Andrew était assez maniaque et surtout dans sa cuisine. Il n’aimait pas que tout soit en désordre, c’était comme ça il se sentait pleinement concentré dans un environnement harmonieux et ça l’irritait de la voir ouvrir tous les placards. Il tâchait de ne pas y penser et tentait de créer la plus parfaite tarte qu’il n’ait jamais conçue. Devait-il lui demander si elle voulait l’aider ? Peut être une autre fois. Il ne la regardait pas ~ Aisling ? ~ Son prénom semblait étrange et ne lui paraissait pas coréen. Puis il eut comme une révélation, peut être ne voulait-elle pas lui donner son vrai prénom après tout ils ne se connaissent pas. Et puis tant pis. Il continuait à pétrir la pâte. Elle s’installa sur le plan de travail. ~ Définir une tarte ? ~ Décidemment aisling était surprenante. Comment pourrait-il définir un dessert à part avec ses ingrédients ? Mais bien sûr ce n’était surement pas l’explication qu’elle voulait, qui voudrait d’une telle explication ?! < C’est un peu comme un… > Il voulait prendre le cheese-cake comme exemple mais fallait-il qu’elle en ait déjà mangé. C’était le dessert national aux USA mais y en avait-il ici ? < Comme une plante. La terre c’est la pâte, les racines c’est la garniture et la fleur c’est le nappage – ici, la meringue - > Il se sentait ridicule d’avoir trouvé une explication aussi stupide mais il n’avait pas vraiment réfléchi et lui avait sorti ça comme ça. En attendant de finir son bébé, il hésitait à lui demander ce qu’elle faisait dans la vie, ce genre de choses. Mais il n’aimait pas les ‘small talks’. Il n’aimait pas bavarder tout simplement. Délicatement il enfarina son rouleau à pâtisserie, et de ses bras musclé il fit de longs gestes d’avant en arrière pour aplatir la pâte, il la plaça dans le moule et l’enfourna. Il s’attela à faire la garniture et la meringue et 35 minutes plus tard la tarte sortait du four, chaude et appétissante. Il chercha dans un des tiroirs deux fourchettes. < Sois honnête, t’en penses quoi ? >

Elle attendait les réponses à ses questions avec la curiosité d’un enfant. Elle aimait tant connaître de nouvelles choses, apprendre tout ce qu’on pouvait lui enseigner chaque jour. Elle avait une facilité pour tout assimiler, pour tout comprendre pour peu qu’on se donnât la peine de lui expliquer. Elle le regarda avec curiosité, constatant que même assise en hauteur, elle n’arrivait toujours pas à son niveau. Elle l’encouragea lorsqu’il commença à parler, le poussant à aller plus loin dans ses réflexions, fronçant un peu les sourcils parce qu’elle trouvait que cela prenait un peu trop de temps. « comme une plante. La terre c’est la pâte, les racines c’est la garniture et la fleur c’est le nappage – ici, la meringue » Elle lui fit les gros yeux en entendant son explications, ne comprenant pas trop où il voulait en venir. Elle s’imaginait une plante, avec tous les détails, mais elle avait maintenant une nouvelle peur… allait-il lui faire avaler de la terre ? Elle n’était pas bien certaine que ce soit comestible, et se demanda si elle ne ferait pas mieux de s’en aller, mais resta. Il lui avait dit que cela allait être bon, elle lui faisait confiance. « donc attends, c’est une plante alors ce que tu vas me faire manger ? je ne savais pas qu’on pouvait manger des plantes. Tu sais, je travaille dans une jardinerie donc j’en connais un paquet sur les plantes et les légumes et tout ça, mais je savais pas qu’on pouvait manger la terre et les racines des plantes. Bien sûr, il y a des racines qu’on peut manger, je le sais très bien, mais des plantes avec des fleurs, je vois pas… OH ! ATTEND ! c’est des courgettes c’est ça ? C’est la seule chose que je vois, mais je ne savais pas qu’on pouvait manger des racines de courgette. Mais t’avais pas de courgette là, donc je sais pas trop… » elle marmonna sans s’arrêter, bien trop impatiente de goûter à cette tarte. Elle n’avait pas besoin qu’on lui fasse la conversation, elle s’en occupait toute seule comme une grande. Elle se laissa glisser du plan de travail pour retourner sur ses deux pieds, tournant dans la grande cuisine en observant ce qui y traînait et qu’elle n’avait pas eu le temps d’examiner. Enfin, la tarte sortit du four, et elle put la goûter. Ce fut avec grand empressement qu’elle en enfourna une grande bouchée. « déjà je trouve ça plutôt joli ! » dit-elle, la bouche encore pleine. Elle n’avait pas l’habitude de ce genre de plat, elle se contentait de manger chaque jour de la nourriture pour enfant qui remplissait les placards de la fraternité. « mais c’est bon ! c’est sucré, c’est chouette ! » elle en reprit une grande fourchette, essayant de prendre tous les ingrédients à la fois. « on dirait de la magie, t’es magicien ? » lui demanda-t-elle avec beaucoup de sérieux. C’était drôle, qu’elle n’en avait jamais goûté, vu comme c’était bon, mais ce n’était pas non plus très étonnant… elle n’avait pas la nutrition la plus variée. « et tu ouvres tout ça quand ? » demanda-t-elle, encore, tout en se rapprochant de lui, continuant doucement ses avances.

