Glauque ? Cette réflexion lui aurait presque arraché un sourire. Ji Hye pouvait être très sensible oui, mais il y avait des choses qui ne l’atteignait plus. Ce n’était pas de l’indifférence, loin de là. Mais toutes les épreuves rencontrées par une personne au cours de sa vie influencent sa vision des choses. Dans le cas de Ji Hye, avoir contracté une maladie comme le cancer lui avait permis d’apporter une certaine réflexion aux questions relatives à la vie et la mort. Et, après tant de temps perdu dans des heures de soins interminables, sa notion de « glauque » avait beaucoup évolué. Elle aurait presque été désolée de ne pas s’en être rendue compte plus tôt. Tout le monde n’était pas comme elle à ressentir la même chose à l’évocation des termes « mort » et « chat ».
Ji Hye tiqua aux mots du jeune homme. Il devait faire des études de langue ou de lettres pour toujours réussir à décrire ce qu’il se passait dans sa tête. Ou peut-être de philo tiens. Il avait sans doute dû lui en parler pour que cette idée lui vienne à l’esprit. A l’entendre parler, elle ne savait pas non plus que ressentir. Elle se disait qu’au final, elle avait peut-être eu peur pour rien, certes, mais au delà de ça, elle ne savait pas si les mots de Noma lui faisait plaisir ou non, si elle s’en foutait ou pas. De toute façon, il ne semblait pas enclin à s’arrêter de parler tout de suite. Oui, c’était sûr qu’il faisait des études de lettres maintenant. Pour causer autant, c’était la seule solution possible. Et en plus, c’était qu’il n’avait pas encore eu assez de détails, le loustic !

Malgré l’infime surprise qu’elle ressentit lorsqu’il la prit sous le bras, Ji Hye ne se gêna pas pour glisser sa main dans la poche arrière de son pantalon et lui pincer gentiment les fesses. D’une, elle se sentait assez à l’aise pour le faire, de deux, elle était alcoolisée donc elle s’en foutait, de trois, les hommes ne se gênait jamais pour envahir l’espace féminin alors pourquoi ne pas faire la même chose ? Elle força une allure lente, comme si un tel rythme pouvait l’aider à parler plus distinctement. « Je n’estime pas être quelqu’un de méchant, mais je ne suis pas une mère nourricière pour autant. Je ne veux pas non plus défendre la veuve et l’orphelin ou être le porte parole de qui que ce soit, mais il y a quelque chose que j’aimerais dire avant de continuer. » Son regard était fixé sur un point devant elle, sans doute ce panneau électrique rougeâtre clignotant au bout de la rue. « En étant fils de médecin, je peux comprendre ta lassitude face à tous ces pauvres petits malades ne demandant qu’à sortir de leur coquille. Mais même si j’étais ou suis commune, est-ce vraiment un problème ? Peut-on juger quelqu’un qui a retrouvé ses jambes de vouloir courir à en perdre haleine, quelqu’un qui a retrouvé sa voix de vouloir faire du théâtre ou que sais-je, de la chanson ? Je ne sais pas, je ne sais pas. "Tout à coup" vouloir changer sa vie après des mois ou des années de vide, j’appelle ça rattraper le temps perdu. Ou soigner ses démons, comme tu préfères. Mais je trouve la dernière proposition un peu trop mélodramatique. » Sa voix était posée, un peu pressée peut-être, mais posée. Il n’y avait pas d’animosité dans sa façon de parler non plus. Elle se sentait toujours nerveuse bien entendu, mais elle n’avait ressenti aucun besoin de s’énerver ou de s’emporter. « Et puis, je n’ai pas non plus oublié ce que tu as dit. Entre avant et après quoi ? Ma maladie ? Le cancer ? N’aie pas peur d’employer les mots pour ce qu’ils sont. Un chien est un chien, un gros est un gros. Une maladie est une maladie. Rien de plus, rien de moins. » Trop de gens avaient tendance à nuancer leur propos. Il nous a quitté. Elle a des formes. Tant d’expressions pour adoucir les propos. Avec un sourire, elle ajouta : « Tu me fais un égotrip à la Voldemort là. C’est quoi qu’elle disait Hermione déjà. Ou peut-être que c’était pas elle. Que ne pas dire son nom c’était lui donner trop de pouvoir sur toi. Bah c’est pareil. » Elle se serait presque félicité pour avoir réussi à caser du Harry Potter dans un dialogue comme celui-ci. Noma se demanderait sans doute encore de quelle planète elle sortait pour mélanger tant de registres dans la même phrase. « En fait, c’est marrant que tu dises ça et que je te réponde ça, parce qu’en fait, c’est exactement ce pourquoi j’avais peur de te rencontrer. Que tu penses que je sois devenue la caricature de moi-même. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi j’en ai fait tout un plat pour toi en particulier. Après tout, tu n’es qu’un gars que j’ai vu une fois dans ma vie. Sans vouloir t’offenser bien sûr. Mais bon, tu te souviens. Un chien égal un chien, un gros égal un gros, Voldemort, etc. » Elle savait qu’elle n’avait pas répondu à toutes ses questions, mais elle avait tellement parlé que peut-être, il aimerait intervenir avant qu’elle n’aille plus loin. Quelle courtoisie.

