we all feel lost sometimes — Jae
조금 늦었지만 그래도 괜찮아
Tout se passe trop vite pour Syu qui n’a pas le temps de faire la corrélation entre la porte qui s’ouvre et va rebondir sur le mur, la main qui l’attrape par le poignet et celle qui la gifle. Même malgré la surprise, elle n’arrive pas à lui faire face. Certes, elle pleurait souvent mais c’était toujours elle qui lui faisait la leçon. Alors aujourd’hui, elle comprend pourquoi il détestait ça. Passer pour la conne qui pleurniche pour un rien. C’est vraiment ça l’image qu’il a d’elle ? Elle qui avait toujours voulu être forte pour lui, pour qu’il l’aime ne serait-ce qu’un peu. Elle ne s’est jamais rendue compte que c’est à travers ses crises de colère et même la gifle qu’il vient de lui donner que Jae lui montre qu’il tient à elle. Elle l’écoute sans un mot, l’air interdit. Les larmes ont cessé de couler mais elle n’arrive pas à calmer ses sanglots. C’est plus fort qu’elle. Ses nerfs ont lâché. Elle passe une main dans ses cheveux pour les caler derrière ses oreilles. Son estomac est encore serré, de même que son cœur.
Sans qu’elle s’en rende compte, elle a attrapé Jae par son haut et s’agrippe désespérément à lui. Sa gifle ne l’a pas particulièrement offensée. Comme il lui a dit, elle essaye de se contrôler. Certes, ses mots la blessent. Elle sait qu’elle n’est pas la seule à avoir des problèmes, que lui doit certainement en avoir, mais elle ne sait pas comment surmonter les siens. Personne ne lui a appris à le faire, de même qu’elle a encore trop d’honneur – mal placé – pour en parler à qui que ce soit et demander de l’aide. Pardon, Jae… murmure-t-elle d’une voix faible puis baisse la tête. Depuis le début, je suis horrible avec toi alors que tu es le seul à être toujours là… Je te demande pardon… Elle fronce les sourcils puis lève les yeux vers lui avec résolution. Mais tu pourrais me prendre dans tes bras au lieu de m’engueuler, merde ! Elle lui grogne presque à la figure et se blottit dans ses bras, même s’il ne veut pas d’elle. Ils ont toujours été aussi têtus l’un que l’autre. Entre eux, c’est souvent la loi du plus fort et même si elle a l’impression de gagner, il est rare qu’il la laisse avoir le dernier mot.
Le visage blottit dans son cou, elle arrive à calmer ses derniers sanglots. Même s’il n’a pas envie de la tenir contre lui dans ses bras, elle ne veut pas le lâcher. Si elle n’arrive pas à lui dire à quel point elle a besoin de lui, il doit s’en douter. Elle ne se confie jamais à quiconque. Même pas à Bom Chan. Il est son meilleur ami mais elle ressent le besoin d’être toujours parfaite pour lui. Ne pas faire de faux-pas, ou même ne pas en avoir fait dans le passé. Il n’y avait qu’à voir comment il avait réagi en voyant un photographie de Syu et Jae ensemble plusieurs années auparavant pour comprendre. Jae n’est comme personne d’autre. Malgré ses airs je-m’en-foutiste, il écoute et il comprend. Jae, ils… Sa voix se brise mais elle se force à s’empêcher de craquer. Il lui faut quelques secondes pour pouvoir parler d’une voix ferme. Les services sociaux veulent me prendre mon bébé. Ils veulent me l'enlever. Je sais plus quoi faire...