Elle fit une moue triste lorsqu’il lui dit que non, il n’était pas magique. Rah, zut. Mais elle était certaine que c’était simplement parce qu’il ne voulait pas l’admettre ! Il avait peut-être trop honte, ou avait peur de la réaction des gens… Il devait être un peu faible, un peu lâche, contrairement à elle qui assumait tout avec fierté. Elle se mit plus droite, se sentant d’un seul coup légèrement supérieure à lui. Elle allait lui montrer, de toute façon, qu’elle savait qu’il était une divinité camouflée, il n’avait pas besoin de continuer de lui mentir. « je repasserais samedi alors ! » déclara-t-elle, puis, elle demanda : « j’ai envie d’en goûter d’autres… est-ce qu’il y a d’autres goûts aussi ? » avec un sourire charmeur. Elle donna un nouveau coup de fourchette dans la tarte, s’en remplissant la bouche au moment où il lui posa une question. Elle prit un certain temps à avaler, amusée d’elle-même et de la situation. « j’ai 22 ans » répondit-elle, un peu surprise tout de même par la question. Faisait-elle si jeune que ça ? Elle observa sa tenue aux milles couleurs, son sac à dos rose pâle. Ah. Peut-être avait-elle un look un peu spécial par rapport aux autres, mais elle n’avait tout de même pas l’air d’une mineure ! Elle allait le lui faire remarquer, mais il la coupa avant même qu’elle ne put commencer. « tu es un psychopathe ? » demanda-t-elle, les sourcils froncés pour lui montrer qu’il n’en avait en rien l’air. « je n’ai pas peur des psychopathes, ils ne peuvent rien me faire » ajouta-t-elle avec beaucoup de fierté. Non, personne ne pouvait la toucher, elle était bien trop forte, presque invincible, et elle le serait encore plus si elle obtenait de lui ce qu’elle souhaitait. Elle se rapprocha de lui, glissa sa main le long de son bras jusqu’à son épaule, restant dans son dos. « je suis venue parce que je te trouvais intéressant » Elle souriant, et tourna autour de lui pour se retrouver de l’autre côté de son corps. « et que je n’ai peur de rien » Son expression de fit plus charmeuse, et elle se demanda s’il allait se montrer difficile.

