Outfit + Mana, il aime jouer au grand et pourtant, il n'en reste pas moins qu'un gosse… Un enfant à la moue intriguée, testant encore le monde et cherchant à repousser ses propres limites. Si Yo Han avait été là, il lui aurait dit que c'était une idée complètement stupide. Que doctissimo était le wikipédia des dissertations ; un site à éviter pour toute référence. Mais personne ne lui avait donné d'avertissement, et Mana s'était bercé naïvement de conviction. Gonflant le torse pour se donner du courage et louant des films qu'il n'aurait probablement jamais du voir.

Les jaquettes dvd jonchant au sol telles des cadavres éventrés par sa curiosité, il aurait probablement pu choisir un autre scénario pour terminer sa soirée. Une comédie, un truc qui l'aurait fait marrer. Le visage collé à l'écran, hypnotisé par les images successives, son coeur s'était accroché à l'évolution des événements. Suivant la dégradation de l'ambiance et ses battements s'y calquant. Il s'était emparé de la couverture, assis à même le sol et recouvrant sa tignasse complètement décoiffée. Son arme, son bouclier. Ses doigts s'accrochant aux pans, parfois trop. Il faisait moins le fier, le Mana. Bien moins fier que lorsqu'il avait posé "Le Cercle" sur le comptoir du disquaire. Il regrettait… Oh ce qu'il regrettait. Il aurait du lire le résumé au moins. Qui pouvait bien inventer des histoires pareilles franchement ! Des malades.  Des sadiques. Des monstres, donnant naissance à des monstres. Une monstruosité. Un cercle de...oh. Son coeur s'arrêta. Il le jurerait, qu'il s'est arrêté de battre ! Même si Yo Han ne le croirait pas. Le courageux Mana se barra vite fait en courant. Pauvre gosse effrayé ayant échappé à toute surveillance, allait se faire emmener par une fille aux longs cheveux qui semblaient apprécier attirer les gens dans son puits. Pour les dévorer ?! Il voulait même pas l'imaginer. Il voulait pas mourir. Pitié, le laissez pas mourir ce soir. Il pouvait pas laisser son petit frère. Il pouvait pas… Il pouvait pas mourir sans avouer ses sentiments à Yohan. Il pouvait pas… Il voulait pas mourir. Pourquoi Yo Han était pas là, pourquoi il avait écouté ses gens sur doctissimo...Pourquoi on lui avait pas dit de faire ça progressivement ?! Il attrapa son téléphone, sans se soucier de l'heure. Sans réfléchir à quoi que ce soit, trop perturbé pour être cohérent. Yo Han, c'était son sauveur. Son meilleur pote, il le savait qu'il ne le laisserait jamais mourir lui. Son visage s'illumina enfin… Et se décomposa aussi rapidement qu'il lui rappela de pas se faire bouffer entre temps. Sadique. Malade. Monstre. Créateur de films d'horreur. Il se recroquevilla dans son coin, dans sa couverture et usa de son téléphone pour faire lampe de poche. Il bougea pas, trop attentif aux moindres bruits et sursautant pour un rien.

Son coeur s'arrêta une seconde fois, en entendant les clés dans la serrure. Il aurait du savoir que ça ne pouvait être que lui, mais son cerveau sembla lui aussi s'être arrêté. Brandissant l'écran lumineux comme une quelconque arme, il se protégea de son autre bras.  « ME PRENDS PAS AVEC TOI STP STP STP JE - JE SAIS PAS NAGER J'AI UNE FAMILLE DES ENFANTS ET YOHAN STP LAISSE MOI J'AI PAS PEUR DE TOI »

Outfit + C’était vraiment un con. Un ptit con même, y avait pas à dire. Non mais sérieusement, qui était assez idiot pour aller chercher conseil sur doctissimo ?! Et ce genre de conseil stupide qui plus est ! Quoi, la fille était sortie de la télé ? Bah voyons, et en rentrant, je le retrouverais noyé au fond de la baignoire ?! Non mais et puis quoi encore… Aish ! J’avais horreur qu’on me réveille. Mon sommeil était sacré, vu le peu d’heures auxquelles je dormais en principe. Mais là, pour une fois que je pouvais avoir une bonne nuit de sommeil… Et bah non ! J’aurais du lui raccrocher au nez, ouais. Ça lui aurait fait les pieds à cet imbécile de se prendre pour un grand. Histoire qu’il flippe bien toute la nuit, et que je puisse me rendormir derechef. Sauf que non, je l’avais pas fait. Premièrement parce qu’il m’aurait harcelé toute la nuit, et m’aurait sûrement retrouvé même si j’avais enlevé la batterie de mon portable, et qu’il ne savait nullement où j’étais. Et deuxièmement… Le deuxièmement restait flou. Parce que c’était lui ? Ouais, je me serais assurément pas levé et rhabillé pour un autre. Mais je savais pas trop non plus pourquoi je le faisais pour lui. Pourquoi il arrivait à radoucir mon caractère de cochon. C’était inhabituel. Étrange même. Mais on s’y habituait. Après tout, c’était un vrai pot de colle, si j’avais du le détester, ma vie en serait devenue invivable, non ? Ouais… C’était sûrement ça. Pas besoin de chercher plus loin.

