Du classique… subitement je l’imaginais en tenue de danse avant de détourner les yeux. Gêné par cette pensée, je préférais me concentrer sur le reste. Je n’avais pas imaginé qu’elle était danseuse à ses heures perdues. Mais ça me plaisait, surement parce-que ça lui donnait un air différent de ce qu’elle dégageait. Plus j’apprenais des choses sur elle, plus j’étais intrigué à l’idée d’en savoir plus. Encore avide d’en découvrir, je tiquais à cette lueur dans ses yeux. Etait-elle triste de sa vie ? La question me brûlait les lèvres, mais je préférais la garder pour moi une fois de plus. Me laissant charmer par son nouveau sourire, alors que je baissais les yeux sur sa bouche. Attentif à ce que j’apprenais, j’avais la subite impression d’être scotché à ses paroles. Je ne savais pas pourquoi, l’excitation de la connaitre, de balayer d’un revers les idées qu’on pouvait se faire sur elle. « Ah ! Justement je rêve d’aller en Californie. Peut-être un jour j’irais avec toi. » Je détournais aussi vite les yeux, venant jouer avec le bout de ma paille sans réellement comprendre ce que je venais de dire. Ça n’impliquait pas grand-chose, juste une idée comme une autre. C’est du moins ce vers quoi je tentais de me rassurer, avant d’ajouter « Enfin… si on va voir Min là-bas. On pourrait voyager… tous ensembles. » Pourquoi je cherchais à me rattraper ? Parce-que j’avais peur qu’elle prenne mes paroles comme de la précipitation. Honnêtement, je n’étais pas vraiment doué pour faire comprendre aux filles qu’elles me plaisaient. Et je me rendais compte que j’avais surement l’air d’un mec un peu… bizarre. Gardant un soupire derrière mes lèvres, je passais une main dans ma nuque avant de laisser mon dos rencontrer à nouveau ma chaise. « Il doit être cool ton frère. Plutôt comme Min ? Ou plutôt comme toi ? » Min avait beau être un garçon amusant, il restait parfois trop sérieux et suivait les règles. Bien que Jae s’était souvent chargé de le dévergonder. « Comme toi, c’est-à-dire… rebelle ? » car c’est ce que j’avais l’impression qu’elle était. Quelque chose me disait que sa vie n’était pas vraiment celle qu’elle souhaitait avoir. Et puis il y avait cette petite lueur dans ses yeux. Ce goût pour les choses qu’elle ne pouvait pas faire et qu’elle voudrait faire. Je pensais brièvement être un garçon comme ça. A pouvoir offrir des moments déraisonnés. A partir du jour au lendemain sans jamais réfléchir aux conséquences.  « Je suis fils unique… Enfin j’ai été adopté à mes six ans. » En général c’était le genre de nouvelle qui parfois attisait la compassion. Alors je m’empressais de rajouter « Mais je le vis très bien. Mes parents sont géniaux. Même si en grandissant je finis par avoir un caractère moins facile à gérer pour eux. Mais ils me soutiennent à leur façon. » Sinon je ne vivrais pas la vie que j’avais. « J’ai aucun souvenir de ma vie avant eux… mais ça me pose aucun soucis. Je sais pas d’où je viens, mais je sais où je vais. » Toujours à prendre tout à la légère, j’avais finis par en faire une force. Je n’étais pas coincé sur mes émotions ou bien ces questions qui pourraient en hanter certains. Moi, je m’en fichais. « J’ai la musique et Kitae. C’est presque pareil. » Pas réellement je pensais. Mais je supposais qu’avoir un frère et une sœur c’était être accompagné. Et la musique avait cet effet là sur moi. Je souriais à nouveau, le cœur battant un peu plus vite « Est-ce que… tu trouves qu’on a une drôle de vie lui et moi ? Je veux dire… » Est-ce qu’elle se verrait avec un type comme moi ? Bon sang à quoi je pensais soudainement. Embarrassé, je changeais brusquement de sujet « Est-ce que ça te tente d’aller te balader ? J’ai un endroit cool à te montrer. » sortant déjà mon portefeuille de ma poche, sans oser la regarder dans les yeux.

Ces vacances annuelles aux Etats-Unis étaient ce qu’il y avait de plus plaisant pour Ye Won. Là-bas, elle était libre de ses mouvements, elle pouvait enfin relâcher la pression de ses parents. Il en était de même avec Ye Jun, depuis peu, ils s’accordaient une semaine tous les deux, à vagabonder ailleurs, loin de tout, mais surtout loin de cette vie qu’ils détestaient. Quelques jours pour emmagasiner le plus de bonheur possible, avant d’affronter une nouvelle année sous le joug de la famille Kim. Outre les moments passés avec ses amis, c’était de loin la meilleure période pour elle. Laissant à son esprit de doux souvenirs dont elle se rappelait toujours avec le sourire. Un rire léger qui s’échappait de ses lèvres aux dires d’Il Kyang, surprise quelque part, sans réellement chercher la réelle signification de ces derniers. Après tout, c’était la première fois qu’ils se voyaient seuls, il ne valait mieux pas se faire de fausses idées. « Ca pourrait se faire un jour. Par contre, accroche-toi bien, tu vois tous les clichés sur la Californie ? Et bah ils sont tous vrais ! » Une pointe d’amusement dans la voix, elle continuait de boire sa boisson, son regard toujours rivé sur lui. Elle avait du mal à observer ailleurs, bien trop heureuse d’avoir été invitée par celui qui l’avait marquée une semaine plus tôt. Elle ne pouvait s’empêcher de croire qu’elle avait de la chance d’avoir Min qui le connaissait aussi, et qui avait pu les présenter. « Difficile à dire… Il est pas aussi sérieux que Min en tout cas, ça c’est sûr ! » Il y avait cette lueur dans son regard, à se rappeler tout ce qu’elle avait pu faire avec lui. De leurs cabanes de draps à travers la maison quand ils étaient petits, jusqu’aux escapades qu’ils pouvaient faire ensemble, même s’il fallait louper les cours pour