On trouve deux types de personnes sur terre. Celles qui utilisent leur temps libre avec intelligence. Puis les glandeurs. Et malheureusement, Jae Hwan ne faisait clairement pas partie de la première catégorie : Adepte de la procrastination et grand vétéran de la glande, le jeune homme avait, comme à l'accoutumée, décidé de ne rien faire de sa journée une fois les cours finis. Un petit déjeuner rapide et puis le voilà errer à gauche et à droite dans le campus, sans but, les yeux dans la vague. Tel un idiot qui ne savait pas quoi faire de son temps, en fait.
Après une heure ou deux d'intense glandouille, l'étudiant de sixième année se retrouva dans une supérette en train de faire des courses à l'aveugle. Il attrapa quelques canettes, pris quelques sachets de malbouffe et des paquets de nouille instantanés puis quitta le magasin tel un fantôme. Même s'il appréciait son rythme de vie actuel, il ne pouvait s'empêcher de penser qu'il gaspillait « peut-être » un petit peu son temps, à rien foutre. Mais cette réflexion ne fit pas long feu puisqu'un groupe de fille en tenue de sport attira son regard – liquéfiant par la même occasion ses pensées -.

Sans réellement faire attention, Jae Hwan se retrouva donc dans la zone sportive du campus, où se trouvaient toutes sortes de terrains de sport. Et alors qu'il buvait sa canette de café tranquillement, il entendit quelqu'un beugler son prénom. L'étudiant en sixième année n'eut aucun mal à repérer l'idiot qui venait de l'appeler, puisqu'il bougeait ses bras dans tous les sens comme un abruti. « Aish... un jour il remarquera que je suis plus âgé que lui grmblbl » marmonna JH dans sa barbe avant de lever le bras, lui faisant signe qu'il l'avait vu, puis de s'avancer vers lui.
Pour être tout à fait honnête, le bonhomme hésita à s'arrêter à mi-chemin et partir à toute jambe lorsqu'il remarqua les plots sur le terrain et qu'il comprit que Jin Kyung était en train de ranger. Qu'il allait se faire exploiter comme un bon petit nouveau stagiaire dans une grande entreprise. Mais son sens de l'amitié – et son côté bonne poire – l'empêcha de s'égarer et de s'en aller.

« Tiens, attrape » Cria le sino-coréen en balançant une canette en direction de son pote. Puis regardant autour de lui « Yah. T'es devenu le bizu ? Les autres membres du club te font ranger tout seul ? »

Jin Kyung était un de ses meilleurs amis. Jae Hwan l'avouait sans honte et il était capable de beaucoup, pour lui. Et il aimait penser que lui aussi, en serait capable d'autant, pour lui. Enfin ça n'empêchait pas au sino-coréen, à ce moment précis, de n'avoir qu'une seule envie : partir en courant pour ne pas passer – et dilapider – le reste de son après midi sur un terrain de sport à ramasser des plots et des outils qui ne lui appartenaient même pas ! Franchement, la seule chose qui le retenait, c'est savoir que son pote devrait se débrouiller tout seul. Et puis, pourquoi était-il tout seul alors que le club de football était sans doute l'un des plus grands du campus ? Peut-être que le Pyobeom ne voulait pas prendre la douche en même temps que ses camarades. Cachait-il là un complexe du fait qu'il avait un petit zizi ? La question traversa l'esprit de l'ancien brigand, mais qui ne resta pas très longtemps dans sa tête, brrr.
Bref. Au final, l'étudiant de sixième année avançait vers son pote, les mains bien remplis. Il savait qu'il allait le regretter – et qu'il allait se faire méchamment exploiter comme un petit stagiaire – mais la décence l'empêchait d'abandonner à son sort le footballeur. Il lança une canette en direction de l'autre exploité qui lui fit un compliment sur son lancer. Bien entendu, JH monta tout de suite sur ses grands chevaux : « QUOI QUOI QUOI TU VEUX DIRE QUE JE LANCAIS MAL AVANT C'EST CA?! » beugla le chevalier sur son destrier blanc, en grimaçant littéralement : « Si t'es pas content je reprends la canette wesh » Continua le bonhomme, tandis que Jin buvait comme un glouton. Bon, au moins, il n'allait pas mourir de déshydratation.
« Bon, maintenant que c'est fait, je vais y a... » Malheureusement, l'étudiant ne pu finir sa phrase, son hoobae lui ''demandant'' s'il pouvait l'aider à ramener le reste des plots. Jaehwan s'apprêtait à répondre par la négative mais Jin s'en alla comme une fleur, sans lui laisser une réelle opportunité de dire non. Il le regarda s'en aller dans la direction opposée et en désespoir de cause, il hurla « AISH T'AS DE LA CHANCE QUE J'AI RIEN A FAIRE ! » tout en tapant des pieds le sol. Il continua à martyriser le terrain pendant bien quinze secondes avant de commencer à ramasser les plots, voyant que Jin n'allait pas le laisser s'en aller. Pourquoi était-il faible lorsqu'il s'agissait de dire non à certaines personnes ? « PFFFFFFFFFFFF » soupira longuement l'homme à la casquette. « YAH. T'as intérêt à me payer à dîner ce soir ! » Oui. Au cas où vous l'auriez remarqué, JH passe son temps à gueuler.

