Something about us - Daft Punk

It might not be   t h e   r  i  g  h  t time
I        might not be the right         o   n   e
But there's something about us I want to say
Cause' there's s  o  m  e  t  h i   n  g   between us anyway


E    l    l    e    a les yeux dégoulinant de noir, sauvage et indomptable, la rage dans ses pupilles dilatées.  ✩☾✩  Après avoir reniait ses propres parents pour cet homme, prête à sacrifier tout ce qu’elle avait, c’était un affront d'oser la jeter, vulgaire maîtresse au charme d’Orient. Elle avait tant attendu qu’il quitte tout pour la Turquie, pour elle, pour Lüftü, mais au final,c'était l'autre enfant qu’il préférait. Alors, passa des mois à pleurer tout son chagrin et son amour, éprise de folie et bridée par la colère, elle s’envola pour Séoul avec le bébé aux bras, des centaines d’appels et des milliers de messages sans réponse. Bloquée, insultée, sous ordre de restriction de la police, si elle devait souffrir autant, elle lui en ferait baver tout autant, un carburant qu’elle ne concevait pas. Quitte à traîner d a n s   l a  b o u e  ce sale type, à briser le mariage et la famille qu’il avait déjà, la décision finale resta la vengeance. Ô et combien elle prit un malin plaisir à rendre sa vie un Enfer, chantages et provocations, m a l s a i n  jeu de séduction. Si maintenant c’est un excès qu’elle a du mal à assumer et à se pardonner, il faut l’avouer qu’elle en tira une grande satisfaction. Cela lui permit de moins regretter les études qu’elle rata, ses jeunes  années à rire et picoler et à soulager aussi l'orgueil qui la dévorait et la refusait de retourner auprès de ses racines désavouées. Coincée entre deux pôles, la mère se rend compte qu’elle n’a plus qu’en ce monde, ce petit garçon aux cheveux bruns et à la curiosité hors pair.  Sans diplôme, sans attache, elle s’impose et se fond dans la masse, d’un coréen   b  a  n  c  a  l  e et d’une culture   d  i  s  s  e  m  b  l  a  b  l  e. Elle enchaîna les petits boulots, galéra à les trouver et cauchemarda à les garder, commença les emprunts et les mauvaises fréquentations. Si elle se plia en six pour le faire vivre, elle abdiqua aussi de son temps personnelle qu’elle aurait voulu lui réserver. Une habitude de ce remue-ménage où le marmot s'occupe de lui comme un grand, jonglage incessant entre sa prison d e  v e r r e  et tous les autres inconvénients. Une tension palpable encore maintenant, où l'autorité maternelle n'a jamais été très bien reçu de la part du fils. Profonde cicatrice d'une s o l i t u d e  béante, un abcès de rancunes qu'il n'arrive pas à percer.


E    l    l    e  a les yeux grands ouverts, terrifiée, deux étoiles d'ambre dans la pénombre de la pièce mal éclairée.  ✩☾✩  Euijin ne se souvient pas de grand chose, mis à part de chaussures rubis et d'un ciré jaune. Tout s'est passé si précipitamment, une camionnette noire, une paire de bras et la gamine au sac cuivré n' é t a i t  p l u s  l à . Il avait couru vers le véhicule dans un imprévisible réflexe nonobstant il ne récolta que de se faire à son tour empoigner et jeter dans l'obscurité. Silence. Le moteur tourne. Pleurs étouffés dans le sac qui recouvre sa tête, bruits de klaxonne et crissements des pneus, sa respiration saccade, il panique, il   p   a  n  i  q  u  e, on le manipule et on le brusque, le pousse et le tire, une gifle se perd et des cris retentissent, indiscernable peine, indéniable douleur, les portes se closent sur des victimes a p e u r é e s . Muet, il reste sans rien dire un long moment puis des pas se rapprochent et des doigts s'accrochent à son cou pour retirer violemment le tissu l'aveuglant. Son crâne retombe à terre brutalement, tangible réalité, quatre murs humides les entourent, lui et la petite fille aux astres accrochés à son parapluie. Le d e s t i n  se jouait sûrement d'eux, sûrement de lui, pauvre minet en quête d'un peu d'appui, Athéna sous son nez, aux joues rouges de larmes séchées, sa voix s'étouffa sous la terreur mais dans le plus grand calme, il lui offrit une certaine paix. Dans leur u n i v e r s  ailleurs, imagination fructueuse de leurs bas âges, ils s'égarent dans la voie lactée, contant l'histoire de chaque planète, de leur façon d e   t o u r n e r . Ils décollent tous les deux vers des galaxies bleutées et passent sur les vagues de l'espace illimité. Un long trajet qui n'a pourtant duré que cinq jours. Quelle éternité. Un lent voyage qui les a rapproché. Innocence et pureté, une c o n n e x i o n  aliène qui chamboule et renverse les barricades érigées. Et peut-être que finalement, l'h i s t o i r e  le voulait ainsi. Se retrouver, passait d'une célibataire invétérée à une famille à quatre, peut-être qu'il le fallait. Trois ans seulement et c'est le goût qui lui avait manqué. Voyageurs intergalactiques aux merveilleuses épopées. Figure p a t e r n e l l e  qui lui avait été négligée. Présences qui pallièrent l'infection qui l'avait contracté au poitrail, Euijin était heureux et le savait.



