⇝ Le film était terminé et pourtant tu ne cessais de fixer l'écran dans un air horrifié, un coussin calé entre tes bras. Coussin que tu serrais un peu trop fort contre toi. Tu clignas des paupières, déviant à peine les pupilles, contemplant une nouvelle fois l'écran. Que venais-tu de regarder ? Et surtout... pourquoi avais-tu regardé ?? Tu secouas un peu la tête, totalement abusé par l'idée – et tu grondais l'ancien toi qui avais dit pouvoir supporter le film. Il te fallait bien ça pour te vacciner, pas vrai ? Comme si tu pouvais trouver le courage face aux films d'horreur après un seul film. Enfin ce n'était pas le premier – pas le dernier non plus. Mais pour ce soir, si, ce sera le dernier. Pour cette semaine, aussi. Sans doute même le mois. Quelle idée... Déglutissant lentement, tu tentas un regard vers ton camarade, calant un peu plus le coussin contre ton torse alors que tu reniflais discrètement. Tu finis par sourire, le coin des lèvres un peu tremblant. « C'était chouette », que tu commentas vaguement, le regard venant se caler dans le vide. Vide que tu fixas longuement, l'esprit ailleurs, les images du film défilant dans tes pensées. Horrible. C'était horrible. T'avais vraiment eu une idée stupide – mais t'osais pas dire à Hak Kun que t'allais probablement être traumatisé pendant au moins dix ans. Tu reniflas à nouveau, le courage longtemps oublié dans un coin de votre chambre alors que tu articulais un vague « Bonne nuit ». Tu savais très bien que ta nuit allait pas être bonne. Et t'en étais même sûr une fois allongé dans ton lit, la chambre plongée dans le noir, le regard vers le plafond que tu ne voyais plus. Le coussin toujours entre tes bras, tu attendais que le sommeil te tombe miraculeusement dessus. Mais les images du film, cette affreuse nonne, restait gravé dans ton esprit, défilant dans tes pensées et apparaissant à chaque fois que tu fermais les yeux. Un bruit attira ton attention, tes pupilles se décalant vers l'origine (enfin tu supposais) alors que tu t'enfonçais un peu plus sous les draps. Tu restas immobile, le palpitant agité, pendant de longues minutes. Prenant ton courage à deux mains, et ton coussin, tu fonças vers le lit de Hak Kun. « Il y a du bruit vers l'armoire », que tu lui dis, suppliant, les doigts agrippés à son bras pour le secouer doucement. « Tu dors ? », et soudainement l'idée d'avoir tes pieds à découvert te fit lâcher un son paniqué. Sans attendre de réponses, tu grimpas dans le lit, le forçant à se pousser. « J'ai senti un truc sous le lit. Je suis sûr qu'elle est sous le lit. Pourquoi elle est sous le lit ? », articulas-tu rapidement, serrant toujours le coussin mais aussi le bras de Hak Kun que tu avais pris en otage. Tu te pinças les lèvres, retenant ton souffle, fixant l'obscurité. « T'as entendu ?? », tu serras un peu plus son bras, un faible « On va mourir » faufilant entre tes lèvres.

⇝ Regarder des films d’horreur… Une occupation qu’Hak Kun affectionne tout particulièrement. Souvent, c’est Soo Bin sa victime, pour l’accompagner dans cette activité. Au dortoir, sa petite-amie n’est pas là, mais il a trouvé un de ses colocataires à entraîner vers l’horreur. Le film touche à sa fin et Hak Kun se lève pour allumer la lumière. Il sait très bien que Eui Joo ne le fera pas, pétrifié en face de l’ordinateur, un coussin serré contre lui. SI Hak Kun l’écoutait, la lumière resterait allumée, mais c’est bien moins drôle. Le ton de la voix d’Eui Joo tremble légèrement quand il prend la parole. Hak Kun le perçoit. Dès leur première rencontre Eui Joo n’a pas témoigné un amour prononcé pour les films d’horreur. Traîné au cinéma par des amis, le musicien a jeté son dévolu sur Hak Kun pour lui servir de bouclier, ce qui l’a beaucoup fait rire. C’est le hasard s’ils se sont retrouvés à l’université, quelques semaines plus tôt. Hak Kun a repris ses études à la rentrée et il se trouve que Eui Joo est un de ses colocataires. Il joue le jeu pour ne pas lui faire de la peine.

- Bonne nuit, fais de beaux rêves, il ajoute, c’est plus fort que lui.

