Un kit de branchies. Beomho se dit qu’il a franchi un cap de l’humiliation, si la jeune mère décide de blaguer pour rattraper le coup. Enfin, ses amis font la même chose. Mais on ne parle pas d’étudiants de son âge qui laissent la moitié de leur cerveau sur un table d’amphithéatre mais bien d’une maman active qui a certainement quelques années de plus que lui. « Hm, oui mais personnellement j’ai jamais trouvé. Même sur Amazon. » - oui parce qu’il faut bien répondre quelque chose, ok. C’est la base des conversations. C’est ainsi qu’on apprend que les gens sont plus fans d’Harry Potter que de Némo. « Je comprends… Les moldus c’est pas ce qu’il y a de plus intéressant à la longue. ». Ce serait presque une remarque de mange-mort s’il était lui-même pas moldus, mais bref. Il sourit. Il ouvre la bouche puis la referme. Est-ce qu’il était à deux doigts de proposer à Madame Yang si elle voulait en tester un ? Oui. Encore des skills en communication manquants à priori. Cette fois, il se retient – mais pas pour longtemps, malheureusement ? ou heureusement. Grande question. C’est vrai qu’il n’a jamais vu Lei en compagnie d’une femme âgé ou d’un homme âgé d’ailleurs – ils doivent habiter loin. Et comme il n’a jamais vu monsieur Yang dans le paysage Beomho se dit qu’il ne verra pas non les grands-parents paternels du petit. Sauf accident tragique, il suppose. Beomho se détend légèrement – la jeune mère l’aide à passer outre ses lacunes avec les adultes. « C’était vraiment un grand honneur, madame. Un moment incroyable. » - et s’il rentre de le jeu humoristique de la jeune maman, il n’en pense pas moins du petit ours toujours focalisé sur son puzzle. « Jusqu’à ce qu’il commence son puzzle, je crois qu’il m’a oublié à ce moment-là. » ajoute-t-il de façon un peu dramatique, un regard triste posé sur le garçon. Sa concentration est impressionnante. Ne voulant détacher l’enfant de son puzzle, Beomho se doit de trouver quelque chose pour occuper sa maman – au risque de vivre une situation gênante d’ « attente » entre eux deux. Cette fois, l’étudiant ne parvient pas à retenir la proposition du puzzle, bien qu’il tente de se rattraper au plus vite. Heureusement, la question ne semble pas faire fuir la jolie mère de famille. « Je crois pas que l’attrait et le talent en puzzle soient liés avec les résultats scolaires. Cela fait appel principalement à la patience et à la visualisation de l’espace à mon sens. Comme les jeux de cartographie. ». Une conversation entre adultes ou la rédaction d’un manuel pour les étudiants en science de l’éducation ? Personne ne peut dire. Même Beomho. Il y a juste des trucs comme ça qui le pousse à réagir, à partager son opinion de professionnel en puissance. « Ah pardon. Je dois vous ennuyer avec mes discours. » - puis bon, un étudiant sans enfant qui donne des leçons d’éducation à une mère avec un petit garçon très avancé pour son âge… Beomho a connu mieux pour se faire bien voir. Il coupe le fil de ses pensés ainsi que le contact visuel, à la recherche d’un puzzle pour la jeune femme. « J’ai ce puzzle 1000 pièces que j’ai acheté l’an dernier, j’y ai pas encore touché si vous voulez ? » dit-il en attrapant un puzzle oublié sous le tas de jeux pour enfant. Un magnifique puzzle botanique, un herbier coloré qu’il n’a jamais pris le temps d’assembler. Dommage – mais d’un côté, Beomho ne sait pas trop où il pourrait l’afficher une fois celui-ci achevé. Ses murs sont déjà bien encombrés.  « Je ne sais pas si vous aurez le temps de le finir par contre… Vous pourrez le ramener chez vous ou je le mettrais de côté… ici. » - oui, où quelque part par là. Dans le vague qu’indique sa main, sur une des surfaces absolument pas libres de son appartement. Il pourra bien faire un peu de place pour le puzzle de Madame Yang – il ne sait pas où mais il trouvera. Surement. « Enfin, quelque part là. ». Hm hm, l’art de la précision c’est certain. C’est avec grande joie qu’il oublie cet instant de gêne et de solitude, reconcentrant son énergie sur Lei. Le petit brun est visiblement heureux de voir ses parents – enfin, non sa mère et son voisin – se joindre à lui.

