Yoonji était un garçon qui lui donnait matière à beaucoup réfléchir. Parce que même le dos courbé au-dessus de sa feuille, ses pupilles allant et venant de l'oiseau à son crayon, l'esprit de Kô était troublé par les paroles de son hôte. Être lui. Qu'est-ce que cela signifiait vraiment, dans le fond ? Kô attribuait souvent des rôles, que ce soit à lui, ou aux autres, et il s'y perdait de plus en plus. Il ne se rendait peut-être plus tout à fait compte de la personne qu'il était sous ses parures, des personnes qui se cachaient sous ces fameux rôles. Glissant une mèche de ses cheveux blonds qui lui tombaient sur le visage, il laissa quelques secondes ses pupilles se perdre sur les plumes de l'animal si coloré. Son attrait pour Sun n'était sans doute pas une coïncidence, lui qui appréciait être si beau, si coloré, si charmeur. Il se mordit la lèvre et l'oiseau choisit cet instant pour s'envoler. Il rejoignit son propriétaire dans la cuisine ouverte et Kô fit aussitôt de même dans cet appartement trop grand, dans ces vêtements trop grands. Pourtant, c'était si chaleureux.
Le japonais se hissa sur l'un des tabourets entourant le plan de travail et acquiesça en ouvrant le cahier à la page de son dessin. Il ne montrait pas si facilement ses oeuvres, mais là, c'était plutôt différent comme il s'agissait de l'animal de Yoonji. Ce n'était qu'une esquisse, mais il espérait qu'elle plairait au brun.

« Si tu as de la peinture, je pourrais t'en faire une toile », lui dit-il avant de faire le tour du comptoir.

Il voulut l'aider dans la préparation du repas qu'il avait choisi. Tous les ingrédients étaient déjà sortis et ils étaient de très bonne qualité. L'estomac de Kô se mit doucement à gargouiller tandis qu'il s'attelait à couper les légumes après les avoir lavés. Et puis, encore une fois, la curiosité légendaire du blond fit son apparition, ses pupilles braquées sur son interlocuteur. A ses quelques mots, il sentit son coeur se serrer. Yoonji ne lui en dévoila pas plus, mais il comprit tout seul que c'était toujours difficile de le supporter. Kô n'avait pas encore connu l'amour avec le grand A, celui qui le faisait tant rêver. Alors même les fois où il avait été en relation avec quelqu'un, tromper, être trompé, c'était des mots futiles, sans importance réelle.
Et puis, quelques secondes, son couteau cessa de découper les légumes. Il réfléchit encore aux paroles de son hôte et il crut se sentir défaillir un peu plus. Cette soirée était chargée en émotions face auxquelles Kô n'arrivait définitivement pas à faire face.

« Non, finit-il par avouer. Enfin, peut-être, si. Est-ce que ça marche si je te compte ? »

Un léger voile de tristesse se glissa dans ses yeux avant qu'il n'esquisse un sourire à l'encontre de Yoonji. Il reprit ensuite la préparation du repas en silence, se concentrant au maximum afin de ne pas avoir à penser à cette solitude malgré les relations qu'il enchaînait. Personne ne s'était posé avec lui pour apprendre à le connaître, personne pour lui permettre de s'ouvrir librement. A moins que si ? L'image de Jiwoong s'imposait en douceur dans sa mémoire. Mais lui aussi, il le trompait.

« Tu m'énerves, reprit Kô en se mettant un peu à rire. Tu m'énerves, parce que j'ai l'impression que tu vois tout en moi alors que... alors que j'ai mis tellement de temps pour construire tout ça. »

Il constatait juste cela, sans aucune mauvaise pensée derrière. Il n'en voulait pas non plus à Yoonji car, dans le fond, Yoonji l'aidait à sa manière. Il n'avait pas l'air de vouloir profiter de toutes ses faiblesses mises à la lueur du jour pour les retourner contre lui d'une façon ou d'une autre. Les mains roulées dans la farine, Kô en leva néanmoins une pour venir chercher les doigts de son hôte, ses iris remontant doucement vers les siens.