Hak Kun ne perd pas de temps pour aller se mettre dans son lit. Il déteste dormir au dortoir. Il n’a rien contre ses colocataires, il s’entend même bien avec Eui Joo, mais Soo Bin lui manque. Ils vivent ensemble depuis près de deux ans, ils avaient leur habitudes à deux bien installées. Il ne vit pas toujours bien le fait d’être obligé de dormir au dortoir la semaine puisqu’il est étudiant. La couverture remontée jusqu’au menton, Hak Kun n’a aucun mal à s’endormir. Le film qu’ils ont visionné ne l’a pas marqué. Il était même plutôt mauvais… Si ce n’est cette nonne effrayante qui prend le spectateur par surprise de temps à autres. L’ambiance est mal maîtrisée. Il n’a aucune compétence particulièrement dans le domaine du cinéma pour juger un film de la sorte, mais c’est un avis subjectif, qui ne relève que de son ressenti personnel.

Allongé dans son lit Hak Kun attend. Quoi exactement ? La même chose que la dernière fois quand ils ont regardé un film d’horreur ensemble au dortoir. Eui Joo qui n’arrive pas à trouver le sommeil, hanté par les images du long-métrage. Il sent la mains de son colocataire agripper son bras, avant d’entendre le son de sa voix.

- J’essaie, il répond avec un demi-sourire.

Il sourit toujours lorsque Eui Joo se précipite pour le rejoindre sous la couverture.

- Oh, on est devenu intime à ce point en si peu de temps ?

La taquinerie est une de ses armes préférés pour embêter les personnes qu’il apprécie. Ce n’est même pas du flirt, Hak Kun est hétéro et bien trop amoureux de Soo Bin.

- Sous le lit ? Tu veux que j’aille voir ?

Le regard suppliant et le hochement de tête discret d’Eui Joo répondent à sa place. Il repousse la couverture et se lève.

- Si tu restes agrippé à mon bras, je ne vais pas pouvoir aller bien loin par contre. Je crois que j’ai entendu quelque chose aussi, je vais aller voir...

Le ton de sa voix est toujours gentiment moqueur. Les réactions d’Eui Joo l’amuse. Il a presque de l’affection pour lui, alors qu’ils ne se connaissent pas tant que ça. Son colocataire le lâche, mais visiblement à contre coeur. Hak Kun retient un rire à la dernière phrase, bien dramatique, d’Eui Joo. Il s’approche du lit du jeune homme et s’accroupit comme pour vérifier qu’il n’y a rien d’effrayant en-dessous. Hak Kun sait bien que non. Il ne croit pas à ces choses-là, mais… Il a bien envie de s’amuser.

- Aah ! Je crois que j’ai vu un truc, ne bouge surtout pas… Si elle m’attaque, va chercher du secours !

Bien évidemment, il n’y a rien d’autre que des moutons de poussière sous ce lit et quelques affaires. Rien qui pourrait s’en prendre à lui, mais la perspective d’embêter son colocataire était bien trop tentante.

⇝ Tu savais pas pourquoi tu tentais encore. A chaque fois c'était la même chose : tu finissais apeuré, caché dans un coin ou sous la couette, craignant que le monstre du film vienne te chercher. Le pire était certainement les films avec les zombies où tu prenais peur dès que tu entendais un grognement étrange provenant du couloir. T'étais terrifié mais tu continuais à en regarder. Encore et encore. C'était presque ridicule. Et on pouvait penser que tu n'aurais plus peur après toutes ces tentatives mais c'était toujours le cas. T'avais l'idée naïve de pouvoir devenir « vacciner » à force d'en voir. Mais force était de constater que ça ne fonctionnait pas du tout, au contraire, ça avait l'effet inverse et plus tu regardais de films du genre, plus tu finissais effrayé et incapable de dormir. Quand on te demandait tu répondais pouvoir tenir jusqu'à la fin mais tu finissais par prendre ton voisin en bouclier. Le pire était sans doute au cinéma où tu t'accrochais littéralement à la personne à côté de toi, que tu la connaisses ou non. C'en était vraiment ridicule... et peut-être un jour songeras-tu à arrêter cette mascarade pour te rendre à l'évidence que les films d'horreur n'était pas faits pour toi – ou bien que tu n'étais pas fait pour eux. « De beaux rêves... », que tu répétas, incertain. Mais certain de faire des cauchemars ou de ne pas fermer l’œil de la nuit. Tu voyais déjà les heures de sommeil perdues et ton regard épuisé au réveil, demain. Tu voyais surtout cette nonne dans le noir alors qu'elle n'était pas là et c'était encore pire quand tu fermais les yeux. Tu pouvais pas supporter ça. T'arriveras pas à supporter ça.