Cherchant à tâtons mes fringues dans le noir, je m’habillais à la va-vite en baillant à m’en décrocher la mâchoire. Un jour, je lui ferais la peau à ce gosse ! Moi qui étais d’ordinaire si propre et maniaque, même lorsqu’il s’agissait de mes fringues, là, je m’en fichais complètement de boutonner lundi avec mardi. J’avais pas que ça à faire. Je passais négligemment une main dans mes cheveux, les décoiffant au final plus qu’autre chose avant d’attraper mon portable et mes clés de voiture. Il avait vécu comment jusqu’à maintenant sans moi ? C’était à se le demander. Il regardait ses films d’horreur comment ? Et qui rattrapait ses conneries ? Soupirant, j’allumais mon engin avant de démarrer. Au final, je voulais pas savoir. Être le remplaçant de quelqu’un était une idée bien trop désagréable à mon goût, alors je préférais ne pas y songer. Pour l’instant, je devais arriver au dortoir. Parce que vu la connerie que j’avais lâché, il devait limite m’attendre en chialant. J’y pouvais rien, j’avais pas pu résister… Et rien qu’à l’idée de sa tête en me voyant finalement arriver, un sourire à la fois sadique et satisfait s’épanouit sur mes lèvres. Bah quoi ? Il m’avait réveillé, je pouvais bien m’amuser un peu, non ? Finalement arrivé à destination, je me servais de la lampe torche de mon téléphone pour mettre les clés dans la serrure et les faire tourner. Sauf que le spectacle qui m’attendait lorsque j’ouvris la porte… Était encore pire que ce à quoi je m’attendais. D’abord aveuglé par son téléphone, éteignant tout aussi vite le mien, je restais un instant ébloui avant que ses paroles, ou plutôt ses cris, ne me frappent. Quoi ? Le… Prendre ? Nager ?? Des enfants ?! Mes yeux s’écarquillèrent avant de se refermer, et je me massais le crâne, déjà las. Un regard blasé peignit de nouveau mon minois tandis que je claquais la porte derrière moi et m’avançais vers lui, lentement. Il avait pas peur ? Ah ouais ? C’est ce qu’on allait voir. J’envoyais valser mes baskets d’un coup de pied, n’allumais pas la lumière et me dirigeais lentement vers lui avant de m’accroupir face à lui, ou du moins, le tas qu’il semblait former avec la couette. Ses yeux semblaient fermés et son corps tremblait tandis qu’il brandissait toujours son téléphone pour je ne sais quel raison dans la direction où je me trouvais tantôt. Un sourire sadique s’épanouit alors sur mes lèvres tandis que je me penchais, enlevais lentement la couette de sa tête et lui murmurais à l’oreille. « Comment ça tu m’as moi ? » Oh non, cette phrase étrange n’était pas partie dans l’oreille d’un sourd. Bien qu’en soit, ce soit sûrement l’une de ses élucubrations, comme ses fameux gosses fantômes.

Outfit + Mana était peut-être qu'un putain de gosse, il avait toujours su compter sur lui-même. Il avait été le grand frère, un temps. Il avait su se tirer de la merde. Il avait su se hisser jusqu'ici, à Yonsei. Il a toujours réussi à s'en sortir. Et son monde avait changé… Son monde avait basculé et ses repères ont été complètement perturbés. Par lui. Il avait rencontré Yo Han. Un mec qu'il appelait à la rescousse, un mec qu'il collait désormais tout le temps. Attaché, entiché. Un mec inaccessible, devenu son repère, à qui il avait donné sa confiance. Un mec qui ne remplaçait personne. Parce qu'avant, Mana se débrouillait avec ses frères, ils se tiraient ensemble de la même galère. Il avait jamais connu quelqu'un d'aussi fort et aussi stable, avant. Et cette stabilité… Putain ce qu'elle était attirante, pour un gars comme lui. Yo Han était unique, s'il savait. Bien loin de la prétention, de l'arrogance et de l'orgueil qu'il pouvait avoir parfois. Il était unique, face à ses yeux de gamin. De gamin totalement amoureux.

La trouille ? A d'autre. Ok, peut-être un peu, un peu beaucoup. Il tremblait, n'osait pas regarder la mort en face de lui. Certain qu'il allait y passer, certain que son heure avait sonné. Ses bruits n'étaient plus de l'hypothèse, ils étaient bien plus réels. Il n'y avait aucune imagination, c'était bien le bruit de clé, et de la serrure. Et puis des pas. ET PUTAIN C'ETAIT QUOI CA ?! Il sursauta et se mordit presque la lèvre à sang avec ses conneries, son bras tremblant deux fois plus. Il voulait qu'il se pisse dessus ou quoi ?! Il retirerait toutes ses éloges, s'il savait. Son pote, son sauveur… était tout autant un tortionnaire. Il le torturait, et jubilait en plus. Il allait chialer. En sentant la couverture lui glisser des doigts, sa respiration se coupa et il cessa de trembler. Ça y est, c'était la fin. Il n'aura pas eu le temps de dire au revoir. Il allait finir noyé dans un trou. Un trou paumé. Séquestré avec une gamine. Déchiqueté par ses ongles et ses dents. Il reverrait plus jamais la lueur du jour. Il pouvait sentir son souffle proche de son oreille et… et son poing parti tout seul. Instinct de survie. Il voulait pas mourir bon sang, il avait encore des trucs à accomplir ! « DÉGAGE ME TOUCHE PAS » Au son de sa voix, sans même chercher à l'identifier, il ouvrit les yeux, abattant son poing serré contre la mâchoire du futur médecin et les écarquilla ensuite. Yo Han. Il laissa tomber son portable, affolé, ses mains tremblantes cherchant à… Il ne savait pas trop quoi, en fait. Lui prendre le visage ?  Elles restèrent en suspend pourtant. « oh putain Yo Han j'suis désolé je… » Son coeur était en panique, au bord de la crise cardiaque, cognant si rapidement contre sa cage thoracique qu'il avait l'impression d'exploser. Et c'était lui le petit con hein ? Voila ce qu'il y gagnait, à le faire autant flipper : son poing dans sa face ! Mais sa crainte de l'avoir blessé ne dura que quelques secondes, se rappelant rapidement que leurs vies étaient en danger… Du moins la sienne, et lui sauta dessus, l'ayant attendu depuis bien trop longtemps. Ses bras s'enroulèrent autour de lui, ses jambes cherchant tout autant à s'accrocher. A son pilier. A son chasseur de fantômes et de mauvaises esprits. Bien qu'à l'instant, il ressemblait plus à un bambou auquel lui, le koala, cherchait désespérément à trouver adhérence. « T'es enfin là sérieux j'ai cru que t'arriverai jamais… ton voyage s'est bien passé ? » Ses yeux se détachèrent aussi rapidement de lui, scrutant la pièce, le corps crispé, l'une de ses mains dans ses cheveux les décoiffant d'autant plus. Il ne se préoccupait pas de sa réponse, à croire que son cerveau s'était rebranché une fraction de seconde, le temps de poser une question par simple politesse alors que… Il s'en fichait. Pas de Yohan, évidemment.

