Sans trop savoir pourquoi, j’étais incapable de me défaire du sourire qui hantait mes lèvres. Comme si mes muscles s’étaient figés d’eux-mêmes à entendre le son de ta voix via le téléphone. « Je suis un homme de parole, je t’accompagnerais jusqu’à ce que tu rentres dans ta chambre. » Ce n’était pas parce que tu voyais le bâtiment de la fraternité que tu étais en sécurité après tout ! Si ? Je n’étais pas hyper protecteur, juste… protecteur. On ne savait jamais ce qui pouvait arriver après tout… « Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ? T’as continué les dossiers pour les gumihos ? Ah ! T’as pas participé aux festivités organisées par la fac ? ça avait l’air assez… convivial ? Amusant ? » Une nouvelle fois, je portais mon verre à mes lèvres pour me délecter de la boisson. Enfin délecter… Pouvais-je me délecter de quelque chose d’aussi fort ? Ils étaient bien drôles avec leur verre rempli quand c’était une boisson qui se buvait en shooter normalement…

Je souriais et ma confiance je t’accordais, pleinement. Et à mon oreille, il me semblait entendre que tu perdais de ta précédente timidité inhabituelle ? Passais-tu un second stade de ton alcoolémie ? Du moment que tu ne m’abandonnais pas. « Oui, tout sera fin prêt pour lundi matin. Mais non, je n’ai pas participé au week-end d’intégration. Sans regret, j’ai pu passer du temps avec les enfants ! » Leur compagnie fut mon seul plaisir de la journée jusqu’à… ton appel. « Je parle de Mingyun et Jethro. Swag aussi mais elle demande généralement moins d’attention. Et toi ? Tu as passé ton après-midi dans les street-food ? » J’inspirais profondément comme si je cherchais à capter quelques saveurs imaginaires dans l’air. « Aaaah, ça me manque ! » me lamentais-je parlant de plus en plus spontanément au téléphone tout en marchant. « La cuisine de mon pays me manque, l’océan me manque et la chaleur aussi ! Pourquoi il fait si froid en Corée ? Et chez toi, il ne fait pas trop froid ? » Même si en vérité, momentanément, mes joues et mon coeur me tenaient largement assez chaud.

Appuyé contre le mur, je décidais de m’installer sur le sol pour être plus confortablement installé. Le verre devant moi, je t’écoutais me raconter ta journée sans prononcer un seul mot. Ta voix suffisait à mes yeux, même si je me rendais bien vite compte que je devais parler malgré tout. Je ne pouvais pas me contenter de me laisser bercer par tes mots. « Swag ? » demandais-je alors dans un premier temps. « Il fait froid… Je pense qu’à cette heure-ci, ça doit avoisinés les moins dix degrés ? Mais l’alcool me tient chaud alors ça va. » Oui, cela devait être l’alcool qui me montait aux joues, pas vrai ? «T’as bien décrit ma journée. Ce matin j’ai aidé ma mère avec nos chats et la maison, on a discuté un long moment aussi puisqu’elle s’inquiétait. L’après-midi je suis sorti avec mon groupe d’amis pour aller manger, boire, faire des achats… Ce genre de choses.» Certains avaient voulus se baigner dans l’eau glaciale mais bien peu avaient accepté de s’y prêter alors bon… L’idée était reportée pour la prochaine fois. « Sinon… Demain… On a qu’à aller à la plage. T’en pense quoi ? »


J’émis un claquement de langue à la fois surprise et indignée que le nom de Swag puisse t’interloquer. Ma tortue je l’affectionnais tout autant que mon chien et notre chat. Puis, je ne pus m’empêcher de frissonner quand tu évoquas les températures. Dire qu’à cette même heure, Singapour se targuait d’une trentaine de degrés de plus. Sans t’interrompre, je t’écoutais à mon tour, presque bercée par le son de ta voix, presque studieuse à me narrer ta journée jusqu’au moment où, mon coeur et mes pieds s’arrêtèrent. « Yah, tu n’es pas sérieux ? » m’exclamais-je incrédule, le coeur en suspend. « Comment pourrait-on aller au bord de la mer la veille au soir de la rentrée ? » Ce n’était absolument raisonnable. Ni même envisageable. C’était comme un rêve que tu me faisais miroiter sans qu’il ne puisse devenir réalité. « Aiiiish ! Woo Haneul, tu es cruel ! » t’accusais-je dans une plainte en reprenant ma marche, remarquant vaguement, sans plus, une silhouette marchant dans mes traces. « C’est de la torture que de me donner un tel faux espoir ! » Tu ne savais sans doute pas encore à quel point, j’aimais éperdument l’océan. Le premier de mes amants.