Mais tu es bien trop égoïste pour te soucier d'elle, encore maintenant. Tu le réalises toujours, à chaque instant, aussi infime soit-il en sa compagnie. Plutôt que de penser à son bien être actuel, tes pensées sont tournées vers ton échappatoire et la peur de t'engager. Tu penses à toi et seulement toi, et le fait que Syu fasse de même pour elle en ce moment n'est pas si problématique. Un instant, tu te demandes à quoi ressemblerait une vie à deux. Cela te paraît presque impossible, car tous les deux vous avez probablement oublié toutes ces habitudes que vous aviez en étant amoureux... Si on pouvait parler d'amour,... Et encore aujourd'hui tu en doutes. Cependant, une part de toi te force à croire que tu te trompes. Que tu n'es pas égoïste. Pourquoi serais-tu venu ici, si ce n'était que pour toi ? Ton planning était bien plus intéressant et croustillant que de jouer à la boxe avec un morpion qui fait de la danse, pour ensuite finir en règlement de compte stupide d'ado frustré. Pourquoi l'écouterais tu, attentivement, lorsqu'elle t'explique que sa vie de famille est menacée. Tu arques un sourcil. Commence déjà par lui faire arrêter la danse, pitié. Tu roule les yeux. Cette reflexion t'a échappé, mais au moins tu ne t'arrêtes pas à ses reproches sans queue ni tête. T'armant de courage, tu l'éloignes de toi tout en réfléchissant. Ton expression incrédule ne change pas, pas même lorsque tu poses ton fessier sur le lit. T'es si nulle que ça ? Oh, ça risque très certainement de la refaire pleurer, mais tu n'as jamais été réputé pour ton tact. En plus, ce sujet t'agace un peu car tu te grattes nerveusement le menton comme un vieux singe qui tente de trouver une solution à un casse-tête.
Finalement, tu lève la tête pour la fixer très sérieusement. Pourquoi arracher les vers du nez, toi qui est la délicatesse incarnée ? Ils te rapprochent quoi exactement ?
조금 늦었지만 그래도 괜찮아
Au fond, elle sait qu’il ne se soucie pas d’elle à ce point, que ses problèmes ne le touchent pas. Elle le laisse la pousser. Arrêter la danse. C’est la seule activité qu’ils peuvent faire ensemble. Elle secoue la tête. Hors de question. Elle doit s’empêcher de lui faire comprendre à quel point la danse est bonne pour son apprentissage moteur. De toute façon aucun mot n’arrive à franchir sa gorge. A cet instant, l’ancien Jae lui manque terriblement. Celui qui faisait au moins semblant de s’intéresser à ses problèmes. Certes, elle a bien compris que sa gaminerie l’ennuie fortement. Alors elle se force à se calmer, à s’arrêter de trembler et de gémir comme un petit chiot blessé. Même sa remarque sur son échec en tant que mère qui manque de la faire de nouveau éclater en sanglots, elle décide de passer outre. De toute façon, il n’a pas besoin de le lui rappeler, les services sociaux s’en chargent déjà parfaitement à sa place. Mais il faut qu’elle se comporte de manière plus mature. Pour cela, elle ne le rejoint pas sur le bord du lit et reste debout, comme une élève faisant une présentation devant un professeur et sa classe.
Je n’ai qu’un seul salaire… Et un salaire de prof, c’est un peu un salaire de misère. Elle l’admet. Pour s’occuper seule d’un enfant, être professeur n’est pas la meilleure solution. Elle a déjà essayé de prendre un autre boulot à mi-temps le soir mais a vu qu’elle n’arrivait pas à composer entre les cours, les devoirs à corriger, les contrôles à faire et le travail à mi-temps jusqu’à deux heures du matin, puis reprendre à sept heures et demi le matin. Elle sent son rythme cardiaque s’accélérer mais fait de son mieux pour ne pas céder à la panique inhérente à ce sujet très délicat pour elle. En plus Shin Bom est… Alors que les larmes menacent de déborder à nouveau, elle est obligée de prendre une grande inspiration pour garder les yeux secs et la voix ferme. Shin Bom n’a jamais eu de figure paternelle, selon eux. Bom Chan a été très présent mais ça ne compte pas pour eux car on n’est pas mariés… Et on n’a pas l’intention de se mettre ensemble ou quoi que ce soit. Elle secoue la tête longuement. Et comme si ça ne suffisait pas… Et depuis qu’il y a eu cet incendie à la Yonsei et que j’ai été trois mois à l’hôpital… C’est de pire en pire. L’école m’a sanctionnée en quelque sorte et mon salaire a baissé… Je sais plus quoi faire. Je suis incapable de faire quoi que ce soit d’autre qu’enseigner. Je sais pas quoi… Elle inspire profondément et passe ses mains sur son visage pour dégager les cheveux collants à son visage.