ça. « Hmm… J’suis loin d’être une rebelle. Maiiis… J’avoue que des fois, j’aime pas suivre les règles. » Une honnêteté certaine dans ses yeux, une pointe de malice face à cet aveu qu’elle pouvait faire. Elle aimait transgresser les règles, pas au point de tomber dans l’illégalité, mais elle aimait l’adrénaline, les frissons qu’elle pouvait ressentir face à quelque chose qu’on lui interdisait. Alors parfois, elle se laissait tenter, malgré les conséquences qui pouvaient en découler. Pourtant, jamais dans l’excès. Son attention toujours portée sur son vis-à-vis, sa tête basculait à nouveau dans sa main, tout en terminant son cappuccino. Elle le trouvait d’un coup bien courageux, de voir les choses comme il le faisait. Une histoire qu’elle n’aurait jamais pu deviner en le voyant ainsi. Et malgré tout, elle répondait à son sourire, sans pitié ni jugement, seulement une forme d’admiration dans le regard. « C’est bien d’avoir des parents qui te soutiennent. » avait-elle simplement répondu. Elle n’était pas vraiment à l’aise avec les mots, savait rarement quoi répondre lorsqu’on lui faisait part de telles choses - même si cela arrivait rarement. « Tant que t’es heureux comme ça, c’est le principal. » Un sourire plus franc encore venait orner son visage, alors qu’elle se redressait sur son siège. Ses sourcils s’étaient légèrement froncés à le voir changer de sujet aussi rapidement, elle tentait de suivre ses pensées tant bien que mal. « Je te suis alors. » répondit-elle, curieuse finalement de voir ou il voulait l’emmener. Attrapant son sac, elle le laissait payer, se levant enfin pour sortir du café. Une minute à peine à attendre qu’il la rejoigne, elle lui offrait un nouveau sourire. « C’est par ou ? » demandait-elle, prête à le suivre. Elle n’était pas sûre de devoir répondre à cette question qu’il lui avait posé juste avant de partir, hésitant un instant, l’observant du coin de l’oeil. « Pour répondre à ta question, j’trouve ça cool ce que vous faites avec Kitae. » Elle se mordait la lèvre, nerveuse. Comme si quelque part, elle n’aurait pas du. « J’veux dire… Y’a pas grand monde qui ose le faire finalement. Si c’est ce que vous voulez, alors personne devrait vous en empêcher. » Elle était sincère dans ses mots, même si, par cette pointe de gêne, elle détournait le regard un instant. Peut-être parfois trop franche avec les autres, à donner son avis parfois lorsqu’il ne fallait pas, elle n’était pas sûre d’avoir fait le bon choix en exprimant son avis ainsi.

Je passais un bon moment en sa compagnie sans me soucier réellement de ce que les autres pouvaient penser. Amusé par ses dires, je prenais note dans un coin de ma tête en m’imaginant déjà voyager à ses côtés… et le reste de mes amis bien entendu. Ses confidences sur son frère ne me laissait pas indifférent non plus. J’avais envie d’apprendre à connaitre sa vie et il semblait qu’il y prenne une place de choix. Ils avaient l’air d’être plutôt proche tous les deux, je pensais qu’ils avaient dût partager le genre de choses qu’on fait lorsqu’on n’est pas enfant unique. Entre bêtises et aventures surement. Moi je n’avais que mes amis imaginaires quand j’étais dans ma chambre. Ça n’avait rien de triste, j’étais habitué et je trouvais ça drôle. Puis cette lueur dans ses yeux, à cette nouvelle confidence sur elle. Je m’en doutais, elle n’avait pas l’air d’être le genre de fille a toujours rester sagement dans sa chambre et cette idée me plaisait. J’aimais la folie chez quelqu’un. C’est d’ailleurs pour ça que Kitae et moi nous entendions si bien. Il pouvait avoir des idées saugrenues totalement impossibles et tout faire pour les réaliser. Parce qu’il avait envie d’y croire ou juste pare qu’il était assez fou pour y croire. A ces souvenirs je gardais un sourire accroché à mes lèvres, tandis que je lui parlais un peu de moi. Mon passé qui n’était pas aussi douloureux qu’il aurait pu l’être. J’avais toujours été un garçon positif. Même si parfois j’avais eu des moments difficiles en étant gamin, j’avais tout de même apprit à sourire et avancer. Une force chez moi, je détestais broyer du noir. Mais aurais dût réfléchir un peu plus avant de parler, brusquement gêné par ce à quoi je pensais. Changeant trop vite de sujet, je me redressais déjà pour lui adresser un petit sourire et aller payer en attendant qu’elle sorte. Lorsqu’elle fut dehors, je lâchais un petit soupire. J’avais besoin de relâcher un peu la pression. En temps normal j’aurais surement appelé Kitae pour lui dire que je ne savais pas comment m’y prendre. Mais aujourd’hui je n’en avais pas envie. Payant les boissons, je finissais par aller la rejoindre à l’extérieur. « C’est par là. » lui indiquant le chemin, je me mettais en route à ses côtés alors que sa réponse me surprenait. