In Ho était sorti faire sa petite course matinale habituelle. Il entretenait son corps et ce n’était absolument pas nouveau. Mais cette nuit, il s’était endormi avec le petit corps de Lyvan contre le sien et il avait été tellement heureux de la voir que sa course avait été plus effective qu’il ne le pensait. Un meilleur chrono, de meilleurs stats. Bref, tout avait été parfait par la simple présence de son petit bout de femme le matin avec lui.

Alors In Ho avait voulu lui faire une petite surprise, amenant un petit déjeuner à la maison. Une nouvelle boulangerie venue tout droit de France avait ouverte. Et il s’était arrêté sous la bonne odeur que ça dégageait. Et leurs pâtisseries étaient réputé bien qu’il n’en avait jamais vraiment mangé. Alors c’était sans hésiter qu’il avait dépensé son argent durement gagné pour le petit minois de son ange. Croissants, pain au chocolat en main, il se dirigea à grandes foulées au dortoir, un sourire aux lèvres. Il monta rapidement les escaliers et en ouvrant la porte, il fit tout tombé. Son esprit s’embrouilla alors qu’une migraine importante le prit, le faisant perdre rapidement l’équilibre, tout tournait autour de lui. Il se tenait à la poignée de porte comme il pouvait avant de voir les petits petons de Lyvan apparaître dans son champ de vision. Un cri aigu lui transperçait les oreilles et son fantôme apparut sous ses yeux. Cet homme, un sourire narquois, vainqueur. Il était là. Comme toujours. Lui qui pensait l’avoir perdu. Sous son bonheur, In Ho l’avait fait disparaître. Douce hérésie de sa part. Son fardeau ne partirait jamais. Jamais. Les larmes dévalaient ses joues sûrement sous le regard perdu de sa petite amie, lui qui était à genoux, se maintenant la tête tant la douleur était horrible. Il avait l’impression de mourir In Ho. Une nouvelle fois. Son âme se noircissait de plus en plus, écrasant toute l’évolution qu’il avait pu faire à ses côtés. Alors sous une demande désespérée, une envie de lumière, sa lumière. Il appela pour la première fois de sa vie à l’aide. ”Lyvan..” Il demanda de l’aide à quelqu’un d’autre que Bo Bae

Un soupire s’échappe des lèvres de Lyvan alors qu’elle sent In Ho s’arracher à son étreinte. Elle affiche une moue, encore endormie, de le voir partir, bien qu’elle connaisse les habitudes de son amant. Amant. Ce nouveau statut qu’avait In Ho arrachait toujours des sourires timides à la jeune femme. Elle n’avait jamais été de ces femmes prudes qui ne voulait rien savoir de la sexualité et qui était gêné de cette réalité entre deux adultes. Mais depuis son traumatisme Lyvan peinait à s’épanouir pleinement de cette pratique. In Ho avait attendu de long mois, plus d’un an, avant de pouvoir poser enfin une main sur le corps de sa petite amie. Il n’avait jamais rien forcé, avait attendu, simplement patienté que sa femme soit prête, bien conscient que tout ça ne le concernait pas. Que ce n’était ni sa faute, ni un manque de désir pour lui de la part de la jeune femme. Il avait compris qu’elle luttait contre des démons et des images bien trop récente encore pour qu’elle puisse pleinement s’offrir à lui. C’était cette bienveillance et cette patience, dont il avait preuve, qui avait su rassurer Lyvan et lui donner le courage de franchir ce dernier cap. Il y avait encore tant de chose qu’elle n’aimait pas faire dans leur intimité, des gestes, des caresses, qu’elle ne supportait pas. Elle grimaçait parfois et le stoppait l’air désolé, mais In Ho ne s’en offusquait pas. Il savait combien cela pouvait être dur pour Lyvan, alors il se contentait de faire ce qu’elle aimait, de faire ce qu’elle voulait, la réconciliant avec l’acte de chair. Il prenait le temps, de chercher les zones qui lui plaisait, autant qu’il évitait celle qui lui faisait monter les larmes aux yeux. Lyvan ne l’aimait que plus encore et cherchait tant bien que mal ne serait-ce qu’un défaut chez lui … ? Elle n’en voyait aucun. Pas un seul. Elle se redresse subitement en entendant comme un bruit sourd et tourne la tête pour voir In Ho à genoux au sol. Que lui arrivait-il ? Le cœur pris d’une panique soudaine elle se jeta à ses côtés et chercha son regard. Dieu qu’elle se détestait de ne pas pouvoir parler, capter son attention lui qui semblait souffrir de la tête. Et soudain elle s’imaginait le pire, une tumeur ? Un cancer ? Une migraine ne vous plaquait pas au sol aussi soudainement. Elle pouvait être cruellement douloureuse, mais jamais d’une façon aussi soudaine. Elle panique et cherche son visage qu’elle veut soulever pour qu’il puisse la voir signer. Mais il semble ne pas être capable d’ouvrir ses yeux alors la jeune femme le berce contre lui en lui caressant le dos comme elle pouvait pour lui montrer qu’elle était là …

