hanbok + Si mon frère a toujours su comment s’y prendre avec les femmes, ça n’a jamais été mon cas. Je sais qu’Ella est en de bonnes mains, peut-être un peu trop mais je ne crois pas avoir à m’inquiéter. Personne, même pas moi, n’oserait contredire mon père, le roi. Alors désobéir serait un suicide. Je ne suis pas du genre à désobéir. C’est pour cela que je décide de m’effacer. Ella appréciera beaucoup plus la présence de So plutôt que la mienne. Je vois que mon prétexte pour quitter les jardins ne dérange pas tant que ça mon jeune frère et je sais que nos relations n’ont jamais été amicales. Les relations que j’entretiens avec mes frères sont en général déplorables et je m’y suis fait, il doit être ainsi. La jalousie du trône détruit toute famille, il y a dans l’ère Goryeo un taux habituel d’assassinat dans la famille royale. Les jeunes frères assassinent leurs aînés pour accéder au trône et les aînés tuent leurs jeunes frères pour donner l’héritage à leurs fils. Un monde cruel peut-être mais un monde où le pouvoir dépasse trop facilement les sentiments et les liens du sang. Je suis pourtant surpris par la réplique de la jeune femme. Elle a du caractère, ce n’est pas ainsi que se comportent les femmes de notre pays habituellement. Je vois que la question a aussi surpris mon frère et nous observons, bouche-bée, la jeune femme qui continue de me fixer. Je souris ensuite en coin, amusé par les excuses qui suivent et je hoche légèrement la tête.

-Sachez qu’à choisir, je préférerais rester auprès de vous plutôt que devoir vous quitter. Je vous laisse entre de bonnes mains, je crois.

Je lance un petit regard à mon frère, certes pas un regard joyeux mais il m’est de toute façon presqu’impossible d’en offrir. Je prends congé auprès d’eux avec regret. Il est possible qu’en continuant la ballade, je l’aie emmenée dans le coin le plus secret de ceux-ci et qui est pourtant mon préféré. C’est mieux que ça se soit passé ainsi, je ne sais pas ce qu’il se serait passé sinon. Un endroit où un homme emmène une jeune femme pour y être seuls, ce n’est pas très décent et je ne devrais pas avoir ce genre de pensées, moi, héritier du trône. Je me dois de rester sur le droit chemin et c’est pourquoi je dois revenir sur mes pas et retourner à mes activités d’héritier. Je m’en vais alors pour de longues heures où je revois les plans de guerre, nous ne pouvons pas perdre contre les autres contrées mais je sais que nous sommes plus puissants et il n’y a sûrement aucun risque que nous perdions tant que nous restons stratèges.

Ce n’est qu’après de longues discussions que je suis enfin libéré et l’heure est venue d’aller manger. Je pars dans mes appartements pour pouvoir me changer avant de rejoindre ma famille et les invités du soir. Il y aura évidemment Ella, aura-t-elle vêtu une tenue de nos contrées ou restera-t-elle fidèle à ses coutumes ? Je ne sais pas pourquoi je me surprends à penser à elle en me changeant. Je vois mon reflet dans la glace, ce reflet qu’une femme n’apprécierait pas de voir. Toutes ces cicatrices sont écœurantes et je doute qu’une femme accepte un jour de les découvrir, je ne pense pas que je laisserais cela arriver. Je couvre à nouveau mon torse, revêtant une tenue plus royale, aidé par nos servantes. Je soupire, je n’aime pas ces repas de famille mais lors des négociations, je ne peux pas m’isoler dans ma chambre et suis obligé de m’y rendre. Je rejoins alors la salle où l’on mange d’un pas lent et désintéressé. Lorsque j’entre, je remarque que j’étais attendu mais c’est une habitude que j’ai prise lors de ces réunions trop familiales. Je croise le regard d’Ella mais ne m’y attarde pas et m’incline poliment, m’excusant avant de prendre place aux côtés de l’étrangère comme il ne reste que cette place de libre.

-Veuillez m’excuser pour mon retard. J’ai été retardé par mes obligations.

