« Comment ça ? Moi, rater ?! N'importe quoi ! Tu te trompes jusqu'au bout de la ligne imaginaire qu'il y aura entre moi et la dernière place ! » Bras croisés, moue boudeuse surmontée de joues rebondies et de sourcils froncés. La demoiselle aux drôles de mimiques connaît la vérité au fond d'elle, mais se persuade naïvement de tout un contraire. « C'est de la tarte cet exam, pas besoin d'réviser j'y vais au talent ! Le 14 tu verras, on en reparlera quand Baek Mi Yeon sera tout en haut de la liste avec sa mention « extrêmement bien », voire même « parfaite » tellement l'épreuve elle est à 98% donnée la plupart du temps ! Puis toi aussi tu as intérêt à réussir hein, on va même tout casser à deux, n'oublie pas que j'veille au grain petit frère ! » Et aussitôt, elle retrouve la pêche, rayonnante d'optimisme momentané. Le plat de son poing claque résolument contre sa paume, en même temps que cette grimace brillante griffonne ses traits et ses lèvres rehaussées. Elle a beau sourire comme une imbécile heureuse à l'instant, dans sa tête, actuellement, c'est la grande confrontation. Pourquoi j'ai dit ça... Pourquoi j'ai dit ça, pourquoi j'ai dit ça, POURQUOI J'AI DIT ÇA ??? BON SANG Mi Yeon, bon sang ! L'étudiante accentue son sourire, à s'en décrocher les mâchoires tant il en devient faux et chargé d'incertitude. Elle s'en évanouirait presque sur le moment, en réalisant l'ampleur que ses paroles risquent de prendre, alors qu'elle prétend pouvoir atteindre la première place et rentrer dare-dare des cours, un beau 150/150 bien mérité inscrit sur son très cher dossier scolaire. Elle qui n'a encore rien révisé, elle qui nie complètement la défaite à ce soi disant examen alors que, au fond, toute l'académie sait à qui le zéro risque d'être joyeusement attribué. L'idiote compétitive du bahut, la fausse excentrique au cœur tendre qui ne se fait guère remarquer par des résultats brillants ou une beauté à en rendre jalouse Miss Korea, mais bel et bien par le biais de notes catastrophiques et d'une étrange addiction pour l'électronique. Oui, tout ça réuni, ça donne Mi Yeon, Baek Mi Yeon.

En face, ce n'est ni son petit frère, ni qui que ce soit partageant éventuellement le même sang qu'elle, mais plutôt un garçon que Mi Yeon aime vraiment beaucoup. Et qui la connaît bien, pour en arriver à de telles discussions. Et qui s'amuse à tester ses limites de grande cancre refoulée, rien que pour la voir se démener avec les mots et clamer qu'elle mettra tout le monde derrière elle aux scores. Et qui, accessoirement et finalement, s'acharne également à se sortir de la friendzone dans laquelle il est bloqué, pour ne pas passer à côté de ce détail plus qu'important. Mais là, encore, il ne s'agira que d'un détail, que la demoiselle a su remarquer depuis bien longtemps déjà, s'en attristant sincèrement pour son ami mais ne pouvant rien changer à la donne de leur relation, qu'elle juge à son tour purement fraternelle. Alors ce petit frère, que l'étudiante aux yeux d'aigle s'obstine à couvrir d'un regard affectueux, elle l'encourage dès qu'elle en a la moindre occasion, se souciant fréquemment de son train de vie et de ses notes à l'école, à lui aussi. Elle désire son bien, ne peut lui céder ce qu'il semble attendre depuis bon temps déjà mais s'en accommode quand même, ne délaissant pas le garçon à qui elle raconte la plus véridique des bêtises à l'instant-même, qu'elle sait d'ores et déjà comme étant pistée par le sourire sarcastique de son cadet. Alors Mi Yeon, elle lui souhaite bonne chance et puis c'est tout. Elle a conscience qu'il tapera dans les toutes premières notes à coup sûr et s'en montre d'ailleurs très concurrentielle à ce sujet, mais son niveau n'est clairement pas comparable au sien, et ça, la nerd de service le sait plus que bien.

