Yami était contente de voir qu’elles avaient pu passer à autre chose. Cependant, si elle avait pu comprendre ce que sa colocataire et amie avait tenté de lui dire dans ses gestes effrénés, elle aurait pu garder cette idée dans un coin de la tête pour plus tard. Si elle avait pu comprendre qu’il lui était possible de porter plainte, peut-être pourrait-elle se lancer dans cette procédure. Or, elle n’était qu’une étrangère, profitant de ses études pour quitter le pays et se lancer dans un tel projet lui ferait grandement peur. Donc fort heureusement, elle n’avait rien compris et s’était contenté d’emmener Sojin aux bains.

L’eau chaude lui faisait du bien. Elle l’aidait à relaxer ses muscles, cependant elle rougissait encore plus les marques de brûlures recouvrant son corps, les rendant plus inconfortables que d’ordinaire. Pourtant, Yami mit un point d’honneur pour ne rien laisser passer. Les deux jeunes femmes étaient là pour se relaxer et non pour continuer de s’inquiéter de l’état de la japonaise qui, de toute manière, niera toujours fermement tout inconfort.
Alors elle posa des questions, demandant des nouvelles de son amie car il y avait bien un moment depuis leur dernière conversation. Elle fut surprise, agréablement, de découvrir qu’elle avait trouvé un travail. Commençant à comprendre comment la société coréenne fonctionnait, ce n’était jamais simple pour quiconque de trouver du travail dans cette société superficielle et encore moins lorsque la personne était handicapée. Elle avait de la chance et la fierté de Yami, comme une mère face à son enfant qui avait réussi. Et la jeune étudiante fut encore plus fière de pouvoir comprendre ce qu’elle lui répondait. Ses yeux étaient fixés sur ses gestes pour être sûre de ne pas rater. Ça doit être trop intéressant. Yami était incapable de dessiner, tout comme elle n’avait jamais essayé en fait. Même lorsqu’elle était encore au lycée, elle avait choisi l’option de calligraphie plutôt que musique ou arts plastiques, alors elle ne donnait pas cher de voir ce qu’elle était capable de produire (ou plutôt ne pas produire) sur une feuille de papier. Si elle était fière et amusée au départ, Yami fut cependant surprise et presque inquiète. Sojin apprenait la musique avec un inconnu, un DJ qu’elle avait rencontré par hasard ? Sa cervelle ne put s’empêcher d’aussitôt imaginer beaucoup trop de scénarios alors qu’elle resta bloquée un temps sans bouger. « Mais... » Elle se reprit, continuant avec des gestes. Tu l’as… C’est un garçon que t’as rencontré? Si le rouge sur ses joues était dû à cause de la chaleur du bain, cette fois-ci c’était pour la gêne et les pensées très osées de la japonaise. Tu as couché avec? Elle, qui n’avait aucune expérience sexuelle, ni même romantique, elle ne pouvait s’empêcher de rougir comme la vierge qu’elle était. Il te doit une faveur? Elle était totalement perdue, pensant que ce DJ était peut-être le copain de sa colocataire, mais s’il lui devait une faveur, toute cette histoire était étrange. Tu le remets à sa place… Au lit? Elle ne savait plus ce qu’elle disait, pensant vraiment que Sojin avait rencontré un homme pour passer la nuit et par la même occasion il lui apprendrait la musique. Tu es sûre, il n’est pas dangereux? Car si elle était contente pour Sojin qu’elle rencontre quelqu’un, elle restait toujours inquiète.

Sojin tentait de ne pas laisser son regard s'attarder trop longtemps sur le corps de Yami. Ses intentions n'avaient rien de pervers, au contraire, c'est d'ailleurs plutôt de l'inquiétude qui pouvait se lire sur son visage alors que la japonaise ne pouvait plus camouffler ses blessures dont l'apparence se détériorait au contact de l'eau chaude. Le seul détail capable de la rassurer un minimum, c'est que les bains risquaient d'aider celles-ci à guérrir un peu plus rapidement. Si elles étaient douloureuses et inconfortable, sa colocataire ne le démontrait pas alors qu'elle poursuivait la conversation de façon banale. Malgré le serrement de son coeur, Sojin décide de faire son possible pour passer outre la vue et se concentrer sur ce moment de détente que Yami mérite amplement.