Lyvan l’écoutait, sans comprendre, il lui disait des choses qui n’avaient aucun sens pour elle car elle n’avait rien vu. Strictement rien. Comment ça un syndrome post traumatique. De ceux qu’elle subissait encore aujourd’hui. Qu’avait-il vécu pour garder ça enfouie au fond de lui ? La jeune femme se sentait plus désemparée par la fait qu’elle ne le connaisse pas que par la peur du garçon qu’il avait de la perdre. Irrationnel à son sens. Il aurait pu faire la pire des folies qu’elle serait restée avec lui. Enfin peut-être pas toutes, mais la plupart. Elle en était certaine, se disant même avec cette fougue remplie d’amour qu’il aurait pu tuer un homme qu’elle s’en moquait bien, l’enfant est bien loin de réaliser la portée de ses pensées. Alors elle l’écoute, suspendu à ses lèvres, à son visage elle l’écoute, le découvre. Découvre son passé. Evidement elle lui signe qu’elle restera, qu’elle lui promet, que rien ne la fera s’éloigner de lui. Elle ne réalisait pas à quel point tous les deux avaient pu être secrets l’un envers l’autre, et elle plus que n’importe qui le comprendrait. Il ne lui avait pas caché par manque de confiance, mais par crainte que ça change tout entre eux … elle ne le voyait que comme un roc sans comprendre toutes les failures qu’il portait. Son pauvre amour … il lui donnait tant et elle … qu’elle petite princesse, monstre d’égoïsme. Elle aimerait se jeter sur lui pour l’embrasser mais elle sait qu’elle doit écouter jusqu’aubout. Elle écarquille les yeux et déglutis en le fixant. Elle signe maladroitement « tu as tué quelqu’un ? » répète l’information dans sa tête encore et encore avant de froncer les sourcils « Mais c’est … » mince elle ne sait pas le signer. Elle s’agace, se lève du lit attrape un bloc note et griffonne d’une écriture grossière, saccadé, énervée en lettre capital « LEGITIME DEFENSE ! » elle jette son carnet, petite féroce qui veut comprendre, elle le tire à elle et attrape son visage pour croiser son regard et lui faire comprendre en signant rapidement « Je ne partirais pas pour ça In Ho ! Jamais ! » puis parce qu’elle avait un million de questions posa la première « Que s’est-il passé ensuite ? »

 

