Elle a encore bu. Papa est là assis sur le lit, je ne sais pas réellement ce qui est décelable sur son visage, de la peur, de la lassitude, de la tristesse. Je me recroqueville dans l'armoire, il m'a dit de m'y cacher et comme toujours, je sais qu'il s'agit de la meilleure chose à faire. Je vois papa à travers l’entrebâillement de la porte, il s'est emparé d'un roman, qu'il fait nerveusement semblant de lire, comme si de rien n'était. Le parquet craque, et j'aperçois ses bottines en cuir marron qui s'approche du lit. Elle crie sur mon paternel tout en se tenant au dessus de lui. Puis un claquement, elle le frappe au visage avec le vieux martinet. " Debout ! Debout ! Debout ! J'ai épousé une tapette, j'ai épousé une tapette, j'ai épousé une tapette !" Un nouveau claquement se fait entendre. Papa ne pleure pas, il ne crie pas non plus, il se contente de baisser les yeux. Il l'aime, c'est ce qu'il m'a répondu lorsque je lui ai demandé pourquoi il ne se défendait pas. Arrête je t'en prie, arrête. Humiliation. Un homme rabaissé à l'état de vulgaire objet. Je me sentais tout autant humilié que mon père, j'avais tout aussi mal que lui. Je me bouche les oreilles, et ferme les yeux , je ne veux plus entendre ces claquements , je ne veux plus voir le visage de mon père défiguré par les coups, je ne veux plus voir les traces laissées par les coups qu'elle lui inflige. Le bruit cesse. Entrouvrant les yeux, je la vois se retourner, faisant les cent pas dans la chambre. Elle me cherche. Elle a toujours le martinet en main. Puis elle s'avance jusqu'à l'armoire et s'accroupit le sourire aux lèvres. Elle sent mauvais, mélange de cigarette, d'alcool et de drogue. " te voilà petite mauviette "

" jun wei ne sera pas un enfant facile, je tiens à vous prévenir. Peut-être serait-ce mieux pour vous d'adopter un autre petit garçon, ou alors une fille ? Nous ne manquons pas de jolies petites filles vous savez ? " elle parle dans une langue que je ne comprends pas. L'homme en costume noir, chemise blanche et cravate grise me jette un rapide coup d’œil avant d'hocher négativement de la tête. La femme qui l'accompagne, menue aux cheveux rebelles sombres aux nuances cuivrées se contente d'afficher un grand sourire, sans me quitter du regard. " bien je vois. si vous tenez réellement à adopter le jeune jun wei je dois vous faire part de certaines choses. comment dire ? vous savez il est rare de voir une femme maltraiter son époux et encore plus rare de voir une mère maltraiter son enfant, jun n'a pas eu un début glorieux. son père s'est pendu l'an dernier, et sa mère a tout simplement disparu de nos radars. Jun porte encore de nombreuses traces de cette violence, vous allez devoir vous montrer relativement patient très patient. " Une nouvelle fois je ne comprends pas. Me contentant de scruter l'homme, il m'intrigue, il n'est pas comme papa, il semble fort lui. Puis il prend enfin la parole, d'une voix déterminée, sûre et forte. " jun est désormais notre fils, il me semble que mon assistante vous a déjà fournis tout les documents nécessaires , pour ce qui est des détails que vous venez d'aborder nous le savions déjà, adopter un enfant c'est avant tout apprendre à le connaître n'est-ce pas ? jun sait déjà ce qu'est la vie, c'est ce que je recherche chez mon fils et futur successeur, il n'a pas eu de mère et en aura désormais une, très attentionnée. pour ce qui est de son prénom comme signaler dans sa fiche d'adoption nous désirons le conserver, je ne veux pas qu'il oublie quoique ce soit, je veux qu'il apprenne à vivre avec et en face une force. si vous avez finis, nous allons ramener notre fils chez nous, dans son pays, en Corée. " la directrice de l'orphelinat semble s'être enterré dans son mutisme. l'homme quand à lui se dirige vers moi d'un pas lourd, avant de me saisir la main. Il est délicat, son geste est réfléchis puis dans un mandarin parfait il s'adresse à moi. " je m'appelle ilsung et c'est moi qui vais m'occuper de toi maintenant. " sans un mot, je me laisse guider. il a quelque chose qui me rassure.

Je peins, j'aime peindre, en fait j'aime l'art. C'est sûrement à cause de ma mère adoptive, c'est une peintre reconnue et elle n'a de cesse de me traîner à ses vernissages. Je suis fière de mon fils, vous savez il s'intéresse à la littérature, à la peinture mais aussi aux statistiques, il aide souvent son papa. - ou, oui il succédera ilsung, il en a les capacités bien qu'encore jeune. - il est beau ? vous rigolez j'espère, jun est magnifique. Passer d'une mère violente à une mère collante n'avait pas été facile, pourtant j'avais finis à m'y faire après 7ans à leurs côtés, bien que je ne supportais guère qu'il ne me touche. personne. Il entre dans mon bureau, suivis par ma nouvelle mère que j'arrive à appeler maman depuis peu. Généralement il m'est quasi impossible de décrire ses émotions, mais aujourd'hui il semble stressé, ce qui est ironique lorsque l'on voit toutes les situations stressantes auxquelles il est confronté chaque jour et qui le laissent cependant de marbre. "yi ming montre toi" yiming, c'est qui ça ? d'où il sort ce prénom ? Puis je la vois, une petite touffe de cheveux probablement bien emmêlé, elle porte une petite robe rose, probablement offerte par ma mère. Au premier coup d’œil je dirais qu'elle est plus âgé que moi lorsque j'ai été adopté, peut-être 8 ou 9ans. Elle cligne des yeux et tente vainement de m'adresser un sourire. En y songeant, je les ai souvent entendu aborder le sujet, maman voulait un autre enfant puis il fallait l'avouer j'étais tellement semblable à mon père adoptif qu'elle commençait à se sentir à l'écart. Alors c'était ça. yiming. "mon coeur c'est " - ma soeur. il ne fallait pas être spécialement intelligent pour le deviner, nous étions et sommes riche, à défaut de combler ma mère affectueusement parlant, père pouvait se permettre de lui offrir les enfants qu'elle ne pouvait guère avoir naturellement. Personne n'était à blâmer, eux au mois savait prendre soin de leurs enfants. Ils étaient responsables. yiming n'avait que deux ans de moins que moi. contrairement à ma personne, elle était très demandeuse au niveau de l'affection, trop. cependant elle comprit vite qu si elle voulait de l'affection de ma part, elle se devait d'éviter de me toucher, seul moi le pouvait.ce qui est drôle avec ma jeune soeur c'est qu'elle est mon opposé. elle, elle est soumise.