AND THEN YOU GAVE YOUR HAND

feat. YINDEE & MISO

Miso s’était résigné à dépenser ses derniers sous pour ce muffin et pour donner une leçon à cette femme. Elle n’avait pas aimé son attitude parce qu’elle l’avait senti … fausse ? Miso n’était pas idiote, et elle semblait sentir quand la personne en face d’elle ne disait pas ce qu’elle pensait. Enfin c’était comme ça qu’elle l’interprétait. Peut-être que dans le fond cette femme avait simplement été maladroite mais qu’elle voulait vraiment l’aider. Pourquoi, ça, ça échappait encore à Miso. Elle mâchouillait nerveusement son bout de gâteau, au moins dans ce café elle était au chaud et tranquille. La rue marquait son visage enfantin qui aurait pu être parfait et délicat dans une autre vie. Pourtant quand sa sauveuse vint s’asseoir en face d’elle Miso ne bouge pas, ne fuit pas. Elle la regarde et l’écoute simplement, posant son regard sur son corps qu’elle montre. Elle déglutit difficilement alors que ses mots la touchent. Miso y dénote une certaine tristesse que n’importe qui aurait pu voir, mais semble avoir beaucoup de regret cette femme. Pas beaucoup de remord, mais plus des souvenirs du passé qu’elle aurait aimé changer pour avoir une vie différente. Miso baissa les yeux vers sa table et se demanda l’âge qu’elle pouvait avoir, et l’âge qu’elle pouvait lui donner à elle, à Miso. Cet enfant qui a fui tous les pays où elle s’était réfugié, où elle avait vécu. Pourquoi la Corée serait différente ? La seule chose qui puisse la retenir ici c’était son frère, qui était quelques parts … Elle frotte sa joue, comme un toc nerveux, celui de croire qu’elle est tout le temps sale et qu’elle a honte de le montrer aux gens. Evidemment qu’elle est sale, mais la crasse elle l’efface, mais la saleté de a vie qu’elle mène et le déchet qu’elle s’efforce de ne pas devenir saute aux yeux. Elle n’a pas l’insouciance des filles de son âge, elle ne marche pas dans la rue avec un but précis. Maison, école, ami. Tous ces refuges n’existent pas pour elle. Elle erre en attendant de trouver une solution pour retrouver son frère. Elle cherche alors ses repas, de quoi manger, de quoi se nourrir, en étant bien heureuse d’avoir déjà un bon repas dans la journée. Reportant son attention sur la jeune thaïlandaise, elle murmure pour briser le silence « Tu m’aides parce que t’on pas aidé ? » Ses yeux ne sont pas chargés de reproche, juste d’une innocence cassée un peu déroutée. Qui cherchait-elle à sauver ? Miso ou l’enfant qu’elle avait pu être et que personne n’a aidé ? Dans le fond la jeune nord-coréenne s’en moque bien. Après tout la perspective d’un bon diner et d’un lit douillet la faisait saliver d’envie. Elle baisse ses yeux à nouveau, frottant sa joue qu’elle croit toujours noircie de crasse et lui tend la moitié de son muffin, comme une promesse tacite. Elle acceptera son offre, si elle accepte de partager son gâteau. Elle se remet à manger son bout de gâteau les yeux rivés sur ses doigts qu’elle réalise noir sous les ongles. De honte elle les cache sous la table et se retient de préciser à la jeune femme qu’elle comprendrait si elle ne voulait pas manger le muffin qu’elle avait touché. Miso se sentait souillé et d’un geste nerveux et qu’elle pensait discret elle tentait de se laver les mains avec le mouchoir qui trainait sur son plateau en grattant le dessous noircis de ses ongles. « Je m’appelle Miso » souffle-t-elle derrière ses mèches de cheveux en zieutant vers la jeune femme en face d’elle. Sans se douter qu’elle venait de rencontrer celle qui lui sauverait probablement la vie. 