Outfit + J’aurais pas du me jouer de lui, et je le savais. Mais depuis quand j’écoutais ce qu’il fallait faire ? J’étais loin d’être un cancre, certes, mais niveau relations humaines, j’avais rarement prit les bons choix. Parce que je le connaissais pas, le bon choix. Parce que j’avais pas non plus envie de me prendre la tête. Parce que j’étais comme j’étais tout simplement, et que ceux à qui ça plaisait pas, ils n’avaient qu’à partir, je les retiendrais pas. J’avais pas que ça à faire de passer pour l’ami super cool, ou le bon Samaritain. Ça m’intéressait même pas en fait. J’étais peut être un ptit con, mais moi au moins, je l’assumais. Parce que ce que j’haïssais le plus, c’était les gens faux. Et les mensonges. C’était d’ailleurs sûrement les deux choses que je serais le moins capable de pardonner. Ou que je ne voudrais pas pardonner. J’avais tout simplement pas besoin de gens comme ça à mes cotés. Et c’était parfait comme ça.

Ouais, j’avais déjà abusé au téléphone lorsque j’avais renchéri à sa panique. Et là encore, j’abusais de pas lui signaler tout de suite que c’était moi, rien que pour le plaisir de le voir crier. Mais je m’en foutais en fait. Je pensais pas vraiment aux conséquences, là, tout de suite. Juste qu’il m’avait réveillé, et que désormais, il se trouvait à ma merci. Comment résister ? Tout bonnement impossible. Mon sourire s’agrandit donc au fur et à mesure que je me rapprochais, pour arriver à son apogée lorsque je lui murmurais à l’oreille. Sans penser une seconde que la suite des évènements prendrait une telle tournure. Sans rien comprendre, je me retrouvais d’un seul coup sur le cul, tandis qu’une douleur lancinante se propageait dans ma mâchoire. J’ouvrais de grands yeux ahuris, l’entendant gueuler sans vraiment écouter avant d'apercevoir sa tête d’abruti grâce à la lampe torche de son téléphone. Il m’avait frappé ce couillon. Comme ça. Sans réfléchir. Il m’avait enfoncé son poing dans la face. Un petit rire sans joie s’échappa de mes lèvres tandis que je le regardais se démener, tentant de s’excuser mais se rétractant au moment de me toucher. Sage décision… D’un revers de main, j’essuyais le liquide rouge sang qui coulait du coin de ma lèvre, un goût de fer se rependant dans ma bouche. C’est qu’il m’avait pas loupé en plus, ce con ! Il allait le payer… Je me levais et me déplaçais, et c’était comme ça qu’il me remerciait ?! Ah ouais ? Second rire ironique. Ce gamin n’en manquait décidément pas une. J’allais le buter. Clairement. Sauf que je n’en eu pas le temps. Parce qu’au moment où j’allais l’attraper par le col pour lui faire regretter son geste, de quelque manière que ce soit, un poids mort s'abattit sur moi, s’enroulant autour de ma taille, massacrant ma chevelure et se plaignant de l’attente. Non mais celui-là… Je bougeais un peu trop brusquement, énervé, et tout ce que je réussis à faire, c’est m’étouffer à moitié avec son bras. Mais quelle sangsue, c’est comme ça qu’il comptait se faire pardonner ?! Si j’avais fait bonne route ?? « A ton avis abru… » Je ne finissais cependant pas ma phrase. Parce que malgré mon énervement. Malgré même mon envie de lui faire regretter d’être né, je pouvais pas lui crier dessus. Je pouvais tout bonnement pas le frapper alors qu’il m’agrippait comme s’il allait crever, tremblant comme une feuille. Alors je soupirais, désabusé, tandis que ma colère retombait petit à petit, tentant de me contrôler. Ce gosse était un cas, on le changerait pas. Alors j’enlevais sa main de mes cheveux, et venais la positionner le long de mon cou pour qu’elle aille rejoindre l’autre, tandis que je passais mes bras autour de sa taille, pour l’attirer à moi plus en douceur. L’une de mes mains vint se perdre dans ses cheveux, que j’ébouriffais un instant, plus affectueusement qu’autre chose, avant de lui caresser la tête et de la faire rejoindre le creux de mon cou. Second soupir. « Calme toi, personne ne va sortir de cette télé idiot. Il n’y a que nous dans cette chambre. » C’était d’une telle évidence… Pourquoi j’avais même besoin de le dire ? Et pourquoi j’étais entrain de le câliner alors qu’il m’avait frappé ? Invraisemblable. Et pourtant réel. Une réalité sur laquelle je ne pourrais mettre les mots. « Tout va bien… Je suis la. » C’était con comme phrase. Et clairement pas le genre de trucs que je dirais en temps normal. Trop nunuche. Trop fleur bleue. Trop tout quoi. Mais je savais pas quoi dire autrement. Je savais pas comment le calmer. Je voulais tout simplement pas le laisser comme ça. C’était pour ça que je m’étais levé au final, non ? Parce que mon coeur refusait de le laisser seul dans le noir.

Outfit + Ce qu'il pouvait être collant, lorsqu'il s'agissait de Yo Han. Plus collant qu'avec n'importe qui, et pourtant le concerné ne se rendait compte de rien. Lui qui soulignait si souvent l'évidence des situations, il passait à côté de la plus frappante. Mais cet aveuglement, il ne s'en plaindrait pas, il en tirait profit… Cet aveuglement était confortable, le laissant trouver proximité sans risquer de perdre cette amitié longue de quatre ans. Friendzoné, parce qu'il l'avait bien voulu. Préférant avoir Yo Han partiellement que pas du tout. Puisqu'il était certain qu'à leur rencontre, il n'était que le colocataire un peu chiant et envahissant...Qu'il aurait remballé s'il avait osé avouer quoi que ce soit. Cet aveuglement avait des avantages, et son lot de désavantages. Dans un équilibre, une balance équitable. Ce qui faisait battre son coeur rapidement, lui faisait parfois tout autant souffrir. Au plus le temps passait, au plus ce lien se renforçait… Peut-être qu'il n'aurait pas du s'aventurer jusque là, qu'il aurait du laisser tomber bien avant. Mais le temps avait passé et lui était resté, là, à attendre comme un con. A espérer, à rêver… A rêver, encore. Un putain de rêveur. Un jour il se fera bouffer, par ses rêves.

