Des cartons, des cartons, encore des cartons...

JUNG BAEK HO & LEE HYE SUN

Parler de nos projets culinaires pour la soirée m'a quelque peu ouvert l'appétit. C'est donc sans plus tarder que j'enfile ce petit tablier et me mets à la recherche de tous les ingrédients et ustensiles dont j'ai besoin pour préparer mes fameux œufs cocottes au bacon. Un petit plat très facile et loin de casser trois pattes à un canard (après tout, il ne s'agit que de bacon, de quelques oeufs et d'un peu de gruyère) mais dont je raffolais à l'époque, quand moi et mes parents vivions encore en France. Je ne peux d'ailleurs réprimer ce fin sourire qui vient légèrement étirer mes lèvres, quand je repense à ces moments de complicité que je partageais avec ma maman derrière les fourneaux, et j'espère vraiment que ce plat qui éveille en moi une certaine nostalgie sera également du goût du jeune homme. Après tout, bien qu'il ne s'agisse là que de quelques ingrédients plutôt banals pour moi, ce n'est pas forcément ce qu'on a l'habitude de trouver sur les tables coréennes et cela pourrait donc ne pas forcément lui plaire. Cependant, je chasse bien vite cette pensée de mon esprit - il ne faudrait pas que je commence à douter avant même d'avoir commencé – et je me tourne finalement vers mon coloc', avant de laisser échapper un rire quand ce dernier me fait comprendre plus ou moins explicitement que je le dérange et qu'il a besoin de se concentrer. « Reçu 5 sur 5, chef ! Promis, je ne vous importunerais plus ! » Me dirigeant ensuite vers le placard qu'il m'a indiqué, j'en sors deux ramequins et me replace derrière mon plan de travail, me munissant d'un couteau pour découper le bacon en lanières. Puis, une fois cette tâche accomplie, je place les dites lanières au fond de mes ramequins et m'attaque aux deux œufs que je casse dans chacun d'entre eux, avant de finalement les recouvrir de crème fraîche. Il ne me reste alors plus qu'à ajouter un peu de gruyère dessus (quand je vous disais que c'était un plat très facile...) mais je suis forcée de relever la tête de mon plat, quand la voix du jeune homme vient briser le silence qui s'était alors installé dans la cuisine le temps de quelques minutes. Et, bien évidemment, je ne peux de nouveau retenir un rire... « Tu penses réellement que si j'étais capable de sorcellerie, je m'en servirais pour t'obliger à cuisiner ? » Le regard rieur, mon visage se charge d'une expression remplie de malice alors que je reprends aussitôt la parole. « Cela dit, maintenant que tu parles de sorcellerie… Récemment, je suis allée en Afrique du Sud et j'ai ramené un petit bouquin de là bas en guise de souvenir. Sur le moment, quand je l'ai vu sur l'étal de cette gentille petite dame, je le trouvais plutôt joli et c'est pour ça que j'ai décidé de l'acheter. Mais, depuis que je l'ai, c'est vrai qu'il se passe des choses un peu bizarres... » Laissant ma phrase en suspend, je fais mine de réfléchir, puis j'hausses finalement les épaules. « M'enfin, je me fais sûrement des idées… » Évidemment, si ce bouquin existe bel et bien, tout le reste, c'est que des cracks. Mais autant entrer dans le jeu du jeune homme. D'ailleurs, au moment même où je suis sur le point de m'atteler de nouveau à ma tâche, Baek Ho revient à la charge mais cette fois-ci ce n'est pas pour une histoire de sorcellerie et, le sourcil légèrement relevé, j'observe finalement le pâtissier du dimanche à l’œuvre avant de m'exclamer, un tantinet moqueuse : « Il y a de l'effort, c'est vrai… Mais c'est encore un peu tôt pour la photo Tinder, tu ne penses pas ?! J'veux dire, tous les hommes savent presser un citron... » Doucement, mon sourire s’agrandit et je reprends : « Cela dit, je dois bien l'avouer, tu as de très jolis biceps… » Et sans un mot de plus, je lui tourne le dos, me reconcentrant sur mes ramequins dans lesquels j'ajoute enfin du gruyère. Il ne reste alors plus qu'à enfourner le tout pour quelques 15 minutes mais minutes pendant lesquelles je n'ai toutefois pas l'intention de rester là à rien faire. M'approchant donc de Baek Ho dont l'attention semble complètement tournée vers ce verre doseur, je me racle légèrement la gorge. « Hm hm... Je sais que j'ai dit que je ne vous importunerais plus, ô grand chef Baek Ho, mais il se trouve que j'ai terminé ce que j'avais à faire alors si vous avez besoin d'aide pour votre délicieuse tarte au citron, je me porte volontaire ! » Vraiment la colocataire parfaite...