Insinuer avoir enterré une partie de soi après avoir frôlé la mort, c’est un concept que Noma juge glauque. Il la trouve sans pitié, indulgente envers elle-même. Il est à parier que la sévérité de son jugement envers sa propre famille, celui qu’elle avait laissé paraître lors de leur rencontre, n’est rien comparé à celui qu’elle porte sur sa personne. Il n’hésite pas à poser des mots durs sur les faits. Elle a peur. Elle, qui semble adopter un comportement contradictoire à celui qu’il avait observé lorsqu’il avait cru faire connaissance, serait sûrement sensible à l’expression du passé que représente Noma à ses yeux. Il le voit comme ça. Son manque de réponse l’incite à penser qu’il est juste. Toujours, Noma vise toujours en plein dans le mille. C’est ce qu’il aime croire. Une légère expression passe sur le visage mutin de la belle et il y voit la confirmation de son triomphe. L’énigme Ji Hye s’éclaircie, tout devient clair et limpide. Son raisonnement est simple ; boderline entre le cliché de l’univers féminin et celui de la survivante. Il lui partage son opinion car il veut la mettre dans l’embarras. Il aime ça au fond, mettre les autres à l’épreuve. Il est tranchant, sans ça la vie est fade et sans challenges. Si elle ne sait pas répondre c’est qu’elle n’est pas aussi intéressante qu’elle veut bien le faire croire. Un nuage de rumeurs et de bruits de couloirs cachant une coquille vide. Il sent sa main lui caresser la fesse dans ce qu’on appelle plus communément mettre sa main dans la poche arrière d’un pantalon. S’il est agréable surpris à cette initiative, le petit pincé qu’elle lui offre en prime a le don de vraiment l’étonner. « Oh c’est ton fameux tour pour mettre les hommes dans ton lit. » cale t-il rapidement, un sourire mesquin sur les lèvres. Il fait mine d’avoir entendu une quelconque information à ce sujet alors qu’il n’en est rien, juste pour le fun. Il aime bien. Ses private joke avec lui-même l’amusent. Il s’adapte à son rythme de marche en notifiant le ralentissement. Un truc de nana, il n’aurait peut-être pas dû se lancer là-dedans au risque d’en avoir pour des heures de discussion plus ou moins intéressante. Pour l’instant en tout cas ça l’intéresse. Il l’écoute attentivement, reportant de temps à autre son attention sur les traits fins de Ji Hye. Il attend avec délectation ce qu’elle souhaite tant dire. Il l’écoute avec intérêt, appréciant qu’elle lui rentre plus ou moins dedans. Ce n’est pas violent mais elle ose lui dire ce qu’elle pense, et elle a tendance à penser qu’il n’est qu’un petit con de gosse de riche qui se la joue sans sentiments. Elle pense qu’il est cliché, voilà tout. « Au contraire, j’appellerai ça soigner ses démons. Vivre n’est pas du temps de perdu, il est gâché peut-être mais pas perdu. On est construits par toutes les expériences qu’on traverse, qu’elles soient bonnes ou mauvaise. Alors même si tu décides de tout changer du jour au lendemain, au final si tu le fais c’est que c’est tout ce que tu as vécu avant t’y a motivée. Alors je n’appellerai pas ça du temps perdu. » Il philosophe, il fait la morale. Du grand Noma. Parfois on souhaite qu’il n’ouvre pas sa bouche, tout simplement parce qu’il est difficile à suivre et qu’au final il n’attend l’avis de personne sur sa réflexion. Raison pour laquelle il n’expose que très rarement son opinion à ses interlocuteurs. L’alcool ou la compagnie du soir, il ne sait pas trop mais il se fait bavard en présence de Ji Hye. Elle rentre dans le tas, pose des mots sur ce qu’il n’a pas osé dire. Avec d’autres il n’aurait pas hésité. Là, étrangement, il n’avait pas eu envie de la bousculer. Ni de la vexer. Elle provoque sa sympathie. « Ta maladie, donc.» a-t-il tout juste le temps de caser avant qu’elle n’enchaine une histoire mélangeant egotrip et Harry Potter. Ça lui arrache un sourire, la dévisageant les prunelles rieuses. Il finit par lâcher un léger rire lorsqu’elle termine son discours ; comme si le fait qu’elle le relaie au statut de simple connaissance soit quelque chose de potentiellement blessant. « Ca je ne sais pas, c’est à toi de me le dire. T’es amoureuse, ce n’est pas un problème t’inquiète pas. » Un sourire en coin, il en content de sa vanne lourde. Puisque le sujet l’intéresse il se force à reprendre son sérieux. « Tu étais peut-être déjà en train d’opérer ta métamorphose qui sait. Ou bien tu as pensé que je te jugeai. Ce qui est vrai. Mais j’apprends à te connaître ce soir, c’est très agréable d’ailleurs. » Il voudrait aussi recaler le fait qu’il n’est pas allé tirer son coup dans une boîte de strip-tease comme un mec désespérer mais il le fera plus tard. Au lieu de ça, il visualise les taxis au bout de la rue. « Je te paie un verre ? On a une excellente cave de vins français. » Par « on » il considère la famille Park. Après tout il ne va pas s’approprier la cave de son père. C’est très chic de borie du vin, plus que du soju qui mine le cerveau. Alors il lui propose en toute simplicité de terminer la soirée sur une note chic, si tant est qu’elle puisse l’être avec sa dégaine de débraillée.