@chae yoon ji

Tenue | Tu t'arrêtes un instant pour regarder son œuvre. A la vue du croquis, tu hausses un sourcil, voyant clairement le talent de Kô. Tu tournes ça vers Sun, même s'il ne comprend pas, à l'intonation de ta voix il sait que c'est de lui dont on parle.

« Waou, pour une esquisse c'est superbe, tu as du talent. T'as vu Sun comme tu es beau. Je n'ai pas de peinture, mais je pourrais m'en fournir. J'aimerais beaucoup une toile de Sun. »

Tu caresses l'animal qui se fait beau avant de venir se frotter contre ton cou. Tu observes Kô qui t'aide à la préparation. Nul doute que ce petit homme a de multiples talents, un artiste dans l'âme. Ce n'est pas uniquement son dessin qui te fait dire ça mais aussi son style, le regard qu'il porte sur toutes choses et bien sûr cette lueur de passion que tu as vue dans son regard, lorsqu'il dessinait mais aussi à présent lorsqu'il cuisine. Tu l'apprécies de plus en plus et pas uniquement parce qu'il te plait physiquement. Tu as entrevu un homme brisé qui lutte face au monde et cette facette abimée te touche puisque tu t'y retrouves un peu, même si tu refuses de l'admettre.

Tu reviens l'aider en cuisine, terminant de mettre à cuire certaines choses. Le sujet à beau être délicat, tu ne laisses transparaitre qu'une légère mélancolie. Après tout, il doit savoir mieux que personne que l'amour n'est qu'une illusion dans laquelle se berce les gens. Etrangement tu as l'impression que malgré vos différences, vous partagez la même solitude amère. Tu vois que ta question le fait réfléchir. Tu viens donc à côté de lui récupérer ce qu'il a fait avec un sourire amical. Finalement il répond et cela te fait soupirer légèrement amusé. Tu acquisses, espérant le rassurer face au sourire triste qu'il t'offre. Il peut te compter si cela lui fait plaisir. Tu es même touché de cet aveu et tu ne comptes pas le trahir. Il a aussi entrevu ta peine. Cet échange au bord de mer est comme un accord tacite de votre amitié naissante.

Alors que tu finis de préparer le repas, tu pouffes de rire avec lui à sa réflexion. Tu ne fais pas expert de lire en lui, c'est quelque chose qui est devenu instinctif. Tu vis au travers du regard des autres, aussi tu as appris à sonder les âmes pour offrir ce qu'elles désirent secrètement. Pour Kô c'est un soutien amical autour d'un repas. Lorsqu'il vient t'attraper la main pour te tirer vers lui et plonger son regard dans le tien, tu lui offres un sourire rassurant.

« Certains disent que c'est une qualité, d'autres un défaut. Qu'en penses-tu toi ? »

En effet tu te lies difficilement d'amitié et pour cause la plupart des gens n'apprécient pas ton regard mettant à nu leurs âmes. Alors que toi-même tu te caches derrière différents masques. On te traite souvent d'égoïste, de beau parleur, de dragueur invétéré. Au fond c'est vrai, tu ne montres que ce que tu veux. Tu préfères connaitre les gens plutôt qu'ils te connaissaient. Avec Ko c'est légèrement différent, tu t'es permis d'extérioriser ta peine. Il est un des rares à l'avoir vu, même tes amis sont peu nombreux à connaitre cette souffrance que tu caches. C'est d'ailleurs avec un sourire tendre que tu reprends.

« Toi aussi tu as vu plus de moi que la plupart des gens. On peut dire qu'on est quitte ? »

Tu lies tes doigts au sein pour le sortir de sa tâche, le faisant tourner sur lui-même pour qu'il se retrouve devant les fourneaux. Tu vois qu'il a parfaitement compris ce que tu voulais faire, ce qui te fait sourire. C'est la première fois que tu cuisines avec une personne passionnée.

« Je finis ici, est-ce que tu peux surveiller la cuisson ? D'ailleurs on dirait que tu aimes cuisiné, c'est un autre talent caché ?»