Ton seul confort était de fuir – plus ou moins – vers Hak Kun. « Tu essaies ? », comment pouvait-il essayer ? T'essayais même pas tu savais que c'était pas la peine. Tu n'attendis pas de réponses pour te mettre à ses côtés. Tu clignas des paupières à ses mots avant de mimer un air bougon, serrant son bras comme un môme boudeur. « On est intimes à partir du moment où on est dans la même chambre. C'est une règle de base », rétorquas-tu, le nez retroussé. T'avais pas la même définition d'intime que lui mais ce n'était qu'un détail. « Tu veux bien voir ? », lui demandas-tu d'une voix pleine d'espoir... avant d'être quelque peu apeuré parce que tu ferais quoi s'il y avait vraiment quelque chose sous le lit ?? A ses mots, tu serras un peu ton emprise sur son bras, le coin des lèvres poussé vers le bas et l'air larmoyant. « Mais j'ai peur tout seul », tu pouvais donc pas le lâcher. « T'as entendu ? T'as entendu ?? Ca venait d'où ? T'as bien entendu hein ? Il y a bien un bruit ! », tu inspiras bruyamment, choqué, les lèvres quelque peu écartées. Après de longues secondes de débat intérieur, tu finis par le lâcher, serrant ce pauvre coussin à la place de son bras. « Fais attention » que tu marmonnas dans un chuchotement. Tu le suivis du regard, les lèvres pincées, avant de lâcher un son surpris. « Mais si elle t'attaque je dois chercher qui ?? », demandas-tu, paniqué, presque entièrement recouvert par les couettes maintenant. « Je sais pas combattre les nonnes. C'est elle qui est là ? Elle est là ? Tu l'as vue ? Elle est partie ? », le questionnas-tu rapidement, t'agitant nerveusement sous les tissus. « Reste pas là-bas, reviens », supplias-tu dans un son plaintif. « Ou alors on sort vite de la chambre et.. et on court ! Loin », c'était une proposition comme une autre. « Je vais pas pouvoir dormir...», tu reniflas discrètement, étouffant ce pauvre coussin. « On va mourir », tu l'avais déjà dit ça.

⇝ - Oui, j’essaie de dormir, il répète, un sourire sur les lèvres.

Contrairement à Eui Joo, Hak Kun n’a aucun mal à trouver le sommeil après une soirée films d’horreur. Il sait fait la part des choses entre la fiction et la réalité, son imagination se tient tranquille à ce niveau. La règle édictée par son colocataire ne manque pas de faire sourire Hak Kun. C’est une façon de voir les choses. Il est vrai que partager sa chambre, c’est partager une part de son intimité, mais ce n’est pas ce que Hak Kun voulait dire. Il ne prend pas la peine de préciser sa pensée. Il n’en aurait pas eu le temps dans tous les cas. Eui Joo est persuadé d’avoir entendu quelques choses et sa panique monte crescendo. Hak Kun a un petit frère. Il s’est souvent amusé à l’effrayer. Ils ne sont plus aussi proches qu’avant désormais, son cadet est plus proche de leur père, alors qu’Hak Kun a préféré couper les ponts. Le plus jeune de la famille Noh correspond davantage aux attentes de leur paternel. Ou peut-être qu’il si plie plus facilement. Il ne l’espère pas. Hak Kun aimerait que son petit-frère puisse avoir autant de libertés que lui. Cependant, il peut aussi concevoir que pour ce dernier, la fierté de ses parents soit importante. Il ne pourrait pas le blâmer pour ça. Il espère juste qu’il ne regrettera pas ses choix plus tard. Les plaintes apeurées de Eui Joo le rappelle à la réalité, Hak Kun se tourne alors vers son colocataire.

- J’ai entendu !

Il n’a absolument rien entendu, mais… C’est bien trop tentant de ne pas jouer le jeu.

- Promis, je fais attention. Et si je meurs, dis à Soo Bin que je l’aime.

Hak Kun prend un ton volontairement théâtrale et dramatique. Eui Joo sait qui est Soo Bin. Ce n’est pas comme si Hak Kun ne l’avait jamais au téléphone, que son fond d’écran de portable et d’ordinateur n’était pas des photos de couple et il a déjà parlé de sa petite-amie à ses colocataires.

- Tu toques à toutes les portes et tu dis à tout le monde de fuir. Si elle réussit à m’avoir, c’est qu’il est déjà trop tard.

Le couturier pousse le vice un peu loin. Est-ce qu’Eui Joo paniquerait au point de suivre ses bêtises à la lettre ? Le pauvre se prendrait un savon par la direction… Évidemment que si cela arrivait, il avouerait sa culpabilité. Hak Kun peut facilement se moquer du sort de quelqu’un, mais pas s’il y a un tant soit peu d’affection et en peu de temps, car son arrivé à l’université est récente, il s’est attaché à Eui Joo. Feignant une certaine prudence, Hak Kun se rapproche du lit d’en face. Il se penche pour regarder en-dessous et continue de faire paniquer son pauvre colocataire. Eui Joo le bombarde de questions et il reste volontairement silencieux.

- C’est pour les faibles la fuite, il faut se sacrifier pour défendre les autres et leur épargner une bonne frayeur.