« Oh c’est ton fameux tour pour mettre les hommes dans ton lit. » Cette phrase n’avait même pas valut la peine d’être soulignée tant elle était stupide. Pour être honnête, Ji Hye en aurait bien ri mais elle savait que rebondir là dessus était la garantie de perdre son sérieux. Alors oui, dans sa grande mansuétude, elle ignora volontairement la remarque pour continuer sur sa lancée.

A son tour, elle finit par l’écouter avec attention. Ji Hye était une gosse de riche, elle faisait des caprices de temps en temps et n’avait pas toujours une grande patience. Mais elle avait une fratrie ; ne fallait-il pas faire des concessions de temps en temps ? Elle avait vécu des épreuves difficiles. Tout ça l’avait un peu sauvée de la fille geignarde et vaine qu’elle aurait pu devenir. Une fille qui aurait très vite été exaspérée parce que quelqu’un, en l’occurrence Noma, semblait la contredire. Des maux pour d’autres biens, il faut croire. Ji Hye elle-même préférait voir les choses du bon côté. Au final, cette discussion pouvait s’avérer assez enrichissante. Pour cette partie encore, peut-être que l'alcool facilitait la chose. La réaction de Noma, moins effrayante que tous les films qu'elle avait pu se faire, aidait aussi à ce qu’elle se sente plus à l’aise. Ou peut-être était-ce Noma lui même ? Ji Hye avait toujours autant de mal à répondre à cette question. « Si tu commences à jouer sur les termes aussi. Ce n’est pas très juste, je suis bête moi tu sais. » Un léger sourire venait alléger des propos qui pouvaient sembler sévère. Ji Hye était bien loin de se penser bête, elle ne faisait qu'une gentille allusion aux propos tenus à son sujet qu'elle entendait un peu trop souvent, et qui avait été très certainement entendus par Noma également. Une fille qui écarte les jambes un peu trop souvent et qui sourit un peu trop, c’est toujours un peu con, non ? Elle avait appris à passer au dessus de ces remarques, mais ce n’était pas toujours facile. Parfois, c’était surtout fatiguant. En particulier lorsque les gens qu’elle appréciait se laissaient influencer par les on-dits. « Mais bon, puisque tu veux être précis, et bien. Encore une fois, je comprends ce que tu dis. Mais je ne suis pas d’accord. Avoue que tu t’y attendais. » Qu’elle ne soit pas d’accord, bien entendu. Un nouveau sourire fleurit sur ses lèvres, pour ne laisser que son ombre subsistait alors qu’elle reprenait. « Pour moi, gâcher son temps et le perdre sont légèrement différents. A mon sens, le gâcher implique une certaine notion de volonté. Comment dire. Pour moi, on gâche volontairement son temps. En en faisant un mauvais emploi, en ne l’utilisant pas au mieux… Tu vois ? Pour toi, ce n’est pas du temps perdu, mais je ne pense pas que ce soit du temps gâché pour autant. C’est parce que je perçois mon temps comme perdu que je me sens motivée par quelque chose. Bien sûr c’est une conséquence de ce que j’ai vécu, ou pas vécu aussi. » Elle en serait presque à se demander si Noma faisait exprès de la faire réfléchir autant alors qu’elle était éméchée. Il devait le faire exprès oui, s’il attendait qu’elle soit sobre, elle ne lui aurait pas autant ouvert la porte de son esprit. Non ?

Preuve étant qu’il l’invitait même pas à boire un verre. « Si tu ne venais pas de sortir d’un club étrange, je penserais que tu essaierais de me pousser à un état d’ébriété élevé afin de profiter de moi parce que tu ne serais pas rassasié. » Bien sûr, elle le croyait quand il disait n’avoir rien fait - ou pas - mais bon, une petite taquinerie ne lui ferait pas de mal. Peut-être avait-elle également tort de limiter l’appétit sexuel de Noma a un spectacle ou à toute autre chose rating NC-17 qu’il aurait pu faire là-dedans. Si ça se trouve, il avait un zizi tout fou qui avait du mal à se calmer. Elle rit intérieurement face à sa pensée stupide. « Bien sûr que j’accepte, Monsieur Park. Après tout, je suis folle amoureuse de vous et mon coeur se déchire à l’idée de me séparer de vous. Alors, autant repousser l’échéance. »