Passer un temps si simple, autour d’une cuisine, à discuter d’un peu tout et rien, cela faisait très longtemps que ça n’était pas arrivé à Kô. Alors, les émotions déjà en vrac, il n’avait pas pu se retenir de vouloir saisir la main de Yoonji pour l’attirer tout doucement à lui. Juste s’enivrer une minute supplémentaire de cet état si agréable, bien que douloureux, qu’il lui offrait. Il aurait voulu que cet instant ne s’arrête jamais, et tant pis pour le reste. A vingt-deux ans, les années avaient filé, emportant les beaux souvenirs avec elles. Ses parents n’étaient plus que des brèves pensées et son enfance l’était tout autant. Bien sûr, il conservait précieusement des moments qu’il chérissait encore, mais il comprit alors que ça ne tenait qu’à lui de se construire des instants inoubliables maintenant. Aller de l’avant… Il tentait déjà de le faire, Kô, sauf qu’il avait de plus en plus l’impression que ce n’était pas assez. Ce n’était jamais assez.
Esquissant un délicat sourire à la reprise de paroles de son aîné, le japonais secoua ensuite légèrement la tête, sans trop savoir. Il haussa un peu les épaules.

« Je ne sais pas trop encore ce que je dois en penser, mais je… je sens que ça me fait beaucoup de bien. »

Il se mordilla doucement la lèvre inférieure, pensif. Oui, cela lui faisait beaucoup de bien tout autant qu’il se sentait épuisé de toutes ces émotions qu’il ne contrôlait clairement plus face à Yoonji. Cet homme avait eu un pouvoir si particulier sur lui depuis ces quelques heures qu’ils venaient de se rencontrer… Comme s’il faisait partie de sa bulle avec une aisance naturelle. Kô avait l’impression que Yoonji avait toujours été là, près de lui, à le cajoler en lui assurant qu’il finirait par s’en sortir. Était-il un esprit ? L’un de ces yokais de la mythologie japonaise ? Cette idée fit sourire le plus jeune qui reporta ses pupilles dans celles de son hôte.

« D’accord, alors nous sommes quittes l’un envers l’autre. »

Il sentit ses joues rosir quand les doigts se lièrent et qu’il pivota vers les fourneaux. Il en rit légèrement avant de retirer sa main pour remettre l’une de ses mèches blondes derrière son oreille. Avec la chaleur que dégageait la cuisine, ces derniers n’étaient plus qu’à peine humides.

« Oui, accepta-t-il. Je ne dirais pas que c’est un talent caché… En fait, je fais partie du club de cuisine de l’université. J’aime beaucoup apprendre de nouvelles choses et ça me permet aussi d’apporter de quoi les aider en matière de cuisine japonaise. Tu as pris des cours, toi, pour être si doué ? »

Une idée qui lui était venue un peu sur le tard, mais Kô avait toujours rêvé d’intégrer un club quand il serait à l’université. Le club de cuisine n’étant pas très populaire, cela lui avait néanmoins permis d’exercer ses talents ainsi que d’apprendre un peu mieux la langue coréenne à son arrivée sur cette partie du globe. Remuant quelques secondes le plat devant lui, Kô finit par demander à Yoonji où se trouvaient les assiettes et les couverts afin de dresser la table. Il s’appliqua à le faire, silencieux, tout en revenant régulièrement jeter des coups d’yeux à ce qui cuisait sur les feux. L’odeur qui emplissait l’atmosphère ne manqua pas de faire gargouiller plusieurs fois son ventre, car la crêpe remontait déjà à un petit moment. Et puis c’était bien connu, l’eau ça donnait toujours faim – sans parler des émotions.

« Au fait, l’établissement que j’ai vu sous ton appartement en arrivant, c’est le tien, n’est-ce pas ? C’est un bar ? »

Après avoir souhaité le bon appétit à son aîné, Kô se jeta sur la nourriture sans se priver plus longtemps. Comme il l’avait prévu, c’était délicieux.

