Impulsive, colérique c'est elle. Elle s'énerve souvent, à croire qu'elle a ses règles vingt-quatre heure sur vingt-quatre. Elle sort facilement les poings, ce qui gâche un peu sa féminité. Elle déteste les personnes qui se plaignent. Elle déteste les gosses de riche. Donc un gosse de riche qui pleure sur sa vie, mieux vaut qu'il évite de croiser Juan.

Violente, elle frappe souvent les personnes qu'elle croise. Elle a battu à mort une étudiante qui insultait un SDF. Elle aime pas vraiment le sang, mais aime la justice. Ou plutôt, sa justice.

Manipulatrice : quand on vit durant seize-ans dans une famille de pauvre, il faut savoir influencer les personnes que l'on rencontre. De l'épicier du coin jusqu'au directeur de son ancien lycée, tous ont succombé à ses charmes. Les gosses de riches aussi, ça la fait marrer de se moquer d'eux. Elle les charme tel une sirène, puis elle les abandonne comme si de rien était.

Sûre d'elle ce qui va avec manipulatrice. Elle sait mettre ses atouts en valeur. Elle sait qu'elle est jolie et intelligente. Elle sait qu'elle peut attirer n'importe quel homme dans son filet. Prudence...

Joviale, drôle il ne faut pas oublier cela. Elle croque la vie à pleine dents. Son karma et sa chance ont toujours été bons, et elle en profite. Malgré tout ce qui s'est passé dans sa vie, elle sait rire de tout et n'importe quoi.  Elle est très sarcastique et ironique, mais cela fait rire ses amis et sa famille. Malgré tout ses défauts, elle est parfaite à sa façon.

Courageuse elle a tout de même choisi de partir de Hong Kong pour aller en Corée  du Sud alors qu'elle ne connaissait même pas la langue. Tout ça pour voir son frère ! Elle ne s'est pas laissée amadouer par les brimades de son lycée et s'est toujours relevée. Alors que sa famille était pauvre, elle a toujours fait de son mieux pour gagner de l'argent notamment avec des petits boulots.  

« Moon Juan est une salope. Elle a couché avec cinq hommes différents le même soir. »

Le tableau du réfectoire est tagué.

    Juan a seize ans, et les yeux fixés sur celui-ci. « Qu'est-ce qu'ils me veulent, ces fils à papa ? », elle pense.
    Les brimades ont commencé il y a deux ans.Juan est née à Hong Kong dans une famille pauvre. A peine de quoi manger, et ne parlons pas des anniversaires. La légende de la mandarine si tu n'es pas sage, Juan la connaissait bien.
    Ses parents se démêlaient pour faire vivre la famille. Ce qu'elle n'avait jamais comprit, c'était pourquoi ils l'avaient inscrit dans un lycée prestigieux de la capitale. Le style de lycée à vingt-mille dollars l'année. Ils avaient pas les moyens. Ils les avaient jamais eu. Mais sa mère supportait difficilement la pauvreté. Elle répétait encore et encore « Juan, nous sommes comme les autres tu sais. Comme les autres. » Alors que la jeune fille étant jeune, pensait « Si on est comme les autres, pourquoi doit ont dépenser des fortunes pour leur ressembler alors qu'eux nous méprisent ? »
    Il arrivait à sa génitrice de pleurer. En cachette bien sûr, pas devant Juan, mais celle-ci l'entendait. Elle se dirigeait souvent vers une heure du matin dans la cuisine, et faisait bouillir de l'eau. Le bruit de la bouilloire et les pleurs de sa mère, voilà ce dont Juan se rappelait quand on parlait de son enfance. Parfois elle pensait « C'est de ma faute si maman est triste » et son père venait la réconforter. « Non ma chérie, disait-il, ce n'est pas de ta faute. C'est Dieu qui inflige nos conditions de vies. » Il faisait toujours une tête triste. Peut-être culpabilisait-il ? Leur vie merdique n'était pas totalement de sa faute. Il était ouvrier, gagnait peu d'argent. Mais c'était pas lui qui avait décidé d'envoyer sa fille dans un lycée de gosse pourris gâté alors qu'à la maison, ils avaient du mal à finir les fins de moi.
    La vie au lycée était l'enfer. Parfois, Juan se demandait même si l'enfer n'était pas plus agréable. Les filles de grands PDG la dévisageaient en sortant leur téléphone dernière génération de leur sac Louis Vuitton. Juan avait une bandoulière en tissu, certes très abîmée, que sa grand-mère lui avait coud. C'était modeste, mais c'était sentimental. Juan détestait ces gosses de riches mal élevées. Même si sa vie était plus difficile, elle était bien élevée. Elle avait une famille aimante. Elle était heureuse.
Tout bascula le jour où son père rentra de son travail en criant. Il criait partout dans la salle à manger « On a gagné ! On a gagné ! ». Le tirage du Loto s'était avéré bénéfique. Ils avaient récolté des millions de dollars. La première chose que Juan pensa fut « La roue a tourné. » Le lendemain, elle arriva dans sa salle de classe avec des baskets Jeremy Scott. Ses camarades écarquillèrent les yeux comme des chimpanzés. Elle leur sourit et leur jeta une liasse de billet à la face. D'un air hautain, elle leur dit « Je vous offre cet argent. C'est pour vous acheter une nouvelle fierté, pouffiasses. »
    La vie de Nouvelle Riche était très facile. Plus d'économie, plus de réserves, de collecte de bon de réductions dans les magazines. Juan était libre. Libre.
    Cependant, elle surprit une nuit une conversation entre ses parents. L'un dit «  Et si on envoyait de l'argent à Dewei ? » et l'autre répondit « Tu es folle ? On l'a abandonné à la naissance. Jamais il ne voudraient de l'argent de parents aussi lâches que nous. »
    Le matin même, Juan fouilla tous les papiers de la famille avant de trouver dans une enveloppe de carte de vœux le certificat médical de son frère caché. Elle demanda des explications à sa mère. En réalité, son frère était né un an après elle. Elle et son père avaient fait croire à un mort né avant d'abandonner le gosse dans un orphelinat. « On avait pas l'argent, on ne pouvait pas avoir deux enfants... Juan... »
    Mais c'était fini. La confiance était finie. Juan se leva, et renversa le vase en cristal de la table basse. Elle réunit tous les papiers concernant son frère et tenta de le retrouver. Combien de temps cela prit-il ? Six mois ? Un an ? Mais à ses dix-huit ans, elle savait à peu près où il habitait, ce qu'il faisait. Adopté par une famille Hong Hongkongaise qui avait par la suite déménagé en Corée du Sud.  Elle partit de sa ville natale pour le pays de son frère. Elle savait les bases de la langue et voulait voir Dewei à tout prix.
    Dans l'avion, elle pensa à tous ce qu'elle aurait pu faire avec son frère. Jouer au ballon, rire, faire des blagues. Peut-être que la pauvreté aurait été moins lourde à supporter ? Et les journée si pesantes du lycée, n'auraient-elle pas été ensoleillées avec un frère à ses côtés ?
    Elle s'inscrit à la fac, espérant trouver son frère dans ce monde et aussi recommencer une nouvelle vie. Un nouveau départ...