Alors qu'elle met l'autre jeune femme à jour des développements concernant sa propre vie, Sojin décèle rapidement l'inquiétude, sentiment qu'elle provoque assez souvent chez les gens autour d'elle. Elle se demandait si c'était pour les mêmes raisons que Hak s'était montré réticent lorsqu'elle lui a annoncé avoir trouvé un travail mais elle en doutait fortement. L'inquiétude de Yami laisse rapidement place à une sorte de gêne qui colore ses joues de rouge alors qu'elle pose de nouvelles questions. Si au départ, Sojin croit que la demoiselle fait une erreur dans l'utilisation des signes, la suite lui confirme que ce n'est pas le cas et suffit à provoquer un changement de couleur sur son visage également.

Non !

La brusquerie de son geste témoigne l'exclamation alors qu'elle essaie de voir à quel moment elle avait pu laisser sous entendre une proximité aussi intime avec le dj. Les jeunes femmes n'avaient jamais abordé un tel sujet auparavant alors, évidemment, Yami ne pouvait pas savoir quel genre de fille était Sojin avec les garçons mais, la sourde avait une petite idée de l'innocence de la japonaise, à voir le malaise palpable malgré ses questions qui, elles, n'avaient rien d'innocent.  Elle ne peut s'empêcher d'éclater d'un rire qu'elle devine être maladroit à la question qui suit alors qu'une vision qu'elle s'empresse de chasser s'emparre de son esprit. Elle tente finalement d'expliquer assez lentement pour que Yami puisse comprendre chaque signe et éviter les malentendus supplémentaires.

C'est un garçon, un dj, qui m'a abordé dans un club. J'ai mal réagit et je l'ai poussé ce qui a créé un accident avec son verre. Il était furieux, ses vêtements ont beaucoup de valeur il paraît. Il s'est montré odieux avec moi.

Elle évite de mentionner le baiser furtif de ce dernier, constatant que l'imagination Yami risquait d'empirer l'histoire en soit.

Pour faire une histoire courte, une fois calmé, je lui ai laissé savoir que de simples excuses ne suffiraient pas. Il connait le langage des signes alors j'en ai profité pour lui demander une faveur, m'enseigner la musique.

Son regard sur la japonaise se fait insistant pour qu'elle comprenne qu'il n'y avait rien de sexuel.

Il n'est pas dangereux, pas d'inquiétude là-dessus. Et puis, je ne crois pas que je l'intéresse suffisamment pour coucher avec lui, il est beaucoup trop agacé par ma personne.

Elle sourit malgré les souvenirs moins glorieux de la dernière fois que où elle s'est glissée sous les couvertures avec un garçon. Si Soli avait occupé ses pensées depuis leur rencontre, elle préfèrait ne rien révéler pour l'instant, trop habituée à la non-réciprocité.