Dress + La réaction des deux frères était prévisible. Je n'avais compris, trop tard, que ma remarque était déplacée et loin d'être conventionnelle. Je m'étais, alors, excusée et je fus surprise de la réaction finale du prince Kwang Min. Il semblait... amusé ? Je ne pus m'empêcher de sourire en entendant sa réponse. Ma compagnie lui était donc préférable. J'étais touchée mais je me devais de ne pas trop le montrer. Je ne voudrais pas le mettre mal à l'aise pour une raison si puérile. Je le vis, donc, s'éloigner de moi. Je n'eus pas vraiment le temps de le regarder plus longtemps car le prince Kwang So s'occupa très rapidement de moi et de mes pensées libertines.

L'heure venue du repas.

Je m'étais changée pour le repas de ce soir. Le premier que nous aurons avec mon père, ici. Comme d'habitude, suivant notre coutume, j'enfile une robe qui appartenait à ma mère. C'est une façon de l'amener avec moi à ce repas. Elle se plairait tellement dans un endroit pareil. Et puis, cette robe bleue fait partie des plus belles robes qu'elle pouvait posséder. J'étais si fière de pouvoir la mettre.

Lorsque l'heure du repas sonna, nous sommes venus me chercher. On m'a conduit jusqu'à la table du roi où se trouvait déjà mon père ainsi que bon nombre d'hommes que je n'avais, encore, pas vu. Sont-ils tous des princes ? J'ignorais que le dirigeant de ce royaume avait autant de fils. De quoi rendre jaloux mon paternel. Lui qui n'a qu'une simple fille. Je m'incline et salue respectueusement l'ensemble des hommes présents. Il manque cruellement de présence féminine à cette table. Fort heureusement, la reine se trouvait déjà là. Je me serais sentie bien seule, sinon. Je pris place et salua chaque homme qui s'ajouta à nous durant les longues minutes suivantes. Il manquait toujours celui qui m'avait tant manqué pendant la seconde moitié de la journée. Travaille-t-il aussi tard, tous les soirs ? C'est alors que j'entendis la porte et je le vis arriver. Enfin. J'affiche alors un sourire et le salua d'un signe de tête alors qu'il vint s'installer à côté de moi. Je lui murmure alors quelques mots discrets pour qu'ils puissent rester entre nous.

- Vous prenez votre statut d'héritier bien trop à coeur, mon prince. Pensez à vivre, tout de même !

Je souriais, amusée. Mon père coupa cette courte entrevue en s'adressant au roi tout en le remerciant de son accueil et de son hospitalité généreuse.

hanbok + Je n’ai aucunement envie de participer à ce repas et je sais que je ne peux pas y échapper malgré tout. C’est pourquoi je me suis résolu à entrer dans cette pièce. Je me retrouve alors en présence de tous mes frères, de mes parents et des étrangers ayant tout récemment rejoint notre contrée. Je salue et m’excuse de mon retard, l’expliquant par mon travail acharné pour le bien du royaume. Des fils, mon père en a eu énormément et je sais que j’ai beaucoup de chance d’être né premier parmi tous. C’est cette chance qui me permet d’être élevé à ce range d’héritier que je prends beaucoup à cœur. Un peu trop peut-être mais il n’en importe que très peu puisque je n’ai habituellement personne qui m’attend. Je m’installe silencieusement auprès de la jeune femme, place stratégique je suppose, choisir un autre de mes frères pour se placer auprès d’Ella semble probablement dangereux pour mon père. Moi, je ne suis pas à craindre, désintéressé des femmes, uniquement obnubilé par mon rôle, mon avenir. La jeune femme se penche vers moi et me parle de mon implication dans mon avenir. Je la regarde, surpris par la remarque, et lui souris légèrement. Je suppose qu’elle veut bien faire en me conseillant de vivre un peu mais elle ne sait pas que c’est à cela que se résume ma vie. Je n’ai pas le temps de répondre puisque son père prend la parole pour remercier le mien de son hospitalité.

Pendant que ceux-ci discutent, je regarde chacun de mes frères. Ils semblent tous troublés par la présence des yeux bleus de cette table. Même mes frères mariés sont tout intrigués par l’étrangère et je vois que So est le plus intéressé de tous. C’est profondément inutile et immature d’oser se faire des espoirs pour une relation interdite, c’est ce qu’il faudrait se dire en toute logique. Mais face à une si jolie femme, toutes les règles pourraient s’effondrer, même pour moi. Ça n’aurait pourtant aucun sens, je ne l’intéresserais jamais de toute façon. Le repas peut alors commencer et des conversations prennent vie de tout côté et je m’adresse alors à Ella en ne la regardant qu’à peine, toujours entouré de cette aura de mystère que je conserve sans m’en rendre compte.