Il avait besoin de lui. Il aurait pu ne pas l'appeler, il aurait pu. Mais il n'en avait pas envie, il préférait se reposer sur lui. Il préférait être faible avec lui, puisque l'idée qu'il vienne le tirer de là était bien plus séduisante que d'y faire face seul. Et il était venu, il était venu pour lui.  En lui faisant payé de l'avoir réveillé et fait se déplacer mais, il était tout de même venu. L'accueillant de son poing dans la figure… Et par ce geste, il avait l'impression d'avoir causé sa propre mort. Yo Han allait le buter. Trop de gens attentaient à sa vie à l'instant… Mais à choisir, il préférait encore se réfugier contre lui. S'accrocher comme si il allait crever dans la seconde et qu'on tenterait de l'arracher à lui. Il l'avait lui… même si il n'avait pas répondu à sa question. Il n'avait même pas réussi à prendre conscience de ce qu'il avait murmuré, trop paniqué, trop affolé. Il avait juste explosé. Son corps crispé, il le laissa pourtant déloger sa main, difficilement et il écarquilla les yeux en se retrouvant blotti dans le creux de son cou. Sans comprendre pourquoi tout à coup, il se retrouvait comme un enfant cherchant refuge. Il se détendit, son coeur reprenant ses battements rapides pour une toute autre raison. Pourquoi il faisait ça… Pourquoi il faisait toujours ça. Pourquoi il était doux, au moment où il s'y attendait le moins. Il soupira, resserra ses bras...et s'accrochant à sa chemise en sentant ses doigts dans ses cheveux, enfonçant un peu plus son visage dans son cou pour tenter d'y échapper. Qu'il arrête de toucher à ses cheveux, aussi.  En si peu de geste, en si peu de mots, il avait réussi à lui faire totalement oublier ce qu'il foutait il y a à peine dix minutes. Sa trouille et ses tremblements. Il ne voulait plus le lâcher...Comme à chaque fois. Il voulait rester là. Il voulait garder son corps entre ses bras. Dans l'illusion qu'il lui appartenait… Profitant de ses rares moments affectueux comme quelque chose de précieux. Il était là, han ? Putain Yo Han, tais toi…  « si on meurt aujourd'hui, il faut que je te dise… » Il murmura, tout bas, fermant les yeux alors qu'il pouvait sentir son odeur, et ses caresses depuis quelques minutes, n'ayant pas osé parler avant. Un câlin devenu trop long, mais il s'en foutait… Il s'en sortirait toujours, d'un rire un peu gêné et un sourire passe partout. Son coeur se serra, se mordant l'intérieur de la joue. « … c'est moi qui aie remplacé ton shampoing. » Dégonflé. C'était pas aujourd'hui qu'il lui avouerait quoi que ce soit… Peut-être qu'il ne devrait pas, de toute manière. Il soupire et se déloge plus doucement, retirant sa main de ses cheveux avant de faire face à son visage. Du sang… Il avait presque oublié qu'il l'avait frappé. La panique retombée, lui calmé, il grimaça, pourtant de nouveau inquiet. « merde… je suis vraiment désolé Yo Han. T'as mal ? je - tu veux que- je- » Il se tourne, cherchant une solution, fixant la salle de bain, puis la télé, se raccrochant automatiquement à son cou. « haha...hah… hm. Tu veux que j'aille te chercher de quoi te soigner ? » Pitié, ne lui demande pas ça.

Outfit + C’était dans ces moments la que je me rendais compte que Mana, bah… C’était un gamin. Il avait beau faire le fier. L’homme viril. Celui aux cinquante nanas qui se relayaient sur son téléphone comme si elles faisaient la queue… Au fond, il était pas si mature que ça. Il était même loin de l’être. Et ça le rendait chou. Si on avait casé n’importe lequel de ses défauts sur un autre, je l’aurais de suite trouvé chiant ou ennuyant. Mais sur lui… C’était différent. Mana était différent. Ça ne faisait aucun doute, vu la facilité avec laquelle il s’était créé une place dans ma vie au fur et à mesure, jusqu’à en devenir la personne la plus importante. Après ma sœur. Mais c’était déjà énorme. Il avait beau être turbulent, collant, tactile, écrire comme un pied et rire tout le temps, au point de se demander s’il savait faire la tête, au fond, je n’aurais échangé l’un de ses défauts ou l’une de ses qualités pour rien au monde. Parce que c’était bien pour ce cocktail détonnant qu’il formait que j’étais tombé sous son charme. Qu’il s’était fait une place dans mon existence, et était devenu mon meilleur ami. Le seul en qui j’avais une totale confiance. Celui dont j’étais persuadé qu’il ne me cachait rien. Qu’il ne me trahirait jamais.

Alors ouais, il avait beau m’avoir foutu un poing en pleine face, je le câlinais tout de même. Ça aurait été totalement impossible avec un autre. Je l’aurais tué. Sincèrement. Mais encore une fois, c’était Mana. Et je pouvais juste pas m’énerver devant cet homme aux allures d’enfants qui s’accrochait à moi désespérément. Après tout, n’était-ce pas de ma faute ? Je l’avais cherché, je l’avais trouvé… Que j’assume un peu mes conneries. Je me retrouvais donc avec lui au creux de mes bras, à tenter de le rassurer avec des paroles douces qui ne me ressemblaient pas, comme un con. Ma main dans ses cheveux lui fit enfouir un peu plus sa tête dans mon cou, et un frisson m’échappa, cette sensation me chatouillant. Décidément, il ne changerait pas ! Et si son corps sembla se détendre, les battements de son cœur, eux, gardèrent un rythme effréné. Sauf que je savais plus quoi faire pour le rassurer. J’étais pas habitué à consoler les autres, moi… Fallait pas trop m’en demander. Je soupirais alors, tandis qu’il commença une phrase qui eut le don de me faire sourire. Si on mourrait aujourd’hui ? Dis donc, il avait vraiment envie d’y passer lui ! Je ne l’arrêtais cependant pas, curieux de connaître la suite et trouvant la situation… Attendrissante. Mais le blanc se fit, et je m’arrêtais de lui caresser la tête, pensant qu’il y avait un problème, avant de finalement avoir son aveu. Alors c’était ça, sa confession ? « Mon shampoing ? Remplacé ? Comment ça ? Tu me l’as piqué ? » Trop surpris pour que mon cerveau marche correctement, je le regardais à moitié hilare, à moitié choqué, ne sachant trop comment je devrais réagir face à ça. D’habitude, j’aimais pas qu’on touche à mes affaires. Mais la, j’en avais carrément rien à foutre. Je me penchais alors pour venir sniffer ses cheveux avant de le laisser s’éloigner. « Yah, c’est vrai que tu sens mon shampoing ! Tu croyais quoi, que tes cheveux deviendraient aussi doux et brillants que les miens ? C’est pas ça qui changera quelque chose, crois moi… » Et mon sourire s’agrandit, devenant moqueur. Ce que j’adorais le taquiner sur ce sujet… J’y pouvais rien aussi, s’il réagissait pareillement. Parce que même s’ils étaient abîmés, ils n’étaient pas si vilains ses cheveux. Enfin, personnellement, je les aimais plutôt bien… Retombant sur terre avec lui s’inquiétant pour moi, je me rappelais de son acte passé et fronçais les sourcils en me repassant le pouce sur la lèvre. « A ton avis, ça m’a fait du bien ? » Question stupide. Et pourtant, si je lui avais répondu du tac au tac, au fond, je ne lui en voulais déjà plus. Des fois, je passais l’éponge bien trop facilement avec ce blondinet… Il allait pas falloir que ça devienne une habitude ! Et ce dernier qui se raccrochait à moi, de nouveau paniqué… « Ah oui, tu traverserais la pièce dans le noir pour moi, et te risquerais devant la télé ? » J’avais pas pu m’en empêcher. Comme ce sale sourire ne pouvait tout bonnement pas s’effacer de mes lèvres. Mais voila, il tendait trop de perches… Et j’avais toujours eu pour habitude de les attraper au vol. Pourtant, je ne le laissais pas face à sa bêtise. Attrapant ses cuisses, toujours autour de ma taille, je les maintenais fermement avant de me mettre à genoux, puis de me relever, le transportant ainsi jusqu’à la salle de bain, allumant la lumière de l’appart au passage. Je m’assaillais finalement sur la baignoire, et lui faisais passer les jambes de l’autre coté, le maintenant avec une main dans le bas de son dos, tandis que l’autre attrapait la trousse à pharmacie. « Rends toi utile, soigne moi, va ! » Pas que j’avais les mains occupées mais… Si, un peu quand même. Je lui sortais alors le désinfectant et les pansements, et levais la tête vers lui, fermant les yeux, attendant qu’il soigne ma lèvre.