Bien entendu qu'il n'avait rien à faire. On parlait de Jae Hwan, s'il vous plaît. Si ce dernier était connu pour une chose dans l'école, c'était bien pour sa capacité à pouvoir glander à tout moment de la journée. Ainsi que l'histoire comme quoi il aurait couru tout nu dans les couloirs du dortoir des « sans fratries » pour taxer du gel douche à un de ses copains, certes. Même si le bonhomme était une pile électrique quand il était bien entouré, il fallait avouer qu'il aimait surtout ne rien faire. Un homme plein de paradoxe comme vous vous en doutez bien. Et s'il n'était pas tombé sur Jin Kyung à ce moment précis de la journée, l'ex-vilain aurait continué à se la couler douce et à s'adonner à son activité préférée : La procrastination. S'il avait fait exprès de venir ici, se demandait Jin ? BIEN SUR QUE NON. S'il avait su qu'il allait devoir se taper du rangement de plots et de ballons lorsqu'il avait mis son premier pied sur les terrains, il se serait barré TOUT DE SUITE.
« AISH. Yah. YAH ! Tu as intérêt à m'inviter à manger après ça ! » Lâcha le campagnard, levant ses deux bras comme pour protester, tout en sachant que son interlocuteur ne le remarquerai pas puisqu'il lui avait tourné le dos. Le faire avec bon cœur ? Mais c'était une blague ! Se faire exploiter par un plus jeune que lui et en plus de cela, gratuitement ? A ce moment précis, Jae Hwan visualisait dans sa tête la pyramide de la reconnaissance, et hiérarchisait celle-ci de cette manière : En premier, les esclaves. En second, les insectes. En troisième, les stagiaires. Et en dernière position, lui. Le bonhomme tapa du pied le sol pour la cinquante septième fois de la journée avant de continuer à ranger comme on l'avait demandé. Il protestait surtout pour la forme au final, puisqu'après avoir râlé comme il savait si bien le faire – certaines personnes se demandaient s'il n'avait pas du sang français qui coulait dans ses veines, c'est dire -, il faisait souvent ce qu'on lui demandait.
Après moult efforts qui ne ressemblaient pas au sino-coréen, ce dernier vit enfin le bout du tunnel. Un dernier plot et hop, c'était fini. Il allait pouvoir rentrer pépère chez lui et pioncer. Après avoir pris une bonne douche. Seulement s'il avait encore du gel douche. Et puis au pire des cas il irait le taxer chez quelqu'un d'autre, hein. Jae Hwan attrapa le dernier truc chapeau en plastique orange et blanc lorsqu'il entendit la voix du Pyobeom grincer dans ses oreilles. Il se retourna vers lui, levant son bras comme s'il allait balancer le plot sur son cadet : « YAH TU VAS BAISSER D'UN TON OK ? » Il le dévisagea un instant puis alla poser la dernière pièce du puzzle : « NE TE PLAINS PAS SI JE TE METS LA PILLULE ! » Ajouta le bonhomme en s'avançant vers Jin : « Si je gagne, tu m'invites à manger. Si je perds, tu m'invites à manger. C'EST TIPAR » Gueula ensuite l'étudiant de sixième année avant de taper dans le ballon que tenait encore le membre du club de football, le faisant rebondir au sol.