-Avez-vous passé une bonne après-midi ? J’ose espérer que mon jeune frère s’est comporté correctement auprès de vous. Je m’excuse pour mon absence mais ma vie se résume à mon statut d’héritier, il est de mon devoir d’y consacrer tout mon temps.

Dress + Mon père et le sien semblaient bien s'entendre et j'étais rassurée de voir cela. Cette alliance tenait beaucoup à mon père et j'avais besoin de cette entente pour espérer réussir à mon tour. Je le sais. Mon père risque de m'en vouloir mais quand il verra les bénéfices que cela procurera à notre peuple, il sera fier de moi. Je ne peux pas laisser cet homme m'obtenir. Lui, qui tente de détruire ma famille. Il ne réussira pas à m'avoir. Je dois épouser un autre homme. Un prince. Et vu le nombre de fils que le roi d'ici possède, je ne peux que trouver le bonheur. Le fils qu'il me promettra pourra, d'ailleurs, devenir le roi de mon royaume. Autant que je serais sa reine. Mais n'allons pas trop vite. Je dois d'abord attendre que les relations entre nos deux familles soient bien établies. Tout est une question de mesure. Et d'attente. Je ne peux pas échouer. Trop de vies sont en jeu.

Alors que nos parents discutent, je vis certains regards se tourner vers moi. Cela me rendit mal à l'aise. Assez pour que mes joues rougissent et que je vienne à baisser les yeux. Je ne savais plus trop où me mettre, désormais. Tous ces princes qui me regardaient. Cette façon de me regarder était parfois malsaines. Surtout pour ceux qui étaient déjà mariés. Je n'apprécierais pas que mon futur mari regarde une autre femme que moi. Mais il est vrai que je suis dans le faux et que mon monde n'a rien à voir avec le leur. J'essayais de paraître calme et désintéressée. De ne pas leur montrer qu'ils me déstabilisent. Je pris alors une petite respiration et relève la tête. Je crois alors, directement, le regard de Kwang So. Il me sourit, instantanément, et je vis dans son regard tout l'intérêt et la franchise qu'il me portait. J'hésitais entre sourire à mon tour et me lever de table pour le fuir. Cet homme me paralysait. Il était parfait, à n'en point douter. Il est l'image même de l'homme que je rêve de rencontrer depuis ma plus tendre enfance. Je suis certaine qu'avec lui, à mes côtés, je serais la femme la plus comblée et la plus heureuse de ce royaume. Je le sais. Je le sens. Alors pourquoi m’effraie t-il autant ? Certainement, à cause de ce qu'il a pu me dire, tout à l'heure.

Les paroles de Kwang Min me sortent de ma torpeur et je me tourne dans sa direction. Cela me permet de fuir le regard de celui qui me perturbe tant. Mais celui qui m'a adressé ces derniers mots ne me regarde pas. Bien au contraire. Pourquoi agit-il ainsi ? Il me parle mais me fuit. À quoi bon ? Je ne comprends pas ce qu'il lui arrive. Je ne comprends pas pourquoi il se comporte ainsi. Il semble s'intéresser à moi par pure politesse. Pour aucune autre raison et cela me fit mal au cœur. Je ne me comprenais pas moi-même. Pourquoi cela me touche t-il autant ? Pourquoi m'intéresse-t-il autant ? Il me parle de son frère et, inconsciemment, mon regard se tourne, de nouveau, vers celui dont on parle. Je remarque alors qu'il me regarde toujours et une peur s'immisce en moi. Mon cœur se met à battre plus vite et ma respiration devient plus difficile. Comme si quelqu'un tentait de m'étouffer.

- Votre frère... a été très correct. Ne vous inquiétez pas. Dis-je, en toussant un peu. Veuillez m'excuser de ma remarque déplacée. Je comprends totalement que vous ayez des devoirs et des occupations très prenantes. Je ne peux que le comprendre.