Jouer sur les mots. Titiller sur un détail. Il adore ça, c’est son plaisir coupable. Pas si coupable que ça puisqu’il le revendique autant qu’il le pratique. Ji Hye est différente, elle admet elle-même être bête. Se jouer des rumeurs est le meilleur moyen d’en profiter. C’est drôle de transformer l’image renvoyée aux autres par ce biais de bouche à oreille corrompu.  « Je sais. » avoue-t-il calmement et sans état d’âme. Il a compris la référence, il se tient très au courant de ce genre de bruits de couloirs. Jamais il ne s’amusera à les faire circuler mais il le prend comme information non négligeable. Tout est réutilisable, le moindre détail peut un jour lui être utile. Le monde est fait de corruption, c’est quand on dévoile leurs petits secrets bien enfouis que les gens s’affolent et paniquent. La peur du jugement social. Il s’amuse à nuancer les paroles de la donzelle dans une longue tirade fatigante dont l’un comme l’autre se seraient passés. Ji Hye conteste. Elle n’est pas d’accord. Cependant elle a tort, il ne s’attendait pas à ça. « Hm non. J’avais espéré t’avoir cloué le bec. » penaud il hausse brièvement les épaules. Il continue de l’écouter, bercé par sa voix et les effluves d’alcool. Un rictus traverse son visage, il s’amuse de l’explication tout autant qu’il l’apprécie. « Je n’ai pas dit que c’était du temps de gâché. » Il fait exprès de réduire son long discours plein d’investissement personnel par cette unique phrase qui semble vouloir dire qu’elle a été à côté de la plaque pendant tout ce temps. « Vois-tu si tu n’avais pas vécu cela nous ne serions pas ici en ce moment-même. » Un fait en entraîne un autre, l’effet papillon les a même amenés à se parler. La discussion est trop profonde, elle sombre son esprit dans une conviction qui, mêlée à celle de Ji Hye, n’a plus de sens. Il s’arrête et prend une distance, les sourcils froncés et décidé à remettre les choses dans leur contexte. « Je t’ai dit n’avoir rien fait dans ce club. » Aussitôt dit il réalise qu’il s’est justifié pour rien et d'une façon des plus douteuses. « Donc non. Je ne suis pas rassasié. » Comment retourner la situation à son avantage en deux secondes. « Parfait. M’en voilà comblé. Ca m’aurait attristé que de te déchirer le cœur. Et de ne pas te mettre dans mon lit. » ou comment faire fuir une demoiselle à la vitesse de l'éclair. Mais Ji Hye est une salope. Du moins c’est ce que disent les rumeurs. Ces fameuses rumeurs. Ca lui arrache un sourire et il passe une fois de plus son bras autour de ses épaules pour se caler tranquillement jusqu’à ce qu’ils atteignent un taxi. Dans un excès de galanterie et de bonnes manières il ouvre la porte tel le porter situé au bas de son immeuble. « Mademoiselle. »

Un je sais, lancé sans prendre de pincettes particulières, qui ne surprenait pas Ji Hye. Drôle de sentiment ressenti à l’égard de Noma; un mélange diffus d’impression de le connaître sur le bout des doigts et de flou confus face à une personne qui lui semblait mortellement mystérieuse. Elle se demandait ce qu’il pouvait bien cacher, ce petit cerveau dissimulé derrière un doux visage revêtant bien trop souvent cette espèce de narquoiso-courtoisie. Ji Hye est pourtant laissée surprise par la réponse du jeune homme. Lui qui semblait prévoir tant de choses ne s’attendait pas à ça ? Surprenant. Elle ne savait pas non plus si avoir été sous-estimée était réjouissant ou non. Satisfaction d’avoir dépassé ses attentes ou déception d’être perçue de la sorte ? Là encore, Ji Hye préféra éluder la question, y répondre n’apporterait pas plus d’oxygène à ses poumons ou de neurones à sa cervelle. « Je n’ai pas dit que c’était du temps de gâché. »

Encore une fois, elle roula des yeux. Etait-ce la première fois ? Elle ne savait même plus. Ce garçon ne l’exaspérait que trop, comment savoir combien de fois elle avait levé les yeux au ciel à cause de lui ? Dire qu’ils ne s’étaient pas tant vus que ça. Sans quoi, ses yeux auraient déjà quitté leurs orbites. « Désolée de t’avoir mal compris, donc. » Ni sec, ni gêné. Son ton était d’une neutralité presque tranchante. Là encore elle n’était pas blessée - si quelconque réaction négative il y aurait dû avoir elle lui aurait sans doute donné un coup dans le bras et fin de l’histoire - mais elle avait surtout très bien compris son petit jeu, cette fois. Enfin, elle le pensait. Quoiqu’il en soit, son propre taux d’alcoolémie lui avait retiré l’envie de répondre par une nouvelle argumentation ? A quoi bon ? Elle préférait voir ça comme une victoire face à celui qui pensait lui avoir cloué le bec. Qu’il pense avoir le dernier mot, si ça lui chante. Ji Hye n’était pas du genre à baisser les bras face à l’adversité, mais il fallait parfois savoir faire preuve d’un peu de bon sens chose que, assez étonnamment pour certains, la jeune femme possédait encore. Par contre, lui ne semble pas en démordre avec cette histoire de club. Arquant un sourcil, elle écouta sa petite explication d’un air faussement dubitatif. Pourquoi autant se justifier ? « Ce n’est que moi, je m’en fiche tu fais ce que tu veux. Qui suis-je pour juger ? » Elle roula encore des yeux. « N’ajoute rien, j’ai compris, tu n’as rien fait, blabla. » Ji Hye étouffa un petit rire. Pourquoi riait-elle ? Ca non plus, elle ne savait pas. Peut-être prendrait-il cela comme une façon pour elle de se moquer de lui, mais même pas. Peut-être était-ce tout simplement dû à cette situation toute entière. « Tu peux me déchirer le coeur, à défaut d’autre chose.» Elle rit face à son jeu de mots plus que débile. L'alcool, l'alcool. Ou pas ? « Je ne pensais même pas à rentrer dans ton lit, je vois bien donc que tu n’es pas rassasié du tout. Un vrai mec avec un véritable esprit mal tourné. Voilà pourquoi la princesse finit toujours avec plein d’enfants à la fin de l’histoire, même les princes n’échappent pas à la règle. » Décidément, elle allait finir que Noma était vraiment un petit cochonou après cette soirée. Mais elle souriait, signe notable chez elle, comme chez beaucoup d’autres, de la légèreté dont elle faisait preuve. Une fois arrivés à un taxi, Ji Hye fut surprise de voir que Noma n’avait pas oublié ses bonnes manières. « Et en plus il est poli. Je finirais vraiment par croire à des intentions cachées dans tout ça. » Elle secoua la tête, avant de poser ses fesses sur le siège arrière et se glisser jusque derrière le conducteur qu’elle salua brièvement. Ji Hye non plus n’était pas si impolie mine de rien. « Maintenant, je vais penser à Gossip Girl, mais je doute qu’un dandy comme toi voie à quelle scène je fais référence. » Le sourire qu’elle avait sur les lèvres s’agrandit alors que l’image d’une scène* endiablée resurgissait dans son esprit. C’était le bon temps cette série quand même. Et voilà qu’elle divaguait encore.