E    l    l    e  a les yeux cernés de rides, cette étrangère au nom de Necmi, cette grand-mère aux histoires venues de loin. ✩☾✩  Pourtant Ô pourtant, on ne peut rien garder dans ce bas-monde trop longtemps. Terrible trahison, ils s'en allèrent comme ils étaient venus, fragments de couleurs dans sa vie en  n o i r  et   b l a n c. Les Ryeo filèrent en lui volant son cœur, ils partirent en reprenant le sable du temps. Retour à la case départ, un  z é r o  pointé et une horloge arrêtée. Les aiguilles sont bloquées et il n'y a plus personne pour l'écouter, le confort est là toutefois le mal est fait et il s'é c h a p p e chercher la douceur. Parce que l'amertume le ronge, qu'importe les efforts de sa mère, qu'importe, q u ' i m p o r t e . Seul, seul, à nouveau seul, fils d'immigrée que tout le monde charrie pour son faciès différent, fils d'immigrée qu'on rit de son accent, fils d'i m m i g r é e , c'est déjà tant. Rejeté et isolé, il se protège dans sa bulle, dans ses chiffres et les sciences occultes. Jusqu'à ce qu'on l'envoie, loin là-bas, dans la contrée où il était né. Là où ses grand-parents pouvaient enfin l'aimer. Le coréen s'est reconstruit en Turquie, le jeune adolescent s'est refait une santé, auprès de traditions et de souvenirs qu'il avait raté. P a y s a g e s  et s p e c t a c l e s   incroyables et de toute beauté, une mer à perte de vue, il se jette à l'eau, chaque été, il s'y ressource et s'y épanouit, le sel entre les doigts et les rayons du Soleil entre les mèches de cheveux.


I  l   a les yeux d'un adolescent encore, mais il ne cherche plus autant, il se laisse bercer par les flots, pansant ses erreurs et s’excusant du jour d'avant ✩☾✩ Personne n'aurait pu le penser ainsi, toujours entouré, sourire pendu aux lèvres permanent, généreuse chaleur qu'il s'efforce à répandre gaiement. Personne n'aurait pu l'imaginer, lui l'enfant au yoyo jaune fluorescent, qui parlait une langue qu'on ne comprenait, il était là, au centre de l'attention, rires de joie éparpillés, les p i g m e n t s  de ces gens parsèment l a  t o i l e  qu'il a enfin c o l o r i é . Après tous ces efforts, c'était une récompense. Après tous ces efforts, revoir Athéna de ses mirettes lui était moins pénible, après tous ces efforts, la ramener à son cœur était fait avec candeur, a p r è s  
t o u s   c e s   e f f o r t s  , remarquer que quelque chose n'allait pas... Noircissait le tableau parfait qu'il avait dessiné. Complice involontaire ou à moitié pétrifié, c'est comme se retrouver de nouveau le visage masqué toutefois cette fois-ci, pour ne pas avoir à se décider. Les doutes le hantaient, elle lui souriait et l'assurait que tout était comme il le fallait. Les signes étaient là. Athéna était là. I l   é t a i t   là quand elle avait ses doigts entrelacés à la rampe de sécurité : Une sirène à la proue d'un bateau, prête à franchir le cap, à se laisser couler, à s'envoler dans l'infinie nuitée. Dans un prévisible réflexe, il court. Depuis ce jour, il court. Il fuit. La vérité et la réalité. Une tâche d'encre sur son navire lustré, la navette le sonne pour les anneaux de Saturne, s'il y retourne ses ventricules vont lâcher. Quand il la voit, il ne se tient pas, quand il la voit, le mensonge d'Evans lui retombe dessus tel un a s t é r o ï d e  sur le g l o b e   t e r r e s t r e . Bourde stupide de celui qui regarde ses pieds, bourde débile du garçon qui sait mieux s'enfuir qu'avancer.

Alors m a i n t e n a n t  e n c o r e , comme ça l'a toujours été, il a ses yeux dans les siens, deux perles dorées face à des diamants de jais. Et peut-être est-ce ainsi va le courant, chaud, froid et violent.


Veridis Quo - Daft Punk