Le bain faisait du bien à la japonaise, mais pas que. Les vapeurs qui s’en dégageaient et la température générale de la pièce pouvaient lui faire tourner la tête et pourtant, c’étaient surtout ses pensées qui filaient dans tous les sens qui la rendaient toute chose. Pas pour elle, mais pour sa colocataire. Yami n’avait pas l’habitude de parler des garçons avec des amies, elle n’avait pas l’habitude de parler d’autre chose que des cours avec des gens quelconques. Or, elle voulait remplir correctement son rôle nouveau d’amie avec Sojin et elle avait compris que ça passait (parfois) par des conversations sur les garçons. Au moins, elle avait réussi à communiquer et, au vu de la réaction de sa colocataire, elle ne s’était pas trompée. Sojin rougit aussitôt et lui répondit un non catégorique. Malgré la gène chez la japonaise, qui n’avait pas l’habitude des plaisirs sexuels et n’avait aucune expérience dans le même domaine (voire simplement au niveau de la romance) pour en parler, elle ne put s’empêcher de sourire légèrement devant la réaction de son amie. Elle ne pouvait encore dire si elle était rassurée de savoir qu’il ne se passait rien entre ce fameux DJ et la sourde ou si elle devait encore s’inquiéter. Elle ne souhaitait pas devenir cette amie beaucoup trop protectrice, jusqu’à risquer de se montrer un peu trop envahissante. Et pourtant, elle ne pouvait pas renier ses instincts de grande sœur, qui reprenaient parfois le dessus, et vouloir protéger la jeune femme. Elle suivait avec attention les gestes de Sojin, réussissant à en comprendre la majorité lorsqu’elle replaçait le contexte silencieusement dans sa tête. « Il t’as fait quelque chose ? » Proche de la panique, la japonaise ne remarqua qu’après qu’elle avait élevé la voix, chose inutile pour son amie. Elle tenta donc de se répéter par des mouvements des coudes et poignets. Elle tentait de se calmer, pourtant les histoires de Sojin eurent l’effet contraire. Pourquoi rester avec s’il est agacé ? Tentant, de comprendre pourquoi le garçon continuerait de lui enseigner la musique s’il était en colère contre la demoiselle, Yami fit de mieux qu’elle put pour communiquer. Ça avec avec lui, tu es sûre? Si ses mouvements étaient hésitants à cause de la concentration qu’ils demandaient à l’étudiante, les pensées de cette dernière l’étaient aussi. Il ne faudrait pas risquer quelque chose. Tu l’as dit à ton frère ? Yami avait compris que le frère de sa colocataire était très protecteur de celle-ci. En plus, il était policier. Elle espérait réellement que Sojin était prudente dans toute cette histoire et qu’il ne lui arriverait rien. L’inquiétude ne quittait pas les traits de son visage alors qu’elle tenta de ne pas en demander plus.

Jouant avec l’eau autour d’elle, parfois avec ses cheveux, Yami donnait l’impression, tout de même, de vouloir en savoir plus. Finalement, elle se lança, réfléchissant à la traduction correcte. Il enseigne bien ? Pour être tout à fait honnête, elle ne voyait pas bien comment il ferait pour lui enseigner. Puis, elle s’approcha, comme si elle allait se mettre à chuchoter. Est-ce qu’il est beau au moins ? Ce n’était pas parce qu’il n’y avait rien entre les deux que les deux filles ne pouvaient pas parler dans son dos.

Malgré les vapeurs des bains, Sojin arrive à voir les lèvres de Yami remuer. Il n'est pas rare que ses interlocuteurs oublies son handicap dans le feu de l'action, lorsqu'une conversation nécessite plus de spontanéité. Sa famille, en particulier Hak Nyeon, avait l'habitude de parler à voix haute en signant lorsqu'ils étaient en colère contre elle. Par le mouvements de leurs lèvres, elle pouvait deviner qu'ils parlaient fort, signe qu'ils se laissaient envahir par les émotions. Il s'agissait généralement d'un signe impossible à nier pour Sojin qu'elle était allé trop loin. Dans le cas de Yami, cependant, elle n'arrive pas à comprendre exactement les paroles prononcées mais peut néanmoins lire la panique sur le visage de cette dernière. Son récit l'inquiétait-elle à ce point? La coréenne s'en voulait de susciter une telle réaction alors qu'elle en avait déjà beaucoup dans son assiette avec l'évènements aux dortoirs. Elle hausse légèrement les épaules à la question de sa colocataire. En effet, pourquoi insister pour que Soli lui apprenne quoi que ce soit s'il se montrait agacé avec elle? Il s'était avéré plus délicat à son égard alors qu'ils apprenaient à se connaître. Il était mystérieux pour de nombreuses raisons et sa curiosité la poussait  à vouloir en apprendre plus également à son sujet. Elle secoue vivement la tête lorsque Yami mentionne son frère.

Non, je ne lui ai pas dit.

Même si ce dernier n'a pas encore eu la chance de rencontrer sa colocataire, Sojin préfère néanmoins la mettre en garde car, le connaissant, il n'hésiterait pas à la confronter et la questionner sans aucune raison particulière.

D'ailleurs, si tu vois un policier qui me ressemble un peu trop, ne lui dit rien Yami.

Elle fait un signe avec ses mains pour la supplier avant d'ajouter:

Je lui fais confiance sinon je n'aurais jamais accepté. Si ça peut te rassurer je peux te dire ce que je sais à son sujet. Il s'apelle Soli et, si j'ai bien compris, il utilise aussi le nom de Beom Gyu. Il est auteur compositeur et il a ving-six ans.