Si d’habitude Noma aime à chercher les limites chez ses interlocuteurs, il se surprend à constater qu’il n’a pas un seul instant tenté d’atteindre celles de Ji Hye. C’est pourtant la première chose qu’il fait habituellement. Sans s’y être attardé il les voit pourtant apparaître devant lui lorsqu’elle balance banalement une excuse qui manque de profondeur. Elle est pétillante et agréable mais dès lors qu’on lui tient tête dans un argumentaire volontairement pompeux elle s’en agace. La rouquine n’est pas réceptive à l’arrogance. A son tour il se fait piéger, espérant que le discours se soit bien imprimé dans son petit crâne concernant ses virées nocturnes. Après tout est-ce réellement important ? Elle-même semble n’en avoir rien à faire, ce qui lui plait à vrai dire. Les filles sans chichis ce sont ses préférées. Il les mange au petit déjeuner. Il veut ajouter quelque chose mais elle surenchéri avec les paroles qu’il était sur le point de prononcer lui-même. Stoppé dans son élan, il esquisse un sourire et lui ébouriffe légèrement les cheveux dans un signe d’affection qu’on lui connait peu. Lui qui d’habitude évite le contact physique, il se surprend lui-même de son geste. Et ça ne s’arrête pas là. Allant de surprises en surprises, ses yeux s’écarquillèrent d’étonnement lorsque Ji Hye se lança dans l’art du jeu de mots. Il marque une légère pause, le temps de réaliser qu’il a bien compris ce qu’il a entendu. « Wow. Je n’ai jamais entendu une blague aussi graveleuse sortir de la bouche d’une femme. » Il se laisse finalement pouffer car cette fille est une pépite. Il se surprend lui-même à avoir ce genre de pensées, dans l’euphorie d’un moment où il cesse de contrôler ses réactions. Depuis Yon, les occasions où il laisse tomber ses barrières sont rares. Quasi inexistantes. Il retrouve en Ji Hye le brut qu’il avait autrefois tant aimé chez Yon. Tiré de ses pensées par le discours de la donzelle, il est soulagé de ne pas y être resté plus longtemps. L’alcool. Il porte de nouveau la paume de sa main sur le haut de son front, comme si ça pouvait lui permettre de tout remettre en place. Heureusement ce qu’elle raconte arrive à happer son attention, du grand n’importe quoi qui finalement résume assez bien leur situation. « Donc je suis un prince à tes yeux. » s’amuse-t-il avec un sourire triomphant. C’est tout ce qu’il retient de la description ô combien peu flatteuse qu’elle vient de tenir à son égard, comme d’habitude il fait le tri. Malgré ses suspections envers les réelles intentions de Noma, Ji Hye monte dans la voiture « Ca va, tu n’as pas l’air de trop t’en méfier. » Il fait claquer la portière et profite de son moment d'isolement pour étirer un énorme sourire révélateur de tout son amusement en contournant la voiture, comme s’il l’avait retenu tout ce temps. Rapidement il se glisse aux côtés de la sango qu’il analyse maintenant comme étant complètement débraillée. « Un dandy ? » Question rhétorique qui encore une fois l’amuse tant les étiquettes que Ji Hye lui colle sont nombreuses. « Désolé de te décevoir mais je n’ai jamais regardé un seul épisode de cette série. Qu’est-ce qu’ils font ? Ils se grimpent dessus ? » lança-t-il à tout hasard, imaginant difficilement ce qu’on pouvait faire d’autre dans une limousine au sein d’une série exclusivement destinée à la gente féminine. Jouer aux cartes ou checker son instagram n’était sûrement pas de la partie. Quoi que, rien n'était moins sûr pour la dernière option. « En tout cas vu ta dégaine c'est sûrement l'impression qu'on donnera en sortant de la voiture. » Elle est complètement débraillée et pour la dernière fois il l'analyse de haut en bas, constatant son pull mal placé, sa chaussette manquante et ses cheveux débraillés. En totale contradiction avec son geste précédent, il vient tenter d'aplatir ses cheveux ébouriffés sur le côté, comme si elle s'était pris une violente bourrasque.

