fréquentation pas très fréquentable ou à conduire, parfois même il faisait du bénévolat avec les animaux parce qu'ils étaient la seule chose qui l'apaisait. Il savait de toute façon où il finirait sa vie, si ce n'était pas en prison, mais dans l'entreprise de son père avec un petit poste qui ne lui prendrait pas la tête. Enfin, c'est ce qu'il pensait, au début. Jusqu'au dernier événement tragique de sa vie. Le décès de son frère. Un accident de la route auquel il ne survécu pas. Son frère Ji Min était la seule personne qui comptait plus que tout pour lui, qui était toujours là pour lui et qui ne l'avait jamais jugé sur ses choix de vie. L'accident était survenu après au moment où son aîné était venu le cherché après une bagarre où il en était sorti plus abîmé que prévu. Evidemment, Ji Yong se pensait coupable, c'est vrai, s'il avait été plus responsable, jamais ça ne serait arrivé ? Peu de temps après l'enterrement, son père l'avait convoqué afin de parler de sa future place dans l'entreprise. Celle de Ji Min. Le successeur de leur père. Reprendre la direction des hôtels à sa mort. Ironiquement, Ji Yong se disait que ça arriverait sûrement plus vite que prévu avec la malchance qu'il avait. Il était furieux. Son fils venait de mourir et il pensait déjà à l'administratif. Les rapports entre le père et le fils n'étant déjà pas bons, ils se dégradaient de plus en plus, Ji Yong refusant de prendre la place de son défunt frère. Ji Yong n'avait pas versé une seule larme. Il avait versé plus de sang en contrepartie.

((It couldn't be much more from the heart))