En se retournant après un signe de main énergique, un au revoir et un sourire contagieux, la demoiselle se sépare de son frère de substitution et souffle un grand coup. Sa mine se décompose instantanément une fois celui-ci hors de son champ de vision, tandis que sa paume rencontre son front dans un claquement sonore, désespéré. « J'hallucine ! Qu'est-ce que je fais moi, maintenant ? Il me reste trois jours, trois jours pour rattraper deux ans de maths en n'ayant pas ouvert un seul cahier et en n'ayant compris absolument aucune formule du programme ! » Fidèle à ses principes de Coréenne, elle se mit à parler instinctivement toute seule, faisant de grands gestes paniqués dans le but vain de faire la part des choses. Elle se mit bientôt à faire les cent pas, son expression se déformant dans diverses moues inimaginables, qui veulent presque dire à elles seules : je suis dans la pire des catastrophes. « Récapitulons : je ne sais pas faire une équation, je n'ai jamais rien compris aux racines carrées, je ne sais pas quel résultat ça donne quand on fait x + x, 7 x 2 ça fait 14, je sais pas faire un calcul vectoriel, j'ai rien suivi au chapitre des algorithmes, PI ça sert à rien, j'inverse les lettres du triangle, je me souviens à peine du cours de la semaine dernière... » Elle sursaute, se reprend en songeant qu'à ce stade-là, faire une liste qui demeurera toujours exhaustive n'aidera en rien. Le savon qu'elle s'apprête à se passer à elle-même ne vaudra jamais celui de son père s'il avait le malheur d'apprendre la terrible vérité, mais elle ne réalise que maintenant la gravité de la situation. « Aish j'hallucine, j'hallucine ! En trois jours, tu penses vraiment pouvoir cartonner à une épreuve nationale Mi Yeon ?! Je fais quoi, je fais quoi ! Je suis morte, c'est la catastrophe, Han Yeol va se ficher de moi ce triple abruti, papa va me tuer, je vais être privée de LoL jusqu'à l'aube des temps, c'est la fin des haricots ! » La retardataire se tient les joues, horrifiée de ne pouvoir rien changer à son destin. Peut-être qu'elle n'a pas échappé à la dure règle de la procrastination, de la flemmardise et de toutes ses sous-catégories auxquelles bon nombre de jeunes de son âge ne peuvent résister, mais son incompréhension de toujours en ce qu'il s'agit de ses études la met dans une position inconfortable. Les mathématiques — et même les sciences en général — avec Mi Yeon, ça n'a jamais été le fruit d'une alchimie fructueuse. Pire encore, on pourrait assimiler cet étrange mélange à celui de l'huile et de l'eau. Physiquement inexécutable, probabilité de succès s'approchant de la barre des 0. Ici, c'est bel et bien le même cas.