Elle réalise qu'il s'agit, finalement, de très peu d'informations. Yami continuait néanmoins avec ses questions et Sojin devait avouer apprécier pouvoir partager ce genre de chose avec une autre jeune femme qu'elle considérait comme une amie. Pourtant, elle ignorait tout de la vie amoureuse de cette dernièrers qu'elle la questionnait sur un garçon que la coréenne connaissait à peine. De nouvelles rougeurs apparaissent sur son visage alors qu'elle acquiesce avec une certaine timidité, n'osant pas avouer avec certitude que le jeune homme était, en effet, séduisant.

Il se débrouille bien et est assez joli garçon oui.

Elle envoie un peu d'eau au visage de Yami pour se moquer et changer légèrement la cible de leur conversation en la mettant sous les projecteurs.

Et toi ? Tu en poses des questions ! J'imagine que tu as beaucoup plus de choses intéressants à me dire sur les garçons.

Même si Yami lui avait déjà avoué ne pas avoir de copains, elle n'imagine pas que cette dernière n'ait aucune expérience avec le sexe opposé, au contraire. Sojin ne se doutait pas que, si toutes les deux n'avaient jamais expérimenté les relations amoureuses, elle avait une certaine longueur d'avance sur sa colocataire en ce qui concernait les expériences sexuelles.

Si la jeune étudiante était déjà paniquée face à l’idée que sa colocataire suive des inconnus, croisés à des soirées, même pour étudier la musique, elle le fut encore plus lorsqu’elle compris que son frère n’était pas au courant. Elle avait envie de s’inquiéter plus que ce qui était qualifié comme raisonnable. Elle avait envie d’aller jusqu’à s’énerver sur l’inconscience de la jeune femme, peut-être utiliser des mots durs, mais qui n’auraient été que le reflet de son inquiétude grimpante. Yami tenait à son amie et s’il devait lui arriver quoique ce soit, elle ne se le pardonnerait jamais. Elle savait que mon frère était policier, bien qu’elle ne l’avait jamais rencontré, pour le moment. Repensant à ce que Sojin avait proposé plus tôt par rapport à l’explosion dans le nouveau bâtiment, la japonaise se fit la promesse silencieuse de solliciter l’aide du grand frère aux premiers signes néfastes dans cette nouvelle relation qui semblait se créer entre la coréenne et l’inconnu. Ami ou non, Yami se tenait prête à agir s’il le fallait pour protéger la coréenne. Néanmoins, elle ne voulait pas contredire Sojin car elle lui faisait confiance malgré tout. Elle se semblait pas malheureuse ni effrayée par le garçon, alors la japonaise se contenta de sourire. Je te promets. Elle ne dirait rien à son frère, tant qu’elle n’avait pas la certitude qu’un malheur se passait, du moins. Elle observait les mouvements de sa colocataire, devinant que ce qu’elle ne comprenait pas devait s’agir du nom du garçon. Elle ne pouvait donc se demander si elle le connaissait, bien qu’elle ne s’intéressait jamais aux personnes derrière les sons qu’elle écoutait. Cependant, elle laissa dans un coin de sa tête le pense-bête de demander à Sojin d’écrire son nom dès qu’elles auraient de nouveau accès à leurs téléphones. Si tu lui fais confiance, alors... Elle voulait rajouter que c’était le principal mais n’était pas sûre de ses mouvements. Alors elle attrapa la main de son amie, dans un geste tendre et qui se voulait rassurant, le tout avec un grand sourire sur les lèvres. Cependant, sa poigne se fit plus insistante, alors que Yami laissa son regard planté dans celui de la coréenne. Mais je veux le rencontrer. Prudente jusqu’à bout, ou simplement par curiosité, la serveuse avait réellement l’envie de voir qui était ce garçon qui avait pu attraper sa colocataire dans ses filets. Son regard ne quittait pas son amie, cette fois avec un sourire qui glissait légèrement vers l’espièglerie