Ji hye ne savait pas s’il fallait accuser sa petite taille, sa tête toute mignonne ou quoi, mais elle allait vraiment finir par se demander d’où venait cette manie de toujours lui ébouriffer les cheveux. Quoique, venant de Noma, il fallait peut-être prendre ça comme un signe exceptionnel venu du ciel (ou de l’alcool). Noma n’était pas du genre friand de contact physique ; Ji Hye n’en était pas certaine mais malgré le peu de temps passé en sa compagnie, ça se voyait quand même un peu comme le nez au milieu de la figure. La légèreté lui allait bien, elle devait bien se l’avouer. La surprise encore plus, à vrai dire. Ji Hye ressentait rarement autant de plaisir à l’idée de désarçonner quelqu’un. Il semblerait que rien ne pouvait se passer normalement avec Noma, de toute façon. Ji Hye n’était pas particulièrement friande du contrôle absolu, mais ne pas avoir la main sur une partie de ce qu’elle pouvait ressentir avait quelque chose d’effrayant. Bien des paradoxes s’entrechoquaient dans son esprit, mais qu’y pouvait-elle. Elle se surprendrait presque elle-même par l’éclat d’attendrissement qui traversa son regard alors qu’il se mettait à rire. Vraiment, cette nuit avait quelque chose de bien étrange. Et voilà qu’il se croyait prince ! Décidément, il fallait vraiment faire attention au langage employé avec ce jeune garçon, pas sûr que Ji Hye réussisse à tenir la route, en particulier vu son état du moment. Elle ressentait une très grosse envie de lui mettre une claque derrière la tête histoire de faire disparaître ce petit sourire triomphant mais bon. Autant apprécier les sourires tant qu’ils étaient là, Ji Hye était quand même d’humeur gentille. Elle préféra donc attendre pour répondre une fois bien au chaud dans la voiture.

« En même temps, dans tous les cas, on pourra dire que c’est à cause de toi si j’ai une allure pareille. » Elle le fixait alors qu’il remettait ses cheveux en place, tout en continuant à parler.Ce garçon était impossible à suivre. « Je peux les attacher si ma débraillattitude te perturbe trop mon prince. » Après tout vu qu’elle était déjà folle de lui, il pouvait bien être son prince aussi tant qu’à faire. Elle n'était plus à ça près. « Et non, je me méfie pas. Parce que contrairement aux autres, les princes sont polis. Ils demandent l’autorisation. Je peux toujours dire non. Et si jamais tu te la joues méchant prince comme dans Shrek, j’ai vu tous les films de Bruce Lee. Je pourrai toujours improviser une défense. »  Lorsqu’il abandonna enfin sa chevelure, elle se pencha pour rattraper son sac, sa contorsion presque étrange étant donné l’espace confiné dans lequel elle se trouvait. Sa voix, à moitié étouffée par la pression de son ventre contre le siège, s’éleva malgré tout. « Et pour te répondre, oui, ils se grimpent dessus. Mais bon c’était un détail un peu inutile je te l’accorde. Mais, mais, mais. » Son visage ressurgit devant celui de Noma, tandis qu'elle tenait à présent un paquet. L’emballage était impeccable, aucun mauvais pli. La couleur argentée du papier cadeau et les petites étoiles bleutées se reflétaient dans la nuit. « J’ai quelque chose pour toi. Je suis une corrompue alors, c’était une façon d’acheter ton pardon. J’espère que… tu apprécieras. » Dans son immense politesse, elle lui tendit le paquet, un sourire plein d’appréhension sur les lèvres. Le cadeau allait révéler un petit doudou pingouin encore dans sa boîte. A moins que ses renseignements aient été faussés, il n’y avait pas de raison pour qu’il n’apprécie pas le geste, non ?