Après de longues secondes de réflexion et de silence, ses bras retombent le long de son corps et elle l’observe d’un air de défaite. J’ai besoin de ton aide… Je sais pas comment mais je… Il n’y a qu’à toi que j’arrive à… Elle s’embrouille encore et dès qu’elle s’en rend compte, elle se tait pour reprendre ses esprits. T’es le seul à plus rien attendre de moi… Et t’es pas un connard. T’as jamais été un connard, Jae. Peu importe ce que j’ai pu te dire.
Le nom de Bom Chan manque de t'arracher une grimace, mais tu sais que ça ne peut pas être lui. Après tout, des Bon Chan, il y en a partout en Corée, alors pourquoi diable par le plus grand des malheureux hasard Syu fréquenterait le pire d'entre eux ? Le mariage, c'est pas forcément la meilleure solution. Lâche tu de la manière la plus abrupte qui soit. Il est vrai que cette idée te déplaît, de se marier pour échapper à un système pointilleux. Pour la première fois de la soirée, tu semble montrer une pointe d'agacement sincère en vu de la situation. Effectivement, la cause est compliquée. Tu bout des doigts, tu passe ta main sur le bout de tes lèvres comme pour activer tes neurones tandis qu'elle te demande de l'aide. De l'aide à toi ? Tu es flatté, mais tes sourcils confirment ton étonnement. Tu ne relève pas sa dernière réflexion, histoire de ne pas relancer le débat sur ton cas personnel, préférant largement parler du futur de Shin Bom. Bom d'ailleurs... Bom Chan... Un léger rictus apparaît sur tes lèvres comme si cet hasard était volontaire, mais tu ne dis rien, tu lèves les yeux pour la fixer. Oui, tu la regarde toi qui fuyais toujours son regard accusateur, car tu avais toujours peur de l'affronter... Mais étrangement, ce soir, après ce coup d'état, tout semble être revenu... Comme avant, si tu peux le dire.... Comme avant, mais sauf que cette fois tu es un gars clean. Ou presque. Je veux bien t'aider, mais comment ? Tu es calme et ta voix ne trahi aucune amertume. Tu crois vraiment que les services sociaux apprécieront qu'un violeur soit le parrain de Shin Bom ? Aucuns tabou ce soir, et cette fois encore tu ne semble éprouver aucun remords a tes précédents actes en les énumérant de la sorte... Mais tu es toujours là, à l'observer, et d'un geste de la main tu attrapes son poignet pour l'inviter à s’asseoir à côté de toi. Une fois qu'elle a pris place, c'est à ton tour de te lever pour aller fermer la porte correctement. De nouveau la nervosité semble bouffer tes entrailles, alors tu piétines un instant devant le lit. C'est ton tour de passer un exposé devant madame la prof. Mains sur les hanches, tu fixes le plafond, tentant de te libérer de ces paroles qui bloquent au fond de ta gorge... Et un soupir, long soupir... Ecoute. Tu baisse la tête, comme si tu avais trouvé le courage de l'avouer. Cette fois, tu ne fuis pas, vos yeux ne se quittent plus. Je pourrais te donner de l'argent pour que tu puisses l'étaler. Du fric, j'en ai à la pelle. Mais j'ai pas envie de te donner cet argent sale. tu marques une pause, histoire que tes paroles l'atteigne réellement, pour qu'elle réalise enfin que tu ne parles pas que de tes job à mi-temps. Un nouveau soupir s'échappe de tes poumons. J'ai beau être clean physiquement Syu, j'ai jamais vraiment raccroché. Je pourrais t'expliquer le pourquoi du comment, mais j'ai pas envie de trouver des excuses à chaque fois. C'est comme ça.