Je le regarde, une nouvelle fois, et tente de sourire. Mais il ne me regarde toujours pas. Alors je détourne les yeux et regarde mon assiette. Je reste, donc, silencieuse et tente de calmer mon anxiété. Pourvu que ce repas finisse, le plus vite possible.

hanbok + Je ne regarde pas la jeune femme, son regard est bien trop envoûtant pour que je ne veuille m’y plonger. Ella a un effet indéniable sur tous mes frères, je le remarque quand je regarde autour de moi. Ils sont tous comme attirés par la jeune femme et je ne veux pas finir comme eux, c’est hors de question. Je ne peux pas me permettre ça, mon père choisira pour moi le meilleur parti, je suppose que ce sera la fille d’un homme puissant, un souverain voisin, de quoi me donner encore plus de pouvoirs. C’est mon destin, je l’ai accepté tel quel et mon comportement est devenu mon moyen de devenir l’héritier parfait. Je ne ressens aucun attachement pour mes frères, aucun amour pour eux, s’ils tentent de m’éliminer une fois mon ascension sur le trône, je n’aurais aucune pitié pour leur rendre la pareille.

Je suis devenu froid par moi-même, je suis devenu distant par moi-même. Je suis comme ça par nature et par nécessité. Je n’attends pas qu’on me comprenne, je crois que personne ne peut me comprendre. J’ai longtemps été sur les champs de bataille, me construisant comme un guerrier solitaire plutôt que comme un futur roi. Je suis souvent vu comme un monstre par mes frères, ils savent ce que je fais lorsque je suis loin du royaume, ils savent ce que cachent mes vêtements, ces cicatrices qui parcourent mon corps sous ces vêtements. Je les dégoute de par qui je suis et qui je vais devenir. Si j’attire les femmes, c’est uniquement pour mon avenir, pas pour qui je suis, je suis trop froid, trop loin du sexe opposé, je ne prends pas assez soin d’elles lorsqu’elles me parlent et ça leur déplaît.

Lorsque je demande à Ella comment s’est passée son après-midi avec mon cadet et elle tousse étrangement. J’espère que So n’a pas été trop insistant auprès d’elle, il doit se rappeler où est notre place sinon, il n’aura jamais le sens des responsabilités pour devenir roi s’il le souhaite. Je jette un coup d’œil à So et je remarque qu’il n’a d’yeux que pour ma voisine de table. Je hoche simplement la tête, si elle m’avait appris qu’il n’avait pas été correct, je serais intervenu par principe, parce qu’elle est un élément important dans les négociations de mon père. Si elle est maltraitée, ça remet en cause tout ce que mon père essaye de construire avec le pays de son père. Je ne peux pas laisser ça arriver.

-Prévenez-moi si un de mes frères se comportent mal avec vous.

C’est tout ce que je prononce avant de replonger dans un silence jusqu’à, j’espère, la fin du repas.

Dress + Il me dit de le prévenir mais comment le pourrais-je ? Il ne fait même pas attention à moi. Il ne me regarde même pas. Comme si j'étais transparente. Comme toutes les personnes qui m'entourent le font depuis ma naissances. Les femmes ne sont bonnes à rien, pour notre époque. Elles ne méritent aucune compassion ni aucun intérêt si ce n'est la raison pour laquelle elles existent. Plaire et procréer. Je vois bien que c'est cela qui plaît tant à l'ensemble de ses frères. Ma beauté. Ce que je représente de par mon physique et non pas par mon esprit. Même s'il est cultivé. Alors pourquoi lui dirais-je les paroles que son jeune frère m'a sorti tout à l'heure ? Pourquoi lui partagerais-je ma peur et mon angoisse ? Ses frères auront forcément un mauvais comportement avec moi. Car je ne suis que le fruit de leur désir. D'une passion incontrôlable. Et il ne pourra rien y faire car je n'irais jamais le trouver pour me plaindre. Une femme ne doit pas parler. Elle ne doit pas penser. Ni même réfléchir. Et si je souhaite une chance de plaire au roi de ce royaume, je ne dois pas créer d'esclandre avec l'un de ses fils. Je vais donc laisser les choses se faire. Se produire. Et je subirais ce qu'il faudra. Seul mon but m'importe. Je n'ai que ça, en tête.