@chae yoon ji

Tenue | Tu laisses ton regard sur lui à ces paroles. C'est bien la première fois que quelqu'un te dit ça. La plupart du temps les gens trouvent ça plutôt dérangeant que tu arrives à ressentir leurs émotions. C'est vrai que tu as cette capacité, cette empathie qui te permet de comprendre facilement les gens. Cependant personne ne t'a jamais remercié pour ça, alors que c'est un peu ce que vient de faire Kô, de façon détournée peut être, mais c'est ce que tu as compris. D'ailleurs tu le remercies d'un regard accompagné d'un sourire reconnaissant.

Son expression te fait sourire tendrement et d'autant plus suites à ses paroles. C'est vrai qu'il a vu une partie de toi qu'en général tu gardes bien enfoui. Tu viens lui prendre les mains et tu remarques ses joues rosées. Tu ne fais aucune remarque, appréciant simplement cet échange léger et doux, à son image. C'est bien la première fois que tu fais entrer quelqu'un dans ton intimité. Normalement tu sélectionnes soigneusement les gens à qui tu te dévoiles. Cependant tu te sens connecté à lui d'une façon que tu n'expliques pas. Est-ce que c'est parce qu'il connait ton jumeau ? Non, c'est autre chose. Tu te sens proche de l'être brisé qu'il est, caché derrière des masques, sans parler de cette passion pour la cuisine que tu découvres. C'est évident qu'il est raffiné, tu l'avais déjà remarqué avec sa tenue et son style. Au fond plus tu en apprends sur lui, plus tu te sens attiré. En temps normal tu évites de t'attacher et pourtant tu es là à partager ta cuisine avec lui. Quelqu'un d'extérieur pourrait vous prendre pour un vieux couple et cette idée te réchauffe le cœur. Avec lui il n'y a pas de sentiment mais simplement un feeling agréable et tu te laisses porter.

Tu l'écoutes te parler avec un sourire intéressé. Tu avais déjà deviné que c'était un étudiant, tu connais aussi son rêve, sa nationalité, là tu apprends qu'il est curieux et généreux. En effet il faut être généreux pour aimer cuisiner. Si de ton côté tu cuisines souvent pour toi, ce que tu préfères s'est bien partager le repas préparé. C'est pour ça qu'aujourd'hui partager la préparation est aussi agréable alors que c'est totalement nouveau.

« Non j'ai dû apprendre très tôt à me faire à manger et je n'ai jamais aimé la mal-bouffe alors j'ai mis la main à la patte comme on dit. »

Tu ne veux pas dire pourquoi tu as du apprendre, car tu n'as pas envie de parler de ton passé, de ta relation compliquée avec tes parents et encore plus tendue aujourd'hui. Non ce moment est trop parfait pour être accablé par de vieux souvenirs. Tu lui sers à nouveau un sourire, lui indiquant ou trouver ce qu'il faut pour mettre la table. La cuisson se termine et pendant qu'il installe bols et assiettes, tu disposes les plats. Il n'y a pas moins de dix banchans, deux sortes de kimchi, différents légumes grillés, à la vapeur ou mariné et bien sur les beignets que vous venez de faire. Il y a deux plats principaux et tu sors en dernier le riz pour qu'il soit bien chaud. A tes yeux ce n'est pas une table compliquée vu ta passion pour la cuisine et la plupart des choses tu les avais préparés d'avance, il n'y avait qu'à faire réchauffer. Pour accompagner tout ça, tu as sorti du soju et de la bière, en général tu es plutôt vin mais aujourd'hui c'est différent. Tu ne connais pas les gouts de Kô, tu restes donc dans du classique pour aller avec les plats présents.

« En effet l'Evidence est mon établissement, c'est un bar, un bar piano je dirais plutôt. Tu n'y es jamais venu ? Je suis sûr que l'ambiance te plairait. C'est abordable mais je pourrais te faire un prix si c'est moi au bar. »

Tu esquisses un sourire amusé, sachant que tu fais des prix à trop de monde alors que les consommations ne sont pas si chères. Cependant la première fois les gens redoutent les tarifs vu le standing de l'établissement alors qu'en réalité tu cherches à rester accessible au plus grand nombre. Le repas commence et tu es heureux de voir qu'il apprécie le tout. Tu reprends néanmoins.