Le jeune homme était mal. Il savait qu’il avait balancé la dernière phrase ainsi. Sans prévenir, sans rien dire. Juste balancer la mort d’un homme qui le poursuivait depuis toujours. Et Lyvan, il avait tellement peur de sa réaction. Elle lui avait signé qu’elle resterait. Mais ce n’était pas pour autant que c’était acquis. Il avait ôté la vie d’un homme bordel! Et son petit trésor qui gigote devant lui ne l’aidait aucunement à rester calme. Il avait peur, il était effrayé même avant de regarder le mot. Légitime défense . Peut-être, il n’en savait rien. Il la laissa faire, fixant son petit bout à lui s’énerver pour lui. C’était rare. De voir quelqu’un agir ainsi pour lui. Et étrangement, ça le rendait réellement heureux de la voir ainsi. ”La vérité est que je ne sais pas si il est mort” Il déglutit difficilement en se remémorant la scène. ”Ils étaient là. Ses collègues s’étaient à moitié enfui, je ne les voyais plus. Je sais qu’ils étaient en mauvais état mais c’est tout. Et lui, c’était en soit le chef”. Du moins, c’était lui qui dirigeait le tout. Il le savait, ça se voyait dans les mouvements des deux autres. ”On s’est battu, j’étais fatigué et dans un sale état. Je l’ai assommé, je suis un gamin de rue Lyvan, je sais me battre comme personne. Il est tombé, la tête la première sur le rebord du trottoir.” Son expression ne montrait que douleur et noirceur à l’intérieur de lui. In Ho était détruit par ce moment de sa vie. ”J’ai vu...son sang, se répartir tout autour de sa tête. Tout s’est arrêté autour de moi. Je ne voyais que lui. Sur le sol. Et j’ai eu peur. J’ai fui. Loin. Très loin. C’est à ce moment la que Bo Bae m’a repris.” Il se souviendrait toujours l’expression de sa mère quand elle l’avait vu. Elle avait su directement que son fils était mort. ”Je n’étais pas beau à voir Lyvan. Et je suis devenu ce que tu connais maintenant. Même si...je change à tes côtés”

Evidemment qu’elle se mettait en colère pour lui. Pour cet homme qui avait subi une injustice. Il s’était fait agressé et en se défendant il avait blessé, peut-être même tué un homme. C’était étrange comme l’information refusait de lui monter au cerveau. Elle était prête à le défendre envers et contre tous. S’il avait tué un homme il en payait aujourd’hui le prix avec un traumatisme qui le poursuivait des années après. Il se punissait de son acte alors qu’il n’avait fait que se défendre. C’était presque pire pour Lyvan. Parce qu’elle savait que son homme en souffrait, qu’il ne pouvait tolérer cette sensation d’avoir ôter la vie d’un homme … Il ne l’a jamais voulu, elle veut le croire, croire en ses mots. Elle l’écoute, se place à ses côtés dans cette rue alors qu’on lui tombait dessus. Un gamin des rues … les mots la frappent et lui brise le cœur. Qu’avait vécu son amour alors qu’elle se complaisait dans un monde de luxe et de richesse. Il avait bravé tant d’épreuve, il s’était battu pour sauver sa littéralement. Dieu que cette injustice la rendait folle. Elle aurait aimé l’arracher à cette vie, le sauver bien avant qu’il ne la sauve. Mais on ne pouvait changer le passer, et les épreuves qu’il avait traversées n’avait fait de lui qu’un homme bon et remplie de valeur parce qu’il estimait la vie. Il avait vécu l’enfer, Lyvan le devinait, et elle ne pouvait être que fier de lui. Peut-être qu’elle se cachait derrière le fait que rien ne pouvait être sûr quant à la mort de cet homme mais … qu’importe. Elle refusait que celui puisse être une raison de l’abandonner. Elle l’aimait plus que tout et cette aveu … dieu qu’il renforçait cet amour, aussi étrange que ça puisse être. Mais elle ne pouvait pas lui en vouloir, elle ne pouvait pas le juger, ni lui dire combien c’était mal. Elle n’aurait pas pensé ses mots, non elle aurait menti. Son petit ami s’enfonce dans ses souvenirs et la noirceur qu’elle voit sur l’expression de son visage lui arrache un cri du cœur (silencieux et douloureux). Elle passe une main dans les cheveux du garçon et relève son visage vers le sien. « L’homme que je connais est merveilleux et l’homme que tu es à présent … que tu as pu être, que tu seras, je les aime tous In Ho. Rien de ce qui a pu se passer dans ta vie ne fera changer ça … tu n’as fait que te protéger … » elle marque une pause et signe « Mon amour … tu n’es pas un monstre … tu n’es qu’un gamin qui a sauvé sa vie et qui se punit encore aujourd’hui pour cet acte qu’il ne voulait pas commettre. Tu n’voulais pas tout ça … tu n’voulais pas le tuer. » elle affiche une mine désemparée en venant coller son front au sien. Mon amour, tu as tellement souffert toi aussi … et la jeune femme se recule juste assez pour lui signer « Je suis désolée … de n’avoir rien vu … et crois moi In Ho, rien de changera entre nous … Ou si, je t’aime encore plus bon sang … »