Hak Kun chevalier servent pour vous servir. Il se prend un peu trop pour Robin des bois parfois, même s’il n’est clairement pas suffisamment altruiste pour se comparer à cet emblématique personnage. L’angoisse du jeune homme serait suffisante pour faire arrêter cette plaisanterie à beaucoup de personnes, mais Hak Kun persiste. Il prend son téléphone portable et allume la lampe torche, comme pour mieux voir. Un bras devant lui, seul son buste et ses jambes dépassant de sous le lit. Il se met soudainement à gesticuler, feignant de repousser une quelconque créature.

- Aaah, elle m’a attrapé, viens m’aider Eui Joo !

Il émet des râles ridicules, digne d’un vrai nanar pour grossir le trait et effrayer encore plus le jeune homme toujours en boule sur le lit. Est-ce que ce dernier osera venir l’aider à se battre contre cette créature imaginaire ?

⇝ T'arriverais pas à dormir ce soir. T'arriverais pas à trouver le sommeil, t'en étais certain. Surtout pas après avoir regardé ce film d'horreur – comment le pourrais-tu ?? T'avais trop peur qu'une nonne vienne te tirer de ton lit par les pieds pour t'emporter .. où ça d'ailleurs ? Tu voulais pas savoir. T'étais même pas sûr d'avoir réellement compris le film, trop perturbé par les images pour en saisir le sens. T'étais tellement apeuré que t'étais sûr de voir les ombres bouger en plus des bruits qui tournaient autour de toi. T'étais pas rassuré et c'était pour ça que tu avais rejoins ton camarade dans son lit. Tu voudrais allumer la lumière. Toutes les lumières, même. Tu ne voulais plus voir un seul centimètre d'obscurité mais t'étais pas sûr que cela puisse te permettre de dormir plus facilement et sereinement. Et si en plus Hak Kun avait entendu lui aussi... Cela voulait dire qu'il y avait bien quelque chose. Ou quelqu'un – ou les deux. T'allais faire quoi si la nonne décidait d'apparaître avec une aiguille entre les mains ? L'horreur. « Quoi ? Quoi ? Pourquoi ? Tu vas pas mourir ! », il pouvait pas te faire ça. Pas ce soir. Pas maintenant – jamais même. Il pouvait pas te laisser seul. Tu feras quoi, tout seul ? Rien probablement. Ou peut-être que tu te cacheras sous les draps en espérant que ce soit suffisant... Ou peut-être arriverais-tu à t'échapper ? A quitter la chambre pour aller chercher de l'aide. T'étais pas sûr que le gardien puisse être utile mais qui pouvais-tu appeler sinon ? Les Ghostbusters ? Tu te pinças les lèvres, les doigts agrippés férocement au drap alors que tu reniflais distraitement. « Tu pourras lui dire à Soo Bin. Tu lui diras. Demain », c'était une façon de te rassurer et de te dire que tout allait bien se passer. « Fais attention », que tu susurras contre le drap, les pupilles vers lui. Le silence de Hak Kun était plus angoissant que réconfortant, tes phalanges tirant nerveusement sur le drap. « Je suis faible et c'est très bien de fuir ! », t'avais aucune honte à le clamer en cet instant, préférant vivre en prévenant la fuite que mourir en jouant au héros – et en ratant, du coup. Surtout que tu serais un très mauvais héros. « On peut sauter par la fenêtre, on se fera pas mal je peux te dire comment faire », marmonnas-tu rapidement. « On sacrifie personne », que tu ajoutas, avant de te mordre la lèvre, un nouveau son plaintif dans la gorge. Tu sursautas sans le vouloir en voyant la lumière de son téléphone, tes prunelles ne quittant pas sa silhouette. Un léger cri quitta ta bouche alors que ton colocataire semblait avoir été attrapé et tu te figeas un instant, incapable de bouger alors que pourtant, ton corps ne faisait que trembler. La terreur dans le cœur te fit enfin bouger alors que tu gesticulais étrangement pour finalement te laisser tomber du lit. Tu t'avançais – en rampant – vers Hak Kun, attrapant sa main, essayant de le tirer. « Je dois faire quoi je dois faire quoi », et tes doigts s'agrippaient aux siens alors que tu tentais de le sortir de sous le lit. Tu tentais de l'amener vers toi tout en reculant, un cri t'échappant quand tu sentis quelque chose frôler ta nuque, tes mains lâchant celle de Hak Kun pour chasser ce qui venait de t'effrayer – tes cheveux. Mais t'étais pas assez calme pour le remarquer. « On va mourir », que tu te mis à marmonner, te dépêchant de rattraper la main de Hak Kun. « C'est horrible on fait quoi on prévient qui on va mourir ?? »

