Conclusion : c’est mieux d’être un singe qu’un sanglier. Au moins, on est intelligent, on se rapproche de l’homme. Elle, elle fonce la tête la première, elle se croit intelligente et elle effraie tout le monde. C’est ce que je me dis en l’entendant me comparer à cet animal adorable qu’est le singe. Retenant une réponse pour ne pas que ça continue sans cesse – me disputer avec elle est bien trop inutile et épuisant pour que ça ne s’arrête pas – je m’approche moi-même de l’arc pour me préparer à tirer. « Je n’essayais pas d’être gentille, mais bon, si pour toi, sous-entendre que ta compagnie est une plaie c’est être agréable, on peut dire que j’ai été sympathique. » Et je ne serais même pas étonnée qu’elle en soit fière. Bien sûr, son objectif dans la vie, ce serait d’être mal vue, ça lui donnera un peu d’importance dans sa vie inutile. Chacun sa façon de se rendre différent – moi, au moins, c’est dans le bon sens. Je ne veux pas devenir une fille aimée de tous, autrement je ferais en sorte d’arrêter mes caprices et de devenir bien plus mature. Je veux simplement être quelqu’un d’utile, de réellement utile, contrairement à elle. Quitte à vivre, autant que ça serve aux autres ; et puisque je vis grâce à quelqu’un qui m’a aidé, je veux vivre en aidant les autres. C’est sous ce point de vue que j’ai réussi à aller mieux, quand j’étais plus jeune. Ça me semblait compliquer de rendre la pareille à mon frère, qui voulait toujours paraître si fort, alors tant que je ne pourrai pas le faire, je rendrai la pareille à la vie en général, aux autres en difficulté. Un sens de la solidarité qui échappe sans aucun doute à Miu.
Je me mets en position pour tirer. Je ne me concentre pas vraiment. En fait, ce serait mieux que je reste ici pour la journée, seule bien sûre, ça me permettra de me calmer. Si je rentre dans le dortoir, je vais sans doute péter un plomb et je ne voudrais pas que Seah supporte ma mauvaise humeur. Je ne sais pas si elle sera dans la chambre quand je rentrerai mais au cas où, il ne vaut mieux pas que je mette tous mes efforts pour viser dans le mile. Normalement, je pouvais le faire – la compétition étant une exception, peut-être parce que c’était ma première et que j’étais stressée – en entraînements, ça m’était arrivé bien plus d’une fois d’y arriver dès le premier coup. Du coup, là, il ne fallait pas que je me concentre sur ça. Je regarde la cible quelques secondes, j’entends la flèche être tirée par Miu et je lâche la mienne aussi, sans viser mais en espérant quand même que ça ne va pas complètement louper la cible, autrement je risquais de devoir entendre la remarque de Miu.