« Si vous ne cherchez que sur Amazon, ça ne m’étonne pas. Le chemin de traverse est quand même plus approprié pour ce genre de shopping. » est-ce qu’elle le taquine ? Est-ce qu’elle plaisante ? Ou est-ce qu’elle préfère simplement passer pour la folle de l’immeuble qui fait vraiment ses courses dans ce genre d’endroits ?
Disons qu’elle a Lei. Et qu’elle a pris l’habitude d’essayer de le faire rêver pour les moments qu’elle passe avec lui.
« Bon après y’a bien Wizzardzon mais le site a dû fermer l’année dernière, trop de hibous égarés. » enfin là, ton jeune public est concentré ailleurs Yulian. Et celui qui te fait face n’est plus un enfant.
Ok. Mais Lei serait rudement content si elle lui proposait de l’adopter. Et entre grand-frère adoptif, ou nounou, on sait lequel est le mieux des deux.
Celui qui est rémunéré ?
Erreur ! Grossière erreur !

Mais puisqu’elle a le talent de se faire féliciter pour ses manquements, après tout, pourquoi pas ?
« Je m’en doute bien. Vous savez, Lei est un enfant très demandé mais je suis convaincue que votre rencontre a eu un sens particulier pour lui. » est-ce qu’on pouvait en terminer là et récupérer son enfant pour rentrer à la maison.
Ô riche idée, très riche l’idée.
Sauf que, dans ce cas précis aussi, le consentement a de l’importance et la chair de sa chair, le sang de sang, ne semble pas très porté sur le volontariat de retour maison.

Celui dit, ça lui permet de deviner que son fils doit très bien s’entendre avec le voisin « Est-ce que vous insinuez que je risque de vivre une grande déception dans les minutes à venir ? » est-ce qu’on peut arrêter de le taquiner « J’espère que vous serez présent pour moi si jamais j’apprends que mes rêves sont brisés. » ses rêves de ? Faire des puzzle.
Allez comprendre. Mais il sera de 1000 pièces à priori.
1000 pièces, c’est un peu long.
La politesse veut qu’elle réponde non pour ne pas squatter trop longtemps chez lui.
Et si elle sourit, manifestement attendri par l’attitude du voisin, elle n’a pas le temps de prononcer le moindre mot que Lei s’est redressé et dire sur la manche de son nouveau super copain. Et oui, faire un puzzle à côté, c’est ok. Un de 1000 pièces, sans lui… ça l’est moins. « T’as vraiment des puzzles de 1000 pièces ? » et oui, dans son monde, sauf quand il entend des mots magiques… c’est ça les gosses « Tu crois que j’arriverais à le faire moi aussi ? » évidemment qu’il arriverait à le faire. Qu’est-ce qu’il ne savait pas faire son fils ? « J’ai presque fini le mien, on peut le faire maintenant. Maman tu restes, tu peux nous aider à chercher tous les coins ! » et il a même prévu un plan d’attaque. « Trésor, ton nouvel ami veut peut-être se reposer. Son puzzle ne va pas s’envoler sauf s’il lui lance un sort de lévitation. » au moins, elle lui offre sa porte de sortie. C’est le moins qu’elle puisse faire après son héroïque sauvetage du jour.