Outfit + Les battements de son coeur, quand avaient-ils réellement commencé à être aussi difficile à contenir ? A partir de quand, il avait commencé à s'affoler en sa présence ? Mana, il disait l'aimer depuis quatre ans. Il disait l'aimer depuis qu'il avait fait sa connaissance, dans ce même dortoir. Depuis qu'il avait croisé son regard, ses yeux et son visage pourtant inexpressif. Il avait pu sentir cette barrière qu'il dressait entre eux, ce mur solide, ses mots induisant le contraire d'une invitation à la discussion. Quelque chose l'avait séduit, ce jour-là. L'infranchissable Yo Han. Le mec qui aurait rebuté tellement de personnes, en les repoussant involontairement. Et cet imbécile de Mana, cet idiot un peu buté, trop attaché… avait vu cela comme une invitation au contraire de bien des gens. Il avait voulu franchir ce mur qu'il avait créé. Il s'était hissé, de la force de ses propres bras, pour faire parti de lui, derrière cette rempart. Sans la briser, sans vouloir le changer. Juste en voulant être à ses côtés, causant la propre perte de son coeur, en se forgeant une place dans le sien, comme un prix à payer. Est-ce qu'il l'avait réellement aimé, sans le connaître ? Avec quelques mots échangés, une présentation un peu maladroite et une situation gênante ? Peut-être. Sans doute. Oui. Il était tombé amoureux, sans le savoir. Le découvrant un peu plus chaque jour. Puisque d'aussi loin qu'il s'en souvienne, ses battements avaient toujours été aussi présents.

Il l'avait appelé, parce que Yohan était bien le seul à effacer aussi rapidement sa peur, et ses émotions. Parce que Yohan était le seul à l'affecter autant. Le seul sur lequel il voulait se reposer totalement. Il lui confierait sa vie. Il lui confierait ses peurs, même les plus ridicules. Il n'avait eu aucune honte à le lui avouer, à demander son aide, face à un écran de télé et son imagination d'enfant. Il était sa personne, son meilleur ami... Et croyait dur comme fer, qu'il s'agissait de son âme soeur, ce mec. Son corps lui criait ses sentiments, pourtant, il était incapable de lui avouer quoi que ce soit. Il se dégonflait à chaque fois, il se contentait de ce qu'ils avaient, de peur de ne plus rien avoir du tout. Alors dans une tentative un peu lâche, il n'avait pas pu la continuer de façon sérieuse. Avouant qu'il avait touché à ses affaires, en guise de dernier aveu. Parce que de tout de tout façon, pour un dernier moment, il ne voudrait pas lui avouer la vérité. Pas pour quelques secondes, ou quelques minutes. Il préférerait rester le Mana qu'il connaissait, sans bouleverser son univers pour quelque chose d'aussi égoïste. Il frissonna, en le sentant enfouir son visage dans ses cheveux, son corps se crispant à nouveau, resserrant ses bras autour de lui avant de se détendre, tentant un rire. Tentant une esquive un peu lâche. Il avait pourtant compris que son shampoing n'était pas le remède miracle à ses cheveux crépus, mais l'idée de porter la même odeur que lui, l'avait peut-être encouragé à continuer. Une ou deux fois. Ou peut-être même trois.  « laisse moi espérer... moi aussi je veux des cheveux doux comme les tiens. » Qu'il n'aurait de toute évidence, jamais. Mais ça lui allait, se contentant de caresser ceux du futur médecin, userait probablement de ce prétexte un jour, si ce n'était pas déjà fait. Pour le toucher, pour le câliner. Pour pouvoir le sentir contre lui. Pour obtenir son attention, partiellement. Si on lui avait dit qu'un jour, Mana frapperait Yohan, il ne l'aurait pas cru. Et en s'en souvenant, il ne put que se sentir coupable, et apeuré de l'avoir mis en colère. Si ça lui avait fait du bien ? Il grimaça. Il était en option sport depuis des années, il tapait pas comme une fille…'parait-il. « désolé Yo Han » Il ne pouvait dire que ça. Ou lui proposer même de le soigner, avant de se rendre compte de la télévision dans sa trajectoire. Plein de bonne volonté, mais pas super courageux non plus. Mais pour lui… Pour YoHan… Il détacha ses bras de son cou, qu'il avait de nouveau noué, pour gonfler son torse d'une plus longue inspiration. « ... EVIDEMMENT. Je risquerai ma vie pour toi, est-ce que tu en doutes ?! Je l'affronterai elle. Je la laisserai m'attirer dans son puits pour que tu te sauves et je-  qu'est-ce que tu ... » Il n'eut pas le temps de finir, ses jambes se resserrant instinctivement à son corps en se sentant soulever.  Il le portait… Il le portait ?! Il était dans ses bras, accroché à son torse, à traverser la pièce. Et son coeur repartit de plus belle, cognant si fort qu'il doutait que contre celui de Yo Han, il n'en ressente pas toutes les pulsations. Mais tant pis… Il ne s'en décrocherait pour rien au monde, se taisant et se laissant faire comme un pantin, jusqu'à se retrouver sur ses genoux à nouveau, sur la baignoire.  Il se détacha lentement, récupérant ses bras, sa main dans le bas de son dos le maintenant alors qu'il fit face à la trousse à pharmacie. Cette proximité allait le tuer, un jour, pour en vouloir à chaque fois un peu plus. Il hocha la tête et baissa les yeux, cherchant de quoi nettoyer la plaie. Il allait jouer au infirmier avec lui maintenant… S'il avait su, peut-être qu'il l'aurait frappé plus tôt. Ouais, non, probablement pas. « c'est drôle, pour une fois c'est toi le patient haha. Enfin, drôle...   » Il se racla la gorge. C'était pas vraiment drôle, vu que c'était de sa faute si ils en étaient là. Il se concentra plutôt sur la plaie à nettoyer, tentant d'oublier qu'il s'agissait surtout de lui. Nettoyant d'abord le sang, puis désinfectant. « dis, je me demandais... » Il leva ses yeux vers les siens, face à son visage, se figeant quelques secondes. Il reposa les bouts de cotons sales en tendant le bras et essuya le contour de sa lèvre de son pouce plus doucement. Regrettant presque son geste. Pourquoi il était aussi beau... Même blessé ? Il baissa enfin sa main, les posant sur ses propres cuisses. « ... tu veux pas qu'on déplace la télé dans le couloir...genre, juste pour cette nuit ? »