« C'est plus cher qu'au Why Not bien sûr, mais l'alcool n'est pas le même. Pas le même gérant, pas la même qualité. » ris tu avant d'ouvrir une bouteille de soju et lui demande s'il veut un somaek,juste du soju ou juste de la bière. « D'ailleurs comment tu as connu Soo Jung ? Tu le fréquentes depuis longtemps ? »

Il fallait bien que tu poses la question à un moment, après tout il t'a pris pour ton frère jumeau, ce qui est normal vu votre ressemblance.

Cela pouvait sembler bizarre, de premier abord, mais Kô avait fini par se laisser porter par tout ce qui émanait de la présence de Yoonji. Installé là, dans sa cuisine, à l’aider avec la préparation qui faisait gargouiller son ventre, il appréciait avec sincérité la douceur et l’évidence qui se dégageaient de leurs deux âmes un peu perdues. Ils paraissaient se ressembler, s’assembler, sur certains points, et en même temps, ils conservaient cette distance entre eux. Osant dire sans trop en dire. C’étaient des sensations vraiment plaisantes, voire carrément ressourçantes. Kô ne s’était pas attendu à cela en prenant Yoonji pour son frère. Les deux hommes étaient bien différents – du moins de ce qu’il avait pu en apercevoir de Soojung au cours de leur nuit partagée.
Ce fut donc avec naturel que l’étudiant en stylisme parla de son entrée dans le club de cuisine, de ses quelques envies envers cet apprentissage. Gourmand, avec une silhouette qui lui permettait de manger jusqu’à n’en plus pouvoir sans jamais prendre un gramme, se tourner vers l’option cuisine avait plutôt été de toute évidence pour Kô. Puis, d’une certaine manière, la cuisine était une forme d’art. On pouvait jouer avec les saveurs, les couleurs et, bien sûr, la présentation des plats. Finalement, quoi de plus logique pour un passionné de mode ? Il ne pouvait pas non plus s’empêcher de penser qu’un jour il cuisinerait pour l’homme de sa vie. Cela lui tira un doux sourire sur ses lèvres rosées tandis qu’il écoutait avec attention la réponse de Yoonji.

« C’est toujours agréable de voir que le résultat est délicieux, surtout quand on le fait soi-même. »

Le blondinet se permit ensuite de proposer à mettre le couvert, se laissant guider dans les placards par le propriétaire de ces lieux. Une fois tout ceci fait, ils purent se mettre à table, les papilles de Kô se mirent sens dessus dessous à la vue et à l’odeur qui émanaient des plats. Ils se souhaitèrent un bon appétit après que Yoonji les eut servis en boisson et le plus jeune attaqua avec plaisir le repas. Il s’en délecta un instant avec de se remettre à laisser sa curiosité déborder. Mine de rien, même juché sur le dos du brun en arrivant ici, il avait fait attention à son environnement – on ne savait jamais.
Il apprit donc que c’était bien un bar en dessous du logement, l’Evidence, et qu’il y avait un piano, ainsi que des prix abordables. Engouffrant une large bouchée, Kô se mit doucement à rire avant de répondre :

« Tu sais, j’ai largement de quoi m’offrir ton bar tout entier si je le désire. Mais le barman est un bel homme, alors je viendrais le voir. »

Le gratifiant d’un sourire, sous-entendu, il gloussait derrière sa main aux doigts fins. Il se permit de boire un peu avant de se resservir d’un peu de tout. C’était très bon et il avait vraiment faim avec toutes les aventures qui avaient eu lieu en l’espace de quelques heures. Enfin, ce fut la curiosité de Yoonji qui s’échappa et Kô n’avait pas de gêne à lui avouer ses histoires avec son frère.