Ma proposition faite, je sentais mon cœur trembler. Allais-tu accepter… allais-tu refuser ? Le temps semblait passer lentement en attendant ta réaction avant que celle-ci ne me parvienne enfin. Mes sourcils se fronçaient en réaction. Etait-ce l’alcool qui me rendait aussi peu souciant de savoir quel jour nous serions demain ? Un grand sourire aux lèvres, je faisais mine de réfléchir, poussant même quelques onomatopées avant de m’exprimer correctement. « Tu ne me crois pas quand je te dis que je vais te kidnapper demain, tu me crois pas quand je te dis que je vais t’emmener à la plage… Est-ce que tu ne crois pas à la sortie de demain tout court ou c’est parce que c’est moi ? Je suis digne de confiance pourtant. Plus que tu peux le croire ! » C’était presque insultant de voir comme tu n’espérais rien de moi tout, bien qu’en temps normal je l’aurais apprécié.

Quelques secondes passèrent et je ne savais que te répondre. Je ne savais si tu étais véritablement froissé ou si encore une foi tu plaisantais. Comme ma réponse sincère ne te plairait. Non, je n’y croyais pas. Alors, dans un souffle, je te répondis « Je crois que j’ai appris à croire plus aux actes qu’aux paroles… » Ma voix trahissait assurément la blessure dont je souffrais à ce sujet. Une cicatrice tout du moins. « C’est facile de parler, et sans doute encore plus quand on est alcoolisé comme tu l’es, mais sans les faits, ça ne vaut rien… » Ma confiance, tu l’avais déjà plus que n’importe quel homme certainement, néanmoins, certaines barrières protectrices demeuraient encore. Et ce ne serait pas face à un homme ivre ne pensant pas la moitié de ses paroles que je les abaisserais. Cependant conscience du poids de la conversation, je décidais de la détourner. « Tes amis vont s’impatienter, non ? Et si tu me les présentais ? » proposais-je avec un regain d’enthousiaste. J’étais un peu curieuse aussi de découvrir ton univers.


Mon regard s’aventurait dans la pièce, comme s’il te cherchait d’une certaine façon. Pourquoi te faisais-tu si silencieuse ? Puis venais cette phrase, ces mots témoignant d’une de tes blessures probablement. Les hommes t’avaient déçue à parler dans le vent, à promettre pour ne pas agir. Même si je t’assurais que, demain, pour sûr, je viendrais te chercher pour te faire sortir, tu ne me croirais pas vrai ? « Je suis pas si bourré que ça… » Même si, après ces mots, j’avalais le reste de mon verre cul sec tant qu’il n’était encore pas trop chaud. « Tu veux que je te les présentes ? Hm.. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Si tu penses que je suis bourré, alors eux c’est encore pire. Mais je peux t’en parler si tu veux. » Je ne comprenais pourquoi un soudain intérêt pour mon univers et, je ne savais pas non plus, pourquoi cette idée me ravissait plus qu’elle ne m’embêtait. Certainement que je devais être saoul sans le savoir… « Je sais pas par où commencer... » Notre rencontre ? Nos bêtises ? A moins que je devrais te les présenter un par un ? « Celui qui a pas arrêté de venir nous interrompre en premier ? »