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle le fasse en réalité. Une part de moi venait d’être touchée par ses mots. Je n’avais pas pensé qu’elle serait aussi… encourageante. « Merci. » je me retrouvais bête à ne plus savoir quoi dire. Surement parce-que je n’entendais pas beaucoup de personnes nous dire que ce qu’on faisait était bien. Le plus souvent c’était irresponsable, inconscient… trop jeune, une erreur… bref rien de réellement motivant. Il n’y avait que Kitae et moi pour croire à notre projet. Un peu gêné, j’avais laissé un petit blanc s’installer entre nous. Alors pour éviter le malaise « Je trouve ça cool ce que tu me dis. C’est plus sympa que d’entendre des tu le regretteras plus tard. » Je riais sans vraiment être vexé de ce que pouvait penser les autres. Continuant à avancer, je fourrais mes mains dans mes poches sans trop savoir quoi faire d’elles. J’étais tellement content de ce début de journée. Je n’avais pas pensé une seule seconde qu’on pourrait ne pas s’entendre. En vue de la première fois, on avait bien discuté tous les deux. La voir dans ce contexte-là était différent mais tellement plus agréable je crois. Peut-être parce qu’il n’y avait personne pour me jeter des regards indiscrets. Bien entendu je visais mon propre meilleur ami qui n’avait pas arrêté de me charrier après la soirée. D’après lui j’aurais dût laisser tomber à la minute où j’avais posé mes yeux sur elle. Il avait peut-être raison, mais je pensais que si je n’essayais pas, je ne pourrais pas le savoir de toute façon. Arrivé devant la boutique, je finissais par m’arrêter « C’est là. » c’était mon magasin préféré. Un vieux disquaire un peu vintage avec des vinyles. Un endroit où on pouvait écouter de la bonne musique. Le gérant me connaissait bien, un peu trop car j’y passais souvent mon temps libre après les cours quand j’allais à l’école. J’aimais cet endroit et l’ambiance. A l’intérieur il y avait même un endroit pour s’installer et écouter des bons disques. Il avait dût se moderniser avec le temps. Laissant parfois place à quelques sons que je jugeais d’un mauvais œil. Entrant à l’intérieur « J’espère que tu aimes la musiques. Parce-que avec moi t’as pas finis d’en entendre parler. » Un nouveau petit rire, avant de croiser le regard du gérant. « Ah Il Kyang. Ça fait plaisir. Tu étais parti où cette fois ? » M’approchant du comptoir « On est allé à Busan. J’aurais dût rentrer y’a deux jours, mais on a eu une panne. » Le gérant était assez âgé. Un vrai connaisseur de musique et il m’arrivait parfois de rester des heures à parler avec lui. Il avait toujours encouragé Illmatic en accrochant des affiches dans sa boutique ou en distribuant quelques flyers. Ici c’était un peu comme un deuxième chez moi. Le voyant observer la silhouette à mes côtés « Je te présente Ye Won. Une… une amie. » Regardant par-dessus ses lunettes, il lui adressa un sourire amical « C’est bien la première fois qu’Il Kyang vient ici accompagner de quelqu’un d’autre que son acolyte. » Une confidence dont je me serais bien passé. Les vieux a toujours vouloir rajouter un petit mot gênant…Mais il avait raison. Je pensais que cet endroit c’était un peu notre antre à Kitae et moi. Peut-être que je la considérais déjà comme quelqu’un de spécial ? « Bon je vais regarder ce que t’as reçu. » puis j’invitais à Ye Won à me suivre au fond de la boutique. Sur ces rayons il y avait tous les vinyles d’occasions. Ma chambre en possédait des tas. Je n’avais aucune rigueur pour les ranger, sans classements ou autre. Je les mettais juste dans un grand meuble. C’était notre truc à Kitae quand on s’était connu. Aller s’acheter un bon disque l’écouter et essayé de reproduire la musique. En réalité il me détestait parce-que j’y arrivais toujours mieux que lui. « Bon Ye Won. Je te fais passé un test ? » Un peu taquin, je me penche sur les disques « Je veux savoir ce que t’écoute. » À mes yeux ça avait de l’importance. Parce-que je ne vivais que pour ça. Jamais sans un son sur mes oreilles, jamais sans ma guitare. Toujours à la recherche d’inspiration et de notes. « Une chanson, un moment ! Hum… je commence par quand t’es joyeuse t’écoute quoi ? Attention à ce que tu vas répondre… ça pourrait changer beaucoup de choses. » la regardant avec un air malicieux, j’osais penser que peut-être mon avis pourrait compter.

On lui avait souvent répété, pendant son enfance, qu’elle devait apprendre à se taire, à éviter de dire ce qu’elle pensait à tout va. On lui avait longtemps fait croire que son avis ne comptait pas, et qu’il n’était pas vraiment nécessaire de donner son avis à chaque fois. C’était comme ça dans les grandes familles traditionnelles, le patriarche était ce qu’on appelait la voix de la sagesse, c’était lui qui avait toujours raison, et il fallait le croire sur parole, qu’importe tous les éléments à décharge qu’on pouvait avoir. Pourtant, elle n’avait jamais su garder sa langue dans sa poche, avait une fois ou deux fait scandale pendant ces soirées mondaines, incapable de se maîtriser face à un sujet qui lui tenait à coeur. C’était naturel pour elle d’exprimer le fond de ses pensées, qu’importe ce que les autres pouvaient penser. Alors le simple fait qu’il lui ai demandé ce qu’elle pensait de sa vie, elle ressentait le besoin de le dire, quelque part. Et elle était soulagée de voir qu’il ne le prenait pas mal, au contraire. Ses paroles n’avaient rien d’un jugement, au contraire. Elle admirait ceux qui avaient le courage de faire ce qu’ils voulaient, à l’inverse d’elle. Elle était comme enchantée de voir qu’il y avait des gens qui étaient encore capables d’aller contre l’avis des autres. Et ça la confortait, parfois, dans son envie de tout plaquer. Même si elle continuait de se trouver des excuses. Trop jeune, pas assez débrouillarde, sûrement peureuse aussi. Voilà tout ce qu’elle pensait d’elle-même face à ces envies qu’elle taisait, mettait encore de côté. « Ils sont sûrement jaloux parce qu’ils peuvent pas le faire. » Un haussement d’épaules, suivi d’un sourire, alors qu’elle continuait de le suivre. Son regard vagabondait autour d’elle, espérant voir se dessiner l’endroit ou il voulait l’emmener. Quelques centaines de mètres plus loin, ils étaient arrivés, alors qu’elle découvrait une petite boutique de vinyles, qu’elle n’avait jamais vu avant. Ses yeux s’écarquillaient, alors qu’elle regardait déjà de partout, comme intimidée par l’endroit.  « Bonjour. » Par signe de politesse, elle s’était légèrement inclinée face au vieil homme qui tenait le lieu, les laissant discuter ensemble. Sa curiosité était attisée, mais elle restait encore quelques secondes concentrée sur cet homme derrière le comptoir, gênée face à cet aveu qu’il faisait. Sa tête qui se baissait alors qu’elle jouait nerveusement avec une mèche de cheveux, elle n’avait osé parler, préférant emboîter le pas d’Il Kyang à travers les rayons. Tentant de calmer le feu de ses joues, elle admirait les affiches accrochées aux murs, les quelques vinyles mis en avant à chaque rangée. Elle connaissait certains noms, mais se doutait déjà qu’elle n’avait pas le même niveau de culture que lui dans ce domaine. « Un test ? J’suis foutue d’avance alors. » avait-elle répondu dans un rire. Comme tout le monde, elle aimait écouter de la musique, mais ce n’était certainement pas une aussi grande passion à ses yeux que pour le jeune homme avec elle. « Je sais d’avance que mes réponses vont pas te plaire. J’suis plutôt du genre à écouter ce qui passe à la radio. » Elle en riait une nouvelle fois, réfléchissant déjà à ce qu’elle pouvait répondre. Son index posé sur son menton, elle prenait un air faussement sérieux. « Laisse moi réfléchir… Je dirais Moves Like Jagger de Maroon 5. Elle me met toujours de bonne humeur. » Un sourire étirait ses lèvres, même si elle savait déjà qu’elle était loin d’écouter le même genre de musique que lui. « Avoue que j’suis déjà en train de rater ton test. » Elle s’en amusait, quelque part. Ca se voyait, qu’ils étaient différents, mais ça ne la gênait pas, au contraire. Elle était curieuse de voir ce qu’il pourrait en dire. Même si elle pouvait avoir peur de voir qu’il la trouve trop superficielle sur certains points, ce qui était loin de la vérité. Elle qui faisait toujours de son mieux pour être simplement elle-même, en toutes circonstances.

Est-ce qu’elle pensait réellement que j’allais la juger ? Une part de moi prenais ce petit test au sérieux, c’était certains. Mais seulement parce-que je mourrais d’envie de savoir ce qu’elle écoutait. Je trouvais que la musique c’était une bonne compagnie. Surement la plus grande qu’on pouvait avoir. Un peu notre meilleure amie aussi. Toujours là pour nous réconforter ou bien au contraire parfois nous faire du mal. Je n’étais pas du genre à pleurer sur une chanson, mais j’étais plutôt passionné par les sons, les notes et les émotions que ça pouvaient créer chez les autres. Ce que j’adorais c’était observer le public quand on jouait. Je trouvais qu’il n’y avait rien de plus beau surement. C’était aussi une des raisons qui me poussait à vouloir être un vrai artiste reconnu. Je rêvais qu’on connaisse mes musiques, qu’on puisse les chanter et les adorer. Alors oui c’était vrai, quelque part j’attendais un peu ses réponses avec impatience. Et sa révélation n’y changeait rien. Il n’y avait pas que des mauvaises chansons qui passaient à la radio. Gardant mon sourire, je fouillais tout de même les vinyles en face de moi, histoire d’en trouver un qui pourrait me plaire. Puis lorsqu’elle me répondit Maroon 5, je n’eus d’autres choix que de relever la tête pour l’observer. Pensait-elle que ça me déplairait ? « Non. Tu marques un point. J’aime beaucoup ce groupe aussi. » Je trouvais le chanteur très talentueux pour être honnête. Et même si leur son était beaucoup plus populaire qu’à leur début, ils restaient de bons musiciens. Un petit sourire au coin des lèvres, je lui lançais un regard amusé et un peu satisfait. Puis en me redressant « La chanson quand t’es triste ? » je crois qu’en réalité, j’étais incapable de répondre à cette question. Je ne me voyais jamais triste. Même si parfois j’avais des coups de mous comme tout le monde évidement. Mais je préférais surement écouter quelque chose qui me boostais. « Je vais voir si t’es la fille qui aime s’enfoncer dans la tristesse ou au contraire qui a besoin qu’on la remotive. » je riais un peu plus à ma remarque. Bien que je ne la jugerai pas si elle faisait partie de la première catégorie. Ce qui comptait pour moi c’est comment chacun vivait la musique. « Une musique quand t’es en colère ? Quand tu as besoin de te relaxer ? » Peut-être étais-je trop curieux ? Mais j’adorais ça. Fouillant encore dans les vinyles je finissais par en sortir un Iron & Wine. Un chanteur que j’aimais bien. « Ah ça c’est cool ! Tu connais ? » Comme je n’étais pas sûr « Il a chanté dans Twilight. » Et je m’empressais d’ajouter « Pas que j’ai aimé le film hein ! » Bon ok, en fait j’avais adoré le premier. Je l’avais trouvé très bon même si c’était un poil trop culcul sur certains aspects. « Mais la bande son est géniale. » il y avait pas mal d’artistes dessus que j’aimais beaucoup. C’était aussi une des raisons qui nous avait poussés à aller voir le film. « Kitae et moi, on s’était mis tout au fond de la salle. Parce-que je crois que aucun de nous deux n’assumait d’avoir été voir ce truc. Je t’ai révélé un grand secret. » Ça me faisait rire, je n’avais pas honte de partager ça avec elle. « Est-ce que t’es une grande romantique Ye Won ? » cette question me fit palpiter davantage mon cœur. Surement un peu nerveux aux idées qui traversaient mon esprit. J’avouais vouloir me renseigner un peu sur sa vision des… couples. Alors subitement je posais la question « Est-ce qu’il y a une bonne chanson pour un premier baiser ? » une part de moi en mourrait d’envie. Mais je savais que j’aurais été incapable de faire ça sans être un minimum en confiance. Alors je masquais mes interrogations en poursuivant ce petit jeu.