 

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Outfits. | Est-ce que Yindee aidait cette jeune femme parce qu'on ne l'avait pas aidé ? Probablement. Oui. C'était bien ça. C'était une démarche à la fois altruiste, et à la fois égoïste. Elle avait, au fond, besoin de l'aider pour se dire qu'elle n'avait pas pousser cette femme à peine sortie de l'adolescence dans des filets semblables à ceux dans lesquels elle était tombée. Si elle avait continué son chemin face à la lueur qu'elle avait vu dans ses yeux, elle ne se le serait jamais pardonnée. Parce qu'elle aurait été aussi cruelle que les gens qui avait profité de sa détresse ou qui l'avait tout simplement ignoré. La thaïlandaise sourit à la jeune femme, un sourire sincère, il fallait qu'elle le soit si elle voulait gagner la confiance de cette âme blessée. « Oui en grande partie. Passer mon chemin face à toi je me le serais pas pardonné. J'aurais pas été mieux que tous ces gens qui sont passés devant moi et que j'ai détesté pour ne pas m'avoir tendu la main. J'veux pas leur ressembler. » Et elle ne voulait pas que Miso finisse à lui ressembler à elle. Avec un peu de nourriture et quelques coups de pouce, elle pourrait trouver les bons moyens pour s'en sortir. Elle la regarda se frotter le visage, à s'en faire rougir la peau. Un tic ? Une démangeaison ? Elle l'ignorait mais en quelques minutes, elle pu observer que c'était présentement un geste récurent chez la jeune femme. Et finalement, elle eut un nom à mettre sur ce visage poupon. Miso. Sourire. C'était joli. Et elle était curieuse de voir un sourire réellement éclairer ce visage, ce devait être beau à voir. « Enchantée Miso. » Et Yindee lui sourit, de ces sourires particuliers, que certains disaient maternels mais qu'elle ne saurait expliquer puisque l'instinct maternel elle ne l'avait pas. Elle prit le morceau de muffin qu'elle lui tendit, et en mangea un bout, comme pour lui prouver qu'elle n'était pas dans la pitié mais dans le partage. Elle se pencha doucement vers elle, avec prudence, comme pour ne pas l'effrayer. « Est-ce que tu me laisses enfin te payer un vrai repas quand même ? » Elle parlait à voix basse, comme si elles s'échangeaient un secret, comme si Yindee voulait renforcer cette confiance qu'elle venait de lui accorder. Son coude sur la table, elle vint poser sa tête sur la paume de sa main. « Je peux te demander quel âge tu as Miso ? » Aux yeux de Yindee elle était jeune, peut-être un peu moins qu'elle lorsqu'elle avait fini sur le trottoir mais quand même... Une jeune femme aussi jeune et aussi belle qu'elle était en danger dans ces rues pleines de prédateurs qui aimaient salir ce qui était beau.

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Il était difficile d’approcher Miso et de gagner sa confiance. Oui, il était difficile de la voir ainsi, de la voir se livrer. Elle n’était que méfiante Miso, une enfant sauvage que la vie avait eu du mal à dompter. Elle n’avait pas envie d’être domptée Miso. Parce que sa liberté valait plus que tout, parce qu’elle avait tout perdu pour sa liberté. Sa famille, son foyer, ses repères, alors elle s’accrochait comme elle pouvait à ce vestige du combat qu’elle avait mené avec ses parents. Ils avaient tout sacrifié pour cette liberté et ce bonheur. Elle ne prétendait pas avoir gagné son combat, comment aurait-elle pu ? Elle tenait certes debout mais c’était bancal et si insuffisant face à ses pertes. Mais dos au mur, elle n’avait d’autres choix que de continuer d’avancer.la faim, la peur, la fatigue de vivre à la rue l’avait poussé à franchir la porte de ce salon. Elle avait besoin d’argent pour vivre, pour rester digne, pour rester elle … alors elle s’était présenté au seul endroit qu’on lui avait conseillé. Personne ne voulait embaucher, même au black, une nord-coréenne fugitive. Elle ne savait pas comment faire, perdue dans ce monde trop vaste, trop grand pour elle, ce monde qu’elle comprenait à peine. Elle était dépassée par ce qu’elle vivait. Son cœur encore fragile n’avait de cesse de se briser chaque matin lorsqu’elle ouvrait les yeux et qu’elle réalisait que son cauchemar ne s’évaporait pas quand elle se réveillait. Bien au contraire … elle avait le visage marqué et la peau abîmée par le froid et la chaleur. Son ventre criait famine mais son regard assurait je vais bien. Il ne fallait surtout pas attirer le regard sur elle. Elle n’était pas là pour faire la manche et mettait un point d’honneur à mettre sa fierté avant tout. C’était sa façon de se protéger, de ne pas se faire avoir, d’éviter ces hommes aux premiers abords doux qui lui promettaient mont et merveille si elle montait dans leur voiture. Elle gardé les yeux rivés sur son muffin quand elle parlait avec Yindee et elle déglutit quand elle lui demanda son âge. Elle réagit comme elle le fait souvent, en relevant un visage fier, menton en avant et expression féroce. « 22 ans. » ment elle par reflexe. Puis après une courte pause et l’œil averti de la jeune femme en face d’elle souffla  « 19 ans … » elle détourne les yeux en fourrant un bout de muffin dans sa bouche. Puis l’invitation de la jeune femme sembla faire pencher la balance et rien qu’une fois, juste cette fois, Miso accepte de lui faire confiance. « De la viande … ? » avance-t-elle avec envie.  Oui, elle avait envie de viande, de nourriture, de quelques choses de bons. Elle n’était pas certaine que Yindee comprenne l’ampleur de sa réponse, le fait qu’elle accepte de la suivre mais Miso se doutait que la plus vieille avait très certainement conscience que c’était rare que la réfugiée se laisse aller ainsi … 