Je tourne, alors, ma tête dans sa direction. Une nouvelle fois. Une dernière fois. Il est toujours renfermé sur lui-même. Je ne comprends vraiment pas son comportement. Pourquoi est-il si noir ? Si sombre ? Si seul ? Ne veut-il pas plus de compagnie ? Je suis certaine que je pourrais être quelqu'un avec qui il passerait du bon temps. Mais je n'eus pas le temps de lui dire ou de lui proposer quoi que ce soit, une personne entre brutalement dans la pièce coupant toutes les conversations. Je regarde qui peut bien être le responsable de cette intrusion. Je reconnus directement ce visage féminin. Ma dame de compagnie semblait terrorisée. Lorsque je vis ce visage si chamboulé, mon cœur rata un battement. Je me lève alors, brutalement. Mon cœur me faisait mal et j'avais peur de ce que sa présence soudaine pouvait bien signifier. Mon père fut tout aussi surpris que moi et demanda des explications.

- Pardonnez-moi mon roi, mais je dois m'entretenir avec la princesse au plus vite !

- Cela ne peut attendre ? Demanda mon père, quelque peu perplexe.

- Je crains que non, une missive vient d'arriver pour elle et...

- Quelle est-elle ? Demandais-je, la respiration quasi coupée. Mes plus grandes peurs se réveillent instantanément. De quoi parle cette missive ? De qui provient-elle ?

Elle ne me répondit pas. Mais je compris, en voyant son air, que la nouvelle était grave. Je me mis alors à trembler et je ne pus empêcher mes larmes de monter aux yeux. Pas encore. Pas une nouvelle fois. Je vous en conjure. Pourvu que mes craintes soient irréelles et que cette missive ne soit qu'une lettre de bonnes nouvelles. Mon père vit mes tremblements et posa une main sur mon bras. Je me devais de le rassurer, et de ne pas gâcher son repas. Je me reprends et mes larmes si discrètes disparurent. Je le regarde, alors, et lui souris.

- Ne vous en faites pas, père ! Je vais m'occuper de tout cela !

Je me tourne alors vers le roi et la reine et m'incline respectueusement.

- Veuillez m'excuser, je crains que cette affaire soit urgente.

Je me dépêche alors de rejoindre ma dame de compagnie, sans prendre la peine ni le temps de m'excuser auprès des princes. Ma dame de compagnie me murmure alors quelques mots et ce fut un choc si grand qu'elle dut passer un bras autour de moi pour que l'on sorte de la pièce sans que je ne m'effondre.

hanbok + Nous sommes tous en train de manger dans un silence presque religieux jusqu’à ce qu’une intrusion brise le calme du moment. Je suis surpris, je ne pensais pas que l’on serait dérangé à un tel moment. Je regarde la jeune femme, elle n’est pas coréenne donc je suppose qu’elle est arrivée avec Ella et son père. Je fronce les sourcils, je ne comprends pas pourquoi on vient nous déranger avec un tel comportement. Je comprends pourtant que la raison de cette intervention est grave et je regarde Ella comme elle semble être celle qui est concernée par le problème. Je suis la conversation sans vraiment me sentir conscerné avant de comprendre que c’est vraiment grave. Je remarque les tremblements de la jeune étrangère et je me demande ce qui peut être assez grave pour qu’elle réagisse comme ça. Elle décide de s’en charger à la place de son père et je penche la tête, surpris qu’elle prenne une telle initiative. Elle s’excuse alors pour quitter le repas et je n’ai jamais vu une femme prendre de telles décisions à la place de son père. Je pince les lèvres en voyant que la jeune femme semble très déstabilisée par ce que lui a dit sa dame de compagnie.

Je reste quelques secondes à fixer la porte alors qu’elle est partie puis je décide de me lever. Mon père me regarde, je m’incline poliment et demande à mon père si je peux m’en aller à mon tour. J’obtiens la permission sous prétexte que je vais encore travailler pour le royaume sauf que ce ne sont pas mes intentions. Je sors de la pièce et je regarde la jeune femme au bout du couloir en train de converser avec sa suivante. Je ne suis pas habituellement curieux mais lorsqu’il s’agit d’affaires semblant importantes, si c’est sur mon futur territoire qu’elles se passent, j’ai envie de le savoir. Je m’approche alors poliment des deux jeunes femmes et m’incline lorsqu’elles me remarquent.