La demoiselle tourne en rond, s'accroupit et s'interroge ; tente vainement de réciter le contenu de ses cours, se fait dévisager par une ribambelle d'élèves postés là pour la pause de midi parce que, sincèrement, pouvait-il y avoir comportement plus saugrenu que celui d'une Mi Yeon désorientée, partagée entre l'effroi des conséquences et l'impatience de terminer ses examens ? Consciente des regards sur elle, Mi Yeon expire une bonne fois pour toute, craintive que son ami ne revienne soulever ses paroles et souligner l'absurdité de ses promesses surfaites. Allez, elle n'allait pas se laisser abattre ! Au lieu de se lamenter et de tourner en rond en attendant le déluge de l'Arche de Noé, elle allait plutôt prouver qu'elle pouvait s'en sortir : que malgré toutes les pires notes du monde et la plus inimaginable dose de procrastination accumulée au bout de deux mois, elle allait réussir à dépasser le 3,5 qui hante inlassablement ses copies d'épreuves et même, d'exercices lambda. Elle l'avait dit elle-même, n'importe quel abruti peut repartir avec une mention positive les mains dans les poches. Pourquoi pas elle, dans ce cas ? Submergée d'un flot nouveau et impétueux de motivation, la Mi Yeon compétitive revient en force, alors qu'elle serre les poings à mesure de pouvoir se saisir de son sac. « Bon, tu es une Baek oui ou non ? Dans la famille, on dit pas « je n'aime pas » avant d'avoir goûté... Bah là, c'est pareil, pas vrai Yeonnie ? Il me reste trois jours, je peux encore le faire, j'le sais ! Je vais leur montrer que je suis pas si nulle que ça, que je peux quand même retenir une leçon en bossant vraiment à fond quitte à passer mes nuits dedans ! C'est décidé, j'ai plus le temps du tout pour déconner, tant pis pour le reste ! » Et aussitôt, mademoiselle attrape son sac, le pas ferme et résolu en direction de son chez-soi. C'est une dure à cuire, pas une poule mouillée, et les maths, Mi Yeon, ça lui a jamais fait peur.

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« J'en sais pas plus que vous ! Depuis qu'on a les statistiques du dernier World Championship et les résultats des LCS Summer Split, j'aurais plutôt tendance à dire que Faker est et restera le premier joueur numéro un en Corée, parce que je ne vois absolument pas comment il pourrait se faire downgrade à l'heure actuelle avec ses counter picks quasi divins quand tout le monde pense qu'il pourra pas assurer au mid ! Du coup je n'en sais rien, rien n'a été annoncé officiellement pour le moment, mais je vous parie que ça va pas non plus tarder à élire Dade sur une espèce de piédestal, juste parce qu'il a carry sa team la dernière fois alors que comme par hasard, ils étaient contre trois des  SKT (dont Faker, voilà pourquoi). J'veux dire, c'était de la simple soloQ, il suffit juste d'attendre leur affrontement aux LCS avant de se faire une opinion toute construite sur ces deux joueurs immanquablement très fort, je le conçois. Mais vous voyez ce que je veux dire, c'est l'idée afin de ne pas faire de conclusion hâtive ! » La demoiselle apparaît sous un autre jour, l'esprit critique et observateur, un flot de charabia se déversant du haut de ses lèvres. Elle s'exprime rapidement, peut-être même trop,  et les idées fusent à la vitesse de la lumière dans son esprit, à mesure qu'une multitude de questions lui sont posées et que les réponses lui germent au bout de la langue dans un élan d'analyse spontanée. Elle plonge dans son domaine, inéluctablement : réfléchit et délivre les solutions, s'esclaffe de temps à autre et s'amuse comme elle ne le fait nul part d'autre. Ses yeux sont rivés sur son écran, un sourire intéressé flotte sur ses lèvres et la caméra qui lui fait face témoigne de sa séance d'enregistrement. Elle s'y connaît dans la matière, joueuse assidue depuis son plus tendre et jeune âge, et si l'opportunité de pouvoir devenir bien plus qu'une simple figure réputée du streaming de jeux vidéo s'offre à elle chaque jour qui passe, ses études et sa scolarité à côté l'empêchent de se faire un vrai nom dans cette industrie si emblématique qu'est l'électronique.