Elle ne savait pas vraiment quoi penser, à l’aveu du vieil homme. A ses dires, c’était la première fois qu’Il Kyang venait en compagnie de quelqu’un d’autre que Kitae, et quelque part, ça la touchait. Elle ne saurais dire pourquoi il avait eu cette attention, ne saurait deviner le but de ce premier rendez-vous, et une part d’elle avait certainement peur. Que ce ne soit qu’un jeu, peut-être. Qu’il n’y voit là rien d’un premier rencard, mais le début d’une amitié, certainement. Des questions qui tourbillonnaient dans son esprit, et même si elle restait naturelle, elle ne savait pas à quoi s’attendre. C’était perturbant, surtout pour elle. Elle n’était pas douée pour les premiers rencards, encore moins pour flirter. Ce n’était pas faute d’y avoir déjà eu droit, pourtant, elle avait ce côté romantique qui la laissait croire que rien n’arrivait par hasard. Alors dans le fond, peut-être qu’elle espérait, qu’il recherche un peu plus qu’un peu de compagnie en ce week end. Ses pensées s’envolaient à l’entendre répondre. Elle marquait un point, ravie du choix qu’elle avait pu faire. « Me voilà rassurée alors ! » avait-elle simplement répondu, avant d’en rire, et de repartir dans ses réflexions concernant les musiques qui la correspondaient le mieux. Elle hésitait un instant, se devait d’être sincère, mais le choix était compliqué pour elle. Alors, elle choisissait un classique à ses yeux, un sourire timide sur ses lèvres. « Fallin d’Alicia Keys. » Elle marquait une courte pause, posant son regard sur lui. « Oui, je suis le genre de fille à me morfondre. C’est plus fort que moi ! » s’était-elle exclamé, plutôt amusée. Elle suivait encore le conseil de Min, restait simplement elle-même, ne cachant pas sa vraie nature. A quoi bon de toute façon. Ca ne servait à rien de mentir, encore moins dans ce genre de jeu qui, elle le savait, laissait à Il Kyang le loisir de la connaître davantage encore. Etait-ce ce qu’il recherchait ? Elle se le demandait, mais elle devait encore répondre à ces questions, le choix étant toujours plus difficile. « Pour me relaxer, j’ai découvert y’a pas longtemps à la radio Lana Del Rey, j’aime beaucoup. Et quand je suis énervée… » Elle ne savait pas quoi répondre. A vrai dire, elle préférait rester au calme lorsque ses nerfs étaient à vif. Il fallait dire, elle s’énervait peu, et lorsque cela arrivait, elle pouvait parfois mettre beaucoup de temps avant de se calmer. Mais elle n’avait pas eu le temps de répondre qu’il sortait un vinyle de la rangée devant lui. Elle s’était approché pour observer la pochette. « Là comme ça, ça me dit rien. On peut écouter ? » demandait-elle, presque timide. Mais son sourire revenait rapidement à écouter cette anecdote, qu’elle n’aurait pas cru possible. « Je me sens honorée ! J’avoue, j’ai pas osé aller le voir au ciné, j’ai préféré pleurer devant dans mon salon. » Un regard rempli d’une certaine malice, avant de se mettre à son tour à mieux regarder les vinyles devant elle, fouillant pour voir si elle pouvait trouver quelque chose qu’elle aimait. « J’pense que oui, même si certains disent que c’est surfait. » Elle n’était pas du genre à attendre un énorme bouquet de roses sur une table pour un dîner aux chandelles - même si l’idée lui plaisait, mais elle aimait les attentions qu’un homme serait capable de lui porter. Elle avait une certaine sensibilité aux choses, c’était indéniable, pourtant elle n’en demandait pas autant. « Une chanson pour un premier baiser ? C’est dur de choisir… » Encore une fois, elle hésitait un instant, cherchant dans ses souvenirs une musique qui l’aurait marqué si tel aurait été le cas. « Y’a une chanson que j’aime beaucoup, mais elle date. C’est de Keane je crois ? Somewhere only we know, quelque chose comme ça. Ou alors, une de Bruno Mars. Ce mec a un réel don pour parler d’amour dans ses chansons. » Elle en riait, presque nerveusement. Peu sûre de faire un bon choix, mais il était trop tard pour revenir en arrière désormais.