Elle fut rapidement coupée dans son élan alors qu’elle reçut de l’eau sur le visage. Elle sursauta, se rattrapa de pousser un cri de surprise qui ferait retourner toutes les têtes autour d’elles. Puis elle rendit la pareille. Quoi, moi... Bien qu’elle ne le montrait pas, elle était quelque peu étonnée de voir la question lui être retournée. Elle n’avait pas grand-chose à dire, même après une longue réflexion, car de manière plus générale, elle de fréquentait pas grand monde. Il y en a bien un qui m’énerve, oui. Sans vouloir passer par l’acharnement, elle pensa aussitôt à Choi Mingwei. Elle ne savait pas de quelle manière elle pourrait communiquer son nom alors elle tenta de le décrire physiquement rapidement. Et il y a eu ce garçon que je connais pas qui est venu m’insulter. Elle n’avait pas compris lorsque cet inconnu, un certain Chu Minjun était venu critiquer ouverture son mode de vie, jusqu’à insister pour l’enfoncer toujours plus bas, faisant alors craquer la japonaise qui avait fini par éclater en sanglots. Je ne dois pas être faite pour m’entendre avec les garçons. Et pourtant, elle voyait à présent une autre silhouette dans sa tête, celle d’un chinois qu’elle rencontrait souvent ces derniers temps, Wu Qin Tian. Crois-moi, tu as plus d’expériences avec les garçons que moi... Car même si elle s’entendait bien avec le chinois, elle continuait de s’entêter dans sa fierté et compliquait les choses.

Sojin voyait bien que, malgré sa promesse, sa colocataire semblait particulièrement inquiète. C'était touchant, en quelque sorte, mais c'était également la raison même pour laquelle elle insistait pour que son frère ne soit pas mis au courant. Ce dernier irait probablement confronter directement Soli qui n'avait - selon leurs connaissances - rien fait de mal et elle préférait éviter de vivre cette humiliation. Yami semble soudainement confuse par ses gestes et la coréenne comprend rapidement qu'elle est incapable de reconnaître les signes utilisés pour le prénom. Elle se promet de le lui écrire plus tard. Qui sait, la japonaise connaissait peut-être son nom d'artiste? Cette dernière interrompt ses mouvements et Sojin la regarde, incapable de cacher sa surprise lorsqu'elle mentionne vouloir le rencontrer. Serait-il d'accord? Si ça se trouve, il risquait de refuser, ne voyant pas l'intérêt de rencontrer l'entourage d'une pauvre fille péchée dans un bar qui le soudoie pour obtenir des cours privés. Elle sourit malgré tout et acquiesce à sa demande.

Yami lui envoie un peu d'eau au visage à son tour, ce qui est bien mérité. Sojin protège instinctivement son visage avant de rapidement reposé son attention sur sa colocataire, curieuse de sa réponse. Elle sourit lorsqu'elle mentionne un garçon qui, selons ses mots, l'énnerve. Ce sourire disparaît néanmoins lorsqu'elle en mentionne un second qui, pour sa part, semble avoir osé l'insulter. Et de quel droit? La coréenne fronce les sourcils, visiblement agacée par cette révélation.

Et c'est quoi leurs problèmes? J'espère que tu ne te gênes pas pour les remettre à leur place.

Comme elle l'avait fait avec le dj, en quelque sorte. Si Yami s'avérait trop rimide pour le faire, elle se promettait de s'en occuper elle-même. Sojin est d'ailleurs étonné d'apprendre que cette dernière estime avoir moins d'expérience qu'elle avec les garçons.

Tu sais, parfois il vaut mieux n'avoir aucune expérience.

Elle tentait de se montrer rassurante tout en étant honnête. Pour sa part, elle aurait préféré pouvoir recommencer à zéro. Elle aimerait interroger davantage la japonaise mais espère ne pas se montrer trop maladroite, ce pourquoi elle décide de se confier elle-même pour tenter de la faire parler à son tour.

Je ne sais pas si j'ai plus d'expérience. J'admets avoir peut-être embrassé le dj...

Elle se sent rougit malgré tout mais se ressaisit rapidement:

Tu es attirée vers les mauvais garçons. J'en sais quelque chose. Mais tu ne dois pas les laisser faire. Autrement je vais devoir m'occuper de leur cas moi-même.

Elle accompagne ses dernières paroles d'un sourire amusé bien qu'elle soit complètement sérieuse sur ce point.