Outfit + Des fois, je me demandais si Mana ne s’était pas trompé de corps à la naissance. S’il n’aurait pas du naître femme. C’est vrai quoi, depuis quand un homme était aussi chou ? C’était… Pas normal. Ni d’avoir ce genre de réactions, ni… De réussir à m’attendrir si facilement. J’étais pas quelqu’un de facile. J’avais un caractère de cochon, et j’avais prit l’habitude de murer mes sentiments, aussi bien pour ne pas être blessé que peu affecté quand je passais ma blouse blanche par les horreurs auxquelles je pouvais faire face. Parce que la maladie, ce n’était pas drôle. Et voir par exemple des enfants en fin de vie, c’était une épreuve auquel on ne nous préparait pas. Auquel on ne serait jamais prêt. Mais enfin, ce n’était pas non plus comme si beaucoup de femmes avaient réussi à obtenir ma sympathie avec leurs yeux doux alors… Autant que ce soit lui. Et puis, ça lui arrivait, d’être viril. Il me le rappelait, de temps à autre. Comme lorsqu’il m’enfonçait son poing en pleine face avec une force déroutante. Je l’oubliais toujours. Qu’il était sportif. Et qu’il avait donc plus de force que moi. Ça me frustrait un peu, je devais l’avouer. Mais enfin, il n’avait jamais essayé de s’en servir contre moi, alors je n’y prêtais pas vraiment attention. Puisqu’au final, c’était toujours moi qui avais le dernier mot.

Le laisser espérer ? Si ça pouvait lui faire plaisir… J’aurais bien pu lui acheter le même shampoing que moi. Sauf que j’avais l’intime conviction que même si les bouteilles étaient identiques, ce serait toujours dans la mienne qu’il se servirait. Il était bizarre parfois. Mais enfin, je ne relevais pas vraiment. Ou du moins, plus. Ça me faisait plutôt rire maintenant. Son désolé me fit soupirer, et son excès de confiance encore plus, sachant pertinemment qu’il tentait de faire le fort, alors qu’au fond, c’était loin d’être le cas. Il risquerait sa vie pour moi ? En l'occurrence, dans le cas présent, tout ce qu’il risquait, c’était de se pisser dessus. Mais à part ça… C’était plutôt mignon, la façon avec laquelle il l’avait sorti. Je ne le laissais pourtant pas finir sa tirade sur sa mort, ma sauvegarde, le puits, ou je ne sais quelle connerie et l'agrippais fermement tout en me dirigeant vers la salle de bain. Ça irait bien plus vite comme ça. Et au vu des battements de son cœur, j’avais bien fait de ne pas le laisser traverser la pièce seul. Sérieusement, quelle idée de regarder un film d’horreur seul quand on était comme lui… Allais-je devoir le surveiller chaque soir, comme un enfant ? Nouveau soupir blasé. Une fois calé sur la baignoire, je sortis donc la trousse à pharmacie et le laissais faire, fermant les yeux. Tout le monde savait soigner un bobo de ce type, non ? Drôle ? Rouvrant les yeux, je le toisais en haussant un sourcil, dubitatif. « Ça t’amuse de me voir blessé ? Ou jouer au docteur pour toi, c’est comme jouer à la dînette pour une gamine ? » Non mais sérieusement… Je voyais où il voulait en revenir, mais j’avais du mal à rigoler avec ce genre de choses. Je me détendis cependant, décidant de passer outre pour une fois. C’était Mana après tout, il ne pensait pas à mal… L’alcool me piqua légèrement, et je fronçais les sourcils mais ne dit rien, attendant qu’il finisse sa tâche. Après tout, si ça piquait, c’est qu’il faisait les choses bien. Et puis, s’il s’était mis à souffler sur ma plaie comme si j’avais été un gosse, je sais pas trop comment j’aurais réagit… Mais le coup de la télé, là… J’avoue que je m’y attendais pas. Ouvrant de grands yeux, tentant de voir s’il se foutait de ma gueule ou pas, je partais dans un fou rire incontrôlé, venant poser ma tête contre son torse tandis que je me tenais les cotes d’une main. Ce mec était franchement… J’avais même pas les mots ! « Tu… as la trouille à ce point ? » C’était même plus une question. Plus une affirmation. Un immense sourire narquois fiché sur mon minois, je me relevais finalement, le relevant au passage avec moi, avant de le lâcher, et de me diriger face à la télé. « Bon… » Je soupirais, allais ouvrir la porte, puis revenais et soulevais la télé dans un râle, l’amenant lentement mais sûrement jusque dans le couloir. « Je te préviens, si on nous la vole, tu en rachètes une ! »  Enfin, je savais qu’il ne le ferait pas, mais bon, j’aimais bien lui donner un petit coup de pression de temps à autres. Pouvant finalement dormir désormais, je commençais à me déshabiller, déboutonnant ma chemise avant de faire passer le pantalon. Je m’arrêtais cependant au moment d’ôter le caleçon, ayant l’habitude de dormir à poil, avant de le regarder et soupirer, me passant une main dans les cheveux avant de dégager la couette pour m’installer dans mon lit, et venir tapoter la place à mes cotés. « Allez, viens la… Mais que je t’entende pas gémir que tu as peur près de mon oreille, je te préviens ! » Et sur ce, je rabattais la couette sur moi, m'allongeant en grognant. « Depuis quand je partage mon lit avec quelqu’un, sérieux… »  