Des tartes à tout ? Alors elle voulait toutes les goûter… et puis, ça lui ferait sûrement une bonne excuse pour le revoir, puisque plus elle discutait avec lui, plus il lui semblait qu’il n’était pas vraiment chaud pour une nuit de folie sous des draps. Elle fit la moue. Oh. La prochaine fois, elle réussirait sûrement. Avec un sourire charmeur elle accepta la coupe, frôlant les doigts de l’autre homme dans l’espoir qu’elle le ferait frémir, puis en bu une petite gorgée avant de le remercier. Elle fut un peu surprise de l’initiative, mais ne retint pas un grand sourire. « ils ne peuvent rien me faire parce que je suis invincible ! » s’exclama-t-elle avec conviction. Elle était invincible, personne ne pouvait la battre, elle en était certaine. Elle observa le drôle de manège auquel l’homme s’attelait. Il descendait des chaises, bougeait un peu partout, et elle le suivit avec sa coupe toujours en main, s’adossant contre un des murs pour continuer à l’observer. Puis, il se stoppa, et, curieuse, elle s’approcha de lui pour savoir ce qui l’avait perturbé. Elle le voyait contre le jukebox. Elle fronça les sourcils, ne comprenant pas trop. « qu’est ce qu’il t’arrive ? t’as bugué ? » demanda-t-elle, légèrement inquiète… était-ce pour lui déjà un effet de l’alcool ? Elle ouvrit grand les yeux. « tu veux mettre de la musique ? tu veux que je choisisse peut être ? » Mais... attend… Un verre de champagne, de la musique, deux êtres humains… était-il en train de la draguer à sa manière ? Son expression se fit plus charmeuse, et de deux pas, elle s’approcha de lui pour coller son corps contre le sien. D’une main, comme si elle avait simplement jeté un sort, elle mit une chanson au hasard (espérant en même temps qu’elle ne tue pas l’ambiance) et glissa ses mains sur les bras de Anderou, puis sur ses épaules, avant de les caler derrière sa nuque. « c’est bon, j’ai compris ce que tu voulais faire » susurra-t-elle avec un léger sourire. C’était sûrement un timide qui n’assumait pas, mais ce n’était pas grave. Une divinité était une divinité.

Il était distrait par les lumières violettes, vertes et oranges du jukebox. « Je suis invincible » raisonnait encore dans ses oreilles. Elle l’avait affirmé avec une telle conviction. Comment pourrait-elle être invincible ? Il avait remarqué qu’elle était un drôle d’oiseau mais croyait-elle vraiment ce qu’elle disait ? Elle était si frêle. De ses 2 mètres de haut il pourrait l’écraser d’un revers de la main. ~ Qu’est- ce qu’elle entend par « invincible » ? ~. Il voulait lui poser tant de questions. Son doigt continuait à caresser délicieusement les boutons du jukebox. Il se stoppa sur l’une des chansons. Il n’avait pas fait attention en l’achetant mais cette chanson était là. Celle de leur première danse. A son mariage. Le goût amer de la trahison d’Ivy lui revint. Il grimaça. Il n’était pas triste mais dégouté. Il ne voulait pas sacraliser cette chanson. Il l’aimait et ne voulait pas qu’elle soit caractéristique de sa relation avec Ivy. Sans trop réfléchir ou par reflexe, il appuya. La musique était lancée et il ne pouvait plus faire contrôle -z-. < Bugué ? > Il réalisa qu’il était figé là depuis un bon moment déjà et qu’elle lui avait demandé s’il voulait qu’elle choisisse la chanson. ~ Oups, trop tard ~. Sans qu’il eut le temps de faire ou dire quoique ce soit, elle s’était collée à lui. Elle avait ses bras autour de son coup. Lui avait-il fait croire qu’il voulait plus ? Il vit les coupes de champagne, entendit la musique, il l’avait emmené dans un lieu plus discret. Il voulait rire de lui-même, de sa maladresse, mais se retint. Il ne savait pas quoi faire. « Ce que tu veux » mais qu’est-ce qu’il voulait au juste ? Il paniquait. Il avait le souffle court. Ses yeux était écarquillés et ses sourcils soulevés. Il se demanda l’espace d’un instant s’il allait accepter sa proposition. Elle était jolie après tout et ça faisait déjà quelques mois qu’il n’avait pas baisé. Il la regarda dans les yeux et puis il se souvenu de sa façon de s’agiter durant le chemin vers la pâtisserie, de son monologue pendant qu’il cuisinait, de sa façon dont elle parlait la bouche pleine. Elle était adorable. Il ne la voyait pas comme une conquête. Il prit les mains d’Aisling de derrière sa nuque et les baissa. Il fit un non de la tête. < Dis m’en plus. Comment peux-tu être invincible ? Moi aussi je peux l’être, "invincible" ? >