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조금 늦었지만 그래도 괜찮아
Jae semble changer du tout au tout en l'espace de quelques secondes. Syu a pu voir son rictus presque mauvais mais surtout amer se transformer en une simple expression neutre voire même peut-être un peu pensive. Pour la première fois depuis qu'ils se sont retrouvés, leurs regards se croisent enfin. Alors elle ne le lâche plus. Cela fait bien trop longtemps qu'il a osé affronter son regard et pour cause, auparavant il n'était toujours qu'accusateur et bourré de reproches. Là, c'est plutôt le contraire. C'est de l'aide qu'elle lui demande. Elle ne sait pas comment il pourrait l'aider mais elle sait que c'est de lui qu'elle a besoin. Pourtant, se dit-elle, elle a tant d'amis proches à qui elle pourrait se confier mais ils la voient tous comme la femme parfaite qui n'a jamais de souci et dont la vie est impeccable. Au moins, Jae sait que tout ça n'est que façade. Elle s'assoit sagement à ses côtés et glisse ses mains entre ses genoux. Je ne suis plus à ça près, tu sais... Il y a une pointe d'amertume dans sa voix tandis qu'elle laisse sa tête retomber sur ses genoux. Elle n'arrive même plus a prétendre que tout va bien ou qu'elle se sent capable de trouver une solution à tous ces ennuis.
Quand il reprend la parole, même s'il n'est plus assis près d'elle, elle lève les yeux vers lui de la manière la plus docile qui soit. Pouvoir se replonger dans ses yeux lui fait un bien fou. Les yeux noirs de Jae lui ont toujours apporté la paix et le calme. Mais surtout, elle n'a plus l'impression qu'il l'évite. Ses mots la frappent instantanément mais son visage reste de marbre. Après l'incarcération de ce dernier, elle a pu rapidement comprendre qu'il ne faisait pas que consommer de la drogue, même a l'époque, alors la révélation actuelle ne la surprend pas. Elle aimerait lui dire tant de choses. Tu pourrais faire tellement mieux de ta vie. Pourquoi tu t'obstines à faire ça ? Pendant que la blondie réfléchit, elle n'a de cesse de se mordre la lèvre inférieure. Je ne veux pas de tes excuses... marmonne-t-elle comme une enfant colérique tandis qu'elle plie les genoux jusqu'à ce qu'ils soient presses contre sa poitrine. Elle a mis une main sur chaque genou et soupire lentement. Je veux juste des explications, pour que l'on puisse recommencer à vivre...
Enfin elle se lève et le rejoint en deux pas pour soutenir son regard sans hésiter, pour autant sans être agressive. Il lui faut quelques secondes à se mordiller la lèvre avant de trouver les mots. Réponds à mes questions, cette nuit. Toutes sans exceptions. Je répondrai aux tiennes, si tu en as, mais tu n'entendras pas de reproche. Demain matin, tout aura été mis derrière nous. Je ne te poserai plus de questions après cette nuit et j'empêcherai qui que ce soit de t'en poser, quitte à devoir te suivre jour et nuit... Comme une enfant qui ne sait pas s'empêcher de faire des bêtises, ses yeux sont à nouveau emplis de larmes mais elles ne coulent pas et sa voix ne tremble pas. Est-ce vraiment si mal d'avoir besoin de ça pour être capable de passer à autre chose ?
Ils t'ont tous abandonnés, les uns après les autres. Tous, sauf elle. Chacun a pris sa route, tout le monde t'a oublié et te regarde de haut quand vous vous croisez. Sauf elle. Alors que tes pupilles noires la fixent avec insistance lorsquelle s'approche de toi, tu continues de l'écouter sans broncher. La seule différence avec ces personnes, c'est que Syu a toujours voulu avoir une explication à quelques actes dénués de sens. Tu gardes ton soupire désespéré, pour ne pas paraître désinvolte. L'heure n'est plus aux reproches, quelque chose te le dit et te confirme que c'est peut-être la meilleure chose à faire... Pourtant, cette idée d'aborder le passé te froisse, aussi tu tentes de garder ton calme. Ce n'est pas parce que toi tu l'as enterré il y a quelques années que c'est le cas de tout le monde... Et pour preuve, le fantôme de Three est toujours autour de toi, à chaque instant, te remémorant tes promesses d'ados et autres choses dénuées de sens.