⇝ Ce n’est pas la première fois que les deux colocataires regardent un film d’horreur ensemble. Hak Kun savait comment la soirée allait tourner. Pourtant, il n’a pas proposé à Eui Joo de regarder autre chose. Premièrement, parce qu’il adore les films d’horreur, le reste à un peu tendance à l’ennuyer. Deuxièmement, Hak Kun est taquin, comme il l’a souvent fait avec son petit-frère par le passé, il s’amuser à terroriser le pauvre Eui Joo. Il faut dire que ce n’est pas bien compliqué… Hak Kun saute sur l’occasion pour sortir son meilleur jeu d’acteur, digne des Oscars ! Bien évidemment, il n’y a rien sous le lit, à part, peut-être, un peu de poussière, il sent que ça lui chatouille le nez. L’étudiant en stylisme fait vraiment tout pour lui faire peur. Jusqu’à lui dire de prévenir Soo Bin s’il venait à mourir. Sacrifié pour protéger les autres occupants du dortoir ! Non, mais quel drama… Hak Kun en fait toujours des tonnes. C’est ce que Soo Bin dirait si elle était là. Elle lui reprocherait aussi, probablement, d’avoir fait peur à Eui Joo. C’est pour rire, il n’y a pas mort d’homme. Il faut qu’il s’endurcisse !

- Viens m’aider ! On n’aura pas à les prévenir s’ils retrouvent nos cadavres.

Hak Kun tend sa main à Eui Joo. Il attend qu’il soit suffisamment proche de lui et il le tire son le lit, en continuant de gesticuler et de crier, feignant de se faire attaquer par une créature d’outre-tombe. L’étudiant en stylisme n’épargne rien à son colocataire. Heureusement qu’il fait suffisamment noir sous le lit pour qu’Eui Joo ne voit pas ce sourire qu’Hak Kun peine à retenir. Pour donner plus de réalisme à cette fausse attaque, il a laissé tomber son téléphone un peu plus loin. Il est tombé sur le dos, bloquant la lumière de la lampe torche qui n’est plus visible que par un halo rougeâtre autour de l’appareil.

Soudainement, le jeune homme arrête de bouger, le souffle court à force de faire l’idiot, il est attentif aux réactions de son colocataire. Elle ne se fait pas attendre d’ailleurs. Eui Joo appelle son prénom d’une voix apeurée. Hak Kun ne bouge toujours pas. Dans tous les bons films d’horreur, il faut un temps de tension avant le jumpscare. Au bout de quelques secondes, qui ont peut être semblé être une éternité pour Eui Joo, Hak Kun attrape son téléphone pour éclairer son propre visage et s’exclame :

- Bouh !

Suivit d’un éclat de rire non dissimulé cette fois. Il est très fier de sa petite plaisanterie. La mine dépitée d’Eui Joo lui fait bien comprendre que ce n’est pas partagé.

- Quoi ? Tu as vu un fantôme ?

Oui, il est très fier de cette blague aussi. Hak Kun et l’humour… C’est quelque chose. Il recule pour sortir de sous le lit en essayant de ne pas se cogner et en entraînant son colocataire à sa suite. Il s’adosse contre le bord du lit et se tourne vers Eui Joo. Il lui tapote affectueusement le dessus de la tête.

- Il n’y avait rien là-dessous. Les fantômes ça n’existe pas, les nonnes maléfiques non plus. Les devoirs, les longues heures de cours inintéressantes et les gens qui n’ont pas d’humour par contre si, malheureusement.

Il dit tout cela comme si c’était une évidence. Pour lui, ça l’est. Il n’a jamais cru au paranormal, aux fantômes et tout ce qui s’en rapproche. L’être-humain est déjà suffisamment effrayant, pas besoin de croire aux fantômes pour avoir peur du monde… Hak Kun se surprend à penser qu’il ne faudrait pas qu’il emmène Eui Joo lorsqu’il part en urbex, il le traumatiserait à vie. Enfin, Hak Kun ne fait pas ça pour se faire peur, mais plus par curiosité et par fascination. Ces lieux abandonnés ont été habités dans le passé, c’est comme si le temps avait été figé parfois… Oh par contre, il faudrait qu’il lui fasse regarder Gonjiam : Haunted Asylum. Certains scènes lui ont fait froid dans le dos, alors la réaction de Eui Joo devrait être… Intéressante. Alors qu’ils reprenaient tous les deux leurs esprits, un téléphone se met à sonner. Celui d’Eui Joo apparemment, Hak Kun ne sait pas qui peut l’appeler à cette heure-ci, mais…

- Si j’étais toi je ne répondrais pas. Tu as déjà vu le film The Ring ? Des personne sont mortes 7 jours après avoir répondu à un appel bizarre…

Et c’est reparti pour un tour. Hak Kun n’épargnera donc jamais le pauvre coeur de son colocataire.