Et oh, comme ses études peuvent l'être, encombrantes. Études que Mi Yeon s'est également empressée d'oublier, le report des révisions à demain et l'humeur à la distraction ayant de nouveau fait fort. Inconsciemment et bien malgré elle, cela dit. Mais à ce soudain éclair de lucidité, elle s'immobilise. Le self-contrôle dont elle s'apprête à faire preuve dissipe les soupçons de ses visionneurs,  et en remettant de l'ordre dans sa caboche jusque-là paisible, elle esquisse un sourire crispé. « Bon les amis, je coupe le stream, merci encore d'avoir suivi ça me fait très plaisir ! N'hésitez pas à checker les news sur ma page Twitch et à vous abonner, on se revoit comme d'habitude Samedi prochain de 17h à 21h ! Annyeooong ! » Mi Yeon adresse des petits gestes à la caméra, de quoi partir dans la bonne humeur et remercier ceux qui lui disent au revoir sur le chat instantané. Pourtant, presque immédiatement, elle coupe l'enregistrement et bondit de sa chaise, dévastée par la dure réalité. Dépassée, horrifiée. Elle en transpirerait presque tant ses tempes pulsent à une cadence fulgurante. « YAH, J'AVAIS PAS VU L'HEURE ! Omo, OK, OK. Respire, respire. » Elle fronce les sourcils, plisse les yeux et se pince l'arête du nez, se maudissant intérieurement avant de décomposer la situation tout haut, matérialisant ses pensées dans une habitude analytique et incomprise. « L'épreuve est Lundi. Si je révise un peu les deux premiers chapitres ce soir, j'aurais toute la journée de demain pour faire le reste. J'envoie un sms à Han Yeol pour m'assurer qu'il travaille bien, et au moins s'il me retourne la question, une pierre deux coups, je lui dis que tout va bien de mon côté ! Vu comme ça, c'est parfait ! » Si les ampoules magiques avaient l'occasion d'apparaître en guise d'auréole, Mi Yeon, elle en aurait sûrement été l'élue. La promesse au bout des lèvres, elle se presse d'aller à la recherche de ses notes et documents scolaires. Ça va aller, elle s'y prend seulement deux jours à l'avant, mais ça va aller — songe-t-elle, son cœur manquant un battement à chaque fois que l'horloge daigne avancer d'une minute, longue et angoissante minute.

Néanmoins, c'est seulement après deux heures de révisions insensées que Mi Yeon cède. Elle ne peut pas. Elle ne peut pas enregistrer autant d'informations en si peu de temps. Mais ça lui coûte trop, d'avouer qu'elle va complètement le ruiner, cet examen. Dans sa tête, elle en a purement conscience, se persuade de toute une fantaisie bâtie sur une envie tendre et naïve, alors que l'évidence-même réside en réalité dans sa préparation psychologique à échouer lamentablement. Elle n'a juste pas envie de se laisser abattre, voit la vie et son quotidien sous un œil très compétitif et bordé de challenges, la demoiselle Baek. Elle ne veut pas décevoir ses amis, plus que tout, ne pas faire déshonneur à sa famille et devenir la risée de l'Académie. Alors Mi Yeon, elle a beau étudier, se remonter à bloc à coup de paroles illuminées et visionnaires, tomber encore et toujours dans les méandres de la distraction, elle ne résiste pas. Elle s'endort tout contre ses cahiers et copies d'études, la bulle au nez, à l'heure tardive de seulement une heure et demi du matin.

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Lundi, 8h45. Une sonnerie aux allures de boysband coréen retentit dans une chambre griffonnée de plusieurs posters, alors que la Belle au Bois dormant des lieux semble encore flotter dans une espèce de rêve aux contours floutés. C'est seulement lorsqu'une carcasse lente et entravée par les chaînes de la fatigue se redresse façon momie que la sonnerie se tait quelques secondes plus tard, la jeune fille aux yeux rouges de fatigue baillant bruyamment. La ferme intention de se recoucher et de retourner camper sous sa couette l'assaille un instant, mais son cerveau semble reprendre du service lorsqu'elle vérifie dans un pressentiment dérangeant l'heure sur son portable, l'épuisement ruisselant de chacun ses pores. Et là, c'est le drame. « 8h50... 8h50... Mais... L'épreuve est... À 9h15, c'est vrai ? Non ? Hmpf... » Elle fatigue, comate, murmure des bribes de phrases incompréhensibles. C'est bel et bien le gros, gros, gros gros drame lorsqu'elle ne réalise pas encore tout à fait qu'aujourd'hui, c'est le jour J, qu'hier, elle n'a rien fait à part jouer toute la journée à Zelda et que, dans approximativement 25 minutes, elle devrait être présente, fraîche et disponible pour le commencement de l'examen national sur lequel elle allait bien évidemment s'étaler en toute beauté et se relever juste après. Quoi que, pas sûr qu'elle puisse le faire d'elle-même, d'ici là. Et à la fin, il n'y aura personne pour la ramasser à la petite cuillère.