Qu'est-ce que tu veux savoir ?
Tu te trouves bien calme en répondant cette simple phrase. Contrairement a elle, tu n'as pas de question à lui poser, car tu as toujours apprécié apprendre les choses au fur et à mesure. Pourtant, même si tes yeux et ton ton ne trahissent aucune colère, tu as croisés les bras comme pour te protéger d'une quelconque reproche. De toute façon, elle fera comme tous les autres, te demandera pourquoi tu as fait ça à Lin Yao et tes réponses, tes justifications ne plairont pas... Lorsqu'elle s'apprête à poser sa question, tu la coupes dans son élan pour ajouter.
Tu veux que je réponde franchement à tes questions ? Ou bien entendre mes réponses comme tu voudrais qu'elles soient ?
Ainsi tu l'avertis. Tu es conscient de tes actes et tu ne changeras pas ta façon de pensée, mais si elle a besoin de mensonges pour avancer alors tu es prêt à faire l'effort. Pour ce soir.
조금 늦었지만 그래도 괜찮아
Les yeux de Syu ne quittent pas ceux de Jae. Pour une fois, il ne se défile pas. Il semble même accepter. Il a tellement changé. En soi, ça attriste légèrement la jeune femme. A l’époque, elle croyait naïvement qu’il l’aimait, qu’il la traitait comme une princesse car il la prenait sincèrement pour telle. Elle voulait croire qu’il tenait à elle, un minimum. Le plus dur fut la chute. Le procès, la prison, se voir refuser l’entrée systématiquement car il ne voulait simplement pas lui parler ni la voir. Si, avec le recul, elle arrive à se dire — mais pas à se convaincre — que la raison était qu’il avait trop honte pour lui faire face, à l’époque, six ans plus tôt, elle n’arrivait pas à comprendre la raison qu’avait Jae de la repousser alors qu’elle voulait, non pas le croire innocent, mais bel et bien l’aider. Même en ce jour, elle aurait bien voulu qu’il la prenne dans ses bras et lui mente, lui dise que tout irait bien, qu’il était là et que plus rien ne pourrait lui faire de mal. Cependant, elle sait qu’elle-même ne l’aurait pas cru. Elle n’a plus vingt ans. Un long soupire lui échappe. Bien qu’elle ait déclenché cette conversation, elle se sent paniquer. Son rythme cardiaque augmente mais elle fait de son mieux pour ne pas le montrer et force sa respiration à garder le même rythme. La jeune femme déglutit et va pour poser sa première question, mais il l’interrompt. Et il ose poser ce genre de question. Elle fronce les sourcils.
Evidemment que je veux la vérité.
Elle répond simplement et d’une voix oscillante, car elle a du mal à contrôler sa respiration et la panique qui grimpe en elle, mais elle le dissimule trop bien. Elle sait à quelles questions Jae s’attend. Pourquoi as-tu fait ça ? Il y aurait au moins celle-ci. Et pourtant, il n’a jamais été aussi loin de la vérité. Elle ne veut plus entendre de réponse à cette question. C’est beaucoup trop de stress, alors qu’elle ne peut même pas se l’expliquer. A nouveau, elle prend une longue inspiration pour se donner du courage. Mais c’est simplement un long sifflement d’asthmatique qui lui échappe. A nouveau, elle a des difficultés à respirer et pose une main sur sa poitrine. Il lui faut quelques secondes pour se donner l’impression que sa respiration se calme.