⇝ Tu t'attendais à avoir peur mais pas autant. Tu te promettais de ne plus refaire cette erreur la prochaine fois – et pourtant tu savais aussi que t'allais accepter si Hak Kun te proposer de regarder un film d'horreur. Tu allais bien finir par être vacciné un jour de toute façon et tu n'auras plus peur. Comme ton colocataire. Tu allais pouvoir regarder n'importe quel film sans broncher. Et peut-être même te sacrifier pour le bien des autres. Pour le moment tu paniquais à défaut de pouvoir faire autre chose, les pensées cohérentes quittant ton esprit. « Nos cadavres ??? Je veux pas mourir comme ça », marmonnas-tu rapidement, de plus en plus angoissé. Et tu pensais à ta mère, et à ton père. Et tu pensais à la peine que ça leur ferait, à la peine que tu leur avais déjà infligé, sans le vouloir. Tu ne voulais pas mourir, pas comme ça, sous un lit plein de poussière par une nonne épouvantable. Mais tu ne pouvais pas laisser Hak Kun seul, attrapant sa main, tentant de l'aider du mieux que tu le pouvais, terrorisé comme tu étais. De légers sons apeurés quittaient tes lèvres alors que ton cœur tambourinait si fort que tu n'entendais plus que lui. Et le silence qui te répondait était absolument terrifiant, les pupilles tentant de capter quelque chose – n'importe quoi. Tu ne pus retenir le cri qui t'échappa, un sursaut venant secouer ton corps avant que tu ne plaques tes mains contre ta bouche. Tu te contentas de le fixer, gardant la réponse à sa question sous silence, les yeux humides et grands ouverts. Tu suivis vaguement les mouvements, les imitant tout aussi vaguement, le regard implorant vers Hak Kun. Tu reniflas discrètement. « Il y avait rien du tout ? », tu poussas quelque peu ta lèvre inférieure en avant alors qu'elle tremblait à peine. « Qu'est-ce qui t'a attrapé alors s'il y avait rien ? », demandas-tu, suppliant, perdu – apeuré. Tu reniflas une nouvelle fois, passant maladroitement tes doigts sur tes pommettes. Tu avais eu tellement peur. Tu avais toujours peur, d'ailleurs. Le cœur agité et le souffle court, tes pupilles voyageant rapidement autour de vous comme si tu craignais être soudainement attaqué. Ton bras vint discrètement s'accrocher au sien.

Tu sursautas au son du téléphone, serrant un peu plus le bras de Hak Kun. « Il faut regarder un film non ? J'ai entendu qu'il fallait regarder un film. J'ai pas regardé de film », tu fixas ton téléphone de loin, serrant toujours plus le bras de ton pauvre colocataire. « Elle peut pas sortir du téléphone pas vrai ? », tes lèvres tremblaient faiblement. Tu inspiras un bon coup, lâchant son bras pour aller attraper ton téléphone. « C'est ma maman », que tu dis en observant le nom du contact. « Je dois répondre ? », tu lui lanças un regard perdu et terrifié. « Elle a pris le contrôle du téléphone de ma maman tu crois ? », tu baissas le regard vers l'écran du téléphone qui s'alluma une nouvelle fois, l'appareil vibrant dans ta main – et tu sursautas à nouveau. « Je fais quoi je fais quoi », interrogeas-tu sans vraiment le faire. « Je veux pas mourir comme ça » »

⇝ Hak Kun commence à avoir de la compassion pour Eui Joo. Pas qu’il en était dépourvu avant, mais sa plaisanterie le faisait rire. L’entendre dire qu’il ne veut pas mourir comme ça, lui fait quand même un peu de peine. Un jour Eui Joo se vengera pour toutes les taquineries qu’Hak Kun lui fait subir… Entre nous, il n’aura que ce qu’il mérite. Il pince les lèvres et se retient de rire lorsque Eui Joo réalise… Non, il n’y avait absolument rien sous ce lit, si ce n’est les monstres inventés par Hak Kun pour effrayer son colocataire.

- C’est le croque-mitaine qui m’a attrapé ! il s’exclame en attrapant la main d’Eui Joo pour le surprendre et encore l’effrayer. Non, il n’y a rien sous le lit, si ce n’est toi et moi. Cette nonne n’existe que dans le film que l’on vient de voir, elle ne viendra pas te croquer les oreilles durant la nuit, promis.

Il commence à essayer de le rassurer. On aurait pu croire qu’il allait enfin s’arrêter et laisser le pauvre Eui Joo tranquille. C’est bien mal connaître le couturier. Le téléphone de son colocataire sonne et il saute sur l’occasion pour l’effrayer de nouveau.

- Il faut regarder le film de Sadako. Elle va sortir d’un puits et elle va traverser l’écran de la télévision pour venir te faire peur. Tue sais comment elle tue ses victimes ? En leur faisant tellement peur que leur coeur finit par lâcher.