Sa cervelle s'active à lui envoyer des ondes d'adrénaline et elle se lève, dans le plus joyeux des capharnaüms. En retard, elle l'est. Chamboulée aussi. Mais au moins, elle se presse une bonne fois pour toute pour s'habiller, se coiffer et faire ses affaires, également emporter de quoi réviser sur le chemin. C'est le dénouement de quelque chose de tout à fait sérieux, et même si la miss Baek sait que sa promesse de l'autre fois tenue à son ami risque de se retourner contre elle, elle ne peut s'empêcher de stresser et de maudire l'arrivée ponctuelle du bus. Même si elle est en retard et sincèrement exténuée, oui. « Tu as intérêt à réussir ! Ne stresse pas trop, tu vas y arriver je le sais (◕‿◕✿) » Dans le bus, elle tape ce message à tout vitesse à celui qu'elle considère comme son frère, impatiente d'en finir une bonne fois pour toute. Si elle ne peut pas y arriver, alors Han Yeol aura le mérite de tout balayer aux résultats. La réponse de son ami ne se fait pas attendre. « Bien sûr que je vais y arriver. J'en doute pas, en fait ! » Elle esquisse un sourire, presque admiratif. Elle envie sa confiance qu'elle sait sincère et justifiée. Mi Yeon descend du bus au prochain arrêt et s'apprête à éteindre son portable, mais un autre sms du même destinateur la prend de court. « Te rate pas trop non plus, hein (¬‿¬) » Et les flammes d'un agacement soudain, tissé sous les toiles d'un amusement certain et d'un sarcasme enfantin, la poussent à répondre le plus vite possible avant son entrée précipitée à l'Académie, fermant d'ores et déjà ses portes. «  Mais te moque pas espèce de babo, je vais faire de mon mieux tu vas voir » Et la voilà partie en courant pour l'heure décisive, dans un rire presque désespéré.

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Elle se maudit à l'heure actuelle. Pas seulement pour son manque de travail évident et sa manie à rester collée à ses jeux vidéo toute la journée, mais également pour ses étourderies causées par sa fatigue matinale. La demoiselle est arrivée de justesse à l'heure. Après avoir fait deux mauvais couloirs et s'être trompée de salle d'examen, de quoi se ficher une bonne honte en plus de faire la clown devant une salle entière d'étudiants amusés, elle a finalement trouvé le numéro de sa salle où l'épreuve est censée commencer depuis environ cinq bonnes minutes. Avec une portion infime de chance, l'examinateur a daigné attendre Baek Mi Yeon, toujours et encore cette Mi Yeon irrécupérable, et c'est une nouvelle fois sous les regards idiots de ses camarades qu'elle est partie s'asseoir à sa table attribuée, les mains moites et le souffle court. Parcours du combattant à 8h, un Lundi d'épreuve. Intérieurement, la coupable de ses propres erreurs se facepalm jusqu'à Tokyo. Il y a de quoi remettre en place quelques neurones.

Et ne parlons pas de la seconde où elle reçoit enfin sa copie d'examen, celle où il est marqué en gros et en écriture formelle « Épreuve Nationale de Mathématiques de Juin 2013 », que Mi Yeon pourrait plutôt déchiffrer comme étant « Contrat d'Assurance Décès 2013 », où quelque chose de plus angoissant du genre, qui lui garantirait un séjour bien trop peu agréable du côté de l'au-delà. Pas grave, je respawn. Elle s'administre une claque mentalement. Elle doit absolument se concentrer, ne pas se lamenter et éviter de stresser. Tourner les pages une par une du polycopier, inspirer un grand coup, mettre les mécanismes de son cerveau en marche, et...