Au téléphone, il m’était assez difficile d’attester de ton état d’ivresse. Ton élocution restait bonne mais ton attitude n’était pas normale. Je savais que tu te comportais à cause de l’alcool. Que tu m’avais appelé à cause de l’alcool et que tout cela n’avait aucune signification. Et que de tout cela demain, il ne resterait plus rien, alors, je voulais juste profiter de cette conversation. Sauf que ma demande tu me refusas.  « Quoi, tu as peur que je leur parle ? » Le son de ma voix témoignait de ma vexation. « Ah ! Non… Je dois être trop princesse pour ça, n’est-ce pas ? » raillais-je. Évidemment, encore une fois, la porte me restait fermée au nez car on jugeait pour moi. Ou parce que tu préférais me garder à distance tout simplement. La jolie fille dans ta bulle, j’adorais cette place ! Alors quand tu me demandas ma préférence, je coupais court froidement : « Laisse tomber, je m’en fous. »  Toi aussi, tu souhaitais me garder à distance de ta vie, très bien. Tu ne me reprendras plus à m’y intéresser. A croire que même sobre, j’étais la plus idiote de nous deux.


Ta réaction, je ne la comprenais. Ne voyais-tu pas que c’était pour toi que je disais cela ? Pourtant, même ma proposition de te les présenter ainsi, tu ne l’acceptais. Les lèvres pincées, je dus me rendre à l’évidence : te les passer. « D’accord, d’accord j’ai compris. Je vais te les passer. Mais je t’aurais prévenue… » Je me saisissais de mon verre tout en me relevant sur mes deux pieds. De la chambre où je m’étais enfermé, je sortais pour rejoindre le salon où bons nombres d’éclats de voix s’élevaient.
« Haneul est de retouuur ! »
« Mais toujours au téléphone. »
Je soupirais et leur tendait le mobile. « Hera veut apprendre à vous connaitre. » Une déclaration simple, efficace… qui provoquait un chaos de tous les diables. Est-ce que tu entendais Kang Wei se ramasser par terre en s’étant jeté du canapé dans l’espoir d’avoir le bras assez long pour attraper le mobile ? Ou peut-être les plaintes de Li, qui finissait avec des doigts dans le nez pour ne plus avancer par notre camarade Zwei. « Je sens que ça va être drôle. Je t’ai prévenue Hera ! » Le premier à s’en emparer fut le plus petit de tous : Shen. « Heraaaa ! » s’exclamait-il d’une voix bien trop guillerette et puissante. « Qu’est-ce que je dois dire maintenant ? » Il était tout gêné alors que le portable était volé par Zwei rapidement. « Oui bonjour, ici Zwei à l’appareil. Je peux savoir pourquoi une fille aussi belle parle autant à un garçon aussi idiot ? » « Je vais me servir un verre...»

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couleur - Kang Wei
couleur - Li
couleur - Shen
couleur - Zwei
couleur - KyungJoo
couleur - Haneul

Caprice exaucé alors que j’y avais renoncé, je ne pouvais réprimé le sourire qui se dessinait sur mes lèvres, sans que tu ne puisses le voir. Peut-être était-ce la raison pour qu’il s’exprime d’autant plus sincèrement. Je ne doutais pas que tes amis devaient être des imbéciles et ivres en prime, mais, rien qu’à attendre le son de leurs voix et un certain vacarme lorsque vraisemblablement tu les avais rejoint, je me sentie intégrée. Inclue dans ton monde. Je n’étais plus seule, même à distance, bien que décontenancée. Si le premier me fit esquisser une moue amusée, le second me fit arquer un sourire et finalement, sur un ton sérieux, je répondis comme si j’y réfléchissais véritablement. « Je me le demande aussi, » soupirais-je avant d’enchainer sur une interrogation aux consonances malicieuses : « Il est beau aussi alors peut-être que je suis en train de devenir idiote ? » C’était une certitude même. Je savais parfaitement pourquoi je voulais lui parler. Les flottements de mon coeur étaient limpides mais je n’arrivais à comprendre comment j’en étais arrivée là. « Eh, mais… Minute ! Comment sais-tu si je suis belle ou non ? » Parole hasardeuse, façon de parler ou bien…« Tu l’es. » Une voix masculine par-dessus me fit sursauter. « Ça s’entend rien qu’au son de la voix. »  Je me retournais et découvrais un visage étranger. « Tu peux devenir une idiote avec moi aussi tu veux ? » « Sans façon. » « Eh, on ne sait pas déjà vu quelque part ? »