« J’ai entendu parler du Why Not au travers de certains étudiants et, comme je fais partie de cette minorité homosexuelle, je me suis permis d’aller y jeter un œil. Soojung m’a tout de suite sauté dessus, s’amusa-t-il en haussant les épaules. Je ne sais pas vraiment si je peux dire que je le connais, en-dehors du fait qu’on ait couché ensemble une fois. Je n’ai pas eu l’occasion d’y retourner, depuis. »

Il le remercia pour le verre de soju, but un peu.

« En tout cas, il est vrai que je saurais faire la différence entre toi et lui maintenant, dit-il en un soupir repensant à la gifle qu’il avait reçu. Est-ce vous passez souvent du temps ensemble ? Vous devez rendre confus plus d’une personne ! »

Un instant, il tenta d’imaginer les deux hommes côte à côte, jouant de leurs charmes et de leurs atouts. Oui, bien sûr, ils étaient à croquer tous les deux… Kô se sentit rosir mais il prétendra que c’était à cause de l’alcool. Il commençait à faire un peu chaud ici, non ?

@chae yoon ji

Tenue | Tu ne peux qu'approuver la réflexion de Kô sur la cuisine. En effet c'est satisfaisant d'avoir préparé un bon repas et de s'en régaler. Si en général tu es souvent seul pour ça, il est évident que tu préfères partager ces plats et c'est peut-être ce qui te fait le plus plaisir ce soir. Avoir pu cuisiner et manger avec quelqu'un, c'est quelque chose que tu n'as pas fait depuis longtemps. La plupart de tes amis, ou de tes partenaires, savent que tu cuisines bien et hésite à mettre la main à la pâte. Enfin pour l'heure tu apprécies ce moment pour ce qu'il est, un instant de partage hors du temps. De toutes les relations que tu as, celle-ci est la plus surprenante, de par sa spontanéité, mais aussi sa simplicité. En effet tu as tombé le masque de gentleman depuis longtemps. Bien sûr tes habitudes ne sont jamais loin et tu pouffes de rires à son compliment, le taquinant amicalement.

Oh tu m'en diras tant, alors tu pourras surement me dédommager ma paire de chaussures. Le cuir n'a pas du tout aimé l'eau salé

Tu lui lances un regard appuyé, car il a bien dû voir tes chaussures ruinées que tu as ôté à l'entrée, sans parler de ton costume qui aura besoin de passer au pressing. Tu ajoutes un clin d'œil à ta mimique, signe qu'en réalité tu n'es pas sérieux. D'abord parce que tu as les moyens de racheter les mêmes et surtout parce qu'au fond cette escapade t'a amusé.

Alors que les conversations s'enchainent, la table mise et vous avez débuté le repas. Visiblement il apprécie autant le repas que l'alcool, ce qui te rassure. Viens alors le sujet de ton frère, enfin de ton jumeau. Tu l'écoutes attentivement, te demandant comment tu n'avais pas entendu parler de cette boite de nuit avant. Bon il faut dire que tu ne sors pas trop de ta grotte comme Soo Jung. Vous avez beau être différents, vous avez beaucoup de points communs. Ce n'est pas pour rien que vous tenez deux établissements nocturnes affichant clairement les couleurs de votre ouverture d'esprit. Tu pouffes de rire, lorsqu'il mentionne qu'il s'est fait sauter dessus par Soo Jung.

Ça ne m'étonne pas, tu es une créature unique en ton genre. Difficile pour lui de résister.

C'est peut-être ce qui diffère le plus entre vous, le choix de vos partenaires. De ton côté, tu ne couches pas à droite à gauche, préférant des plans cul stables et disponibles. Tu le remercies d'un sourire légèrement flatté de la différence qu'il fait entre lui et toi. Cependant tu perçois son soupire et tu sais à quoi il pense. Il est évident que Soo Jung ne l'aurait pas accueilli comme ça et maintenant tu t'en veux un peu, car au fond Kô n'est pas si différent de toi, brimé par des dogmes archaïques d'une société hypocrite. Pour autant tu ne reviens pas sur le sujet, répondant plutôt à sa question.