A y regarder de plus près Ji Hye devait sortir d'une soirée très animée au vu de son allure générale. Une femme libre ou une femme perdue; il ne savait pas trop dans quel domaine jouait la rouquine. « Pas question de nourrir de rumeurs. » déclare-t-il tranquillement en démêlant ses doigts des cheveux aux reflets ocres pour terminer sa mise en place. Le temps de courtes secondes il se donne l’impression de jouer à la poupée. Une poupée qui parle et qui l’appelle prince. Fantasme un peu gore dont la pensée l’amuse. « Ca te donne un petit côté sauvage. Comme un chaton qui vient de jouer avec une pelote de laine. » décrète-t-il en recentrant son attention sur le visage de Ji Hye. « Tu sais, j’ai essayé de t’imaginer avec ta chevelure naturelle ce soir-là.» Pendant tout le repas. Ca l’avait occupé et il s’était amusé lui-même à lui donner des coiffures délirantes. Après coup il lui avait octroyé une longue chevelure noire de jais en pensant que ça ferait ressortir son regard si spécial. Aujourd’hui la lumière dans ses prunelles avait changé pour quelque chose de plus malicieux, de plus conquérant. Ji Hye était plus sûre d’elle, une évidence lorsqu’on sort d’une maladie pareille. Telle une menthe vengeresse elle s’acharnait sur les hommes pour faire passer son mal. Quel mal, ça, il l’ignorait encore. Il n’est pas sûr d’être vraiment intéressé par la question finalement, l’alcool lui accorde une légèreté qu’il ne s’offre habituellement pas. Là, tout ce qui l’intéresse, c’est la situation présente. « Wow mais t’es une vraie warrior. » lui accorde-t-il en écarquillant les yeux et en ponctuant d’un rire. « Mais il en fait plus pour m’impressionner. Je suis un prince avec une épée. Un pied tranché et on en parle plus. » Il s’imagine une scène à la Tarantino avec du sang qui gicle partout et le combat qui continue l’air de rien. Il l’admire dans sa contorsion, ne la questionnant point et préférant attendre son explication. Noma est un observateur, il attend que les gens l’informe des choses avant de demander brutalement. Alors voilà, il est là, un sourcil plus haut que l’autre et interloqué. Il se doutait que la scène de limousine avait à voir avec une scène de sexe. Il s’attendait presque à ce qu’elle brandisse un préservatif en se redressant mais il n’en fut rien. « Oh. » lâcha-t-il surpris, baignant dans ses effluves d’alcool qui le tirent d’un habituel silence. « Je ne comprends toujours pas pourquoi tu veux t’excuser. » Ca reste encore un mystère. Lui qui sait si bien comprendre le gens habituellement reste dans l’incompréhension quant à cette histoire. Il fixe un instant le paquet puis s’attarde sur son visage qu’il ne peut s’empêcher de trouver mignon. Il ne sait pas si c’est son attention ou son expression adorable mais il ressent tout à coup un élan d’affection envers elle. Calme toi. Il redescend ses prunelles pour admirer le papier. La dernière fois qu’on lui avait offert un présent remontait à quelques années maintenant. Avec l’âge, les choses n’étaient plus présentées de la même façon. Un virement faisait l’affaire, le nombre de zéros mentionnant la taille du cadeau. « C’est toi qui l’a emballé ? » Il défait le papier avec précautions par respect pour la personne qui s’en est chargée et découvre une petite peluche. Un pingouin. Pris au dépourvu, un large sourire fend ses lèvres toutes barrières abaissées. « Je ne sais pas quoi dire… tu as touché en plein dans le mille. » Il relève la tête puis, enfin, ça monte au cerveau. « Mais qui est-ce que tu as interrogé pour être au courant ? » Il plisse légèrement les yeux, à deux doigts d’accuser son frère. Emprisonnant le doudou entre ses mains il l’élève jusqu’à hauteur de ses yeux. « Je suis fan de lui. Il a une bonne tête à s’appeler Purple Rain je trouve. » Aucun rapport mais très dans sa tête c’est très cohérent.

« Je suis désolée, j’aurais dû effectivement prendre en compte le fait que tu es une précieuse, il ne faudrait pas ternir ton blason. » Ji Hye esquissa un petit sourire. Son ressenti sur la question était un peu bizarre, elle-même avait du mal à mettre des mots dessus. D’un côté, elle n’en avait évidemment que faire des rumeurs. Quelque part c’était peut-être une conséquence de son éducation ; son père, riche parmi les riches, estimait qu’avec leur position ils n’avaient de compte à rendre à personne (peut-être était-ce en partie pour cela qu’il avait eu autant de maîtresses, pas de compte à rendre même à sa propre femme, ha ha ha). Raison pour laquelle Ji Hye, en temps normal (reprécisons qu’avec Noma rien n’était normal), n’était pas du genre à justifier ses agissements plus que de raison ou à prendre en compte l’avis des gens. D’un autre côté, elle accordait quand même un minimum d’importance à ce que les gens pensaient d’elle. C’était ce même père qu’il lui avait transmis l’importance de se faire respecter en toute circonstance et de conserver une image à la hauteur de notre nom. Quelque part, avec ce papa volage, peut-être l’avait-elle bien suivi, après tout… Elle était tout de même surprise par la réflexion de Noma. A défaut d’avoir son comportement habituel avec lui, Ji Hye aurait pu prendre en considération que Noma n’était qu’une personne comme les autres, ce n’était pas la première fois qu’elle l’entendait, cette histoire de l’imaginer avec des cheveux sur la tête. La surprise se rapportait donc plus au fait que lui, fasse la remarque. « J’espère que tu n’es donc pas trop déçu maintenant que j’en ai sur la tête. Je pourrai même te laisser te jouer dedans, si un jour t’as envie de t’improviser coiffeur. » Proposition encore plus étrange venant de la jeune femme. Elle n’avait aucune psychose concernant sa chevelure et n’allait pas piquer une crise si on les touchait bien entendu, mais elle n’était pas non plus du genre à inviter quelqu’un à faire le branlebas dedans tous les quatre matins. Et puis, jouer dans les cheveux de quelqu’un, ça a quelque chose d’intime qu’on réserve à des gens qu’on aime. Et surtout, manquerait plus que Noma se la joue bébé enragé et découvre qu’en fait, elle portait des extensions. Aucun mal à ça, mais bon. Pas besoin de s’attarder sur la question.