Harry Potter ; c’est d’un âge un peu plus avancé que les univers dont il a l’habitude de discuter avec ses petits. Ses petits – les petits qu’il garde ; on se comprend. Quoique dans quelques années, Lei sera prêt à absorber le premier volume d’un œil adapté – peut-être plus vite que les autres enfants de son âge d’ailleurs. Ou peut-être que madame Yang l’a déjà initié. Toujours est-il que Beomho se retrouve plus facilement dans ce genre d’échanges amusants que dans ceux qui animent les parents d’élèves à la sortie de la maternelle où il fait son apprentissage. « Il faut dire que le dressage des hibous a perdu en qualité ces dernières années, même les simples courriers ont du mal à arriver à destination. » ajoute-t-il d’air un peu plus sérieux. Intérieurement, il remercie la jeune maman de réussir à le mettre à l’aise ainsi. Avec la concentration du petit ours sur son puzzle, le moment aurait pu très vite devenir long – gênant – oppressant et il en passe ; heureusement madame Yang semble être quelqu’un de sociable et qui s’adapte facilement à son public. Beomho ne serait pas étonné que Lei tienne beaucoup de sa maman. « Je ne sais pas si on peut réellement parler de rencontre… Il est venu à moi… Enfin on s’est croisé quelques fois dans les couloirs, mais j’étais très étonné qu’il me fasse confiance au point de venir ici. J’ai du lui faire bonne impression ! » - un fait que l’étudiant est très heureux de constater.  Gagner la confiance d’un enfant ainsi, c’est un peu comme gagner la confiance d’un chat sauvage ou d’un lapin peureux. Une victoire. Une fierté. Ou alors Lei a un odorat très prononcé pour les jeux et les puzzles – pas impossible vu son appétence et son talent évident pour ces derniers. Beomho ne peut qu’espérer que sa mère a les mêmes passions – car il n’a pas vraiment mieux à proposer. « Euh non c’est juste très long 1000 pièces… » ; non pas qu’il pense que la jeune femme s’en sortira pas. Après il ne connait pas la difficulté du puzzle, il est encore dans son emballage pour une bonne raison. Le fait qu’il soit 1000 pièces. « Bien sûr ! Enfin je pourrais vous aider, hm comme je peux… » ; disons qu’il est plus habitué aux puzzles 10 pièces ou 50 pièces qu’aux 1000 pièces mais cela ne peut pas être siiiiiii différent. Justement plus long et probablement bien plus chiant à finir mais il ne peut pas dire ça à Madame Yang si elle lui demande son soutien. Il fera de son mieux, comme avec les enfants, il se le promet. En parlant d’enfant, les mots puzzle et pièces semblent réveiller un certain ours qui relève le nez de son puzzle. Le silla regrette un peu d’avoir osé prononcer ces mots. « Euh oui je suppose mais Lei, c’est beaucoup tu sais 1000 pièces… » - cela tombe dans une sourde oreille qui propose déjà à sa maman une stratégie pour arriver au bout de toutes ces pièces. Beomho ouvre et ferme la bouche réfléchissant à comment raisonner le garçon. Heureusement, sa maman semble bien connaître les ficelles sur lesquels tirer pour s’en sortir. Le silla saute sur la perche tendue par Madame Yang. « Oui oui tu peux revenir le faire une prochaine fois, ou vous pouvez l’emmener à la maison pour le faire ta maman et toi. » ; un autre 10 pièces pourquoi pas, là ils seraient encore partis pour plusieurs heures, voire plusieurs jours. « Ta maman doit être fatiguée aussi, elle vient juste de rentrer du travail tu sais… Et je pense qu’il va bientôt être l’heure qu’on aille tous se coucher non ? Ce serait dommage de commencer et de devoir s’arrêter aussi vite non ? »  - que d’excuses absolument et incroyablement valables. Beomho est pas peu fier d’avoir trouvé un tel argumentaire pour que Lei lâche le morceau. Pas qu’il veuille virer Lei et sa mère de chez lui – mais il n’a pas envie de forcer Madame Yang a se lancer dans un puzzle pour passer le temps alors qu’elle pourrait se poser chez elle. Surtout après un tel instant de panique autour de la garde de son fils.