On passe beaucoup de temps ensemble en effet. C'est vrai qu'on en perturbe plus d'un. Quand il est dans mon bar, les clients ne savent plus où donner de la tête dis-tu en riant. On n'a pas encore dragué ensemble et je crois que c'est mieux.

Tu esquisses un sourire, car tu as bien remarqué les joues rosées de Kô. C'est peut-être l'alcool, mais tu as plutôt l'impression qu'il s'imagine entre vous deux. Ce qui ne risque pas d'arriver, tu es ouvert d'esprit, mais tu vois mal un plan à trois avec ton frère. Vous n'avez pas encore mis à l'épreuve vos talents respectifs, cependant cela risque d'arriver un jour pour jouer et voir qui repart avec la cible. En attendant le repas continue. Les conversations vont et viennent, jusqu'à ce que tu te permettes d'abord le sujet du départ.

Est-ce que tu veux rentrer chez toi ? Je peux te ramener si tu veux.

Tu accepterais qu'il te demande de rester, sinon tu n'aurais pas posé la question comme ça. Tu accepterais même de passer la nuit avec lui, peut-être dans le même lit. C'est la première fois que tu acceptes quelqu'un dans ton intimité aussi vite. Dans tous les cas, même s'il ne reste pas tu as envie de garder contact, ce que tu lui avoueras plus tard.

La conversation ayant déviée sur les deux frères, les joues de Kô se mirent à rosir doucement. Mettant sur le compte de l’alcool, il sourit aux paroles de Yoonji, prenant les compliments qu’il lui adressait par la même occasion. Oui, Kô savait qu’il était une personne que l’on ne croisait pas tous les jours et les nouveautés, Soojung appréciait bien cela ; il en avait fait les frais. Un jeu fort agréable, soit dit en passant. Il en conservait un bon souvenir et il se disait qu’il retournerait peut-être dans son établissement.

« Il en faut pour tous les goûts, ajouta le plus jeune, je suis certain que vous avez des envies différentes tous les deux. Et tu as la chance de pouvoir séduire aussi des femmes, je me trompe ? »

Ses baguettes empoignées de sa main gauche, Kô continuait de déguster toutes les préparations. Il avait un très bon appétit et il avait cette chance de ne pas prendre de poids, peu importe ce qu’il mangeait et les quantités. Yoonji et son hôte poursuivirent donc cette soirée, discutant de tout et de rien, comme s’ils se connaissaient depuis bien plus longtemps que ces dernières heures. Alors, quand vint la question de partir, le plus jeune ne répondit pas tout de suite.
A vrai dire, emmitouflé là, dans les vêtements bien trop amples de Yoonji, Kô n’avait pas la moindre envie de quitter cet endroit dans lequel il se sentait à l’aise depuis trop longtemps. Sans aucune pensée, sans aucune envie particulière sauf celle de demeurer ainsi, le jeune homme avait l’impression que redevenir l’enfant qu’il n’avait pourtant jamais cessé d’être. Alors il fit la moue, se renfrognant légèrement, laissant son regard se détourner sans oser fixer les prunelles de son interlocuteur quand il lui déclara :

« Je n’ai pas très envie de partir maintenant. »

Parce que partir pour aller où ? Rentrer à l’université dans le dortoir qu’il partageait avec tant d’autres camarades ? Parfois, Kô s’interrogeait sur les raisons premières qui l’avait poussé à ne pas chercher un appartement dans les alentours. Et il se souvint de son désir soudain de quitter le Japon, de ne pas regarder en arrière et de juste arriver ici, en Corée et apprendre à y nager tout seul. Néanmoins, maintenant que c’était chose faite et que l’argent de sa mère continuait de couler à flot sur son compte en banque, peut-être serait-il temps de prendre une dépendance ? Il se dit qu’il allait sûrement commencer à y songer plus sérieusement. Pour l’heure, il termina son repas avant de relever les pupilles vers Yoonji.