Elle se mordit les lèvres. Oh, elle était sûre qu’il n’avait besoin que d’une petite poussée pour tomber dans ses bras. Mais il était haut, si haut qu’elle peinait, même sur la pointe des pieds, à atteindre son cou. Elle s’étirait, elle s’étirait encore, mais encore une fois, elle fut rejetée. Elle ne comprenait pas ce qu’il voulait, décidément pas. Il semblait parfois si ouvert à ses propositions, mais l’instant d’après il la repoussait. Voulait-il jouer les durs à atteindre ? Elle n’avait pas peur d’un peu de challenge, mais si ‘était pour au final craquer, c’était une perte de temps pour eux deux, alors qu’ils pourraient faire des activités bien plus intéressante. Elle s’éloigna de deux pas, le fixant dans toute sa grandeur, penchant un peu la tête sur le côté dans l’incompréhension de sa soudaine question. « invincible, c’est genre invincible, comme invincible, c’est pas compliqué à comprendre si ? » elle fronça les sourcils, haussant un peu la voix pour se retrouver à nouveau à parler comme un enfant. « genre, personne peut me toucher, personne peut me faire du mal, je peux pas mourir je suis invincible ! » Elle argumenta son récit en relevant ses bras pour étaler toute sa force au grand jour. Elle tata ses muscles (inexistant) en souriant de toutes ses dents. « mais tu sais, devenir invincible c’est difficile… je sais pas trop comment on fait, moi je suis née comme ça ! » Elle se mit à marcher de long en large dans la pièce, posant son doigt sur son menton, comme si cela l’aidait à réfléchir. « faut être magique aussi, je pense, mais tu l’es déjà ! tu es la divinité de la tarte ! » dit-elle en se tournant brusquement vers lui, le pointant du doigt.

Elle le regardait avec les yeux plein d’espoir, prête à l’entendre affirmer qu’il était effectivement une divinité. Elle était certaine d’avoir raison ! Il ne pouvait pas en être autrement, de toute façon, elle avait une sorte de sixième sens pour ce genre de choses. Il lui demanda si elle possédait d’autres pouvoirs, et elle se mit à réfléchir intensément. Oh ! Elle en avait des tonnes, c’était sûr, mais… ils n’étaient pas encore très développés donc elle ne savait pas si elle pouvait les considérer comme acquis. « b…b…bientôt je saurais voler ! » dit-elle avec à la fois gêne, enthousiasme et détermination, convaincue de ses propres mots. Sa première tentative avait été un échec, mais cela ne voulait pas dire qu’elle n’y arriverait jamais ! L’oisillon, en sortant du nid, n’y arrive pas toujours du premier coup. « mais tu sais, les divinités ont chacune leur spécialité ! toi c’est la tarte, tu n’es pas obligé d’avoir d’autres pouvoirs. » Elle lui fit un grand sourire, tapotant sur son épaule comme pour le rassurer qu’il n’était pas un moins que rien. On ne pouvait pas tout maîtriser, elle le savait bien. « oh oui, des dieux il y en a beaucoup ! » elle accentua ses paroles de grands gestes des bras, comme pour montrer l’énormité de la présence de ces divinités. Puis elle se mit à rire devant l’aberrance de ses paroles, se moquant ouvertement de son ignorance. « bien sûr que non ! je ne suis pas une divinité, ça se voit ! » parvint-elle à dire malgré son hilarité. Elle mit du temps à reprendre contenance, respirant avec peine, et essuyant le coin de ses yeux ou quelques larmes de rire avaient perlé. « je suis une fée ! » dit-elle, écartant une nouvelle fois ses bras, tournant sur elle-même pour lui montrer l’évidence de la chose. Elle se demandait toujours comment les gens pouvaient être aussi aveugle face à des faits si réels. « les fées ne peuvent pas devenir des dieux, tout le monde sait ça ! enfin… tout le monde sauf toi apparemment. » Elle fit une petite moue. Elle ne cherchait pas à être malicieuse, elle disait simplement la vérité comme elle l’entendait. « les fées sont les fées, les dieux sont les dieux, c’est deux choses totalement différentes ! » ajouta-t-elle, les yeux écarquillés, essayant de faire comprendre à un non-initié en quoi consistait le monde dans lequel il vivait depuis tant d’année, mais dont il ignorait la réelle consistance.