Je ne m’attendais pas à ce que nous ayons les mêmes goûts tous les deux. Je pensais même que ça pouvait être plutôt amusant de ne pas aimer les mêmes choses. Par exemple avec Kitae nous n’étions pas toujours d’accord sur pleins de sujets. Mais ça faisait la force de notre amitié. A tel point que parfois j’avais aussi besoin de son point de vu pour certaines choses. Je n’avais pas envie de trouver une fille qui me ressemble. Et je croyais que justement qu’elle n’était pas pareil que moi. La preuve en était avec son choix de chanson lorsqu’elle était triste. J’étais loin d’écouter ce genre de musique pour être franc. Alors je fis la moue, pas déçu mais plutôt intrigué. Ye Won était donc le genre de fille à aimer se morfondre. Je trouvais ça drôle… Alors naturellement je lâchais « C’est mignon. » parce-que je le pensais. Ce n’était pas ridicule et j’appréciais le fait qu’elle me le dise. Ce n’était pas le genre de révélation dont on se vantait. Je supposais donc qu’elle était sincère avec moi et j’aimais ça. Je n’avais pas envie de jouer un rôle. J’agissais simplement comme je l’aurais fait avec n’importe qui, bien que j’avais tout de même des attentes différentes. Lui souriant, je l’écoutais répondre au reste de mes questions avec attention. Un peu surprit aussi sur ses choix « Oh, ça j’adore. » plus qu’il ne faudrait d’ailleurs. Lana del Rey c’est le genre d’artistes qu’on aimait pour sa voix, sa musique et aussi… son physique. On avait eu de longue discussion sur le sujet Kitae et moi. Mais je préférais garder cette information pour moi. Visiblement, on pouvait tout de même trouver une entente sur nos goûts et ça me plaisait aussi. « Oui bien sûr. » je gardais le vinyle dans mes mains, avant de lui raconter ces anecdotes sur moi. Ce qu’elle me répondit me fit sourire à mon tour avant que je ne lâche un rire « Oh, j’imagine la scène. » je la voyais bien assise sur son canapé, les genoux replié sur elle-même avec les larmes qui coulaient sur ses joues rougies. « T’es une grande sentimentale on dirait. » je me moquais sans être méchant. Je pensais surement que les filles avaient une sensibilité différente de la nôtre. En tout cas pour ma part, je n’étais pas du genre à pleurer devant un film. C’était plutôt rare qu’une histoire me bouleverse au point de me faire sortir des émotions. Je préférais surement vivre à travers les autres. M’inspirer du vécu, des sentiments que les gens pouvaient ressentir. Moi ? Je n’avais pas grand-chose à confier. Puis je restais attentif à ses réponses, cette fois-ci je n’étais pas trop sur la même longueur d’onde qu’elle. Ça ne faisait pas parti des artistes que j’écoutais, mais je connaissais. « Hum je vois. Là je t’avoue que je suis hors course. » Même si ces artistes avaient de bonnes musiques et des paroles qui pouvaient toucher. C’était surement un peu trop pop pour moi. Mais je gardais ça dans un coin de ma tête, avant de rire « Donc tu voudrais qu’on te demande en mariage sur Marry You ? » taquin, je penchais ma tête vers elle. « Bon, c’est pas si horrible que je le pensais. T’as quand même du goût. » Et je lâchais un nouveau rire pour me moquer. Ça n’avait rien d’un reproche, je plaisantais avec elle et j’espérais qu’elle le prendrait de cette façon. Me rapprochant un peu d’elle, je venais approcher mon visage du sien pour venir murmurer « Je vais te confier un secret… j’aime bien Taylor Swift. » je riais un peu plus, un peu honteux de lui révéler ça sur moi. Mais c’était vrai. J’aimais certaines de ses musiques. Il m’arrivait même de les écouter… et si elle regardait dans mon ipod j’avais quelques chansons d’elle. Puis me redressant « Aller viens, je vais te montrer le truc le plus cool de cette boutique. » et sur ces mots, je l’invitais à me suivre jusqu’au fond là où se trouvait un petit salon, rien de fou juste un gros canapé avec deux fauteuils et une petite table. Sur le coin, un bon tourne disque moderne où on pouvait écouter les vinyles. Prenant celui que j’avais dans les mains, je le plaçais dedans avant de prendre le casque branché. M’asseyant sur le canapé, je lui souriais avant de lui tendre « Tiens. Je pense que tu vas te souvenir de cette musique. » Il n’y avait qu’un casque, alors je choisissais de le mettre entre nous deux, avant de m’approcher d’elle. Il ne fallait pas plus pour sentir mon cœur rater un battement, à cette nouvelle proximité. Alors que la musique démarrait, je mettais un peu plus fort le son pour qu’on puisse écouter tous les deux. Je savais que cette musique avait un son un peu triste. Mais j’aimais vraiment les paroles. Je la trouvais prenante, bien qu’elle ne me touchait pas personnellement. La laissant profiter de la chanson, je chantonnais déjà quelques paroles sans pouvoir m’en empêcher. J’étais toujours en train de faire ça, ce qui parfois faisait rire mes parents. Et pendant que j’écoutais encore la chanson, je me rapprochais un peu pour mieux entendre. Sentant subitement mon genou rencontrer le sien. Rien de bien éprouvant et pourtant, je sentis mon cœur battre un peu plus vite. Aussi proche d’elle, j’humais pour la première fois ce parfum qui la caractérisait. Et cela eut l’effet de me perturber doucement, alors que j’osais détourner les yeux sur elle… Elle était belle, presque trop parfaite pour être vraie. Et je ne cessais de repenser à ce que Kitae m’avait dit « Elle est trop bien pour toi. » tout me criait qu’il avait surement raison. Mais ma tête pensait différemment. Comment allais-je pouvoir m’en sortir ? Et si elle me voyait comme un ami seulement ? Cette idée me déplaisait tellement. Même si je n’aurais pas d’autres choix que d’accepter. Me mordillant la lèvre, je rencontrais subitement son regard, prit sur le fait « Ah… euh tu aimes ? » me reculant, je détachais mon genou du sien avant de passer une nouvelle main dans mes cheveux. « C’est peut-être pas ton genre. Je peux comprendre, j’écoute des trucs déprimant parfois. » et je riais pour avoir l’air moins embarrassé.