L’effet qu’eut son cadeau était bien plus important à ses yeux. Pour une fois, c’était elle qui le scrutait. Ji Hye hocha simplement la tête lorsqu’il lui demanda si elle avait emballé le papier elle-même, presque déçue que l’on puisse douter de ses capacités exceptionnelles d’emballage. Le sourire qu’il afficha à la découverte du cadeau eut don de lui réchauffer le coeur. Elle pensait plus tôt à la légèreté qui lui seyait bien mais vraiment, un tel sourire était encore mieux et encore plus charmant. La jeune demoiselle n’avait pas non plus de fétichisme particulier, mais elle devait avouer que ce petit appareil dentaire lui donnait un air de grand adolescent qu’elle ne pouvait s’empêcher de trouver attendrissant. Son sourire s’agrandit alors à son tour, ses yeux s’agrandirent, elle était à l’affut de la moindre réaction verbale. Un rire franchit alors ses lèvres, avant que son poing ne se ferme et qu’elle ne tende son auriculaire. « Une warrior ne révèle pas ses secrets, mais puisque c’est toi : c’est mon petit doigt qui me l’a dit, il est magique. » Sa main retomba alors sur sa cuisse, avant qu’elle n’arque un sourcil fasse au sobriquet qu’il avait décidé de donner au petit pingouin. « Purple Rain ? Est-ce que c’est dans la continuité de toi qui te prend pour un prince ? Celui-là n’a pas vraiment d’épée. Enfin, n’avait. Mais, eh. » Ji Hye se pencha vers Noma pour lui attraper le bras et le secouer légèrement. « Ca te plait vraiment, hein ? Non mais dis-moi si t’aimes pas hein ? Je peux toujours trouver autre chose ! » Elle fit la moue. Oui, Ji Hye pouvait se montrer très gamine par moment.

Il se contente de rire à la considération de Ji Hye toujours aussi flatteuse. Il est gentleman il ne dit rien, à ne pas confondre avec précieuse. Et puis il n’a pas envie de lui préciser une nouvelle fois qu’il s’agit tout simplement de ses airs royaux et pas d’autre chose mais ce serait se répéter pour rien donc il évite. Ca l’amuse d’en arriver à ce genre de réflexion, lui qui renie son milieu plus que quiconque. Il focus un peu sur les cheveux orangés de la demoiselle, ça l’intrigue autant que ça l’amuse compte tenu de ce qu’il avait imaginé auparavant. La couleur champagne rosé il n’y avait pas pensé, c’est plutôt bien joué de sa part. «Non ça va, ça te donne un petit charme supplémentaire. » Ou comment glisser poliment qu’elle est devenue mignonne et qu’il ne l’appréhende plus comme une personne asexuée. Il se réjouirait presque qu’elle lui propose de jouer dedans si ce n’était pas uniquement pour jouer à la coiffeuse. « Alors en fait devenir coiffeur c’est juste un rêve de petites filles en général, ça m’a jamais trop attiré tu vois. » Il dit ça comme ça hein. Ca ne lui procurerait même pas une micro-satisfaction que de lui couper une mèche de cheveux. Au contraire il aurait l’impression de tout abimer.

Avec mille précautions il déballe le cadeau que Ji Hye lui affirme avoir minutieusement emballé. Ca lui fait plaisir à Noma, derrière ses grands airs il reste heureux lorsqu’on pense un peu à lui et qu’on lui fait l’effort d’une attention. Un pingouin. Elle ne pouvait pas tomber plus juste qu’avec cette petite créature toute douce dont il teste déjà la qualité de la peluche en la balayant de ses doigts. D’ailleurs son attention est happée par l’auriculaire ô combien gracieux de Ji Hye qu’elle lui expose avec délicatesse prétextant un superpouvoir ou un truc du genre. « Il fallait le dire si ton problème c’était que tu étais devenue trop fan de moi. J’aurais pu te donner plein d’avantages en exclusivité. » Toujours plus Noma, toujours plus. Et parce qu’il aime être dans la démesure, il offre à son nouvel ami un nom totalement ridicule qui n’a aucune cohérence. Et c’est bien pour ça qu’il l’affectionne d’ailleurs. Il sourit et s’amuse de la réflexion de Jiji qu’il doit avouer être parfaitement trouvée, la laissant secouer son bras comme une gamine. Ca lui donne un petit air mignon, elle est toute cutie Jiji. Il la serrerait presque tout fort dans ses bras si l’alcool en lui ne commençait pas à doucement redescendre. « Mais bien sûr que ça me plait ! Il est trop mignon en plus. » comme pour appuyer ses propos, il plante le regard vitreux de la peluche à quelques centimètres de celui de Ji Hye. A peine oppressant. « Je vais même dormir avec. Tu peux venir avec nous si tu veux. » Il sourit l’air de rien, jouant de ses sourcils comme le pervers qu’il revendique être avec seulement quelques mots. « C’est nul Purple Rain. Je vais l’appeler Prince tout court. » Pincée entre ses doigts, il élève la peluche à hauteur de ses yeux qui viennent tout juste de baisser de niveau ; affalé pour s’ajuster à la petite taille de Ji Hye, la tête penchée dans sa direction. « C’est quoi ton animal préféré ? Je ne peux pas rester sans rien faire, ça me gêne ta fanattitude. »