Elle attendrait donc avec impatience le jour où elle pourrait rencontrer ce fameux garçon et pouvoir juger s’il est digne ou non de son amie. En attendant, elle ne pouvait que partager son manque d’expérience. Seules de très rares personnes avaient pu découvrir un côté plus doux, plus timide chez la japonaise. Elle, qui faisait toujours froide et hautaine, qui n’avait pas peur de dire ce qu’elle pensait, même si ça blessait la personne en face. Elle, qui était bien trop occupée pour même accorder un bonjour à quiconque. Elle, qui malgré tout arrivait à l’excellence alors qu’elle n’avait rien. Pourtant, parfois, Yami était une tout autre personne. Son manque cruel d’expérience dans les relations humaines lui jouait parfois des tours et la timidité prenait alors le contrôle. Son teint naturellement pâle prenait rapidement des couleurs rosées selon des dires déplacés, ou non. Puis, elle bégayait. Beaucoup. C’était presque honteux pour elle, comme pour les autres de la voir dans cet état. Cependant, il pouvait aussi y avoir cette notion d’intimité qui s’installait, comme un signe que l’étudiante se sentait assez proche de la personne pour laisser tomber toutes ses barrières. Pour se montrer, pas qui elle était réellement, mais au complet. Néanmoins, cette timidité n’était pas présente lorsqu’elle parlait des deux garçons avec qui elle ne s’entendait pas. Non, non au contraire. Choi Mingwei, elle le remettait à sa place presque tous les jours, comme ils se voyaient non seulement au restaurant, mais aussi dans les couloirs du dortoir des Cheonglyong. Et pour ce qui était de l’autre garçon, elle avait essayé, comme elle avait pu mais il semblait avoir été plus têtue qu’elle ne pouvait l’être et avait fini par la faire craquer et éclater en sanglots. Juste l’un d’eux, il ne me lâchait pas. Son visage se durcit alors qu’elle se rappelait des mots échangés, de la façon dont il avait jugé sa façon de vivre, son éloignement de sa famille. Mais la prochaine fois que je le croise, je le frappe. Finalement, elle rit, préférant laisser une pointe d’humour sur cette conversation. Elle, qui ne savait aucunement se défendre.

Néanmoins, si elle fronça les sourcils devant la remarque de son amie, elle ne put s’empêcher un mouvement brusque. « Quoi ?! » Elle avait voulu se lever d’un coup, mais son pied avait glissé et au final, elle ne s’était levée que de quelques centimètres. Elle voulait s’assurer de bien comprendre. Alors elle posa ses deux index l’un contre l’autre et imita le geste d’un baiser. Pourquoi ? Son sourire glissa en coin, elle le savait. Il y avait quelque chose entre les deux. Comment il a réagi ? Il devait être content, non ? Qui ne serait content d’être embrassé par la belle Sojin ? Yami leur jetterait la pierre. Elle agrippa le bras de son amie et le secoua légèrement. C’était comment ? Elle donnait l’impression d’avoir douze, d’être dans la confidence des premières expériences de petit-ami. Cependant, clignant seulement des yeux lorsque Sojin dit qu’elle était attirée par les mauvais garçons, elle fut soulagée de voir qu’elle serait protégée. Non, non, non, non. Les mauvais garçons l’agaçaient au plus haut point. Il n’est pas un mauvais garçon. Ne sachant toujours pas comment communiquer les prénoms, ses pensées criaient alors Wu Qin Tian. Il est bizarre mais très gentil. Un simple ami qu’elle pourrait se faire.

Sojin ignorait tout de la timidité de Yami, particulièrement avec les garçons. Elle savait sa colocataire douce et de bonne compagnie mais il se dégageait également une confiance froide de cette dernière qui, selon la coréenne, devait certainement jouer en sa faveur pour attirer l'attention du sexe opposé. Elle sourit à nouveau lorsque Yami mentionne  un certain jeune homme qui ne la lâche pas et ne peut s'empêcher de s'imaginer un parfait inconnu suivant son amie en espérant obtenir une fraction de seconde son attention. Et encore une fois, elle faisait ressortir ce caractère particulier en se promettant de le frapper la prochaine fois qu'elle le voit. Son visage dur se détend finalement pour rire de la situation au plus grand soulagement de Sojin qui craignait qu'elle soit sérieuse.

Tu sais, ce n'est pas en les frappant que tu te feras un copain.