La musique faisait indéniablement partie de sa vie, rien de vraiment étonnant lorsqu’on savait qu’elle dansait depuis son plus jeune âge. Et même si ce choix n’était que l’un des nombreux faits par son père depuis sa naissance, elle aimait ça. Bien plus depuis qu’elle avait arrêté le classique, pour choisir des cours de danse contemporaine. Pourtant, les musiques sur lesquelles elle dansait à son école étaient bien loin de ce qu’elle aimait. Elle s’était longtemps imaginé tenter d’autres styles, s’y était parfois essayé dans le dos de son père, mais elle n’avait jamais eu le courage de tenir sur la durée. Son rythme de vie était déjà assez lourd, elle préférait garder son temps libre pour ses amis, pour profiter un tant soit peu de cette vie qui lui échappait trop souvent. Mais elle n’en disait rien, préférait encore se concentrer sur celui qui lui faisait face. Elle était heureuse de marquer des points sur un simple jeu, même si elle se demandait encore quelles étaient ses intentions quant à cette invitation. « Ca m’arrive oui. » Elle était un peu ailleurs, comme perdue dans ses pensées pendant un instant. Elle avait parfois du mal à accepter ce côté fleur bleue qu’elle avait. A aimer les films romantiques, à vouloir croire en l’amour avec un grand A. Pourtant, face à lui, elle l’assumait quelque part, restait sincère dans ce qu’elle pouvait dire. Peut-être espérait-elle que cela change le regard qu’il pouvait porter sur elle. Peut-être que cela l’attirerait à elle. Elle n’en était pas sûre, pourtant, elle osait. En le voyant se rapprocher d’elle, elle croyait déjà qu’une certaine proximité s’installait entre eux, sans pouvoir l’expliquer. Un sourire timide ornait ses lèvres, alors qu’elle ne savait pas quoi répondre. « Hmm… Ca pourrait être une idée. » avait-elle finalement lâché, avant d’en rire. Un façon de cacher cette gêne face aux aveux qu’elle pouvait faire.  Ses yeux s’étaient écarquillés à l’entendre, étonnée par les goûts qu’il pouvait avoir lui aussi. Finalement, ils avaient bien plus de points communs qu’elle ne l’aurait cru. « Sérieux ? J’adore Taylor Swift ! Y’a des jours ou j’écoute qu’elle. » Enthousiaste, très certainement. Mais c’était agréable pour elle de voir que même si beaucoup de choses avaient l’air de les éloigner, d’autres pouvaient les rapprocher. Elle le suivait finalement dans une salle au fond du magasin, son regard une fois de plus attiré par la décoration simpliste mais pourtant efficace. Un canapé, des fauteuils, de quoi se relaxer. Elle appréciait l’endroit, ça se voyait. Elle récupérait le casque qu’il lui tendait, dans un autre sourire qu’elle lui offrait, et laissait finalement la musique parvenir à ses oreilles. Ce n’est qu’après quelques notes, qu’elle reconnaissait finalement cette chanson, qu’elle n’avait pas écouté depuis bien longtemps. Elle restait silencieuse, profitait simplement de l’instant, alors qu’elle sentait Il Kyang plus près encore d’elle. Les battements de son coeur s’accéléraient doucement, alors qu’elle se pinçait les lèvres, tentait de ne pas montrer que cette autre proximité l’enchantait au fond d’elle. Comme intimidée, il lui fallût attendre la fin de la chanson avant de poser son regard sur lui, voir qu’il l’observait. Discrètement, elle prenait une grande inspiration, restant toujours aussi proche de lui. « J’avoue que je l’avais pas écouté depuis longtemps, mais j’aime bien. » avait-elle fini par répondre. Elle ne savait pas quoi faire, pour calmer les palpitations de son coeur, se doutait même que ses joues s’étaient encore empourprées, essayant vainement de ne pas y penser. « T’as… d’autres morceaux à me faire découvrir ? » finit-elle par demander. Cachant son émoi, elle n’osait plus vraiment bouger, le seul geste qu’elle avait réussi à faire étant de lui rendre le casque. Les minutes passaient et elle se rendait compte que finalement, en étant là, elle espérait qu’il puisse vouloir plus qu’une simple amitié. Que ce qu’elle pouvait ressentir à cet instant précis pouvait être réciproque. Et même si c’était fou de le penser, elle se laissait aller à cette idée.

Je détestais l’idée de devoir dire des phrases ridicules pour avoir l’intérêt de l’autre. Je n’avais pas envie qu’on joue un rôle. Au fond de moi, je souhaitais juste apprendre à connaitre qui était Kim Ye Won. J’avais beau avoir imaginé certains aspects en réalité, rien ne valait ses propres révélations et cette découverte de l’autre. J’aimais ce genre d’instants, ces sensations qui naissaient au creux de mon ventre. Elle me plaisait… plus que je ne le laissais paraitre, mais je n’étais vraiment pas doué pour ces choses-là. Pas que j’étais prétentieux, mais il était vrai que je n’avais jamais vraiment eut besoin de « draguer ». Ça se faisait toujours naturellement et puis je passais surement bien trop de temps sur ma musique plutôt que sur les filles. Ça ne me dérangeait pas, mais je me rendais compte que je n’avais pas l’assurance pour lui dire simplement ce que j’avais en tête. J’avais peut-être un peu peur aussi qu’elle ne me voit pas de la même façon. Pourtant, une part de moi refusait de croire que nous n’étions là qu’en amis. Devrais-je lui dire clairement ? Attendre un moment opportun ? Je n’en savais rien, alors je laissais juste les choses se faire sans réellement y penser. J’appréciais cette complicité qui naissait entre nous. Lui confier quelques secrets c’était aussi une manière de lui montrer que je n’étais pas indifférent à elle. S’en rendait-elle compte ? Difficile à dire, savourant l’instant avec amusement face à ses confidences. Elle aussi aimait cette artiste, ça nous faisait un nouveau point commun malgré ceux qui nous séparaient. Rien d’alarmant selon moi, je préférais ça. Etre complémentaire c’était toujours plus grisant que d’être similaire. Alors assit à ses côtés, je devenais un peu nerveux. Surtout lorsque nos regards se croisèrent. Je souriais, baissant les yeux sur mes mains. Je trouvais ça bête d’être intimidé, mais Ye Won n’était pas comme les autres filles. Ce qu’elle créait chez moi était différent. Plus attractif et plus enivrant. Surtout avec cette proximité. Si proche et trop loin pour l’atteindre. J’avais un tas de questions qui me venaient en tête. Avait-elle quelqu’un dans sa vie ? Même si elle n’en avait pas parlé, il se pourrait qu’elle ait quelqu’un d’autre à l’esprit. Je n’avais rien demandé à Min, j’étais plutôt du genre à vouloir faire tout tout seul. Mais maintenant que je me retrouvais là, je ne savais plus comment gérer. Je tentais de balayer ces questions avant de lui répondre « Oh j’ai une idée. » je me redressais, laissant libre court à ma spontanéité. Je retirais le vinyle, le gardant en main avant de l’inviter à me suivre dans la boutique. Cette fois-ci j’allais du côté de la pop-culture, un sourire aux lèvres « Je t’enverrais des morceaux cools si tu veux. Pour refaire un peu tes playlists. » relevant les yeux vers elle, je gardais cet air amusé. Je passais tellement de temps à parler musique. Finirait-elle par se lasser ? Baissant à nouveau les yeux sur ma recherche, je trouvais enfin le vinyle que je cherchais. Cette partie de la boutique était surtout consacrée aux artistes d’aujourd’hui et plus populaire. Alors évidement je trouvais rapidement celui de Taylor Swift. « Tadam ! » il s’agissait de l’album RED, celui que j’aimais écouter sans honte. « Tu sais qu’elle sort un nouveau single en fin d’année ? » Puis réalisant ce que je venais de dire, je me mis à rire « Ouais ça craint, je suis son actualité. » me moquant de moi-même, je me demandais vraiment ce qu’elle allait penser de moi. Je ne réfléchissais pas en parlant. Je voulais simplement être moi-même et lui montrer que je n’étais pas le genre de type à se prendre au sérieux. J’aimais m’amuser, prendre du bon temps, rire. M’approchant d’elle, je tournais le vinyle pour avoir la liste des chansons. « C’est laquelle ta préférée ? » laissant mon épaule toucher la sienne, je provoquais ce geste avant de lever les yeux vers elle « J’adore We Are Never Ever Getting Back Together. » et sans attendre, je me mettais déjà à chantonner cette musique que je trouvais entrainante. J’espérais presque qu’elle me suivrait dans mon délire.