 

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Outfits. | Yindee se demandait souvent ce qu'aurait été sa vie si quelqu'un l'avait aidé lorsqu'elle n'avait eu plus aucune solution pour fuir la Thaïlande. Serait-elle une femme d'affaire ? Ou toujours une étudiante mais qui servait dans un café ou un restaurant ? Elle s’abîmait souvent dans ces réflexions à imaginait quelle femme elle serait, une femme qui pourrait assumer entièrement qui elle était aux yeux du monde. Pas qu'elle rougissait de qui elle était mais il était clairement difficile de parler de sa profession à n'importe qui. Elle espérait aussi fou cela puisse être, être cette personne qui pourrait permettre à la jeune fille de ne pas avoir à imaginer ce que serait sa vie si elle était mieux, si on l'avait aidé au bon moment. Elle sourit, un brin maternel, en entendant l'âge de Miso. A peine plus âgée qu'elle lorsqu'elle avait vendu son innocence. Yindee finit le morceau de muffin que lui avait donné la jeune femme et ne pu retenir un petit son victorieux en entendant la douce. " Va pour de la viande ! " Et elle se redressa, tendant une main à Miso pour l'aider à se relever et l'emmener dans un barbecue de la rue. Sortie du café, elle lâcha la jeune femme pour ne pas lui donner l'impression de l'entraîner de force. Au bout de quelques minutes elles entrèrent dans un restaurant de viande, l'odeur leur sautant immédiatement au nez, donnant faim même aux personnes rassasiés. Yindee trouva une place libre et s'y assit. " Faudra pas que tu sois surprise en venant dormir ce soir mais j'ai deux hérissons chez moi. Ils sont un peu bruyants mais adorables ! " Yindee essayait de détendre l'atmosphère en parlant d'un sujet neutre, et quoi de mieux que ses hérissons ? Adorables pacificateurs auxquels personne ne pouvait résister.  

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Miso avait l’impression qu’une tornade s’abattait sur elle. Sauvage et soudaine. Elle avait du mal à réfléchir, à peser le pour et le contre. Elle avait du mal à garder les idées claires. Elle avait trop faim, trop soif, trop sommeil. Elle luttait et tentait d’agir comme si de rien n’était mais son teint blafard et ses cernes ne pouvaient pas mentir. Rien qu’une fois elle décidait de se laisser aller et de faire, rien qu’un peu, confiance à cette inconnue. Elle ne se voyait pas de toute façon passer le reste de sa vie avec. Elle va juste lui donner un repas chaud et un toit pour la nuit. Elle prendra une douche et lavera ses vêtements. Puis elle pourra reprendre le court de sa vie et se chercher un travail. Enfin, essayer tout du moins … Elle se laisse entrainer, montrant quelques signes de réticences toute fois, comme si elle refusait d’être totalement apprivoisée. Elle déglutit et suit Yindee en silence. Elle ne sait quoi penser de la situation mais peut être qu’une fois le ventre plein elle pourra réfléchir correctement. Elle entre dans le restaurant et tente de garder une attitude normale mais … bon sang qu’elle a faim. Elle se sent soudain crasseuse et pas digne de ce restaurant. Elle hésite pendant un instant à faire demi-tour mais Yindee l’entraine rapidement à la table. Elle s’y assoit et se positionne de façon à ce qu’on ne la remarque pas. Elle attache rapidement ses cheveux qu’elle coince dans l’arrière de sa nuque en tentant de cacher leur saleté. Elle se recroqueville légèrement comme pour se cacher derrière la carrure de Yindee. Elle pose ses mains sur ses cuisses sans oser rien toucher. Elle fixe son assiette gênée et les joues rouges. Elle a l’impression que tout le monde la regarde, mais peut-être est-ce juste que ce duo parait bien atypique pour un repas en pleine journée. Miso s’est remise à gratter ses joues et ongles pour en retirer la saleté. Elle ne la remarquait jamais autant que quand elle était entourée de gens et qu’ils étaient proches d’elle. Son ventre crie famine et elle tente de masquer le bruit en posant son bras discrètement sur son ventre. Elle déglutit et relève la tête surprise vers Yindee. « Tu as des hérissons ?! C’est normal ici ? » Dit-elle en se trahissant légèrement avant de bafouiller « Enfin à Séoul je veux dire … genre les grandes villes … » son mensonge habituel était de dire qu’elle venait de la campagne pour éviter toute maladresse. Puis de toute façon elle ne se livrait pas facilement. « Ca pique non ? » dit-elle avec une candeur qui contraste avec les traits fatigués de son visage. 