Le regard apeuré d’Eui Joo fait rire Hak Kun qui ne cherche même plus à le cacher. C’est tellement facile de lui faire peur… Tout fonctionne avec lui. Parfois il s’en veut un peu, surtout quand le jeune homme vient squatter le lit de Kun la nuit parce qu’il ne trouve pas le sommeil. Il se sent un peu coupable quand il apprend l’identité de la personne qui appelle. Désolé Madame Doh pour avoir effrayé votre fils au point de l’empêcher de dormir… Il sourit à son colocataire et répond :

- Je te taquine, tu ne vas pas mourir. Réponds, ta maman veut sans doute avoir des nouvelles.

Eui Joo a encore la chance de bien s’entendre avec ses parents. Hak Kun ne s’entend pas du tout avec son père… Il n’a aucun différent avec sa maman, mais les choses ont fait qu’en prenant ses distances avec son père, leur relation mère/fils en a aussi pâtit. Hak Kun se dit parfois qu’il devrait faire l’effort de refaire un pas vers eux… Puis les disputes avec son père lui reviennent en mémoire et sa fierté lui dit que c’est hors de question. Pas tant qu’il n’aura pas prouvé à son père qu’il se trompait en disant qu’Hak Kun ne réussirait à rien dans la vie. Hak Kun sort de sous le lit pour laisser de l’espace à son ami. En espérant ne pas le faire paniquer en s’éloignant de lui. Si Eui Joo veut répondre à l’appel et discuter un peu, il le laissera tranquille. Puis, il essayera de se faire pardonner. Il ne peut pas promettre de ne pas tenter à nouveau de l’effrayer si une idée lui vient à l’esprit, mais… Eui Joo a sans doute eu son lot de sensations fortes pour les semaines à venir.

⇝ « Qui ?? » que tu laissas échapper dans un cri sans doute trop aiguë, la gorge déraillant vaguement alors que tu toussotais. Tu clignas des paupières dans un air penaud, le cœur tambourinant encore bien trop fort. Les prunelles cherchaient une ombre qu'elles ne pouvaient voir, comme si tu voulais t'assurer que Hak Kun disait vrai. Pas de nonne, donc ? « Elle existe pas ? Pas du tout ? » que tu demandas dans une petite voix, les lèvres pincées dans un air pas vraiment rassuré. Pire que ça, t'étais apeuré, la lèvre inférieure tremblante faiblement alors que tes prunelles voyageaient dans l'obscurité. Et si elle était réellement là ? Que ferais-tu ? Rien. Tu ne pourrais rien faire. Tu ne saurais rien faire. A part hurler et pleurer et te cacher sous les draps. Tu ne savais pas pourquoi mais tu te sentais plus en sécurité sous les draps, même si ça ne te protégeait pas réellement dans l'absolu.

« Pourquoi elle sort d'un puits ? », fut ta première question. « Pourquoi de la télé ensuite ?? », parce que c'était quand même plus sympa de passer par la porte pour entrer chez les gens. Et plus poli, aussi. « Ils sont morts de peur », susurras-tu, les sourcils levés, le teint sans doute trop pâle soudainement. Et si c'était elle ? Avait-elle pris possession de ton téléphone ? Allait-elle venir te faire peur au pire de faire lâcher ton cœur ? Et pourquoi ton téléphone, au juste ? Les lèvres pincées, tu lui offris un air un brin confus, mais toujours effrayé, le regard humide. « Tu es sûr hein ? Je veux pas mourir », affirmas-tu un instant avant de regarder ton téléphone. Du moins, c'était pas comme ça que t'imaginais ta fin. Mais peut-être que ça rendrait la possible rechute moins douloureuse. Etait-ce un moyen de te mettre en garde ? Peut-être – mais de quoi ? Tu reniflas discrètement, attrapant ton téléphone les mains tremblantes. Tu lanças un regard vers ton camarade, incertain, alors que tu décrochais, ta voix résonnant à peine. La voix de ta mère te fit pousser un soupir de soulagement mais la panique revint quand Hak Kun se leva. Par instinct et réflexe, tu vins t'accrocher à sa jambe, refusant qu'il s'éloigne. Et tu discutas quelque peu avec ta mère, lui assurant que tout allait bien, que t'étais juste fatigué et que tu la rappelleras demain, après une bonne nuit de sommeil. Tu ne voulais pas qu'elle s’inquiète. Puis tu relevas le visage vers Hak Kun, l'air suppliant. « Je peux dormir avec toi cette nuit ? », que tu l'interrogeas d'une petite voix, la lèvre inférieure tremblante pour tenter de mettre toutes les chances de ton côté. Tu n'attendis pas vraiment de réponse cependant, te redressant d'un coup et allant te caler dans le lit de ton aîné, les draps directement remontés jusqu'à ton menton. « Tu peux me raconter un truc ? », que tu susurras doucement. « Un truc mignon », précisas-tu sans attendre, un brin de panique dans le regard. T'allais pas mieux dormir cependant.  »

⇝ - Le croque-mitaine, il répète avec un sourire mutin sur les lèvres.