Dans le fond, ce rendez-vous la perturbait. Elle ne savait pas à quoi s’attendre avec lui, elle se demandait encore ce qui l’avait poussé à l’inviter elle, plutôt qu’une autre, aujourd’hui. Et même si elle faisait de son mieux pour ne pas y penser, ça revenait parfois à son esprit, un peu plus encore lorsqu’elle sentait cette proximité se créer entre eux. Toute cette semaine, elle avait repensé à cette rencontre, avait passé des heures à en parler avec sa meilleure amie, plus encore lorsqu’elle avait reçu ce message. Dans le fond, Ye Won était le genre de fille qui peinait à croire qu’elle pouvait plaire. Parce que dans son monde, toutes ces relations n’avaient rien de sincère, bien au contraire. Tout n’était qu’apparence et beaux discours. Tout ce que ses parents lui offrait, au final. Elle ne retrouvait qu’un peu de chaleur humaine auprès de son frère, qui tentait encore de lui montrer qu’il y avait autre chose, derrière ces barreaux invisibles. C’était sûrement pour ça aussi, qu’elle tentait de n’être qu’elle-même, et pas cette fille de riche. Une étiquette qui lui collait à la peau, partout ou elle allait. Une étiquette qu’elle voulait effacer une bonne fois pour toute, sans savoir comment y parvenir. C’était ça aussi, qui la poussait simplement à agir naturellement, avouer quelques secrets qui n’en étaient pas vraiment. Mais c’était des petites choses qu’elle taisait dans son univers, façonné par l’image parfaite que les gens se faisaient des autres. Et dans le fond, ça lui faisait du bien de pouvoir parler librement, malgré l’appréhension toujours présente d’être jugée. Plus encore, ça réchauffait son coeur de voir qu’Il Kyang tentait de la connaître, davantage encore. Alors peut-être se faisait-elle des films, mais dans le fond, elle avait réellement envie de croire qu’elle pourrait l’intéresser, d’une certaine façon. Un léger sourire sur les lèvres, elle le suivait dans la boutique, découvrant un nouveau rayon. Il y avait plus de noms qu’elle connaissait ici, des artistes qu’elle écoutait souvent. « Je dirais pas non, j’aime bien découvrir de nouveaux trucs. » avait-elle simplement répondu, alors que son sourire grandissait davantage encore en voyant l’album de Taylor Swift. « Ah ! J’adore cet album ! » s’en était-elle amusée en le voyant. Elle riait à la remarque qu’il faisait, se cachent légèrement le visage de sa main. « Non c’est cool. J’ai hâte de pouvoir écouter son prochain album. En vrai, j’aimerais bien la voir en concert. » avouait-elle, sans honte. Après tout, voilà un point commun entre eux, elle n’avait pas besoin de cacher son goût prononcé pour les chansons de cette artiste. Elle observait alors la liste des morceaux de l’album, pouvait sentir l’épaule d’Il Kyang contre la sienne. Son coeur s’emballait, bien malgré elle. Un contact qui était agréable, bien plus qu’elle ne l’aurait cru. Tentant tant bien que mal de le cacher, elle pointait un nom sur la liste d’un geste aussi naturel que possible. « Celle là, I knew you were trouble, je l’adore. » Son attention qui se portait sur le jeune homme, lui offrant un sourire. « Mais j’aime beaucoup We are never getting back together. » avait-elle ajouté. Et à l’entendre chanter, elle s’était mise à fredonner aussi, au bout de quelques secondes, plus faiblement que lui. Il avait une voix particulière quand il chantait, elle avait eu tout le loisir de l’écouter une semaine auparavant. Elle savait surtout, qu’elle était loin d’avoir le même niveau. Le temps de terminer le refrain, elle s’arrêtait, se mettant à rire. Elle se moquait d’elle-même, finalement, parce que même si elle arrivait à ne pas chanter trop faux, elle était loin d’être une chanteuse née. « J’suis désolée, t’es pas tombé sur une très bonne chanteuse. » Elle riait un peu plus, cachant cette légère gêne. Peut-être qu’il ne voulait pas la voir oser le suivre. Peut-être était-elle en train de tout gâcher. Elle stressait pour rien, certainement parce qu’elle avait du mal à gérer ce qu’il se passait en elle, depuis qu’ils s’étaient retrouvés devant ce café.