Si la pilule, ce n'était pas pour les femmes ? Bien sûr que si, mais là n'était pas la question ! Jin Kyung ne comprenait-il pas cette expression ? N'était-ce pas une expression super commune que tout le monde – encore plus à cet âge là – était censé connaître ? Ou bien était-ce simplement Jae Hwan qui était trop vieux jeu et qu'il sortait des proverbes et des expressions d'un autre âge ? Dans sa campagne profonde, c'était quelque chose qu'on lui disait souvent. A Séoul peut-être utilisait-on différents mots. Le campagnard de première n'insista pas et ne chercha pas à répondre à la question de son ami. Il haussa simplement les épaules en grognant, sachant très bien qu'il n'aurait jamais le dernier mot avec le footballeur, principalement parce que ce dernier maîtrisait mieux le coréen que lui. Faut dire qu'il n'y avait pas beaucoup de monde, en Corée, qui maîtrisait moins bien cette langue que lui.

JH lança donc un défi au Pyobeom, ajoutant des conditions qui avantageaient lui et lui-seul. Puis ne laissa pas un instant à Jin de protester puisqu'il tapa le ballon pour l'envoyer au sol. Oui, en plus d'être un mauvais parieur, Hwannie était d'une fourberie à faire pleurer le Joker. Et le plus fort, c'est qu'il ne connaissait pas toutes les règles du football. Il savait qu'il y avait une balle, que vingt deux joueurs couraient derrière sur le terrain, qu'un arbitre distribue les cartons jaunes et rouges et qu'il faut mettre le ballon dans le filet de l'adversaire, le tout en utilisant que les pieds. Mais s'il avait quelques acquis dans ce sport, c'était uniquement à FIFA, le jeu de football qu'il taxait à un de ses camarades de classe. Il avait peut-être mis qu'une ou deux fois les pieds sur ce terrain rectangulaire.

Le rose se dirigea donc vers les cages, prenant son rôle de gardien particulièrement à cœur. Le sino-coréen lui, resta immobile, le pied posé sur le ballon pour éviter que ce dernier ne bouge. Il observa son ami se placer et se motiver, tandis que lui se demandait où est-ce qu'il allait frapper. Devait-il frapper de front, en force ? Ou en direction d'une des deux lucarnes, en douceur ? Non. Avec ses deux pieds gauches, tout ce qu'il ferait serait d'exploser les oiseaux qui volaient dans le ciel. Pourquoi Kyung n'avait-il pas proposé un badminton ou un basket ? Ou même un bras de fer. Pas besoin de technique, au bras de fer. Ni besoin de savoir viser. Juste de la force.
« Je... Poulet ?! C'EST TOI LE POULET ! » Balança Jae Hwan en bougeant ses bras n'importe comment. Il recula ensuite de quelques pas, décidé à prendre de l'élan avant de frapper droit au but. Puis il courut vers la balle aussi rapidement qu'il en était capable. La distance entre lui et la sphère blanche et noire se réduisit à la vitesse de la lumière et, alors qu'il donnait l'impression de vouloir taper dedans de toutes ses forces avec son pied droit, il attrapa finalement la balle avec ses deux mains et la plaqua contre son poitrail. Et il courut vers la droite de la cage avant de faire une feinte de corps et plonger vers la gauche, où il plaqua la balle contre le sol, derrière la ligne.