La question que Syu veut poser à Jae fait peur à la jeune femme. Pire. Elle la terrifie. Tant de choses pourraient changer selon sa réponse. Pourtant, il ne lui suffit que de prononcer un mot. Oui ou non. Mais tout pourrait changer. Bon. Tout est peut-être un trop grand mot, mais Syu a l’impression qu’elle attend tellement de cette soirée. Elle ne cherche plus à comprendre pourquoi il a fait ça. C’est trop tard. C’est le passé, n’en parlons plus, comme dit le dicton. Ce qu’elle attend de lui, c’est au moins la vérité.
Ce jour-là… T’étais défoncé ?
Ton regard se fige, perdu dans les ténèbres. Peut-être as-tu mal compris la question. Ce n'est pas de l'hésitation qu'on peut apercevoir sur ton visage, mais bel et bien cette surprise de n'avoir que cette question en premier. Tu t'attendais à autre chose. Pourquoi elle ? Pourquoi t'as fait ça ? Est-ce que tu regrettes ? Tu n'as pas honte ? Toutes ces reproches que ta propre mère t'avait craché à la figure, cette seule visite que tu t'étais permis... Et la dernière. Insupportable.
Tu la revois, en face de toi, tremblant et en sueur sous le manque de tes substances qui étaient devenues indispensable selon toi à ta survie. La revoir, avec ces émotions confuses sur son visage, reconnaissant à peine le fils qu'elle avait mis au monde. Tu n'as pas honte ? Sa voix résonnait dans le parloir, tes mains jointes attachés, tu relevais la tête comme un animal sauvage apeuré. Les traces violacés sur tes bras découverts trahissaient le mauvais traitement que tu t'autorisais, comme pour te punir d'avoir abandonné ton ami. Après tout, c'est toi qui cherchais les détenus à l'époque. Cet acte, tu n'en avais pas honte. Loin de là, tu n'as jamais éprouvé du regret, pas même aujourd'hui. La seule chose dont tu avais "honte", c'était d'avoir été incapable d'agir en conséquence pour sauver Three. Tu réalises ce que tu as fait ? Ses reproches ne cessaient de venir, comme si elle essayait de t'achever sur un ring de boxe, mais la seule chose qu'elle n'avait pas calculé, pas même pensé, c'était ton état. ton âme, si sombre, si malade, te rendait parfois comme possédé... Pas étonnant que les gardiens restaient à proximité, à quelques mètres, observant d'un regard inquiet la scène... Mais ta mère, elle, continuait de cracher sa peine, son désespoir, comme pour se soulager du traitement médiocre qu'elle subissait au quotidien avec son mari. As tu seulement pensé à l'avenir de cette fi-... C'est la première et dernière fois ou tu manqua de respect à ta mère. Crachant volontairement au sol d'un air dédaigneux pour l'interrompre, tes pupilles noires la fixaient comme pour l'avertir qu'elle avait été trop loin. Peut-être voyait-elle le monstre qui te servait de père à cet instant. Et toi, t'as déjà pensé à mon avenir ? Tu sais que oui, elle s'était toujours démenée au travail, mais tu perdais le contrôle. Inconsciemment, tu t'étais redresser et instinctivement, les gardiens s'étaient dangereusement rapprochés de toi. Sale conne, mon meilleur ami est mort et toi tu viens pleurer sur le sort de cette salope ?
Oui, de toute évidence. Tu as l'air un peu amer en répondant, mais il faut dire que tu as hésité à employer le sarcasme. Ton avocat, pauvre type commis d'office, avait tenté de coller ça sous la perte de contrôle, mais... Les jurés n'étaient pas dupent, et tu étais une cause perdu ce jour au tribunal. Dans le cas contraire, j'aurais eu un peu d'amour propre pour pas toucher à ça. Tout ce mépris à l'égard de Lin Yao résonne un peu plus dans la pièce. vos retrouvailles n'ont pas amélioré la chose, loin de là. toi qui avait tenté d'oublié, de repartir de zéro, cette fille là ovulait limite t'enterrer plus profond. En voilà une qui n'avait pas su avancer, tentant d'oublier tout son être. Une personne comme tu pouvais les mépriser.