-J’espère que ce que dit la missive n’est pas trop grave.

Dress + Je ne pouvais y croire. Cela ne peut pas être réel. Dans quel cauchemar, suis-je encore ? Mon monde s'écroule lorsqu'elle m'annonce la raison de cette missive. Mais j'ai besoin de la lire pour en être certaine. Nous nous éloignons un peu et je pris la missive de ses mains. Je pus lire l'affreuse et douloureuse réalité et les larmes me viennent sans que je ne puisse les retenir. Ma dame de compagnie avait l'habitude de me voir si démunie. Depuis la mort de ma très chère mère, je me reposais beaucoup sur elle. C'est, alors, tout naturel, qu'elle me dise qu'elle continuera de veiller sur moi et que je me dois de rester forte. Pour mon père. Mais cela m'est impossible. Je pousse un cri avant de m'effondrer de douleur. J'étais prête à m'écrouler au sol mais elle réussit à me retenir.

- Princesse, je vous en prie. Tenez le coup !

La douleur était si grande. Si affreuse. Si mortelle. Je n'arrivais plus à respirer et tentais de calmer mes pleurs, du mieux que je le pouvais. Cet homme. Non. Ce monstre venait de me prendre une deuxième personne. Personne n'en avait la preuve mais j'en étais convaincue. J'eus presque envie de mettre fin à mes jours pour que cela s'arrête. Je la regarde, la douleur transperçant mon visage.

- Aide moi à en finir. Apporte moi n'importe quoi. Une lame. Du verre.. N'importe quoi !

- Ne dites pas de telles horreurs, princesse ! Qui veillera sur votre père si vous disparaissez ?

Nous étions si absorbées par notre conversation que l'on ne remarqua pas la venue du prince. Alors quand il prit la parole, mon corps se figea. Automatiquement. Avait-il entendu ce que je venais de dire ? Je ne l'espérais pas. Ma dame de compagnie avait raison, de toute façon. Je me devais d'être forte. Pour mon père. Mais comment puis-je supporter le deuil, une nouvelle fois ? Si je veille sur lui, qui veillera sur moi ? Personne.

- Je me retire. Dis-je, en m'éloignant.

Je n'ai pas accordé la moindre importance au prince. Je n'en avais pas le cœur ni l'envie. J'avais besoin d'être seule. Tranquille. Je ne voulais pas pleurer devant lui et lui montrer à quel point j'étais fragile. Comme toutes les femmes, à vrai dire. J'aurais aimé être différente. Forte comme un homme. Mais je ne l'étais pas. J'entendis, cependant, brièvement, ma dame de compagnie répondre à Kwang Min. Même dans les pires circonstances, elle ne manque pas d'être respectueuse, elle, au moins. C'était une bonne chose.

- Veuillez l'excuser, mon prince ! Dit-elle, en s'inclinant. La princesse Ella vient d'apprendre la mort brutale de son oncle qui était aussi l'héritier du trône de son père.

Je n'entendis plus rien, ensuite. Ce fut le silence. Le noir complet. Alors que je marchais, doucement, car j'étais totalement désorientée, je finis par perdre connaissance et m'effondre lourdement au sol. Je crus seulement entendre les cris de terreur de ma très chère compagne de vie.

hanbok + La discussion entre les jeunes femmes a l’air animée mais je ne l’écoute pas avec attention, ne voulant pas être trop indiscret. Je sais que ça n’est pas joyeux, je le vois aux expressions d’Ella mais je pose toujours la question lorsque j’arrive. Je vois la jeune femme se refroidir à mon arrivée mais je ne réagis pas vraiment, ça ne me fait ni chaud ni froid qu’elle réagisse de cette façon, j’ai l’habitude que les femmes ne m’accueillent pas avec un grand sourire. Je suis toujours inquiet quant à la missive qu’elle a reçue. Est-ce aussi grave qu’elle semble le montrer ? Je la suis des yeux, les sourcils froncés. Que peut donc contenir cette missive pour mettre cette jeune femme dans un tel état. La dame de compagnie s’excuse à la place de sa maîtresse et m’explique enfin ce qu’il se passe. Elle vient donc d’apprendre la mort brutale de son oncle qui était aussi l’héritier du trône. Je comprends alors la situation et m’apprête à me retirer à mon tour dans le silence quand je vois Ella s’effondrer au sol. Je m’élance auprès d’elle, suivi des cris de la servante. Je la fais taire d’un regard en prenant doucement la princesse dans mes bras.