« TOUCHDOOOOOOOWN ! » Beugla l'étudiant de sixième année en se relevant, tout poussiéreux, jetant la balle par terre pour ensuite courir à droite et à gauche, les bras levés, célébrant son « goal » comme un demeuré. Puis il s'arrêta et se retourna vers Jin Kyung : « Ce soir, c'est poulet et bière ! »

La fin justifie-t-elle les moyens ? La réponse est oui. Ayant vécu une enfance relativement merdique, Jae Hwan avait appris à user de toutes les ruses et artifices possibles pour parvenir à ses fins. Alors oui, ce n'était pas toujours honorable et, comme le disaient les autres, « ce n'est pas digne ». Mais est-ce que le sino-coréen en avait-il cure, de toutes ces belles paroles ? On ne remplit pas son ventre avec de l'honneur ou de la dignité. Et même si c'était bien beau de pouvoir se dire « je vais mourir mais j'ai vécu avec panache », Jae Hwan n'avait surtout pas envie de mourir, lui qui s'était accroché à la vie plus que quiconque.
Du coup, il lui arrivait effectivement de faire des coups bas. Comme celui à l'instant, où il venait de plaquer le ballon rond de football derrière la ligne – et marquant ainsi un « but », en utilisant les mains et non pas les pieds comme le stipulait les règles. Mais y avait-il de règles, à la base ? Jin Kyung avait été terriblement naïf. Il avait proposé à son hyung « une partie ». Mais une partie de quoi ? IL N'AVAIT RIEN PRECISÉ ! Ca aurait pu être du foot, du tennis, du basket. Même si c'était avec une balle de foot ; N'y avait-il pas des énergumènes, sur cette terre, qui jouaient au « tennis basket » ou d'autres jeux combinant différents sports ?

« MOUAAHAHAHAHAHAHHA » Beuglait le campagnard comme il savait si bien le faire. Entendre son dongsaeng le traiter de tricheur était à la fois drôle et gratifiant. Le voir tirer cette tête était tellement... Génial. D'autant plus que le rose était quelqu'un connu pour être patient et calme. Perdait-il patience avec son sunbae ?
Ce dernier fit malgré tout remarquer que non, il en avait rien à foutre et que non, Jae Hwan n'avait pas marqué. Celui-ci se retourna vers son jeune pote les yeux grands ouverts : « COMMENT CA JE N'AI PAS MARQUÉ ?! » Beugla une fois de plus le banlieusard, visiblement outré. Lui ? Mauvais joueur ? OUI c'était un mauvais joueur. C'était surtout quelqu'un qui ne sait pas jouer au football, alors où était le problème ?! Mais face à tant de détermination de la part de Jin, Jae ne put que se soumettre.

Jae Hwan se remit donc en position, à quelques mètres du goal. Il prit une nouvelle fois quelques mètres d'élan pour courir et attendit que son camarade soit prêt pour taper dans la balle. Le jeune homme s'avança, cette fois ci avec plus de retenue, pour enfin caler le ballon entre ses deux pieds. Puis il avança en sautant, sans lâcher le ballon. De loin, oui, il avait l'air d'un parfait idiot.
Lorsqu'il arriva au niveau du membre du club de football, JH s'accroupit et commença à faire une roulade. Les jambes en l'air, il laissa tomber le ballon le long de ses pattes (oui, pattes. Vu sa façon de faire, Hwannie était plus un singe qu'un homo sapiens à ce moment précis) et le cala entre ses cuisses et son ventre. Puis il fit une roulade en avant. Puis une autre. Et une autre. Puis un autre. Jusqu'à atteindre le goal.

« HUMAN BALLOOOOON YEAAAAAH » hurla le bonhomme non sans difficulté, le ballon coincé entre ses jambes et son corps gênant quand même pas mal sa respiration.