Outfit + Laisse le espérer. Il n'en demandait pas plus. Juste l'espoir. L'espoir circulant dans ses veines, infusant son coeur. Provoquant ses battements, étirant ses lèvres dans un sourire. D'un tout, d'un rien. D'un regard, de quelques mots. D'un caractère de cochon à un geste tendre. Il ne lui demandait rien. Rien que l'espoir, rien que des rêves. Il ne lui en avait jamais demandé plus, si ce n'est le laisser faire sa place. Le laisser devenir une partie de son quotidien. Il pensait pas en demander tant, pourtant, il en demandait bien plus, à un gars comme lui. A deux contrastes, à deux opposés, un " peu "  devenait rapidement un " beaucoup ". Peut-être était-ce pour ça, qu'il ne l'aimait pas simplement. Que le peu d'amour qui avait commencé à naître s'était transformé en folie permanente. En obsession. En amour impossible. En quelque chose vous consumant, petit à petit. Vous bouffant les tripes, les sentiments. La moindre parcelle de votre être. L'espoir qu'il nourrissait n'était pas sain, il le savait. Mais il s'en foutait. Il était un gamin qui n'avait jamais cessé de rêver toucher les cieux, en étant vouer à ne viser que l'horizon.

Il riait, parfois un peu trop. De tout et n'importe quoi. D'une intonation, d'une situation, de quelque chose d'imperceptible. De lui-même, de sa misère. Il n'avait jamais eu besoin de prétexte, pour rire. Pour s'amuser, alors que parfois il ne devrait pas. En soit, c'était probablement pas drôle. Non, en fait c'était pas drôle, d'avoir blessé Yo Han et il ne serait pas tant excusé si cela avait été le cas. Son sourire se figea, sa voix se coupa, de quelques secondes, avant de reprendre ce même ton amusé.  « ah ? non, bien sûr que non, c'est pas ce que je voulais dire. Mais c'est toi le médecin, pas moi, et pourtant c'est moi qui te soigne tu vois ? C'est juste ça. » Lourd  ? Un peu. Il voulait pas qu'il se méprenne, en fait. Mais il aurait du se taire, comme bien souvent et il préfère se concentrer sur ses lèvres, laissant son rire mourir et le silence reprendre ses droits. Il était pas si empoté, il savait soigner des plaies. Il en avait eu, des écorchures. Des cicatrices. De nombreuses, et des os brisés. Ses frères aussi.  Il jouait pas à la dînette. Il y avait jamais joué.

Il put rendre sa blouse d'infirmier, écartant la trousse et le matériel un peu trop médical de ses doigts. Son expression sérieuse s'effaça, pour paraître surpris en sentant sa tête s'appuyer sur son torse, le faisant mordre sa lèvre. Pour l'entendre rire, il était prêt à dire des conneries… Seulement là, il avait été sérieux. Sa main se loge contre sa nuque, qu'il détaille un moment.  « non c'est pas … disons que… C'est par mesure de sécurité ? » Il grimace, tout aussi peu sûr et se raccroche instinctivement à son corps, reposant ses pieds sur le sol. Son coeur allait peut-être pouvoir enfin se calmer, à présent. Surtout qu'il croyait pas qu'il céderait à une autre de ses demandes. Il avait la trouille, ouais… Une trouille démesurée. Une trouille de gosse, parce qu'il en était un. Et lui, il était un héros. Il avait endossé ce rôle, en le protégeant. Un héros qui aimait le torturé parfois. Son sourire devint nouvelle grimace, lorsqu'il parla de payer la télévision, si on la leur volait. Avec quel argent il pourrait bien acheter une télé ?! il avait déjà galeré à s'acheter un portable. Il rit, ce con. Il rit pour cacher son mensonge, vieux de plusieurs années maintenant. Enraciné dans sa vie, à présent en lui. « tu veux pas qu'on la mette dans la salle de bain ? … je veux pas qu'on nous la vole. » Il l'aurait bien déplacé lui-même, si il n'avait pas aussi peur qu'elle attrape sa taille et le fasse passer à travers l'écran. Un frisson, il secoue la tête et verrouille la porte « non elle est bien là. »  Il se débrouillerait pour payer, au pire. Il voulait plus d'une télé maudite. Il soupira. Un long soupire de soulagement, comme si être séparé d'un bout de bois le protégeait un minimum de ses cauchemars à venir. Il se tourna, au moment même où YoHan se déshabillait et son regard se perdit à nouveau, à détailler son torse un moment. Il était franchement pas discret… Il l'avait jamais été. Détournant les yeux, il déboutonna son propre pantalon, avant de s'arrêter. Le fixant lui, puis son lit, surpris. Il lui proposait vraiment de dormir avec lui ? De partager sa nuit ? Il s'approcha d'abord lentement, puis se posa sur le côté libre, se mordant la lèvre en espérant ne pas rougir comme un crétin. « C'est sympa … » L'entendre ronchonner lui arracha un nouveau sourire et il vira le bas. Pas le haut. C'était suffisamment gênant déjà, et se glissa dans les couvertures. « hm ... Bonne nuit ? » Allongé sur le dos, un moment sans bouger, à fixer le plafond, à respirer l'odeur de ses draps… Le temps passait pas, et il n'osa pas fermé les yeux. Trop attentif au bruit de sa respiration, à lui, juste à côté. Il se tourna enfin, dans un bruit de froissement. Au bout de cinq, ou dix minutes peut-être.  « ... Merci d'être rentré. Tu as quand même pu voir ta famille, un peu ? » Il avait vraiment cru qu'il le laisserait dormir ?

