Je sais qu'une simple boutade ne redonnera pas le sourire à mon amie d'enfance. Après avoir entendu cette rumeur à la radio, et après avoir vu ce qu'elle a pu voir, il est difficile d'oublier, surtout en si peu de temps. Toutefois, je ne pense pas non plus perdre mon temps. Je suppose que mes efforts lui réchaufferont un peu le cœur tout comme il est en train de réchauffer le mien. Je suis certainement plus serein qu'elle mais je ne risque pas d'en mener large si des mauvaises nouvelles finissent par tomber. J'ai beau avoir quitté l'université, je reste relativement proche de beaucoup d'étudiants. Enfin proche, façon de parler. Après tout, je ne suis pas certain d'avoir une foule d'amis, du moins qui respirent la sincérité. Mais, ce n'est pas moi qui devrais me plaindre à ce sujet. J'agis souvent comme un hypocrite. Bref. J'esquisse un sourire et continue de jouer à mon petit numéro. « Ce n'est pas grave. Le talent fait que je suis toujours au top. » Je lui fais un clin d'oeil avant de passer aux choses sérieuses dés que je me retrouve devant Ha Ni. Je dois soigner ses coupures même si cela ne lui semble pas grand-chose. Il est vrai que ce genre d'incidents peut arriver quotidiennement, surtout pour les personnes maladroites. Toutefois, je trouve bon de lui dire: « Sûrement mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire. » Je fronce doucement les sourcils. Je sais très bien ce que je suis en train de faire. Je tente de la pousser à faire plus attention à elle, de changer un peu de sujet de conversation pour ne pas répondre au fond du problème. On ne peut pas s'imaginer ce qu'il se passe là-bas. Bien sûr, avoir une pensée pour eux est normale dans de telles situations. Enfin, je suppose que ça l'est mais ne rien savoir peut nous faire devenir fou. Enfin, Ha Ni est loin d'être stupide et ma façon d'interpréter ses mots n'est peut-être pas la bonne. Inspectant du regard les moindres de ses égratignures présentes sur ses bras, je commence à verser le désinfectant sur une des compresses avant de poser cette dernière sur la blessure qui me semble la plus grave. « Désolé, ça risque de piquer un peu. » Mais encore une fois, Ha Ni risque de me dire que c'est rien comparé à la douleur que peuvent ressentir les gens à quelques kilomètres de nous. Or, je comprends très vite que je n'ai pas fait le bon pronostic. « Je l'espère aussi... » Un silence s'instaure ensuite entre nous, et ce, pendant plusieurs secondes durant lesquelles je m'applique à la soigner. Cependant, je finis par briser ce silence, reprenant la parole d'un murmure. « Tu sais... » Je relève finalement le menton quand je viens de finir de désinfecter l'un de ses bras et tente alors d'expliquer ma prise de parole. « Je ne sais pas comment tu fais. Depuis tout à l'heure, tu passes par toutes les émotions alors que je crois que je ne parviens pas à réaliser ce qu'il se passe. » J'attrape une nouvelle compresse. « C'est sûrement parce que je n'ai rien vu et que je ne suis pas blessé. J'étais dehors quand j'ai vu l'émeute commencer. » Je mordille ma lèvre inférieure et plante mon regard dans le sien. « Dans notre tête, ce genre de choses arrive toujours aux autres. » Je marque une courte pause et échappe un soupir. « Je me demande pourquoi Yonsei a été visé. » Il se passe tellement de choses dans la faculté mais est-ce que les membres d'une fraternité auraient exprimé leur mécontentement de cette façon ? Non, il faudrait que l'université accueille de grands malades dans ce cas.