 

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Outfits. | Yindee avait mis un moment à comprendre le manège de cette jeune fille. L'origine de ses gestes nerveux. Ce n'est qu'à force de l'observer en faisant mine d'ailleurs qu'elle n'était pas en train de le faire qu'elle compris. Mi So grattait le dessous de ses ongles et la peau de ses joues. Mais Yindee n'y voyait rien. La patronne du bordel ne l'aurait pas laissé avec un client si elle était visiblement sale. La douche obligatoire avant chaque homme, aucune des filles n'y échappait aussi courte soit-elle. Mais la thaï savait que quoiqu'elle dise rien ne la rassurerait, si ce n'est pouvoir se retrouver sous de l'eau brûlante à sa convenance. Alors dans l'immédiat à part changer de conversation pour détourner l'attention de la jeune coréenne elle ne pouvait rien faire. Elle leva un sourcil surpris à sa remarque mais ne s'y attarda pas. Avant qu'elle ne puisse répondre, un homme d'une petite cinquantaine d'années vint prendre leur commande. Voyant le regard de la brune, Yindee commanda du porc et du bœuf pour trois, un ragoût de tofu piquant et des soda. Pour ne pas déranger Miso, elle allait manger avec elle, de toute façon la thaï ne refusait jamais de la viande. « Souvent j'sais pas mais ça se fait. » Elle sourit doucement. « Ça a l'air de piquer mais c'est tout doux au final. Ça ne pique que quand ça se sent attaquer, comme les êtres humains finalement. » Comme Yindee. Comme Miso. Au fond, ils étaient tous des hérissons. « J't'en parle parce que ça vit la nuit, alors ils seront peut-être un peu bruyants. » C'est comme ça qu'elle justifia son détournement de conversation, comme si c'était pour la prévenir. Sur ce le type revint avec les deux bouteilles de soda, le riz, les accompagnements et la viande qu'il mit à griller aussitôt. Yindee pour décomplexer la jeune fille piocha dans les accompagnements (épicés bien sûr) et les disposa sur une bonne cuillère de riz. D'un geste de la main (elle avait la bouche pleine) elle pressa Miso de manger, lui montrant presque l'exemple.

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Peut-être que finalement je suis un hérisson ? Pense Miso en grattant sa joue avec un air pensif sur le visage. Elle sourit en coin à Yindee, la première esquisse d’un vrai sourire qu’elle lui offre pour la première fois. Faible symbole mais encourageant, la jeune thaïlandaise est sur la bonne voie. Miso n’est pas si mauvaise ou peu reconnaissante. Elle ne sait juste plus à qui faire confiance dans ce monde-là. Son instinct lui dit qu’elle ne risque rien avec la jeune femme en face d’elle mais elle a si peur de se faire avoir et de perdre ses maigres chances de retrouver son frère qu’elle préfère continuer sa route seule.  Le seul souci c’est qu’elle commence à s’essouffler et qu’elle ne sait plus comment mener ses recherches. Elle a peur qu’on la reconnaisse, qu’on la renvoie d’où elle vient … elle se demande combien de temps elle va pouvoir tenir dans un pays comme celui-ci sans papier. Elle renifle doucement et finit par lui demander «  Mais … ce n’est pas un peu bizarre d’avoir des hérissons comme animaux de compagnie ? » elle se sent presque gêné de sa question et l’a murmuré tout bas en se penchant par-dessus la table. Qui sait, peut-être que c’était monnaie courante ici … il lui faudrait encore quelques mois pour s’habituer à ses uses et coutumes … Elle sourit en voyant la viande arriver enfin et sent se ventre se crisper douloureusement. Elle hume le parfum délicieux et salive déjà. Elle laisse la jeune femme faire et prends une grosse bouchée de riz qu’elle mâche à s’en étouffer. Elle tousse légèrement et grimace au soju qu’elle ingurgite. « ché bon ! »