Plus le temps passe, plus tu te dis que tu aurais mieux fait de ne pas venir. Ha Rin prend un peu trop de plaisir à te malmener. Non, en fait elle prend trop de plaisir à retourner contre toi les faiblesses que tu lui as laissé entrevoir. Ce n’est clairement pas un sentiment agréable et tu n’as pas les armes pour te défendre. Tu pousses un soupir avant de reprendre une gorgée de ton verre avant de te prendre le front dans une main. Oui tu es soudain en train de mieux comprendre pourquoi tous les gens au labo se moquent quand tu vas faire cour. Parce que oui, tu avais remarqué que tu avais beaucoup plus d’étudiantes que d’étudiant, mais de là à penser que c’était à cause de toi… Non mais sérieusement c’est un peu ton monde qui s’écroule en quelques instants, tu pousses un soupir avant de parler, résigner. ”Je ne pense qu’un professeur devrait attirer des élèves par ce moyen-là. Je dois avouer que c’est un peu… Humiliant.” Tu soupires de nouveau, noyant ce dernier signe de faiblesse dans une nouvelle gorgée de poison. ”Décidément cette soirée est de pire en pire, j’aurais mieux fait de ne pas venir.”

Forcément, il faut qu’elle gratte le sujet… Sensible qu’est Rhea. Décidément cette femme se plaît à torturer les autres. Ce n’est pas professeur d’art qu’elle aurait dû être mais responsable des interrogatoires. Tu poses ton verre, le regard dans le vide, clairement tu souhaites éviter de croiser son regard à tout prix. ”Qu’elle me plaise où pas n’est pas le sujet. C’est inapproprié et une question de crédibilité. Je suis son responsable de thèse, si jamais il se passait quelque chose ses travaux ne seraient jamais pris au sérieux.” Tu reprends une gorgée, la dernière de ton verre, avant de te tourner vers ta consœur. ”En plus je ne crois pas qu’être avec quelqu’un qui passe sa vie à vous contredire soit une bonne idée pour garder ça secret non? En plus ce n’est pas dans mes plans d’être le centre de genre de rumeur. Je n’ai pas le temps pour ça, on en attend déjà bien assez de moi.” Tu ris doucement, tu te dis naïvement que si tu lui donnes ce qu’elle veut, peut être que tu vas réussir à lui faire lâcher l’affaire.

C’est peut-être l’alcool qui commence de faire faire des idioties, mais tu te rapproches un peu d’elle. Un sourire en coin étire tes lèvres, après tout toi aussi tu peux jouer à ça. Enfin, un peu. ”Dit moi, tu aimes bien me faire parler de mes sombres secrets. Si on parlait un peu de toi Madame la prof délurée.” Tu ris de nouveau alors que tu te recules, observant Ha Rin en riant presque d’avance. ”Je me demande bien quel genre de chose quelqu’un comme toi peu bien cacher? Je suis presque envieux de ne pas être comme toi.” Oui, parce que tout serait beaucoup plus facile. Enfin, souvent, si tu n’avais pas autant de retenu.

C’est humiliant de savoir finalement qu’on plaît ? Je ne l’aurais pas cru possible. Si nous parlons du Doc, il est séduisant. Il a un charme à couper le souffle, on ne peut pas ignorer cette beauté. On peut clairement l’imaginer dans des costumes comme un membre de la mafia avec une telle assurance ou dans un uniforme qui pourrait le rendre encore plus redoutable. Il possède un charisme dont il n’a pas conscience. Ce ne sont pas uniquement les jeunes demoiselles qui voient ça, mais bien toute la gente féminine. Je le vois. Certes, son manque de confiance et d’assurance peut faire ralentir plus d’une, mais pour les femmes qui adorent saisir le taureau par les cornes ; il est à croquer ! Donc savoir que ton cours plaît à plus d’une, d’où est le problème ? Il devrait se sentir honoré d’avoir davantage des femmes scientifiques. « En quoi c’est humiliant de savoir que tu es beau ? Il y a de quoi à être fier ! Sors ton beau plumage pour te pavaner, mon beau petit paon ! » Pourquoi s’enivrer pour si peu ? Je voudrais bien que ma classe soit remplie par ma beauté et non par ma folie. « Mais non, mais non. Il faut voir le bon côté chose ; tu as moi comme nouvelle amie. » Je lève mon verre pour trinquer à son honneur. Est-ce une bonne nouvelle d’être mon ami ou pas ? Bonne question.

Le timide Don Juan. C’est dommage qu’il n’ait pas conscience des personnes ou de belles personnes à sa portée. Il pourrait tellement être comblé si ce n’est pas grâce à sa maladresse, au moins en étant social, il pourra rencontrer quelqu’un aussi formidable. Cela dit, il n’a pas tort. Je bois un peu en écoutant son explication. Si on apprend sa relation avec son assistante, les deux sont discrédités. Je hoche la tête pour lui montrer que je comprends totalement. Toutefois, je m’en moque un peu. Nous avons une vie à vivre et pourquoi crier sur tous les toits sur cette relation secrète ? « Tu vas être surpris d’apprendre qu’il y a des personnes qui aiment ça se faire contredire. » Chaque être humain est unique et chacun possède son âme-sœur qui est faite l’un pour l’autre. En tout cas, la personne qui m’a comme âme-sœur, j’espère qu’elle est saine d’esprit.

Buvant le restant de mon verre tout en le déposant par la suite, on s’approche de mon visage. L’idée de l’embrasser pour le surprendre est bien là, mais je crains que je l’aie suffisamment traumatisé pour ce soir. Bon, en vrai, j’essaie de me retenir. C’est tentant. Une belle opportunité, mais non. De toute façon, sa personnalité a changé du tout au tout. Monsieur est alcoolisé ? Déjà ? Dommage, je tiens bien l’alcool, je suis capable de tenir au moins deux autres verres. En revanche, la tournure devient de plus en plus intéressante. Autant rester consciente afin de le taquiner un peu à notre prochaine rencontre. Je fais signe au barman de m’offrir un autre verre. Quant à Doc ? Un soda pour le faire redescendre sur terre pourra l’aider. « Tu te demandes ce que je cache ? Je suis toute ouïe à tes hypothèses. » Être folle n’est parfois pas un cadeau, mais on s’y fait et on croque à la vie. « Tu feras quoi si tu es comme moi ? » Lui demandais-je avec curiosité.