« Est-ce que je peux rester encore un peu ? Je ne prendrais pas beaucoup de place. »

Il rit doucement avant de se lever pour retourner auprès de la cage où Sunny venait de se réinstaller sur les barreaux en bois. Un soupir s’abandonna entre ses lèvres démaquillées et il entoura sa frêle poitrine de ses deux bras. Il ne saurait expliquer ce qu’il ressentait à cet instant, sentiment mêlé de nostalgie et de n’appartenir jamais vraiment quelque part. Ici, en Corée, il n’était qu’un étudiant étranger et là-bas, au Japon, tout lui semblait si étranger. Lentement, l’une de ses mains se tendit en direction de l’animal qui attirait tant son regard, le touchant du bout des doigts. Lui rêverait d’adopter un animal, un chien sans doute, ou un chat, mais le temps qu’il serait logé à l’université, il ne pourrait pas en avoir.
Perdu là, au beau milieu de ce loft luxueux qui ne devrait pourtant pas l’intimider, Kô s’y sentit vraiment minuscule. Néanmoins, se retournant, il adressa un délicat sourire à son hôte.

@chae yoon ji

Tenue | Tu pouffes légèrement de rire lorsqu'il parle de vos envies différentes. Effectivement la plus grosse différence réside dans votre orientation sexuelle. S'il ne veut pas entendre parler des femmes, toi tu les apprécies. Cependant s'il a joué avec Kô c'est bien qu'au fond les courbes féminines lui plaise un minimum. Hormis ce détail, il y en a d'autres et encore vous n'avez pas encore échangé sur tous les sujets.

Oh s'il n'y avait que ça. Monsieur boit son whisky on the rock et il préfère les vrais glaçons. Tu imagines, couper de l'alcool avec de l'eau, tsss.

Tu souris parce qu'au-delà des différences, vous vous ressemblez beaucoup, beaucoup trop. Au point où vous n'avez pas besoin de mots parfois pour être sur la même longueur d'ondes. Cela pourrait être effrayant pour certains, mais pour lui, pour toi, pour vous qui avez tellement cherché cette partie manquant, c'est une bénédiction. Enfin tu as trouvé la moitié de toi qui te manquait et si jusque-là tu te sentais incomplet, aujourd'hui ça va mieux. Oh tu as encore beaucoup de choses à régler; mais tu n'as aucun doute sur la clarté de l'avenir maintenant que ton jumeau est à tes côtés.

Lorsqu'il te répond en détournant le regard tu te permets d'esquisser un léger sourire, heureux de son choix. Toi non plus tu n'as pas envie qu'il parte tout de suite. Tu redoutes de te retrouver seul. La solitude t'as toujours accompagné et tu l'as comblé avec différentes compagnies, toujours bien choisi. Pourtant il t'arrive d'être seul et dans ces moments-là même Sun parfois n'arrive pas à t'arracher un sourire. C'est donc sans surprise que tu acceptes sa demande.

Bien sûr tu peux rester autant que tu veux et ne t'en fais pas, ce n'est pas la place qui manque.

Finalement le repas se termine et tu lui indiques que tu te débrouilles pour débarrasser. Cela ne prend pas longtemps vu que vous avez presque tout fini. Une fois la vaisselle mise dans la machine et la table essuyé tu reviens vers lui. Un sourire sur le visage en le voyant caressé Sun.

Il a l'air de t'aimer bien. Il reviendra surement quand on se sera installé sur le canapé

Est-ce que c'est une façon pour toi l'inviter à s'asseoir. Oui et non, tu ne veux pas le forcer. Tu lui as dit au début de faire comme il veut et c'était sincère. Il peut bien déambuler dans le salon, observer ta bibliothèque, ou admirer le piano et la vue. Toi de ton coté tu as apporté un petit dessert sur la table basse et un peu de thé.

Tu préfères du café ou un digestif peut être ?

La suite du programme pour toi, t'installer sur le canapé. Tu as un roman à finir, il y a aussi la télévision ou vous pouvez regarder un film. Tu ne proposes rien préférant le laisser libre de choisir ce qu'il a envie de faire. De ton côté le simple fait qu'il soit là dans ton duplex te suffit.