-Ne crie pas ainsi. Ella s’est évanouie, va plutôt prévenir son père et chercher une serviette et de l’eau chaude. Je l’emmène dans sa chambre.

Je donne les directives à sa dame de compagnie avant de m’éloigner, portant la jeune femme dans mes bras. Marchant vers sa chambre, je regarde les traits palis d’Ella et espère qu’elle ne restera pas trop longtemps évanouie. Le choc a dû être très grand pour qu’elle en vienne à s’évanouir. Les femmes réagissent souvent comme cela lorsqu’elles subissent de trop grandes émotions, elles n’ont pas cette capacité qu’ont les hommes de réagir calmement face aux problèmes. Une faiblesse féminine que je ne pensais pas retrouver chez Ella, même si je ne la connais pas depuis si longtemps, je la voyais comme une femme plus forte. J’arrive devant sa porte et les servantes m’ouvrent celle-ci puisque mes mains sont toutes les deux prises. Je l’emmène près de son lit et l’y installe avec une douceur qui ne se montre qu’exceptionnellement. Je reste quelques secondes accroupi à ses côtés, observant longuement les traits étrangers de son visage. Je comprends pourquoi mes frères sont obnubilés par sa beauté mais je ne peux que me forcer à rester froid face à elle. Je tends tout de même la main et dans un geste que je n’explique pas, je remets doucement ses cheveux en place pour dégager son front. Je la regarde sans sourire mais mes yeux posés sur elle ne parviennent pas à cacher l’intrigue que cette femme provoque en moi. Je détourne pourtant mon regard quand je remarque que nous ne sommes plus en tête à tête. J’invite froidement la dame de compagnie d’Ella à approcher pour commencer à éponger son front avec de l’eau chaude. Quelques secondes après l’arrivée de la suivante, le père de l’évanouie arrive, suivi de près de So. Je m’efface alors pour laisser le roi être auprès de sa fille et me détourne lorsque j’aperçois So se permettre de prendre la main de la princesse, son front barré par l’inquiétude. Sont-ils devenus si proches que cela ? Je me rends compte que je n’ai pas vraiment d’intérêt envers la réponse à cette question, si mon frère souhaite désobéir, je n’ai rien à voir avec cela. J’aurais peut-être voulu veiller sur la jeune femme à sa place, je n’aurais de toute façon jamais été suffisamment stupide pour me laisser tenter par sa beauté et je sais que So n’a pas ma force de caractère. Je m’incline alors auprès du roi étranger et avant de sortir, je demande à l’une des servantes de la princesse de me prévenir une fois celle-ci réveillée.

Dress + - Prince Kwang Min, je ne vous remercierais jamais assez pour avoir porté secours à ma fille.

L'état de la princesse Ella ne s'est pas amélioré. La nuit fut passée sans changements. Les heures. Les jours, également. Cela fait bientôt quatre jours que la demoiselle ne s'est pas réveillée. Le médecin de la famille royale indique un trop grand choc émotionnel pouvant la plonger dans ce sommeil de manière définitive. Son père, détruit, ne s'est pas résolu à rentrer dans son royaume. Sa fille est bien trop faible pour supporter le voyage et il refuse de la laisser, seule, ici. Autant dire que leur royaume est en grand danger, car depuis que l'héritier du trône a disparu, l'étau se resserre. Des discussions se sont, alors, ouvertes entre les deux souverains. Le peuple à Ella a besoin d'un héritier et leur roi a besoin d'un successeur afin d'avoir l'esprit tranquille. Le souverain asiatique a alors proposé un accord militaire et un accord de royauté. L'un de ses fils pourrait devenir le sien et soulager la conscience et les problèmes qu'il subit depuis la perte de sa fille unique. Car, personne ne sait quand elle reviendra à elle. Dès lors que cet accord fut signé, les princes se sont mis en compétition, entre eux, afin d'attirer les faveurs du père à Ella. Tous veulent hériter d'un royaume.