Ce n'est pas que ça t'embête de répondre, mais c'est de voir le visage de Three qui t'emmerde comme d'habitude. son regard vide, rivé sur vous. Ton esprit, divaguant, voulant... Agir. Ton esprit répondant à tes pulsions.... Tu lèves les yeux au ciel comme pour chasser ces mauvaises ondes, et d'un revers de main tu balayes ces pupilles de ton esprit avant de fixer à nouveau Syu. A nouveau, tu paraît légèrement surpris en remarquant qu'elle à l'air stressé. Un soupire s'échappe, comme désespéré devant cette situation... Quelque peu comique. Je ne vais pas m'énerver si tu me pose des questions, alors vas-y franco avant que je ne change d'avis. Il ne manquait plu qu'une cigarette pour que tu soies posé. Mais fumer dans une chambre, c'est fortement déconseillé - surtout dans celle de Syu, alors tu joues avec la cigarette que tu viens de sortir, comme pour occuper ces doigts angoissés de livrer tant de sombres secrets.
조금 늦었지만 그래도 괜찮아
Il a l’air de partir tellement loin, que Syu se permet de le dévisager un peu plus à loisir. Il n’a pas vraiment changé. A part s’être étoffé, il est resté physiquement le même. Il a toujours les oreilles en chou-fleur, et c’est en partie pourquoi elle craquait sur lui quand il est arrivé dans sa classe, les yeux en amande noirs comme la nuit, un nez légèrement tordu qu’elle s’amusait beaucoup trop à pincer pour l’embêter jusqu’à ce qu’il lui mette une petite tape sur la main pour l’écarter, et ses traits effilés. Il lui parait tellement beau, même plongé dans des souvenirs qui ne lui semblent pas agréables, que pendant un instant, la jeune femme arrive à se calmer quelque peu et à oublier pourquoi ils en sont là. Elle arrive encore à se renvoyer à plusieurs années auparavant, quand il allait encore à peu près bien, et qu’ils étaient heureux ensemble. Mais sa voix la fait revenir à la réalité, même si elle ne peut empêcher un frisson de remonter le long de sa colonne vertébrale. Elle cligne lentement des yeux en entendant sa réponse, qui fait revenir son anxiété. En soi, elle se sent moins blessée que s’il avait avoué ne pas être défoncé. Au moins, elle a toujours la consolation de se dire qu’il n’était pas totalement lui-même.
Et moi ?
Sa voix résonne à ses oreilles comme venant d’ailleurs. Elle ne prévoyait même pas de la poser, même si elle lui pendait au bord des lèvres. Elle qui, pendant des années, avait culpabilisé en se disant que c’était peut-être aussi de sa faute. Elle se disait qu’elle n’était plus assez attirante pour Jae et que c’était pour ça qu’il était allé voir ailleurs. Pendant quelques semaines suivants le procès, elle s’était confiée à son père, en lui disant que tout était peut-être de sa faute. Et voilà qu’en quelques mots, Jae l’avait lavée de toutes ses angoisses. Pourtant, il avait fallu qu’elle gâche tout en laissant son cœur parler avant son cerveau. Et, comme une chose n’arrive jamais seule et que Syu ne fonctionne pas comme tout le monde, elle se sent tellement oppressée qu’elle se détourne de Jae pour s’avancer à la fenêtre et l’ouvrir en grand, laissant l’air froid de l’hiver s’engouffrer dans sa chambre. Elle s’appuie à la fenêtre et regarde la ville. D’un mouvement de la tête, après s’être retournée brièvement vers lui, elle l’enjoint à la rejoindre pour pouvoir fumer la cigarette qu’il semble avoir tant envie de s’allumer. Quand il est près d’elle, elle lui tend une main. Passe-m’en une. Il ne l’a probablement jamais vue fumer car elle a commencé bien après son incarcération, non pas par effet de mode, mais juste par envie. Elle ne fume pas souvent, juste en cas de crise d’angoisse, comme maintenant.