Elle tire la langue pour souligner sa moquerie alors qu'elle n'avait elle-même aucune leçon à donner à qui que ce soit. C'est d'ailleurs avec surprise que ragit Yami suite à sa confession qu'elle avait pourtant éviter jusque là. Elle se mord la lèvre inférieure, ignorant si confier ce détail était une erreur. Une fois le chox passé, sa colocataire s'emballe en lui posant plusieurs questions et, encore une fois, Sojin a envie de tout lui raconter. Elle ne s'était pas confier à qui que ce soit et Yami était sans doute la personne la plus proche à qui elle pouvait se confier. Hak Nyeon était hors de question, tout comme ses grands-parents et en ce qui concernait Sawyer, elle n'avait pas apprécié le voir en compagnie de son frère et préférait donc éviter toutes confidences.

Content?Je ne sais pas.

Comment expliquer à la japonaise les évènements suivant leur rencontre sans qu'elle ne le juge? Sojin hésite quelques secondes avant de finalement se lancer:

ll a du succès avec les filles, je pense. Il me taquinait gentiment et j'ai interprété ses paroles comme des avances alors je l'ai embrassé, sur un coup de tête. J'ai excusé mon geste en disant que c'était lui qui l'avait cherché avec ses nombreuses remarques mais il l'a très mal pris.

Le simple souvenir de la réaction de Soli suffit à faire renaître la honte chez la coréenne qui décide finalement de tout révéler à Yami. Elle méritait bien ça, après tout.

Je ne sais pas comment l'expliquer. Je me suis sentie femme pour la première fois avec lui. J'ai l'impression qu'il est l'un des seuls à ne pas me traiter de façon différente dû à mon handicap. Il est brusque, direct et impulsif, il me rend curieuse et en même temps je le sens fragile. J'ai peur d'avoir tout gâché.

Embarrassée par ses propres mots, elle termine ses gestes en plaçant ses mains devant son visage pour cacher ses rougeurs. Décidemment, elle n'était pas la seule à avoir fait une rencontre intéressante alors que son amie admet que celui qu'elle a rencontré n'est pas si mauvais, au final. Sojin se détend à nouveau, retrouvant même son sourire.

Alors il est intéressant? N'essait pas de me cacher quoi que ce soit!

Yami se vengea en tentant d’éclabousser son amie. Elle sentait la taquinerie, le voyait dans son regard et pourtant faisait semblant de ne pas l’accepter. Si seulement elle était plus douée pour le langage des signes, elle pourrait lui répondre rapidement, continuer une conversation enchaînée plutôt que de perdre du temps à trouver la position de ses doigts et de se rappeler du moindre geste pour tel mot. Néanmoins, ce n’était qu’un encouragement qu’elle prenait pour travailler encore plus dur et s’améliorer dans ce langage. Pour son amie. Surtout si elles commençaient à prendre souvent des bains ensembles, elles ne pouvaient se permettre d’avoir leur téléphone sur elles tout le temps. Je ne veux pas être copain avec lui. Hors de question, il était sorti de nulle part et avait retourner toutes les peurs de Yami pour les lui montrer en plein visage. Il avait été insistant alors qu’elle ne l’avait jamais rencontré auparavant.

Cependant, la japonaise était curieuse, et elle demanda plus d’informations sur ce mystérieux garçon qui semblait avoir pris possession des pensées de la demoiselle. Elle regardait ses gestes, concentrée, pour ne rien laisser passer. Les sourcils froncés, elle n’était pas sûre d’apprécier ce qu’elle observait. Lorsqu’elle comprit une nouvelle fois que Sojin confirmait avoir embrassé ce garçon, elle ne put s’empêcher de rougir une nouvelle fois. A croire qu’elle faisait de la fièvre, tellement elle n’avait pas habitué son entourage à rougir autant et aussi longtemps. Je vois. D’un côté elle pouvait comprendre pourquoi il avait réagit ainsi, mais d’un autre elle avait envie de lui demander de se calmer, et pour qui il se prenait. Il s’est énervé ? Elle pouvait imaginer sa réaction, mais elle pouvait aussi complètement se tromper car elle ne le connaissait pas. Elle ne savait même pas à quoi il pouvait bien ressembler, mais il croyait sa colocataire sur parole lorsque celle-ci disait qu’il était mignon. Je peux pas te dire, mais il serait bien stupide de te laisser partir. Il te mérite pas. S’il prenait la fuite à la moindre réflexion, il n’en avait pas fini avec la coréenne. Si tu veux, j’irai lui dire deux mots si jamais il te fatigue. Son visage ne collait pas vraiment à sa menace et Yami était tout sauf crédible alors qu’elle ne ferait pas la maligne si elle le croisait. Tu es sourde, mais s’il ne revient pas te voir, alors lui est aveugle et stupide.