Et juste, catastrophe. Calamité. Cataclysme. Désastre. Malheur, tragédie, HORREUR. Un étau lui resserre la gorge alors que ses yeux défilent sur ce qu'elle n'est pas apte à comprendre, sur les dizaines de questions auxquelles elle ne trouve pas de solution immédiate et sur les énoncés qui lui donnent soudainement mal à la tête, alors qu'elle se met à chercher de toute sa volonté des semblants de réponse qui la mettraient d'ores et déjà en confiance. Mais rien. Niet. C'est la terreur qui déferle sur elle, tandis qu'elle se rend compte que la maigre quantité de travail qu'elle a su fournir n'apparaît aucunement dans chaque consigne de chaque exercice de cet examen. La jeune fille se met à mordiller le bout de son crayon, les yeux écarquillés. Ses paroles de ce jour-là lui reviennent alors en tête. « Le 14 tu verras, on en reparlera quand Baek Mi Yeon sera tout en haut de la liste avec sa mention « extrêmement bien » ! ». À ces remontrances, elle a envie d'éclater de rire. De rire jaune, nerveux, angoissé. Parfois, elle devrait sincèrement s'appliquer à la boucler. Et là, la goutte de sueur qui perle au coin de son front l'encourage à tout sauf à la boucler. Car elle a désespérément besoin d'exprimer la calamité dans laquelle elle est plongée, la petite Mi Yeon qui réfléchit dans tous ses états.

1h30 d'examen, 1h30 qui semble filer à la vitesse d'un escargot aux yeux de Mi Yeon. Elle n'a fait que quatre exercices sur sept, quand bien même incomplets, pour sûr faux et pour certains pas totalement justifiés. Elle a soudainement oublié comment réaliser une simple équation de rien du tout, et les questions qui lui sont posées la font sécher d'une manière propre à celle d'un linge après une bourrasque de vent. Parce que blanche, elle l'est bel et bien comme un linge, l'élève aux cernes anormalement marquées et à la main infortunée plaquée sur le front.

Mi Yeon n'arrive à rien. À quoi bon se forcer et chercher une solution, l'esprit de compétition ne la sauvera pas. C'est le destin et c'est tout. C'est une situation logique puisqu'elle ne s'y est pas pris à l'avance et n'a cette fois pas étendu son regard aussi loin qu'il le fallait. Alors elle sort en première de la classe, prétexte avoir terminé avant tout le monde, parce qu'après tout et encore une fois, à quoi bon ? Faire semblant ne servirait à rien. Telle sera la suite : son zéro pointera tout au bout de la liste, ses parents apprendront la triste nouvelle et ses études risquent d'en pâtir. Mais Mi Yeon n'aime pas ses études, et ressent le sentiment que ce n'est pas un monde auquel elle appartient. Alors oui, à quoi bon ?

Après avoir émargé dans un silence inhabituel, Mi Yeon quitte la salle sous les yeux indiscrets de ses camarades. Sa copie ne doit pas ressembler à quoi que ce soit, et elle plaint celui qui se chargera de la corriger. Dans les couloirs, elle tâche de quitter l'Académie au plus vite afin de rentrer chez elle et souffler un bon coup, réaliser une bonne fois pour toute que c'est fini et que de toute manière, elle ne pointera pas le bout de son nez le 14. Tout est terminé, maintenant. Le stress accumulé prendra un certain tournant à redescendre à sa convenance, mais cette histoire d'épreuve se voit finalement être révolue. Et Mi Yeon, en dévalant les escaliers, s'en voit perplexe. Et peut-être même un peu désinvolte, au fin mot de l'histoire. « Bon...  Bah voilà. » Elle soupire, ses pensées se tournant vers son ami. Oh, et puis au pire, tant pis. « J'ai plus qu'à aller pré-commander la dernière extension et me caler devant un drama, moi. »