Pourquoi t’as refusé de me voir systématiquement au parloir, Jae ? demande-t-elle alors qu’il la presse. Elle attrape son briquet posé sur la table de chevet. Cadeau de son défunt mari. Un briquet un peu plus sophistiqué dans lequel il avait passé tout un salaire. Juste pour lui faire plaisir. Elle allume sa cigarette puis réenclenche le briquet avant de tendre la flamme à son ex, ami, ou peut-être celui qui arrivait malgré tout à occuper toutes ses pensées. Elle ne sait plus comment le qualifier. Il a promis de ne pas s'énerver, alors si elle tentait quelque chose, le ferait-il ? Non, idiot, se dit-elle. Comme si c'était le moment de penser à une chose pareille ! Un moment aussi grave, aussi important pour l'un comme pour l'autre. Je... Je voulais vraiment te voir, tu sais, et t'aider. Ou te soutenir. Ne serait-ce que ça.
Et moi ?
Et toi ?
La confusion s'empare de toi. Tu n'as pas trop compris sa réflexion, car jamais tu n'as comparé Lin Yao et Syu. Comme si on pouvait le faire. D'habitude, tu te serais mis en colère, mais là c'est plus le dépit qui s'empare de tout ton être. Alors, il était là le problème depuis tout ce temps ? Tu pourrais claquer ta langue contre ton palais comme pour lui faire comprendre qu’elle vient de sortir une énorme bêtise... Mais au final, tu inspires un court moment tandis qu'elle s'éloigne vers la fenêtre. Lorsque le courant d'air parcours ton dos, tu frissonnes un instant avant de desserrer les dents. Pourquoi "toi" ? Tu te compares vraiment à... tu baisses la voix, murmurant à ton toi intérieur ce mépris, tout en coinçant ta cigarette derrière ton oreille. ... ce déchet ? Comme pour clôturer ce sujet, tu tapes les paumes de tes mains sur tes cuisses, d'une part pour te réchauffer et également pour te motiver à bouger et rejoindre la jeune femme. Lorsqu'elle te demande une cigarette, tu ne manque pas d'arquer un sourcil avant de lui donner celle que tu venais de caler (sale habitude de tabac addict)... Et tu en ressort une. Naturellement. eh.
Sa nouvelle question tu t'y attendais. Cette fois, tu ne laisse paraître aucune réaction sur ton visage, préférant paraître occupé à fixer les lumières de la ville. Portant la cigarette à tes lèvres, tu attends ta première bouffée pour réfléchir à comment tourner ta réponse. LEs mots de Syu sont complètement dénués de sens, aussi tu tentes d'être le plus doux possible dans la justification que tu dois apporter malgré toi. Un grognement résonne au fond de ta gorge, trahissant cette hésitation. Finalement, à quoi bon la ménager maintenant, ce n'est pas comme si c'était encore une petite fille. Le filtre de ta cigarette a pris le temps de coller a tes lèvres sèches pendant cette attente presque interminable, te permettant ainsi de libérer tes mains et de croiser les bras. Ça m'aurait pas aidé de te voir. C'est brutal dit comme ça, mais c'est la vérité. Une inspiration de nicotine, ta main froide passe dans ton cou. Tu as un peu chaud, malgré le froid hivernal. Et ça ne t'aurait pas aidé non plus.
Tu aimerais lui dire que le passé c'est le passé, qu'il n'y a pas besoin de revenir là dessus, que les choses sont telles qu'elles étaient et que même si tu voulais changer ça,... Vous n'y pourriez rien.... Si seulement tu voulais changer ça, jamais dans ta vie tu n'as éprouvé le moindre regret, alors, plutôt que lui faire un peu plus mal, comme à chacune de tes réflexions, tu tourne la tête pour la regarder une nouvelle fois. Ta cigarette se retrouve à nouveau entre tes doigts. Je me suis autorisé une seule visite. J'ai fini à l'isolement une semaine... Tu m'aurais probablement posé les mêmes questions qu'elle j'imagine, et fait les même reproches. J'avais pas envie d'entendre des sermons supplémentaire.