Outfit + Je savais bien. Qu’il avait pas dit ça à mal. Qu’il avait pas voulu me faire mal. C’était Mana. L’opposé de la méchanceté, surtout gratuite. Jamais il n’aurait tabassé quelqu’un. Encore moins moi. C’est pour ça au fond, que ma colère était retombée si vite. Parce que je savais que son poing était parti tout seul, sous l’effet de la peur que je n’avais fait qu’accentuer. J’avais joué, et j’avais perdu. Alors pour une fois, j’avais décidé de laisser ma fierté de coté et juste laissé passer. Pour lui. Pour cet idiot qui s’était fait sa place dans mon existence, brisant tous les murs que j’avais bien pu dresser. Si agilement, que lorsque je m’en étais rendu compte, je n’avais pu qu’accepter le résultat. Ce qu’il ne savait cependant pas, c’est que désormais, je ne le laisserais plus en sortir. Parce qu’il était devenu important. Très important. Trop important. Et que le perdre était inenvisageable. Alors quoi qu’il fasse, je ne le laisserais jamais s’éloigner. Il était mon meilleur ami. Mon… Il était mien, et c’était tout.

C’était un vrai gosse, à vouloir cacher la télé pour arrêter d’y penser. Et en même temps, ça le rendait irrémédiablement adorable. J’avais beau le taquiner, mon sourire n’était pas que sournois, il était aussi… Je ne savais trop. Attendri ? Peut être bien. Parce que ça avait beau être un gosse, j’aimais plus que tout qu’il ait besoin de moi. Qu’il doive se reposer sur moi. Qu’il compte sur moi, et uniquement moi. Parce qu’ainsi, je savais qu’il ne partirait nulle part. Qu’il resterait toujours à mes cotés, et que je serais toujours le premier qu’il viendrait voir. Si j’étais un égoïste ? Oh oui, et un bel égoïste même. Mais je m’en foutais, j’en avais jamais rien eu à branler de mes défauts. Il m’avait accepté comme j’étais, non ? Donc il ne viendrait pas râler ensuite si je l’enfermais dans mon monde. Puisqu’il y était rentré de force de lui même. « Dans la salle de bain ? » Je ne pu empêcher ce sourire amusé à sa remarque. Il fallait croire qu’une fois encore, j’avais fait mouche en parlant de la lui faire payer en cas de vol. Ce radin, je vous jure… Toujours à piquer le fric des autres, mais jamais à se servir du sien ! Enfin, ce n’était pas non plus comme si ça me dérangeait. J’en avais, de l’argent. C’était pas ça le soucis. Je lui en rachèterais une, de télé, il avait pas à s’inquiéter. Même si j’avouais que simuler le vol de celle ci pour voir sa réaction était bien tentant. Mais il avait déjà eu assez de frayeurs comme ça pour ce soir, je n’étais pas non plus sadique à ce point. Raison pour laquelle je proposais de partager mon lit, sachant pertinemment que sinon, il ne me laisserait pas dormir. Enfin… J’avouais que si ça n’avait pas été Mana, je l’aurais foutu dehors s’il m’avait saoulé. Sauf que voila, pour lui, ça ne me dérangeait pas tant que ça, de faire des concessions. Par contre, ça, je ne l’avouerais jamais. Raison pour laquelle je me plaignais ouvertement, histoire qu’il voit que ceci était exceptionnel. La prochaine fois qu’il osait regarder un film d’horreur, il allait m’entendre ! Je l'emmènerais visiter un puits, tiens, il comprendra vite qu’il faut m’écouter. Les yeux déjà fermé, j’entendis néanmoins l’un de ses vêtements tomber au sol, et les draps se froisser, signe qu’il entrait à l’intérieur. Et je me tendais, tandis que mon cœur s’accélérait, sans trop savoir pourquoi. Étais-je maniaque à ce point ? Ça ne semblait pourtant pas être ça… Et pourtant, mon cœur s’emporta de plus belle, refusant cependant de le laisser paraître ou d’ouvrir de nouveau les yeux pour l'apercevoir allongé à coté de moi. « Bonne nuit. » C’était… Trop bizarre. J’étais tendu, complètement tendu, comme si j’avais peur de quelque chose. Comme si je me retenais de faire quelque chose. Et je comprenais rien à cet affolement de mon enveloppe charnelle. Étais-je malade ? Pourtant, j’allais bien il y a à peine quelques instants. Je n’eus cependant pas le loisir de continuer mon analyse, que je l’entendis bouger, ouvrant automatiquement les yeux et tournant mon visage dans sa direction. Et mon cœur rata un battement, en le voyant si proche, allongé dans mon lit, la tête sur mon oreiller et les cheveux retombant sur les draps. Il était sex… Si j’avais pu voir ma famille ? Instantanément, mon rythme cardiaque se calma, tandis que mon poing se serrait, avant de se détendre de nouveau. « De rien. Et oui, j’ai pu passer du temps avec ma sœur, c’est le principal… Elle avait fait une rechute, mais elle semble aller mieux maintenant, demain, elle pourra sûrement quitter son lit. » Ou du moins, je l’espérais… Lui avais-je déjà seulement parlé de ma sœur ? En y repensant, il ne connaissait rien de ma famille. Et je ne connaissais rien de la sienne. Étrange, pour des meilleurs amis, non ? Enfin, ce n’était pas comme si j’étais très bavard non plus. « Il n’empêche que la prochaine fois, je ne rentrerais pas pour toi, alors tu as intérêt à ne pas recommencer ! » Menteur. Pour lui, je serais même prêt à prendre un vol de nuit si je me trouvais à l’autre bout du monde. Et cette pensée m’effraya un peu, mon regard se perdit sur sa silhouette, détaillant son visage puis ses lèvres sans vraiment en être conscient. « Allez, dormons… » finis-je par souffler tout bas, ma main venant effleurer sa joue et ramener en arrière une mèche de cheveux qui lui tombait dans les yeux. Réalisant mon geste trop tard, je ne laissais cependant rien voir de mon étonnement ou de ma gène et ramenais ma main sous la couette, tandis que mon coeur s’accélérait de nouveau. Mais qu’est ce que je foutais ?