Finalement le temps de conversation pour le mystérieux garçon était fini (pour le moment), et les deux filles reportaient leur attention sur ce qu’il se passait chez la japonaise. Ne sachant pas comment communiquer les noms, elle ne pouvait le donner à son amie, mais elle pouvait parler de ce Wu Qin Tian, le seul garçon pour le moment pour qui elle s’était précipitée dans les escaliers pour ne pas le rater à la sortie, pour qui elle avait accepté de laisser son travail de côté pour l’aider dans sa tâche. Il est gentil, oui. Mais spécial, il croit aux... Elle ne savait pas comment parler du fait qu’il se disait médium et qui ressentait plus de choses qu’une personne lambda. Il voit des choses. Mais surtout il était ami avec Mingwei, le garçon que Yami supportait le moins sur cette Terre. C’est le meilleur ami de Choi Mingwei, tu sais le garçon dans notre dortoir. Elle n’allait pas commencer à cracher dans le dos du cuisinier avec sa colocataire, ne souhaitant pas l’influencer, ni même perdre son temps ainsi. La japonaise se laisse glisser un peu plus dans l’eau, laissant même son menton trempé malgré la température élevée. Mais il est mignon, je crois. Elle n’avait jamais vraiment fait attention, bien trop occupée à travailler. Et surtout très gentil. Elle se souvenait de la fois où, sans aucune raison, il était resté à ses côtés lorsqu’elle était physiquement mal, peu après son malaise au travail.

Même si elles se connaissaient depuis peu, Sojin avait compris que Yami avait parfois des idées arrêtées sur certaines choses et qu'il valait mieux ne pas trop insister. Si elle refuse de faire les efforts nécessaires pour être cordiale avec ce fameux jeune homme c'est qu'elle devait avoir de bonnes raisons. La coréenne se contente donc d'acquiescer pour signifier qu'elle n'insisterait pas sur ce cas.

Malgré les inquiétudes de Sojin en ce qui concerne sa confession, elle ne peut s'empêcher de sourire en apercevant sa colocataire rougir à nouveau. Elle était donc si innocente? Même si Yami était plus âgée qu'elle de quelques années, elle ne pouvait s'empêcher de la trouver mignonne  à se mettre dans tous ses états à la mention d'un simple baiser. Pas qu'il s'agissait d'un geste banale pour elle mais il lui en fallait un peu plus pour se troubler de la sorte. Même si Sojin se doute bien que la japonaise n'est pas réellement sérieuse, elle secoue vivement la tête en signant rapidement:

Non surtout pas Yami!

Elle se détend finalement en entendant la remarque de cette dernière qui la fait sourire malgré tout.

Oui, peut-être est-il aveugle et stupide mais j'ai du mal à le sortir de ma tête.

Nouvelle confession qu'elle n'admettrait sans doute à personne d'autres qu'à Yami. La dernière fois qu'elle avait développé un semblant de sentiment aussi rapidement, les choses ne se se sont pas exactement passées comme elle l'aurait souhaité. Et puis, elle ne s'est pas montré complètement honnête avec Soli.

Le sujet change finalement pour se concentrer sur la japonaise qui subissait maintenant l'interrogatoire de Sojin. Elle penche légèrement la tête lorsqe cette dernière essaie de lui communiquer une information sur ce garçon qui a retenu son attention avec certaines difficultés.

Des choses? Il voit des fantômes?

Elle accompagne sa question d'un rire qu'elle est incapable de retenir face à l'absurdité de sa question. Pourtant, à voir le langage non verbal de sa colocataire. Sojin devine que cette dernière ne le trouve pas simplement mignon.

Comment est-ce que tu l'as rencontré? Tu crois qu'il pourrait tomber sous le charme japonais?