Il n’en dit pas plus, il réserve cette légende pour une autre fois, Eui Joo a eu son compte de frissons pour ce soir. La naïveté de son colocataire le surprendra toujours. Hak Kun ne peut pas s’empêcher d’en jouer. Si Soo Bin était là, elle tenterait certainement de l’en dissuader et lui dirait que ce n’est pas délicat de faire ça… Il ne pense pas à mal, et si Eui Joo veut dormir avec lui cette nuit pour ne pas avoir trop peur, il ne lui dira pas non. C’est le moins qu’il puisse faire.

- Non, il n’y a pas de nonne, promis.

Lui parler de Sadako et de la légende de The Ring, n’était pas une bonne idée non plus. Du moins, pas s’il avait l’intention de le rassurer pour finalement aller au lit. Hak Kun se contente de rapidement changer de sujet.

- Je te raconterai tout ça une autre fois. Il faut garder un peu de suspense, tu ne crois pas ?

Il adresse un clin d’oeil à son colocataire qui décroche enfin son téléphone. Hak Kun le laisse échanger avec sa maman et en profite pour aller dans la salle de bain. Eui Joo ne semble pas être d’accord, ce qui tire un sourire au styliste. Il attend que ce dernier termine son appel. Il ne peut pas aller bien loin avec un koala accroché à sa jambe de toute manière.

- Bien sûr que tu peux dormir avec moi, mais je dois aller aux toilettes avant. Mets-toi sous les draps, j’arrive.

Un sourire rassurant plus tard, Kun s’éclipse dans la salle de bain adjacente à leur chambre commune. Il se nettoie le visage rapidement et applique quelques crèmes qui constituent sa routine du soir. Ce n’est pas parce qu’il est homme qu’il ne peut pas prendre soin de lui. D’autant plus qu’Hak Kun est coquet, il aime se sentir beau. Il sait qu’il l’est. Il prend soin de lui et ne choisit jamais ses vêtements au hasard. Il rejoint Eui Joo dans son lit, restant au bord, pour lui laisser la place contre le mur.

- Hm… Je ne connais pas trop d’histoires mignonnes…

Ce n’est pas son domaine de prédilection, par contre, en dehors de l’horreur, il adore la fantasy et les récits épiques. Hak Kun n’est pas un grand lecteur, mais il a visiblement de l’imagination… Il attrape son téléphone et choisi une musique.

- Je vais nous mettre dans l’ambiance (♫)… Est-ce que tu aimes bien les pirates ? demande-t-il à son colocataire. Je vais te raconter l’histoire d’un bateau pirate et de son équipage… Je ne parle pas de pirates tels qu’on les connaît, qui voguent sur les océans. Dans mon histoire… Ce sont des pirates de l’air, qui côtoient les nuages sur leur bateau volant. Tu as une idée du nom que l'on pourrait donner à ce bateau ?

Il lui pose cette question pour le faire participer un peu, même si d’expérience, il se doute que Eui Joo va finir par s’endormir.

- Il était une fois, un monde presque tel que nous le connaissons , à quelques exceptions près : la magie est monnaie courante et la Terre a été fragmentée. La guerre faisait rage entre le monde d'en-haut et celui d'en-bas. Le capitaine Théodore et son équipage, constitué de cinq hommes : Pieter, le médecin, Joe, le cuisinier, Nicholas, astronome et canonnier, Felix, couteau suisse de l’équipage, il fait un peu tout, c’est le plus jeune et aussi le plus espiègle. Et le capitaine lui-même, ont toujours vécu de larcins et de quêtes diverses, défendant au péril de leur vie ce bateau qu’ils aimaient tant… Il n’y avait aucune femme dans l’équipage, jusqu’au jour où il décide de voler le plus riche commerçant de la capitale. En passant par les cachots de l’immense demeure, Felix et Joe ont rencontré une jeune femme, enfermée… Elle avait l’air jeune, pas plus de seize ou dix-sept ans. Plus tard… Elle leur a révélé la raison de son emprisonnement… Anna prétendait être la réincarnation de Calypso, déesse de l'océan dans l'ancien monde, avant la fracture. C'est pour sorcellerie qu'elle a été enfermée dans ce vieux cachot. En écoutant ce récit, les pirates ont immédiatement pensé à une prophétie : Accueillez ce qui dans l'écume est caché, ainsi l'ancien monde prospérera.

Hak Kun jette un coup d’œil à son colocataire qui semble l’écouter avec attention. Il ne peut s’empêcher de sourire. Il doit reconnaître qu’il adore raconter des histoires. Il le fait aussi avec Soo Bin quand elle le lui demande, apparemment ça l’aide à s’endormir...